Charles Darwin (1809-1882), "Journal and Remarks (The Voyage of the Beagle)" (1839), "On the Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life" (1859), "The Variation of Animals and Plants Under Domestication" (1868), "The Descent of Man, and Selection in Relation to Sex" (1871), "The Expression of the Emotions in Man and Animals" (1872) - ....
Last update: 02/02/2023
Freud a écrit qu'au cours des siècles écoulés, la science a infligé deux blessures à l'amour propre de l'humanité, la première, lorsqu'elle a montré que la Terre n'est pas le centre du monde mais un point minuscule dans un univers d'une dimension à peine concevable, et la seconde, quand la biologie a frustré l'homme du privilège d'avoir fait l'objet d'une création particulière et a mis en évidence son appartenance au monde animal ...
La publication de "L'Origine des espèces" (Origin of Species) est considérée à juste titre comme un événement marquant de la science du XIXe siècle. Le 27 décembre 1831, le HMS Beagle a quitté le port de Plymouth, dans le sud de l'Angleterre, pour un voyage qui a duré près de cinq ans. Sa mission était d'effectuer un relevé des côtes méridionales de l'Amérique du Sud et, par la suite, de faire le tour du monde. Le naturaliste du petit navire était Charles Darwin (1809-82). Au cours du voyage, Darwin a noté certains aspects de la vie végétale et animale de l'Amérique du Sud, en particulier des îles Galápagos et de la Terre de Feu, qui lui semblaient devoir être expliqués, mais qui n'étaient pas pris en compte de manière satisfaisante par les théories existantes. Les premiers mots de l' "Origine des espèces" posent l'énigme qu'il était déterminé à résoudre :
"When on board HMS Beagle as naturalist, I was much struck with certain facts in the distribution of the organic beings inhabiting South America, and in the geological relations of the present to the past inhabitants of that continent. These facts, as will be seen in the latter chapters of this volume, seemed to throw some light on the origin of species – that mystery of mysteries, as it has been called by one of our greatest philosophers." (Lorsque j'étais à bord du HMS Beagle en tant que naturaliste, j'ai été très frappé par certains faits dans la distribution des êtres organiques habitant l'Amérique du Sud, et dans les relations géologiques entre les habitants actuels et les habitants passés de ce continent. Ces faits, comme on le verra dans les derniers chapitres de ce volume, semblaient jeter quelque lumière sur l'origine des espèces - ce mystère des mystères, comme l'a appelé l'un de nos plus grands philosophes) - Charles Darwin, On the Origin of the Species by Means of Natural Selection. London: John Murray, 1859. Si à son retour, en 1842, l’idée de base d'une évolution par sélection naturelle semble s'imposer à Darwin, il ne semblait pas encore en mesure de publier quoique ce soit. Mais le contexte, sous l'influence de la théologie naturelle (Natural Theology, 1802) de William Paley (1743-1805), archidiacre de Carlisle, était alors à un Dieu génie mécanique de la révolution industrielle ...
Il semble que lorsqu’il est monté à bord du Beagle en 1831, Darwin était alors enclin à penser que la flore et la faune d’une région donnée seraient déterminées par leur environnement physique ; ses observations le conduisirent à remettre en question cette croyance et à chercher des explications alternatives , et l'une d'entre elles s'imposa progressivement à sa pensée....
"During the voyage of the Beagle I had been deeply impressed by discovering in the Pampean formation great fossil animals covered with armor like that on the existing Armadillos; secondly, by the manner in which closely allied animals replace one another in proceeding southwards over the Continent; and thirdly, by the South American character of most of the productions of the Galápagos archipelago, and more especially by the manner in which they differ slightly on each island of the group; none of these islands appearing to be very ancient in the geological sense. It was evident that facts such as these, as well as many others, could be explained on the supposition that species gradually become modified; and the subject haunted me...." (Pendant le voyage du Beagle, j'avais été profondément impressionné par la découverte, dans la formation pampéenne, de grands animaux fossiles couverts d'une armure semblable à celle des tatous actuels ; en second lieu, par la manière dont des animaux étroitement apparentés se remplacent les uns les autres en se dirigeant vers le sud du continent ; en troisième lieu, par le caractère sud-américain de la plupart des productions de l'archipel des Galápagos, et plus particulièrement par la manière dont elles diffèrent légèrement dans chaque île du groupe ; aucune de ces îles ne semble très ancienne au sens géologique du terme. Il était évident que de tels faits, ainsi que beaucoup d'autres, pouvaient être expliqués par la supposition que les espèces se modifient graduellement ; et le sujet m'a hanté.... ).
Le naturaliste britannique, plus savant que philosophe, Charles Darwin, conçut, loin de toute agitation, - dans sa paisible maison de campagne de Downe, dans le borough londonien de Bromley, une banlieue à une vingtaine de kilomètres de Charing Cross, dans le Kent -, une révolution analogue à celle que Karl Marx préparait lui-même en plein centre de la tumultueuse ville de Londres. Dès septembre 1938, s'esquissait l'idée que la "sélection naturelle" entre des individus en concurrence conduirait à des adaptations extraordinaires et à la diversité des espèces, puis vingt et un ans plus tard, ce fut en 1859, la publication de "On the Origin of Species" : en recherchant les lois qui régissent l'évolution des espèces, Charles Darwin venait de de jeter un pont entre les pures données de la science et les interprétations métaphysiques ou religieuses de l`histoire de l'être humain et de la nature. S'ouvrait une nouvelle ère de la pensée humaine qui verra la notion de "sélection naturelle" permettre d'expliquer l'évolution de la vie sur Terre sur près de 3500 millions d'années, - une sélection qui permet à la vie de s'adapter pour survivre -, puis on étudiera la biologie évolutionniste au niveau du matériel génétique, le seul but de la vie étant de faire toujours et toujours plus des copies de gènes ..
L'Angleterre du XIXe siècle est alors la terre de l'industrie, du capitalisme naissant et de la pauvreté urbaine, mais tout autant la nation des sciences où des penseurs comme Marx viennent se réfugier: nou sommes alors en pleine apothéose de la société victorienne, la prose domine la vie intellectuelle britannique et nombre de controverses s'y déploient, entrechoquant les problèmes religieux et la pensée scientifique naissante : si Walter Scott et Dickens sont toujours présents, l'utilitarisme de Mill, l'histoire génétique de l'univers qu'édifie un Spencer, et voici venir l'évolutionnisme de Darwin ...
Entre 1831 et 1836, le hasard conduit Charles Darwin à rejoindre la célèbre expédition Beagle en Amérique du Sud et dans les îles du Pacifique. Ce voyage, dont il publie un récit détaillé en 1839, est décisif dans sa vie, car il lui permet de faire de nombreuses observations d'animaux et de plantes et d'accumuler une foule d'informations à partir desquelles il commence à développer ses théories sur la transmutation des espèces. Après 23 ans de maturation, Darwin publie en 1859 son œuvre majeure, "L'origine des espèces", dans laquelle il explique l'apparition de nouvelles espèces et la disparition d'espèces préexistantes par la sélection naturelle. Ses idées ont suscité à la fois enthousiasme et controverse, notamment lorsqu'il a étendu les principes de l'évolution à l'espèce humaine, mais elles ont fini par devenir l'une des découvertes les plus importantes de son époque. Darwin a complété et affiné ses thèses dans des publications successives jusqu'à sa mort en 1882.
Charles Darwin (1809-1882)
Son père, célèbre médecin de Shrewsbury, était fils d'Erasmus Darwin, lui-même médecin réputé, mais apprécié surtout pour l'ensemble de ses œuvres scientifiques, littéraires et philosophiques, et déjà porté à évoquer le problème de l'évolution (les animaux changeaient de forme sous l'influence directe de l'environnement). La mère de Charles Darwin était fille de Wedgewood, célèbre céramiste. De neuf à seize ans, Darwin fréquente le collège de Shrewsbury, puis, après une tentative infructueuse d'étudier la médecine à l'université d'Édimbourg, il se rend à Cambridge en 1828, se tourne vers la théologie pour l'abandonner ensuite et revenir à la science. Il va suivre ainsi un large éventail de matières, de la théologie aux langues classiques en passant par la géologie, l'entomologie et la botanique. Ce furent trois années passées dans l'amitié de savants tels que le botaniste et géologue John Stevens Henslow (1795-1861), et Adam Sedgwick (1785-1873).
C'est à cette époque que le jeune Darwin s'enthousiasme pour les conceptions de Jean-Baptiste Lamarck et pour les travaux du géographe Alexander von Humboldt (1769-1859) et du géologue Charles Lyell (1797-1875) qui suggéraient que la Terre était bien plus ancienne que ce que l'on avait pensé jusque-là...
HMS Beagle, les Galapagos - En 1831, à peine Darwin achève-t-il son parcours universitaire, que Henslow lui conseille de postuler à l'emploi de naturaliste à bord du navire Beagle, qui allait entreprendre un voyage de recherches scientifiques autour du monde (du 27 décembre 1831 au 2 octobre 1836)...
C'est donc de manière presque occasionnelle que Darwin va participer à une expédition scientifique qui le conduira pendant 18 mois jusqu`aux îles Galapagos : il y recueillera des données considérables à partir desquelles il fondera l'essentiel de ses théories. Son séjour de deux mois aux Galapagos en 1835 constituent en effet l'un des épisodes les plus connus de sa vie, car c'est dans ce petit groupe d'îles volcaniques qu'il va découvrir une diversité surprenante d'espèces vivantes....
(The young Charles Darwin, shortly after his arrival home from the Beagle voyage. - By permission, Bridgeman Art Library)
"Journal of Researches into the Natural History and Geology of the Countríes visited during the Voyage of H. M. S. "Beagle" Round the World" (VOYAGE D'UN NATURALISTE AUTOUR DU MONDE : 1831-1836)
Publié en 1839, Charles Robert Darwin nous livre ici ses observations réalisées pendant le voyage du navire "Beagle" du 27 décembre 1831 au 2 octobre 1836. Vingt et un chapitres rédigés dans un style très simple qui nous parlent de contrées alors peu connues, surtout l'Amérique du Sud et les iles de l'Océanie. ll décrit tout ce qui lui tombe sous les yeux, les hommes, les animaux, les plantes, les paysages. On sent toutefois à chaque instant le naturaliste qui préfère s`arrêter sur le vol des oiseaux, sur un papillon ou sur un fossile. Le grand intérêt de ce livre consiste moins dans le nombre des observations que dans les déductions géniales que l'auteur sait en tirer. ll élabore par exemple une théorie pour expliquer la formation des îles circulaires si communes en Océanie; il observe les caractéristiques de la faune des îles Galapagos. Partant de là, il fixe déjà son attention sur le phénomène zoo-géographique qui lui permettra plus tard d`élaborer sa grande conception évolutionniste de l'origine des espèces ; à savoir les différences que l`on peut remarquer dans la faune de territoires séparés tels que des îles. ll note l`aspect des animaux élevés par l`homme dans les différents pays ou transportés involontairement. comme les rats ou les souris. La quantité de raisonnements et d`hypothèses que I'auteur fait devant les nombreux objets naturels observés justifie pleinement son affirmation que ce voyage fut l`un des événements les plus importants de sa vie....
"Darwin’s First Theory: Exploring Darwin’s Quest for a Theory of Earth", Rob Wesson (2017)
Retraçant les traces de Darwin en Amérique du Sud et au-delà, le géologue Rob Wesson traverse les Andes, navigue sur les eaux cartographiées par le Beagle, chasse aux fossiles en Uruguay et en Argentine et explore les sites des glaciers disparus depuis longtemps en Écosse et au Pays de Galles. Alors qu’il suit le chemin de Darwin, littéralement et intellectuellement, Wesson expérimente la terre comme Darwin l’a fait, s’engage dans ses observations et aborde les mêmes questions que Darwin avait sur notre Terre en constante évolution. À son retour de son voyage de cinq ans à bord du Beagle, après avoir examiné les effets des tremblements de terre, des tsunamis, des éruptions volcaniques et plus encore, Darwin a conçu sa théorie de l’affaissement et du soulèvement, sa première théorie. Ces concepts et ces attitudes – l’immensité du temps ; l’énorme impact cumulatif d’un changement presque imperceptiblement lent ; le changement comme caractéristique constante de l’environnement – sous-tendent les découvertes ultérieures de Darwin dans l’évolution. Et cette façon particulière de penser reste d’une importance vitale aujourd’hui alors que nous entrons dans l’ère anthropocène dominée par l’homme. Mêlant habilement science et aventure, la Première Théorie de Darwin est un voyage fascinant et révélateur autour du monde avec l’un des plus grands esprits scientifiques de l’histoire.
Durant le voyage qui dura cinq ans, ils visitèrent de nombreuses îles de l'Atlantique, du Pacifique, les côtes sud-américaines, néo-zélandaises et australiennes. Les premiers fruits de ces recherches furent pour Darwin d'ordre géologique, comme le prouve son livre sur la formation des récifs coralliens, "Structure et répartition des récifs coralliens" (The Structure and Distribution of Coral Reefs, 1842]. Mais ce fut dans le domaine de la biologie qu'il se montra le plus incisif : ses observations, sur la distribution géographique des fossiles sur les côtes orientales sud-américaines et sur la faune des îles Galapagos, le convainquirent que les phénomènes naturels ne pouvaient être expliqués par la seule Création, mais découlaient d`une théorie évolutive.
C'est ainsi qu'en 1887, peu après son retour en Angleterre, Darwin entreprit son premier livre de notes sur "la transmutation des espèces". Il séjourna encore deux ou trois à ans à Londres, publiant le résultat de ses observations, suivant des réunions scientifiques, et nouant de nombreuses amitiés dans les milieux savants. Il devint également secrétaire de la Geological Society, et épousa sa cousine Emma Wedgewood dont il s'était épris.
En 1842, sa santé délicate lui fit quitter Londres pour le Kent, où il vécut les quarante dernières années de son existence. Toute la suite de sa carrière peut se résumer dans sa bibliographie...
Après avoir rédigé ses observations géologiques et zoologiques réunies lors du périple du Beagle et assuré leur publication, - "Geology of the Voyage on the Beagle, 3 vol. 1842-1846, "The Zoology of the Voyage of H.M.S. Beagle", 5 vol. 1839-1842 -, et avoir écrit son célèbre "Journal of Researches", Darwin se consacre à la volumineuse "Monograph on the Cirripedia" qui lui prit huit années et publia en 4 volumes (1851-1854), après avoir entrepris l'examen de milliers d'échantillons et leur fastidieuse classification.
A partir de 1854, il se consacra presque exclusivement à l'étude de l'évolution. Trois ouvrages en découleront :
- "De l'origine des espèces par voie de sélection naturelle",
- "De la variation des animaux et des plantes sous l'action de la domestication"
- "La Descendance de l'homme et la sélection sexuelle"....
1858, Darwin reçoit une lettre de son collègue naturaliste Alfred Wallace qui avait mis au point une théorie similaire à la sienne lors de son séjour en Indonésie ("Sur la tendance des variétés à s'écarter indéfiniment du type original" ). Ceci va le pousser à publier son "Origine des espèces" dès l'année suivante, tout en se dérobant au débat public que suscite très rapidement son oeuvre ...
C'est dans "De l'origine des espèces" et "La Descendance de l'homme" que se trouve le nœud de la théorie darwinienne. Le premier de ces ouvrages pose le problème de l'évolution en général et développe LA THEORIE DE LA SELECTION NATURELLE, le second, en dépit de son titre, tend surtout à développer la théorie, complémentaire de la SELECTION SEXUELLE ....
Les autres ouvrages de Darwin complètent ceux-ci. Le "Naturalist's Voyage Round the World" (ou "Journal of Researches into the Geology and Natural History of the Various Countries visited by "Beagle" under the Command of Capt. Fítzroy R.N. from 1832 to 1836", 1889] présente un compte rendu éblouissant des expériences qui convainquirent pour la première fois Darwin de l'EVOLUTION, ou plus précisément de la réalité d'un processus de "descendance modifiée" ...
Certaines œuvres, ainsi qu'il le dit dans sa monographie si complète sur les cirripèdes, constituent les matériaux et la vérification indispensables pour soutenir son argumentation sur le problème de l'espèce. Par la suite, à diverses reprises après l' "Orígine", il publia de nombreux ouvrages de moindre importance sur les divers aspects de l'adaptation et de la fécondation des orchidées, sur les plantes grimpantes, sur les plantes insectivores, sur "Les Effets de la fécondation croisée dans le règne végétal", sur "la variation des animaux et des plantes sous l'effet de la domestication".
"The Variation on Animals and Plants under Domestication" est un vaste résumé des connaissances que Darwin avait accumulées dans ce domaine comme éléments pour la compréhension des mutations dans la nature : c'est ainsi que pour expliquer comment des espèces apparentées acquièrent des caractéristiques différentes, Darwin fit une analogie avec les éleveurs qui, par la sélection continuelle des animaux reproducteurs, sont capables de produire de nouvelles variétés, parfois fort différentes les unes des autres ...
Si "La Descendance de l'homme" date de 1871, Darwin publia l'année suivante, en 1872, "L'Expression des émotions chez l'homme et chez les animaux".
Et c'est alors qu'il avait dépassé soixante-dix ans que Darwin écrivit l'une de ses œuvres les plus marquantes dans le domaine de l'histoire naturelle, sur les vers, "Formations of Vegetable Mould through the Action of Worms, 1881).
Son fils publia après sa mort "Life and Letters" (1887) avec une version abrégée de son "Autobiography" écrite par Darwin à l'intention de ses fils...
Karl Marx fut le premier à se rendre compte de l'importance des travaux de Darwin. En affirmant la thèse de l''évo1ution des espèces à partir de leur nécessaire adaptation au milieu auquel elles sont soumises, Darwin prenait fait et cause contre la thèse "créationniste", heurtant ainsi de front les principes de l`Eglise...
Lamarck, 1809 ...
Mais l`idée d'une évolution des espèces permettant de penser de manière continue leur hiérarchie n`était pas en elle-même une idée nouvelle, même si elle n'avait jamais été affirmée avec autant de vigueur. Buffon lui-même l`avait posé en particulier dans ses "Epoques de la Nature" à la fin des années 1770. Lamarck entrevoit par la suite les moyens que la Nature emploie pour transformer les espèces déjà existantes en espèces nouvelles (1809), mais ses travaux furent éclipsés par les étonnantes réussites de Cuvier dans le domaine de l'anatomie comparée et de la paléontologie, et surtout par sa la théorie qui en découlait des "révolutions du globe" (1812), ces fameuses extinctions majeures causées par des catastrophes de type inondations ou séismes, au terme desquelles s'effectuent repleuplement de la Terre par nouvelle création ou migrations. Mais les arguments tant de Buffon que de Lamarck ne sont alors que des théories ...
«L'état où nous voyons tous les animaux est le produit de la composition croissante de l'organisation qui tend à former une gradation régulière» - Lamarck est le premier à imposer l'idée que tout changement dans le monde organique est l'expression d'une loi et non d'une intervention miraculeuse: «Tout ce qui a été acquis, tracé ou changé, dans l'organisation des individus, pendant le cours de leur vie, est conservé par la génération, et transmis aux nouveaux individus qui proviennent de ceux qui ont éprouvé ces changements»..
Lamarck incorpore en 1809 l'hérédité de caractéristiques acquises dans sa théorie de l'évolution, une théorie de l'évolution qui affirme la notion de l'unité de la vie, - un organique nettement distingué de l'inorganique -, et la tendance de cette vie vers la complexification croissante et le perfectionnement.
C'est en tant que botaniste que Jean Baptiste de Monet, chevalier de Lamarck (1744-1829, devint célèbre, son grand ouvrage, "La Flore française" (1778, 1795) lui ouvrit les portes de l'Académie des Sciences (1779), et la Révolution française qui lui fit perdre son poste au Jardin des Plantes de Paris le vit devenir devenir zoologiste : son "Histoire naturelle des animaux sans vertèbres" (1815-1822) marque un premier progrès décisif sur les travaux de Linné et de Buffon, sa "Philosophie zoologique" (1809) suit ses "Recherches sur l'organisation des corps vivants" (1809), dans laquelle il formule ses idées évolutionnistes. Son dernier grand ouvrage, "Système des connaissances positives de l'homme" énonce une véritable métaphysique de la Nature. Pendant tout le XIXe siècle , les biologistes crurent en l'hérédité des caractères acquis, puis au XXe siècle, le lamarckisme devint synonyme de mauvaise science...
C'est que Lamarck cherche essentiellement la raison de ces transformations dans l'usage ou le non usage des organes, cause de leur développement ou de leur disparition. La nouveauté de Darwin, c'est L'HYPOTHESE DE L'ADAPTATION NECESSAIRE AU MILIEU COMME CRITERE DE SELECTION entre individus et espèces viables ou non. S'inspirant des idées économiques de Malthus, - dans son "Essai sur le principe de population" (1798), celui-ci soutient l'idée d'une "lutte pour l'existence" qui serait déterminée par la contradiction entre l'expansion de la population et l'insuffisance des ressources -, Darwin montre que chaque espèce se doit d`engager un combat pour sa vie (struggle for life) si elle prétend survivre aux modifications incessantes que connaît le milieu dans lequel elle vit. Mais cette sélection naturelle agit en aveugle, ce qui détruit au passage la représentation classique de la nature conçue comme un ensemble ordonné et finalisé, en y introduisant au contraire la contingence.
De son vivant, Charles Darwin s'est vu critiqué passionnément par les classificateurs, disciples de Linné, qui lui en voulaient de contester la fixité des espèces dont ils venaient de dresser le catalogue (fixisme) ; les esprits religieux ont vu une contradiction entre la genèse des espèces par évolution et leur création par Dieu telle que la Bible la décrit (créationnisme).
Et cette thèse prendra une dimension sociale que son auteur cherchera à minimiser à juste titre, mais que d`autres n'ont de cesse d'exploiter sous couvert de la théorie du darwinisme : si l'histoire nous apprend que chaque espèce doit se défendre, s`adapter, et lutter contre les autres espèces et contre les données de la nature pour pouvoir espérer survivre en tant qu`espèce, ne doit-on pas reconnaître qu`il en va de même pour l'homme social individuel ? La vie économique et sociale est dure et impose à chacun de se défendre ; si les faibles disparaissent, ne serait-ce pas "naturel"! Jamais Darwin n`accordera qu`on puisse parvenir à une telle inférence à partir de ses propres thèses : il préviendra au contraire constamment dans sa correspondance cette erreur d`interprétation. ...
Le darwinisme explique donc bien les lois de l'évolution des populations animales ou végétales du globe et celles qui président à la réussite ou à l'échec des formes nouvelles apparues dans une population, mais n'expliquant pas par quel mécanisme apparaît le premier couple d'individus « nouveaux », c'est à Hugo De Vries (1848-1945) que revient de parachever cette approche, en 1901, avec la "Théorie de la mutation", en situe dans les chromosomes la source des changements, ce que confirmera toute la génétique moderne. C'est en 1920 qu'ainsi les travaux de Darwin et de Mendel, - qui avait publié ses travaux en 1865 dans l'indifférence générale -, vont se rejoindre, les lois de Mendel permettent de combler une lacune des théories évolutionnistes avec l'explication de la transmission des caractères et la modification de la fréquence des gènes. De la bactérie, apparue vraisemblablement il y a plus de 3 milliards d'années, à l'être humain contemporain, tous les êtres vivants ne sont que des variations produites par la nature à partir des mêmes composants élémentaires, les quatre bases de l'ADN et les 20 acides aminés essentiels. L'idée d'une chaîne évolutive ininterrompue développée par Darwin en 1859 s'est ainsi largement imposée, corroborée par les découvertes de la paléontologie puis de la génétique des populations ...
"The Autobiography of Charles Darwin, 1809–82 written by Charles Darwin which was published in 1887' - L’autobiographie de Charles Darwin a été publiée pour la première fois en 1887, cinq ans après sa mort. C’était une édition tronquée : la famille de Darwin, essayant de protéger sa réputation posthume, avait supprimé tous les passages qu’ils considéraient trop personnels ou controversés. La présente édition complète n’est apparue qu’en 1959, cent ans après la publication de The Origin of Species. À son apparition, Loren Eiseley a écrit : « Aucun homme ne peut prétendre connaître Darwin qui ne connaît pas son autobiographie. Ici, pour la première fois depuis sa mort, il est présenté complet et non expurgé, comme il existe dans les archives familiales. Il s’avérera inestimable pour les biographes et jettera un nouvel éclairage sur la personnalité de l’un des plus grands scientifiques du monde. Nora Barlow, la petite-fille de Darwin, s’est avérée une excellente éditrice. Ses propres annotations sont fascinantes à lire. » L’esprit audacieux et agité, l’intégrité et la simplicité du caractère de Darwin se révèlent dans ce récit direct et personnel de sa vie : sa famille, son éducation, ses explorations du monde naturel, sa religion et sa philosophie. L’éditeur a fourni des références de page et de ligne aux passages restaurés les plus importants, et des notes et des lettres inédites sur les questions familiales et sur la controverse entre Samuel Butler figurent en annexe...
"The Origin of Species by Means of Natural Selection, or the Preservation of Favoured Races in the Struggle for Life" (L'Origine des espèces, 1859)
Ce si célèbre ouvrage du naturaliste anglais Charles Darwin marque le couronnement de sa carrière scientifique. Pendant des mois, Darwin, qui faisait partie de l'expédition du capitaine Fitzroy en Amérique du Sud et dans les Îles du Pacifique, avait accumulé observations et documents tant zoologiques que botaniques en grande partie inédits. De 1840 à 1843, il rédige ses notes de voyage qui parurent sous le titre de "Zoology of the Voyage of the Beagle": en 1851, une remarquable monographie sur les cirripèdes, enfin. en 1859, "L"Origine des espèces" qui, sur la base de la solide documentation scientifique qu`il avait accumulée pendant plus de vingt ans. proposait de nouvelles solutions au problème déjà classique de l'évolution des espèces. Son ouvrage théorique est inséparable de ses multiples travaux au cours desquels il apportent un faisceau de preuves impressionnantes à l`appuí des explications qu`il propose dans des domaines très variés, avec toutefois une prédominance des études botaniques sur les études zoologiques. Son point de départ est des plus simples. Observant la manière dont les éleveurs et les horticulteurs parviennent à créer des espèces nouvelles par la sélection, Darwin s`aperçoit que des phénomènes identiques sont observables dans la nature: il en conclut que la nature procède de la même façon et avec des moyens, sinon identiques, du moins analogues ...
Quel est donc le principe qui détermine cette sélection naturelle? Darwin observe que les lois de Malthus semblent s`appliquer au domaine des espèces animales et végétales. En effet, on observe dans la nature que le nombre des germes produits dépasse de beaucoup celui des germes qui arrivent à maturité, parce que les causes de destruction sont nombreuses et de tous ordres. Il semble donc que la mort a un effet sélectif, Dans la "lutte pour la vie" (struggle for life), ce sont les plus aptes qui survivent. Les individus, qui présenteraient par hasard une variation favorable morphologique ou physiologique. ont plus de chances que les autres d'échapper à la destruction. Cette sélection naturelle (survival of the fittest, elimination of the unfit) agissant d`une manière constante, finit par avoir des effets sensibles sur de grands nombres et au bout de longues périodes de temps, par suite de la sélection sexuelle qui permet à ces qualités fortuites non seulement de se perpétuer, mais de se perfectionner. D`où une diversification de plus en plus grande des espèces et un perfectionnement constant dans l`adaptation au milieu. Cette théorie, qui est à la base du système connu sous le nom de "darwinisme", l`auteur l'étend à l'évolution des divers instincts et la complète par une théorie des croisements et des hybridations (laquelle s'applique surtout au règne végétal).
Il faut noter que le darwinisme (sélection naturelle) n'a qu'un point commun avec le lamarckisme (influence du milieu et adaptation des organes) : c`est la constatation des mutations dans les espèces animales et végétales. ll s'en écarte complètement quant à l'interprétation de ces mutations. Pour Lamarck, ce sont les facteurs extérieurs, le milieu qui exercent l`influence décisive, l'idée de la transformation des espèces est à rechercher dans l'usage ou le non usage des organes. Darwin, qui parle de descendance avec modification plutôt que d'évolution, privilégie les variations et la sélection de celles qui, dans la lutte pour l'existence, sont les plus favorables à l'espèce, une lutte qui est elle-même tributaire de la rapidité avec laquelle tous les êtres organisés tendent à se multiplier. Mais pour être plus précis, ce n'est, pour Darwin, à proprement parler la sélection qui produit la variabilité, mais le mécanisme qui favorise la conservation des variations accidentellement produites, lorsqu'elles se révèlent avantageuses à l'individu dans les conditions d'existence où il se trouve placé. La nature progresse par degrés, l'évolution n'est qu'une modification lente et graduée des espèces ...
(Signification de la lutte pour l'existence) - Darwin semble ici anticiper sur les débats à venir et prévient les risques que fait courir l'ambïguïté de l'expression «lutte pour l'existence», insistant sur Ia nécessaire confusion de sens qu'elle engendre et que toute son œuvre viserait à dissiper....
"I should premise that I use this term in a large and metaphorical sense including dependence of one being on another, and including (which is more important) not only the life of the individual, but success in leaving progeny. Two canine animals, in a time of dearth, may be truly said to struggle with each other which shall get food and live. But a plant on the edge of a desert is said to struggle for life against the drought, though more properly it should be said to be dependent on the moisture. A plant which annually produces a thousand seeds, of which only one of an average comes to maturity, may be more truly said to struggle with the plants of the same and other kinds which already clothe the ground."
"Je dois faire remarquer que j`emploie le terme de lutte pour l'existence dans le sens général et métaphorique, ce qui implique les relations mutuelles de dépendance des êtres organisés, e,. ce qui est plus important, non seulement la vie de l'individu, mais son aptitude ou sa réussite à laisser des descendants. On peut certainement affirmer que deux animaux carnivores, en temps de famine, luttent l'un contre l'autre à qui se procurera les aliments nécessaires à son existence. Mais on arrivera à dire qu'une plante, au bord du désert. lutte pour l'existence contre la sécheresse, alors qu'il serait plus exact de dire que son existence dépend de l'humidité. On pourra dire plus exactement qu'une plante, qui produit annuellement un million de graines, sur lesquelles une seule, en moyenne, parvient à se développer et à mûrir a son tour, lutte avec les plantes de la même espèce, ou d`espèces différentes, qui recouvrent déjà le sol.
Le gui dépend du pommier et de quelques autres arbres ; or, c`est seulement au figuré que l'on pourra dire qu'il lutte contre ces arbres, car si des parasites en trop grand nombre s'établissent sur le même arbre, ce dernier languit et meurt ; mais on peut dire que plusieurs guis, poussant ensemble sur la même branche et produisant des graines, luttent l'un avec l`autre. Comme ce sont les oiseaux qui disséminent les graines du gui, son existence dépend d`eux et l'on pourra dire au figuré que le gui lutte avec d`autres plantes portant des fruits, car il importe à chaque plante d'amener les oiseaux à manger les fruits qu'elle produit pour en disséminer la graine. J'emploie donc, pour plus de commodité. le terme général lutte pour l'existence, dans ces différents sens qui se confondent les uns avec les autres...."
Les mécanismes de la sélection naturelle - L'importance de l'œuvre de Darwin ne tient pas tant à l'originalité de ses hypothèses (car d'autres les avaient formulées autrement) qu'à la rigueur logique de sa méthode démonstrative et à l'usage convaincant de ses exemples. La loi générale se trouve à la fois abstraite de la diversité des espèces particulières et confirmée par elles. Darwin met ici en évidence l'importance des mécanismes de variation dans l'adaptation et la survie des espèces : nuançant l'idée selon laquelle chaque changement vise au mieux au progrès, Darwin montre que c'est bien davantage l'utile qui préside à la sélection naturelle que l'idée du bien ou du beau....
"La sélection naturelle agit exclusivement au moyen de la conservation et de l'accumulation des variations qui sont utiles à chaque individu dans les conditions organiques et inorganiques où il peut se trouver placé à toutes les périodes de la vie.
Chaque être, et c'est là le but final du progrès, tend à se perfectionner de plus en plus relativement à ses conditions. Ce perfectionnement conduit inévitablement au progrès de l'organisation du plus grand nombre des êtres vivants dans le monde entier. Mais nous abordons ici un sujet fort compliqué, car les naturalistes n'ont pas encore défini, d'une façon satisfaisante pour tous, ce que l`on doit entendre par "un progrès de l`organisation". Pour les vertébrés, il s'agit clairement d'un progrès intellectuel, et d'une conformation se rapprochant de celle de l'homme.
On pourrait penser que la somme des changements qui se produisent dans les différentes parties et dans les différents organes, au moyen de développements successifs depuis l`embryon jusqu'à la maturité, suffit comme terme de comparaison ; mais il y a des cas, certains crustacés parasites par exemple, chez lesquels plusieurs parties de la conformation deviennent moins parfaites, de telle sorte que l'animal adulte n'est certainement pas supérieur à la larve. Le critérium de von Baer semble le plus généralement applicable et le meilleur, c'est-à-díre l'étendue de la différenciation des parties du même être et la spécialisation de ces parties pour différentes fonctions, ce à quoi j'ajouterai : à l`état adulte, ou, comme le dirait Milne-Edwards, le perfectionnement de la division du travail physiologique. Mais nous comprendrons bien vite quelle obscurité règne sur ce sujet, si nous étudions par exemple les poissons.
En effet, certains naturalistes regardent comme les plus élevés dans l`échelle ceux qui, comme le requin. se rapprochent le plus des amphibies, tandis que d`autres naturalistes considèrent comme les plus élevés les poissons osseux ou téléostéens. parce qu'ils sont plus réellement pisciformes et diffèrent le plus des autres classes de vertébrés. [...] Mais, pourra-t-on dire, si tous les êtres organisés tendent ainsi à s'élever dans l'échelle. comment se fait-il qu'une foule de formes inférieures existent encore dans le monde ? Comment se fait-il qu'il y ait, dans chaque grande classe, des formes beaucoup plus développées que certaines autres ? Pourquoi les formes les plus perfectionnées n'ont-elles pas partout supplanté et exterminé les formes inférieures ?
Lamarck, qui croyait à une tendance innée et fatale de tous les êtres organisés vers la perfection, semble avoir si bien pressenti cette difficulté, qu'il a été conduit à supposer que des formes simples et nouvelles sont constamment produites par la génération spontanée. La science n`a pas encore prouvé le bien-fondé de cette doctrine. [...]
D`après notre théorie, l'existence persistante des organismes inférieurs n'offre aucune difficulté ; en effet. la sélection naturelle [...] ne comporte pas nécessairement un développement progressif. elle s'empare seulement des variations qui se présentent et qui sont utiles à chaque individu dans les rapports complexes de son existence. Et, pourrait-on dire, quel avantage y aurait-il. autant que nous pouvons en juger, pour un animalcule infusoire, pour un ver intestinal, ou même pour un ver de terre, à acquérir une organisation supérieure ? Si cet avantage n'existe pas, la sélection naturelle n'améliore que fort peu ces formes et elle les laisse pendant des périodes infinies dans leurs conditions inférieures actuelles. [...]
Bien que l'organisation ait pu, en somme, progresser et qu`elle progresse encore dans le monde entier, il y aura cependant toujours bien des degrés de perfection ; en effet le perfectionnement de certaines classes entières, ou de certains individus de chaque classe, ne conduit pas nécessairement à l'extinction des groupes avec lesquels ils ne se trouvent pas en concurrence active. Dans quelques cas. [...] les organismes inférieurs paraissent avoir persisté jusqu'à l'époque actuelle. parce qu'ils habitent des régions restreintes et fermées, où ils ont été soumis à une concurrence moins active, et où leur petit nombre a retardé la production de variations favorables. Enfin, je crois que beaucoup d`organismes inférieurs existent encore dans le monde pour des raisons diverses. Dans quelques cas, des variations [...] d'une nature avantageuse ne se sont jamais présentées. [...] Dans quelques cas, il doit y avoir eu ce que nous désignons sous le nom de rétrogradation. Mais la cause principale réside dans ce fait que, étant donné de très simples conditions d'existence, une haute organisation serait inutile, peut-être même désavantageuse, en ce qu`étant d`une nature plus délicate, elle se dérangerait plus facilement et serait aussi plus facilement détruite...."
The Origin of Species - CHAPTER XIV - RECAPITULATION AND CONCLUSION - Recapitulation of the difficulties on the theory of Natural Selection – Recapitulation of the general and special circumstances in its favour – Causes of the general belief in the immutability of species – How far the theory of natural selection may be extended – Effects of its adoption on the study of Natural history – Concluding remarks AS this whole volume is one long argument, it may be convenient to the reader to have the leading facts and inferences briefly recapitulated.
That many and grave objections may be advanced against the theory of descent with modification through natural selection, I do not deny. I have endeavoured to give to them their full force. Nothingat first can appear more difficult to believe than that the more complex organs and instincts should have been perfected, not by means superior to, though analogous with, human reason, but by the accumulation of innumerable slight variations, each good for the individual possessor. Nevertheless, this difficulty, though appearing to our imagination insuperably great, cannot be considered real if we admit the following propositions, namely, – that gradations in the perfection of any organ or instinct, which we may consider, either do now exist or could have existed, each good of its kind, – that all organs and instincts are, in ever so slight a degree, variable, – and, lastly, that there is a struggle for existence leading to the preservation of each profitable deviation of structure or instinct. The truth of these propositions cannot, I think, be disputed.
Récapitulation des difficultés relatives à la théorie de la sélection naturelle - Récapitulation des circonstances générales et particulières en sa faveur - Causes de la croyance générale en l'immutabilité des espèces - Jusqu'où la théorie de la sélection naturelle peut être étendue - Effets de son adoption sur l'étude de l'histoire naturelle - Remarques finales Comme l'ensemble de ce volume constitue un long argument, il peut être utile au lecteur d'en récapituler brièvement les principaux faits et déductions.
Je ne nie pas que de nombreuses et graves objections puissent être avancées contre la théorie de la descendance avec modification par sélection naturelle. Je me suis efforcé de leur donner toute leur force. Rien ne peut paraître plus difficile à croire que les organes et les instincts les plus complexes aient été perfectionnés, non par des moyens supérieurs, quoique analogues à la raison humaine, mais par l'accumulation d'innombrables variations légères, chacune bonne pour l'individu qui la possède. Cependant, cette difficulté, bien qu'elle paraisse insurmontable à notre imagination, ne peut être considérée comme réelle si nous admettons les propositions suivantes, à savoir : - que des gradations dans la perfection de tout organe ou instinct, que nous pouvons considérer, soit existent maintenant, soit auraient pu exister, chacun étant bon dans son genre, - que tous les organes et instincts sont, à un degré toujours très faible, variables, - et, enfin, qu'il y a une lutte pour l'existence conduisant à la préservation de chaque déviation profitable de la structure ou de l'instinct. La vérité de ces propositions ne peut, je crois, être contestée....
It is, no doubt, extremely difficult even to conjecture by what gradations many structures have been perfected, more especially amongst broken and failing groups of organic beings; but we see so many strange gradations in nature, as is proclaimed by the canon, ‘Natura non facit saltum,’ that we ought to be extremely cautious in saying that any organ or instinct, or any whole being, could not have arrived at its present state by many graduated steps. There are, it must be admitted, cases of special difficulty on the theory of natural selection; and one of the most curious of these is the existence of two or three defined castes of workers or sterile females in the same community of ants; but I have attempted to show how this difficulty can be mastered.
Il est, sans doute, extrêmement difficile même de conjecturer par quelles gradations de nombreuses structures ont été perfectionnées, plus particulièrement parmi les groupes brisés et défaillants d'êtres organiques ; mais nous voyons tant de gradations étranges dans la nature, comme le proclame le canon : « Natura non facit saltum », que nous devrions être extrêmement prudents en disant qu'un organe ou un instinct quelconque, ou un être entier, n'a pas pu arriver à son état actuel par de nombreuses étapes graduelles. Il y a, il faut le reconnaître, des cas particulièrement difficiles pour la théorie de la sélection naturelle, et l'un des plus curieux est l'existence de deux ou trois castes définies d'ouvrières ou de femelles stériles dans la même communauté de fourmis ; mais j'ai essayé de montrer comment cette difficulté peut être surmontée....
"The Descent of Man" (La Descendance de l'homme et la sélection naturelle, 1871)
Appliquant sa théorie controversée de l’évolution aux origines de l’espèce humaine, "The Descent of Man" de Charles Darwin est l’aboutissement de l’œuvre de sa vie. Dans "The Origin of Species", Charles Darwin s'était refusé à discuter de l’évolution humaine, estimant que le sujet était trop « surrounded with prejudices», retravaillant ses notes depuis les années 1830. mais ce n’est qu’avec appréhension qu’il a finalement publié "The Descent of Man" en 1871. Le livre a notoirement positionné les singes dans notre arbre généalogique et a fait des races une seule famille, diversifié par la « sexual selection » – La théorie provocante de Darwin selon laquelle le choix des femmes parmi les hommes concurrents mène à des caractéristiques raciales divergentes. Cité par Sigmund Freud comme « l’un des dix livres les plus importants jamais écrits », le livre de Darwin "Descent of Man" peut continuer de façonner notre façon de penser ce qui fait de nous des êtres humains uniques. Dans leur introduction, James Moore et Adrian Desmond, biographes reconnus de Charles Darwin, appellent à une réévaluation radicale du livre, arguant que ses idées fondamentales sur la race ont été inspirées par la haine de Darwin de l’esclavage. Le texte est la deuxième édition définitive et ce volume contient également des suggestions pour une lecture plus approfondie, une chronologie et des croquis biographiques des personnalités mentionnées...
PART I - THE DESCENT OR ORIGIN OF MAN - Chapter 1 - The Evidence of the Descent of Man from some Lower Form Nature of the evidence bearing on the origin of man ... – PART II - SEXUAL SELECTION - Chapter 8 - Principles of Sexual Selection - Secondary sexual characters – Sexual selection – ... PART III - SEXUAL SELECTION IN RELATION TO MAN, AND CONCLUSION ...
"The advancement of the welfare of mankind is a most intricate problem: all ought to refrain from marriage who cannot avoid abject poverty for their children; for poverty is not only a great evil, but tends to its own increase by leading to recklessness in marriage. On the other hand, as Mr Galton has remarked, if the prudent avoid marriage, whilst the reckless marry, the inferior members tend to supplant the better members of society. Man, like every other animal, has no doubt advanced to his present high condition through a struggle for existence consequent on his rapid multiplication; and if he is to advance still higher, it is to be feared that he must remain subject to a severe struggle. Otherwise he would sink into indolence, and the more gifted men would not be more successful in the battle of life than the less gifted.
Hence our natural rate of increase, though leading to many and obvious evils, must not be greatly diminished by any means. There should be open competition for all men; and the most able should not be prevented by laws or customs from succeeding best and rearing the largest number of offspring. Important as the struggle for existence has been and even still is, yet as far as the highest part of man’s nature is concerned there are other agencies more important. For the moral qualities are advanced, either directly or indirectly, much more through the effects of habit, the reasoning powers, instruction, religion, &c., than through natural selection; though to this latter agency may be safely attributed the social instincts, which afforded the basis for the development of the moral sense.
Le progrès du bien-être de l'humanité est un problème très complexe : tous ceux qui ne peuvent éviter à leurs enfants une pauvreté abjecte devraient s'abstenir de se marier ; car la pauvreté n'est pas seulement un grand mal, mais elle tend à s'accroître elle-même en conduisant à l'insouciance dans le mariage. D'autre part, comme l'a fait remarquer M. Galton, si les personnes prudentes évitent le mariage, tandis que les personnes imprudentes se marient, les membres inférieurs tendent à supplanter les membres supérieurs de la société. L'homme, comme tous les autres animaux, est sans doute parvenu à sa condition élevée actuelle par une lutte pour l'existence résultant de sa multiplication rapide ; et s'il doit progresser encore, il est à craindre qu'il ne doive rester soumis à une lutte sévère. Sinon, il sombrerait dans l'indolence, et les hommes les plus doués ne réussiraient pas mieux que les moins doués dans la bataille de la vie.
C'est pourquoi notre taux d'accroissement naturel, bien qu'il entraîne des maux nombreux et évidents, ne doit pas être considérablement diminué par quelque moyen que ce soit. La concurrence doit être ouverte à tous les hommes, et les lois ou les coutumes ne doivent pas empêcher les plus aptes de réussir le mieux et d'élever le plus grand nombre de descendants. Aussi importante qu'ait été et soit encore la lutte pour l'existence, il y a cependant d'autres facteurs plus importants pour ce qui est de la partie la plus élevée de la nature humaine. En effet, les qualités morales sont développées, directement ou indirectement, beaucoup plus par les effets de l'habitude, du raisonnement, de l'instruction, de la religion, etc. que par la sélection naturelle, bien que l'on puisse attribuer à cette dernière les instincts sociaux qui ont servi de base au développement du sens moral.
The main conclusion arrived at in this work, namely that man is descended from some lowly organised form, will, I regret to think, be highly distasteful to many. But there can hardly be a doubt that we are descended from barbarians. The astonishment which I felt on first seeing a party of Feugians on a wild and broken shore will never be forgotten by me, for the reflection at once rushed into my mind – such were our ancestors. These men were absolutely naked and bedaubed with paint, their long hair was tangled, their mouths frothed with excitement, and their expression was wild, startled, and distrustful. They possessed hardly any arts, and like wild animals lived on what they could catch; they had no government, and were merciless to every one not of their own small tribe. He who has seen a savage in his native land will not feel much shame, if forced to acknowledge that the blood of some more humble creature flows in his veins. For my own part I would as soon be descended from that heroic little monkey, who braved his dreaded enemy in order to save the life of his keeper, or from that old baboon, who descending from the mountains, carried away in triumph his young comrade from a crowd of astonished dogs – as from a savage who delights to torture his enemies, offers up bloody sacrifices, practises infanticide without remorse, treats his wives like slaves, knows no decency, and is haunted by the grossest superstitions.
La principale conclusion de cet ouvrage, à savoir que l'homme descend d'une forme organisée inférieure, sera, je le regrette, très désagréable pour beaucoup. Mais il ne fait guère de doute que nous descendons de barbares. Je n'oublierai jamais l'étonnement que j'ai éprouvé en voyant pour la première fois un groupe de Feugiens sur un rivage sauvage et brisé, car la réflexion s'est immédiatement imposée à mon esprit : tels étaient nos ancêtres. Ces hommes étaient absolument nus et couverts de peinture, leurs longs cheveux étaient emmêlés, leurs bouches bouillonnaient d'excitation et leur expression était sauvage, effrayée et méfiante. Ils ne possédaient pratiquement aucun art et, comme des animaux sauvages, vivaient de ce qu'ils pouvaient attraper ; ils n'avaient pas de gouvernement et étaient sans pitié pour tous ceux qui n'appartenaient pas à leur petite tribu. Celui qui a vu un sauvage dans son pays natal n'éprouvera pas beaucoup de honte s'il est forcé de reconnaître que le sang d'une créature plus humble coule dans ses veines. Pour ma part, j'aimerais autant descendre de ce petit singe héroïque qui brava son redoutable ennemi pour sauver la vie de son gardien, ou de ce vieux babouin qui, descendant des montagnes, emporta en triomphe son jeune camarade d'une foule de chiens étonnés, que d'un sauvage qui se plaît à torturer ses ennemis, offre des sacrifices sanglants, pratique l'infanticide sans remords, traite ses femmes comme des esclaves, ne connaît aucune pudeur, et est hanté par les superstitions les plus grossières.
Man may be excused for feeling some pride at having risen, though not through his own exertions, to the very summit of the organic scale; and the fact of his having thus risen, instead of having been aboriginally placed there, may give him hope for a still higher destiny in the distant future. But we are not here concerned with hopes or fears, only with the truth as far as our reason permits us to discover it; and I have given the evidence to the best of my ability. We must, however, acknowledge, as it seems to me, that man with all his noble qualities, with sympathy which feels for the most debased, with benevolence which extends not only to other men but to the humblest living creature, with his god-like intellect which has penetrated into the movements and constitution of the solar system – with all these exalted powers – Man still bears in his bodily frame the indelible stamp of his lowly origin.
L'homme peut être excusé d'éprouver une certaine fierté de s'être élevé, quoique non par ses propres efforts, jusqu'au sommet de l'échelle organique ; et le fait qu'il se soit ainsi élevé, au lieu d'avoir été placé là de façon aborigène, peut lui donner l'espoir d'une destinée encore plus haute dans un avenir lointain. Mais il ne s'agit pas ici d'espoirs ou de craintes, mais seulement de la vérité, dans la mesure où notre raison nous permet de la découvrir ; et j'en ai donné la preuve du mieux que j'ai pu. Nous devons cependant reconnaître, comme il me semble, que l'homme, avec toutes ses nobles qualités, avec sa sympathie pour les plus humiliés, avec sa bienveillance qui s'étend non seulement aux autres hommes, mais à la plus humble créature vivante, avec son intelligence de dieu qui a pénétré dans les mouvements et la constitution du système solaire - avec toutes ces puissances exaltées - l'homme porte encore dans sa structure corporelle l'empreinte indélébile de son humble origine..."
"The expression of the emotions in Man and Animals" (1872)
L'esprit tout entier acquiert une signification biologique. En cherchant à faire voir dans la plupart des mouvements qui accompagnent une émotion des ébauches d’actes adaptés, Darwin illustre une psychologie désormais transformiste que l'on retrouvera, parmi bien d’autres, dans les ouvrages de Paul Rée (Der Ursprung der moralischen Empfandungen, 1877 ; Die Enstehung des Gewissens, 1885), un des points de départ de la méditation de Nietzsche (la sélection a selon lui pour effet d’atténuer, chez l’homme, les sentiments altruistes qu’il a hérités des animaux et de renforcer les sentiments égoïstes).
Dans "The Expression of the Emotions in Man and Animals" (1872), Charles Darwin utilise une série de photographies d'expressions faciales et gestuelles prises par Oscar Gustav Rejlander (1813-1875), peintre et photographe suédois, un des "père de la photographie artistique". Son œuvre la plus célèbre, The Two Ways of Life (1857), qui s'inspire du décor et de la composition de l'École d'Athènes de Raphaël (1509-1510), est un montage d'une trentaine de négatifs qui sera présenté à l'exposition des Trésors de l'art de 1857 à Manchester et acheté par la reine Victoria pour le prince Albert.
CHAPTER XIV. - CONCLUDING REMARKS AND SUMMARY. - The three leading principles which have determined the chief movements of expression-Their inheritance - On the part which the will a.ud intention have played in the acquirement of various expressions - The instinctive recognition of expression - The bearing of our subject on the specific unity of the races of man - On the successive acquirement of various expressions by the progenitors of man- The importance of expression - Conclusion.
"I HAVE now described, to the best of my ability, the chief expressive actions in man, and in BOme few of the lower animals. I have also attempted to explain the origin or development of these actions through the three principles given in the first chapter. The first of these principles is, that movements which are serviceable in gratifying some desire, or in relieving some sensation, if often repeated, become so habitual that they are performed, whether or not of any service, whenever the same desire or sensation is felt, even in a very weak degree. Our second principle is that of antithesis. The habit of voluntarily performing opposite movements under opposite impulses has become firmly established in us by the practice of our whole lives. Hence, if certain actions have been regularly performed, in accordance with our first principle, under a certain frame of mind, there will be a strong and involuntary tendency to the performance of directly opposite actions, whether or not these are of any use, under the excitement of an opposite frame of mind.
J'AI maintenant décrit, du mieux que j'ai pu, les principales actions expressives de l'homme et de quelques animaux inférieurs. J'ai également tenté d'expliquer l'origine ou le développement de ces actions par les trois principes énoncés dans le premier chapitre. Le premier de ces principes est que les mouvements qui servent à satisfaire un désir ou à soulager une sensation, s'ils sont souvent répétés, deviennent si habituels qu'ils sont exécutés, qu'ils servent ou non, chaque fois que le même désir ou la même sensation se fait sentir, même à un degré très faible. Notre deuxième principe est celui de l'antithèse. L'habitude d'exécuter volontairement des mouvements opposés sous l'effet d'impulsions opposées s'est fermement établie en nous par la pratique de toute notre vie. Ainsi, si certaines actions ont été régulièrement accomplies, conformément à notre premier principe, sous un certain état d'esprit, il y aura une tendance forte et involontaire à l'accomplissement d'actions directement opposées, qu'elles soient utiles ou non, sous l'excitation d'un état d'esprit opposé.
Our third principle is the direct action of the excited nervous system on the body, independently of the will, and independently, in large part, of habit. Experience shows that nerve-force is generated and set free whenever the cerebro-spinal system is excited. The direction which this nerve-force follows is necessarily determined by the lines of connection between the nerve-cells, with each other and with various parts of the body. But the direction is likewise much influenced by habit; inasmuch as nerve-force passes readily along accustomed channels. The frantic and senseless actions of an enraged man may be attributed in part to the undirected flow of nerve-force, and in part to the effects of habit, for these actions often vaguely represent the act of striking. They thus pass into gestures included under our first principle; as when an indignant man unconsciously throws himself into a fitting attitude for attacking his opponent, though without any intention of making an actual attack.
Notre troisième principe est l'action directe du système nerveux excité sur le corps, indépendamment de la volonté et, en grande partie, de l'habitude. L'expérience montre que la force nerveuse est générée et libérée chaque fois que le système cérébro-spinal est excité. La direction que suit cette force nerveuse est nécessairement déterminée par les lignes de connexion entre les cellules nerveuses, entre elles et avec les différentes parties du corps. Mais cette direction est aussi fortement influencée par l'habitude, dans la mesure où la force nerveuse passe facilement par les canaux habituels. Les actions frénétiques et insensées d'un homme en colère peuvent être attribuées en partie au flux non dirigé de la force nerveuse, et en partie aux effets de l'habitude, car ces actions représentent souvent vaguement l'acte de frapper. Elles deviennent ainsi des gestes compris dans notre premier principe, comme lorsqu'un homme indigné se jette inconsciemment dans une attitude propice à l'attaque de son adversaire, sans toutefois avoir l'intention de l'attaquer réellement.
We see also the influence of habit in all the emotions and sensations which are called exciting; for they have assumed this character from having habitually led to energetic action; and action affects, in an indirect manner, the respiratory and circulatory system; and the latter reacts on the brain. Whenever these emotions or sensations are even slightly felt by us, though they may not at the time lead to any exertion, our whole system is nevertheless disturbed through the force of habit and association. Other emotions and sensations are called depressing, because they have not habitually led to energetic action, excepting just at first, as in the case of extreme pain, fear, and grief, and they have ultimately caused complete exhaustion; they are consequently expressed chiefly by negative signs and by prostration. Again, there are other emotions, such as that of affection, which do not commonly lead to action of any kind, and consequently are not exhibited by any strongly marked outward signs. Affection indeed, in as far as it is a pleasurable sensation, excites the ordinary signs of pleasure.
Nous voyons aussi l'influence de l'habitude dans toutes les émotions et sensations dites excitantes, car elles ont pris ce caractère pour avoir conduit habituellement à une action énergique ; or l'action agit, d'une manière indirecte, sur l'appareil respiratoire et circulatoire, et ce dernier réagit sur le cerveau. Chaque fois que ces émotions ou sensations sont ressenties, même légèrement, par nous, bien qu'elles n'entraînent aucun effort sur le moment, tout notre système est néanmoins perturbé par la force de l'habitude et de l'association. D'autres émotions et sensations sont dites déprimantes, parce qu'elles n'ont pas conduit habituellement à une action énergique, sauf au début, comme dans le cas de la douleur extrême, de la peur et du chagrin, et qu'elles ont finalement causé un épuisement complet ; elles s'expriment donc principalement par des signes négatifs et par la prostration. Il y a aussi d'autres émotions, comme l'affection, qui ne conduisent généralement pas à une action quelconque et qui, par conséquent, ne s'expriment pas par des signes extérieurs fortement marqués. L'affection, en effet, dans la mesure où elle est une sensation agréable, excite les signes ordinaires du plaisir.
... Few points are more interesting in our present subject than the extraordinarily complex chain of events which lead to certain expressive movements. Take, for instance, the oblique eyebrows of a man suffering from grief or anxiety. When infants scream loudly from hunger or pain, the circulation is affected, and the eyes tend to become gorged with blood: consequently the muscles surrounding the eyes are strongly contracted as a protection: this action, in the course of many generations, has become firmly fixed and inherited: but when, with advancing years and culture, the habit of screaming is partially repressed, the muscles round the eyes still tend to contract, whenever even slight distress is felt: of these muscles, the pyramidals of the nose are less under the control of the will than are the others, and their contraction can be checked only by that of the central fa scire of the frontal muscle: these latter fascire draw up the inner ends of the eyebrows, and wrinkle the forehead in a peculiar manner, which we instantly recognize as the expression of grief or anxiety. Slight movements, such as these just described, or the scarcely perceptible drawing down of the comers of the mouth, are the last remnants or rudiments of strongly marked and intelligible movements. They are as full of significance to us ill regard to expression, as are ordinary rudiments to the naturalist in the classification and genealogy of organic beings.
(...)
... Peu de points sont plus intéressants dans notre sujet que l'enchaînement extraordinairement complexe des événements qui conduisent à certains mouvements expressifs. Prenons, par exemple, les sourcils obliques d'un homme souffrant de chagrin ou d'anxiété. Lorsque les enfants crient fort à cause de la faim ou de la douleur, la circulation sanguine est affectée et les yeux ont tendance à se gorger de sang : par conséquent, les muscles entourant les yeux sont fortement contractés pour se protéger : cette action, au cours de nombreuses générations, est devenue fermement fixée et héritée : mais lorsque, avec l'âge et la culture, l'habitude de crier est partiellement réprimée, les muscles autour des yeux ont encore tendance à se contracter, chaque fois qu'une détresse, même légère, est ressentie : Parmi ces muscles, les pyramidaux du nez sont moins contrôlés par la volonté que les autres, et leur contraction ne peut être freinée que par celle du fa scire central du muscle frontal : ce dernier fa scire relève l'extrémité interne des sourcils et plisse le front d'une manière particulière, que nous reconnaissons instantanément comme l'expression du chagrin ou de l'anxiété. De légers mouvements, comme ceux que nous venons de décrire, ou l'abaissement à peine perceptible des commissures des lèvres, sont les derniers vestiges ou rudiments de mouvements fortement marqués et intelligibles. Ils sont aussi significatifs pour nous, en ce qui concerne l'expression, que le sont les rudiments ordinaires pour le naturaliste dans la classification et la généalogie des êtres organiques.
(...)
Of all expressions, blushing seems to be the most strictly human; yet it is common to all or nearly all the races of man, whether or not any change of colour is visible in their skin. The relaxation of the small arteries of the surface, on which blushing depends, seems to have primarily resulted from earnest attention directed to the appearance of our own persons, especially of our faces, aided by habit, inheritance, and the ready flow of nerve-force along accustomed channels; and afterwards to have been extended by the power of association to self-attention directed to moral conduct. It can hardly be doubted that many animals are capable of appreciating beautiful colours and even forms, as is shown by the pains which the individuals of one sex take in displaying their beauty before those of the opposite sex. But it does not seem possible that any animal, until its mental powers had been developed to an equal or nearly equal degree with those of man, would have closely considered and been sensitive about its own personal appearance. Therefore we may conclude that blushing originated at a very late period in the long line of our descent.
De toutes les expressions, le rougissement semble être la plus strictement humaine ; pourtant, il est commun à toutes ou presque toutes les races humaines, qu'un changement de couleur soit visible ou non sur leur peau. Le relâchement des petites artères de la surface, dont dépend le rougissement, semble résulter d'abord d'une attention sérieuse portée à l'apparence de notre personne, surtout de notre visage, aidée par l'habitude, l'hérédité et la circulation rapide de la force nerveuse le long des canaux habituels ; puis il a été étendu, par le pouvoir d'association, à l'attention portée à la conduite morale. On ne peut guère douter que beaucoup d'animaux soient capables d'apprécier les belles couleurs et même les belles formes, comme le prouvent les efforts que font les individus d'un sexe pour montrer leur beauté à ceux du sexe opposé. Mais il ne semble pas possible qu'un animal, avant que ses facultés mentales n'aient été développées à un degré égal ou presque égal à celui de l'homme, ait considéré de près son apparence personnelle et y ait été sensible. Nous pouvons donc conclure que le rougissement est apparu très tardivement dans la longue lignée de nos ancêtres.
From the various facts just alluded to, and given in the course of this Volume, it follows that, if the structure of our organs of respiration and circulation had differed in only a slight degree from the state in which they now exist, most of our expressions would have been wonder fully different. A very slight change in the course of the arteries and veins which run to the head, would probably have prevented the blood from accumulating in our eyeballs during violent expiration; for this occurs in extremely few quadrupeds. In this case we should not have displayed some of our most characteristic expressions. If man had breathed water by the aid of external branchial (though the idea is hardly conceivable), instead of air through his mouth and nostrils, his features would not have expressed his feelings much more efficiently than now do his hands or limbs. Rage and disgust, however, would still have been shown by movements about the lips and mouth, and the eyes would have become brighter or duller according to the state of the circulation. If our ears had remained movable, their movements would have been highly expressive, as is the case with all the animals which fight with their teeth; and we may infer that our early progenitors thus fought, as we still uncover the canine tooth on one side when we sneer at or defy anyone, and we uncover all our teeth when furiously enraged.
D'après les divers faits auxquels il vient d'être fait allusion, et qui sont exposés dans le cours de ce volume, il résulte que, si la structure de nos organes de respiration et de circulation n'avait différé que dans une faible mesure de l'état où ils se trouvent aujourd'hui, la plupart de nos expressions auraient été tout à fait différentes. Un très léger changement dans le cours des artères et des veines qui vont à la tête aurait probablement empêché le sang de s'accumuler dans nos globes oculaires pendant une expiration violente ; car ce phénomène se produit chez un très petit nombre de quadrupèdes. Dans ce cas, nous n'aurions pas eu certaines de nos expressions les plus caractéristiques. Si l'homme avait respiré de l'eau à l'aide d'un branchage externe (bien que l'idée soit difficilement concevable), au lieu de l'air par la bouche et les narines, ses traits n'auraient pas exprimé ses sentiments beaucoup plus efficacement que ne le font aujourd'hui ses mains ou ses membres. La rage et le dégoût, cependant, auraient encore été manifestés par des mouvements des lèvres et de la bouche, et les yeux auraient été plus ou moins brillants selon l'état de la circulation. Si nos oreilles étaient restées mobiles, leurs mouvements auraient été très expressifs, comme c'est le cas chez tous les animaux qui se battent avec leurs dents ; et nous pouvons en déduire que nos premiers ancêtres se battaient ainsi, puisque nous découvrons encore la canine d'un côté lorsque nous ricanons ou défions quelqu'un, et que nous découvrons toutes nos dents lorsque nous sommes furieusement enragés.
The movements of expression in the face and body, whatever their origin may have been, are in themselves of much importance for our welfare. They serve as the first means of communication between the mother and her infant; she smiles approval, and thus encourages her child on the right path, or frowns disapproval. We readily perceive sympathy in others by their expression; our sufferings are thus mitigated and our pleasures increased; and mutual good feeling is thus strengthened.
The movements of expression give vividness and energy to our spoken words. They reveal the thoughts and intentions of others more truly than do words, which may be falsified. Whatever amount of truth the so-called science of physiognomy may contain, appears to depend, as Haller long ago remarked, on different persons bringing into frequent use different facial muscles, according to their dispositions; the development of these muscles being perhaps thus increased, and the lines or furrows on the face, due to their habitual contraction, being thus rendered deeper and more conspicuous. The free expression by outward signs of an emotion intensifies it. On the other hand, the repression, as far as this is possible, of all outward signs softens our emotions.5 He who gives way to violent gestures will increase his rage; he who does not control the signs of fear will experience fear in a greater degree; and he who remains passive when overwhelmed with grief loses his best chance of recovering elasticity of mind. These results follow partly from the intimate relation which exists between almost all the emotions and their outward manifestations; and partly from the direct influence of exertion on the heart, and consequently on the brain. Even the simulation of an emotion tends to arouse it in our minds.
Les mouvements d'expression du visage et du corps, quelle que soit leur origine, sont en eux-mêmes d'une grande importance pour notre bien-être. Ils constituent le premier moyen de communication entre la mère et son enfant ; elle sourit pour l'approuver et l'encourager ainsi dans la bonne voie, ou fronce les sourcils pour le désapprouver. Nous percevons facilement la sympathie chez les autres par leur expression ; nos souffrances sont ainsi atténuées et nos plaisirs augmentés ; les bons sentiments mutuels sont ainsi renforcés. Les mouvements d'expression donnent de la vivacité et de l'énergie à nos paroles. Ils révèlent les pensées et les intentions d'autrui plus fidèlement que les mots, qui peuvent être falsifiés. Quelle que soit la part de vérité que peut contenir la soi-disant science de la physiognomonie, elle semble dépendre, comme Haller l'a remarqué il y a longtemps, du fait que différentes personnes utilisent fréquemment différents muscles faciaux, selon leurs dispositions ; le développement de ces muscles étant peut-être ainsi accru, et les lignes ou les sillons sur le visage, dus à leur contraction habituelle, étant ainsi rendus plus profonds et plus apparents. L'expression libre par des signes extérieurs d'une émotion l'intensifie. En revanche, la répression, dans la mesure du possible, de tous les signes extérieurs adoucit nos émotions. Celui qui se laisse aller à des gestes violents augmentera sa rage ; celui qui ne contrôle pas les signes de la peur éprouvera davantage la peur ; et celui qui reste passif lorsqu'il est accablé de chagrin perd ses meilleures chances de retrouver l'élasticité de l'esprit. Ces résultats découlent en partie de la relation intime qui existe entre presque toutes les émotions et leurs manifestations extérieures, et en partie de l'influence directe de l'effort sur le coeur, et par conséquent sur le cerveau. Même la simulation d'une émotion tend à l'éveiller dans notre esprit.
Shakespeare, qui par sa merveilleuse connaissance de l'esprit humain devrait être un excellent juge, dit :
"., Is it not monstrous that this player here,
But in a fiction, in a dream of passion,
Could force his soul so to his own conceit,
That, from her working, all his visage wann'd;
Tears in his eyes, distraction in's aspect,
A broken voice, and his whole function suiting
With forms to his conceit? And all for nothing! "
Hamlet, act II. sc. 2.
"N’est-ce pas chose monstrueuse que ce comédien que voici, dans une pure fiction, dans une passion rêvée, puisse, selon sa propre idée, contraindre son âme à ce point que, par le travail de son âme, son visage entier blêmisse. Et des pleurs dans ses yeux ! l’égarement dans sa physionomie ! une voix brisée ! et toute son action appropriant les formes à l’idée ! Et tout cela pour rien ! "
We have seen that the study of the theory of expression confirms to a certain limited extent the conclusion that man is derived from some lower animal form, and supports the belief of the specific or subspecific unity of the several races; but as far as my judgment serves, such confirmation was hardly needed. We have also seen that expression in itself, or the language of the emotions, as it has sometimes been called, is certainly of importance for the welfare of mankind. To understand, as far as possible, the source or origin of the various expressions which may be hourly seen on the faces of the men around us, not to mention our domesticated animals, ought to possess much interest for us. From these several causes, we may conclude that the philosophy of our subject has well deserved the attention which it has already received from several excellent observers, and that it deserves still further attention, especially from any able physiologist."
Nous avons vu que l'étude de la théorie de l'expression confirme, dans une certaine mesure, la conclusion selon laquelle l'homme dérive d'une forme animale inférieure, et appuie la croyance en l'unité spécifique ou sous-spécifique des différentes races ; mais, pour autant que je puisse en juger, cette confirmation n'était guère nécessaire. Nous avons également vu que l'expression en elle-même, ou le langage des émotions, comme on l'a parfois appelé, est certainement d'une grande importance pour le bien-être de l'humanité. Comprendre, dans la mesure du possible, la source ou l'origine des diverses expressions que l'on peut voir d'heure en heure sur les visages des hommes qui nous entourent, sans parler de nos animaux domestiques, devrait présenter pour nous un grand intérêt. De ces diverses causes, on peut conclure que la philosophie de notre sujet a bien mérité l'attention qu'elle a déjà reçue de plusieurs excellents observateurs, et qu'elle mérite encore plus d'attention, surtout de la part de tout physiologiste compétent. »
L`immense succès que connut l`œuvre de Darwin et l'influence qu`elle exerça sur tout le développement des sciences biologiques tiennent au fait que le naturaliste proposait une théorie claire, souple, satisfaisante pour l'esprit et qui semblait embrasser toutes les observations. ll en résulte l`image d`un cosmos mécaniquement purgé de toute trace d'intentionnalité, de tout finalisme supérieur. Et c`est la raison pour laquelle le darwinisme connut un tel rayonnement à une époque de positivisme dominateur et qu'il fut présenté comme une "doctrine immorale et antichrétienne". Thomas Henry Huxley (1825-1895), grand défenseur de Darwin, publiait dès 1863 "Evidence as to Man's Place in Nature" (La Place de l'homme dans la nature) dans lequel il développait la thèse que, dans la perspective darwinienne, l'homme est un animal évolué, et inventait en 1869 le terme d' «agnostique» ...
Après une période de succès immédiat et l'acceptation rapide du concept général d'évolution, ce fut la notion de "sélection naturelle" souleva le plus de question ...
On retrouve les tenants du "Lamarckisme", soutenus par la théorie de la transmission des caractères acquis, illustrer la vision du XIXe de l'échelle des êtres selon laquelle l'évolution est un processus menant à l'apparition de l'homme (cf. "L'Arbre de la vie" (1879) représenté par Ernst Haeckel dans "L'évolution de l'homme" ). De la révision rendue nécessaire de la théorie de la sélection naturelle naquit le "néo-darwinisme" tel que porté par le biologiste allemand August Weismann et Alfred Russel Wallace. Un August Weismann (1834-1914), qui fournira l'explication de la transmission de l'information génétique qui manquait à la théorie de l'évolution, permettant ainsi l'essor de la génétique. Alors que la redécouverte des travaux de Gregor Mendel sur les lois de l'hérédité en 1900 déclenchait un violent débat, la génétique des populations inaugurait dans les années 1920 une toute nouvelle étape dans la formulation de cette fameuse notion de "sélection naturelle", un nouveau chapitre qui s'écrit encore, à distance de la sélection darwinienne telle que formulée par son créateur ...
Parallèlement, transposé abusivement sur le terrain sociologique, le darwinisme fut assimilé à un réductionnisme simplificateur justifiant l'écrasement de l'inférieur par le supérieur, le "darwinisme dit social" transposant à la société humaine le "survival of the fittest" du naturaliste. Au-delà des abus idéologiques, voire dramatiques, de telles affirmations, cette formulation qui aboutit à affirmer que seuls les membres les plus forts des espèces survivent en développant des caractéristiques biologiques supérieures, s'installera très rapidement dans le langage commun, inspirant nombre de penseurs à tous les étages de leurs réflexions, - que l'on songe à William James (1842-1910), le fondateur du pragmatisme, séduit dans son adolescence par "L'origine des espèces", qui, décrivant la formation de nos convictions, écrit qu'elles deviennent vraies si elles nous aident à survivre et fausses si elles ne sont pas utiles. Darwin, il est vrai, n'était pas le seul et unique inspirateur de cette formulation, son grand contemporain, Herbert Spencer (1820-1903), adopta sans réserve la notion de survivance du plus apte pour en tirer toutes les conséquences les plus importantes non seulement en biologie, mais en psychologie, en morale et en politique. La supériorité mentale et morale consiste dans la précision et la finesse de plus en plus parfaites des réactions d’un animal à son milieu. ..
Avec l`évolution des sciences biologiques et la création de la génétique, maillon intellectuel manquant entre la théorie de l'évolution et la biologie cellulaire, le darwinisme a cessé d'être une explication théorique universelle du monde des êtres vivants, tout en restant, dans les strictes limitations qui sont les siennes, une tentative cohérente et unitaire d'explication. Depuis la théorie de "la conception intelligente" (Intelligent Design) tente de développer l’idée que certaines caractéristiques du monde naturel, telles que la machinerie interne des cellules, sont trop et « irréductiblement complexes pour avoir résulté de processus naturels non guidés seuls" (to have resulted from unguided natural processes alone).
Darwin ne prit jamais parti d`une manière aussi tranchée que ses sectateurs, la sélection naturelle était présentée par lui comme une constatation a posteriori et non comme une explication causale : sa théorie prenait la vie "en l'état", sans spécifier si elle était hasard singulier ou création....
"Charles Darwin : Victorian mythmaker", by Wilson, A. N., 2017
Charles Darwin : l'homme qui a découvert l'évolution ? L'homme qui a tué Dieu ? Ou un homme imparfait de son époque, mi-génie, mi-carriériste impitoyable, qui ne voulait pas reconnaître ses dettes envers d'autres penseurs ? Dans cette nouvelle vie audacieuse - la première biographie en un seul volume depuis vingt-cinq ans - A. N. Wilson, l'auteur de "The Victorians et de God's Funeral", part à la recherche de Charles Darwin, personnage célèbre mais contradictoire. Darwin a été décrit par son ami et champion, Thomas Huxley, comme un "symbole". Mais que symbolisait-il ? Dans le portrait de Wilson, à la fois sympathique et critique, Darwin était deux hommes. D'une part, un naturaliste de génie, un collectionneur et conservateur patient et précis qui a considérablement élargi les possibilités de la taxonomie et de la géologie. D'autre part, Darwin, un homme apparemment timide, doux et même paresseux, cachait une ambition brûlante d'être un génie universel. Il aspirait à une théorie qui expliquerait tout. Mais l'œuvre maîtresse de Darwin, L'origine des espèces, publiée en 1859, était-elle vraiment ce qu'elle semblait être, un ouvrage d'histoire naturelle ? Ou était-ce en fait un mythe de consolation pour les classes moyennes victoriennes, les rassurant sur le fait que l'égoïsme et l'indifférence à l'égard des pauvres faisaient partie du grand plan de la nature ? "Charles Darwin : Victorian Mythmaker" est une réévaluation radicale de l'un des grands victoriens, un livre qui n'a pas peur de remettre en question l'orthodoxie darwinienne tout en nous rapprochant de l'homme, de son idée révolutionnaire et de l'époque victorienne au sens large....
"The evolution controversy in America", by Webb, George Ernest (1994)
Depuis plus d'un siècle, les États-Unis sont le théâtre d'un débat prolongé sur l'évolution organique et l'enseignement de cette théorie dans les écoles publiques du pays. La controverse, qui a débuté avec la publication de L'Origine des espèces de Darwin, s'est étendue, dans les années 1920, aux théologiens, aux hommes politiques et aux éducateurs. Le procès Scopes, qui s'est tenu en 1925, a donné une grande publicité au mouvement anti-évolution en plein essor et a entraîné un recul de l'enseignement de l'évolution dans les écoles publiques. George E. Webb explique comment les efforts déployés pour améliorer l'enseignement des sciences dans le sillage du Spoutnik ont ravivé le sentiment anti-évolution et conduit à l'émergence de la "science de la création" en tant qu'expression la plus récente de ce sentiment. Les créationnistes continuent d'exiger un "traitement équilibré" des théories de la création et de l'évolution dans les écoles publiques, bien que leurs efforts aient été déclarés inconstitutionnels dans une série d'affaires portées devant les tribunaux fédéraux. Leurs combats ont été beaucoup plus fructueux au niveau local, en obtenant le soutien de politiciens et d'éducateurs locaux. Webb attribue le succès des créationnistes principalement au manque de culture scientifique du public américain. Bien qu'un certain nombre d'études publiées aient traité d'aspects spécifiques du débat, The Evolution Controversy in America (La controverse sur l'évolution en Amérique) représente la première étude historique complète du sujet.
Le paléontologue britannique Stephen Jay Gould (1941-2002) s'est rendu célèbre dans les années 1980 comme grand vulgarisateur de la théorie de l'évolution en biologie et dans l'histoire des sciences (The Panda's Thumb, 1980; The Mismeasure of Man, 1981; Hen's Teeth and Horse's Toes, 1983), mais aussi en s'opposant au grand "dessein intelligent" des créationnistes. Il proposera une "théorie des équilibres ponctués", selon laquelle les transitions évolutives entre les espèces au cours de l'évolution se font brutalement et non graduellement, et contestera une vision adaptationniste par trop naïve qui oublierait tout simplement l'importance du rôle du hasard dans l'évolution ...
"Darwin’s Ghosts: The Secret History of Evolution", written by Rebecca Stott, 2012
Noël 1859. Juste un mois après la publication de Sur l’origine des espèces, Charles Darwin a reçu une lettre troublante. Il s’attendait à des critiques; en fait, des lettres arrivaient tous les jours, la plupart exprimant l’indignation et des accusations d’hérésie. Mais cette lettre était différente. Il l’accusait de ne pas reconnaître ses prédécesseurs, de s’attribuer le mérite d’une théorie déjà découverte par d’autres. Darwin s’est rendu compte qu’il avait commis une erreur en omettant dans Origin of Species toute mention de ses ancêtres intellectuels. Pourtant, quand il a essayé de retracer tous les philosophes naturels qui avaient jeté les bases de sa théorie, il a constaté que l’histoire avait déjà oublié beaucoup d’entre eux. Darwin’s Ghosts raconte la découverte collective de l’évolution, d’Aristote, marchant sur les rives de Lesbos avec ses élèves, à Al-Jahiz, un écrivain arabe du premier siècle, de Léonard de Vinci, à la recherche de fossiles dans les puits de mine des collines toscanes, à Denis Diderot à Paris, explorant les origines des espèces sous la surveillance de la police secrète, et des brillants naturalistes du Jardin de Plantes, trouvant des preuves de changement évolutif dans les collections d’histoire naturelle volées pendant les guerres napoléoniennes. L’évolution n’a pas été découverte à elle seule, soutient Rebecca Stott, contrairement à ce qui est devenu la tradition, mais est une idée qui a émergé au cours de nombreux siècles, avancée par des individus audacieux à travers le monde qui ont eu l’imagination de spéculer sur les voies extraordinaires de la nature, et qui a eu le courage d’articuler de telles spéculations à un moment où le faire était souvent considéré comme une hérésie. Stott démontre que les idées, y compris l’évolution elle-même, évoluent tout comme les animaux et les plantes, en s’entremêlant, en renversant des notions plus faibles et en se développant sur une période de temps plus longue...
"Darwin’s Dangerous Idea: Evolution and the Meanings of Life", Daniel C. Dennett (1995)
Dans un livre à la fois novateur et accessible, Daniel C. Dennett, que Chet Raymo du Boston Globe appelle « one of the most provocative thinkers on the planet », concentre son esprit infailliblement logique sur la théorie de la sélection naturelle. montrant comment la grande idée de Darwin transforme et illumine notre vision traditionnelle de la place de l’humanité dans l’univers. Dennett décrit vivement la théorie elle-même, puis étend la vision de Darwin avec des arguments impeccables à leurs conclusions souvent surprenantes, remettant en question les vues de certains des scientifiques les plus célèbres de notre époque.
"Understanding Moral Sentiments: Darwinian Perspectives?", by Hilary Putnam (2014)
Ce volume rassemble des chercheurs de premier plan pour examiner les perspectives darwiniennes sur la moralité de disciplines très variées : biologie évolutive, anthropologie, psychologie, philosophie et théologie. Ils apportent non seulement une expertise variée, mais aussi des jugements contrastés sur lesquels, et dans quelle mesure, des récits évolutifs différents expliquent la moralité. Ils examinent également les implications de ces explications pour un éventail de traditions morales religieuses et non religieuses. Le livre examine d’abord la compréhension scientifique de la moralité. Les chapitres de Joan Silk et Christopher Boehm demandent ce que la primatologie et l’anthropologie nous disent des origines morales. Daniel Batson et Stephen Pinker fournissent des récits contrastés sur la façon dont l’évolution façonne la psychologie morale, et Jeffrey Schloss évalue une gamme de propositions biologiques pour la moralité et l’altruisme. En ce qui concerne les questions philosophiques, Martha Nussbaum soutient que la reconnaissance de notre nature animale ne menace pas la moralité. Stephen Pope et Timothy Jackson explorent comment les récits darwiniens de bonté morale enrichissent et exigent des compréhensions en dehors des sciences. Hilary Putnam et Susan Neiman demandent si Darwin est vraiment utile pour nous aider à comprendre ce qu’est la moralité et comment elle fonctionne. Le livre est un effort équilibré pour évaluer les mérites scientifiques et la signification philosophique des perspectives darwiniennes émergentes sur la moralité.
"Human Devolution: A Vedic Alternative to Darwin’s Theory written", Michael A. Cremo, 2003
Fondant sa réponse sur la science moderne et les grandes traditions de sagesse du monde, y compris la philosophie védique de l’Inde ancienne, Cremo propose qu’avant de poser la question, « D’où viennent les êtres humains? » nous devrions d’abord nous demander ce qu’est un être humain. Pendant une grande partie du XXe siècle, la plupart des scientifiques ont supposé qu’un être humain est simplement une combinaison d’éléments physiques ordinaires. Dans Human Devolution, Cremo dit qu’il est plus raisonnable de supposer qu’un être humain est une combinaison de trois substances distinctes : la matière, l’esprit et la conscience (ou l’esprit). Il montre comment des preuves scientifiques solides pour un élément mental subtil et un soi conscient qui peut exister en dehors du corps ont été systématiquement éliminées de la science traditionnelle par un processus de « knowledge filtration » ....
"Darwin Comes to Town: How the Urban Jungle Drives Evolution", Menno Schilthuizen (2018)
Du biologiste évolutionniste Menno Schilthuizen, un livre qui vous fera voir vous-même et le monde qui vous entoure d’une manière entièrement nouvelle. Pendant longtemps, les biologistes ont pensé que l’évolution était un processus nécessairement lent, trop incrémental pour être observé dans une vie. À Darwin Comes to Town, le biologiste évolutionniste Menno Schilthuizen montre que l’évolution peut en fait se produire extrêmement rapidement, et dans les endroits les plus étranges : le cœur de la ville. Menno Schilthuizen est l’un des nombreux « écologistes urbains » étudier comment nos environnements artificiels accélèrent l’évolution des animaux et des plantes qui nous entourent. Les villes sont des environnements extrêmes et, dans un monde où il faut s’adapter ou mourir, la faune qui partage ces espaces avec nous est forcée d’adopter de nouvelles façons fascinantes de survivre, et souvent de prospérer. Les corbeaux Carrion de la ville japonaise de Sendai ont appris à se servir de la circulation pour casser des noix. À Vienne, les araignées s’adaptent pour construire leurs toiles près des lampadaires qui attirent les papillons, tandis que dans certaines villes, les papillons développent une résistance à l’attrait des ampoules. – Certains lézards de la ville portoricains ont des pieds qui s’accrochent mieux aux surfaces comme le béton. Les merles d’Europe chantent à un ton plus élevé que leurs cousins ruraux, pour être entendus au-dessus du vacarme de la circulation, tandis que de nombreux pigeons ont évité de voyager « à vol d’oiseau » en faveur de suivre des routes artificielles. Des exemples éclatants pour partager une vision étonnante de l’évolution urbaine dans laquelle les humains et la faune coexistent dans une harmonie unique. Il révèle que l’évolution peut se produire beaucoup plus rapidement que Darwin ne l’imaginait, tout en donnant une lueur d’espoir que notre course vers la surpopulation ne pourrait pas emporter le reste de la nature avec nous.
"Finding Darwin’s God: A Scientist’s Search for Common Ground Between God and Evolution", Kenneth R. Miller (1999)
Question : Qui nous a créés ? Réponse #1 : Dieu nous a créés. Réponse #2 : L’évolution nous a créés. Qu’est-ce que c’est ? Quelle est la vraie réponse à la question séculaire de savoir d’où nous venons? Est-il même possible de le savoir avec certitude? Dans « Finding Darwin’s God », Kenneth R. Miller propose une résolution surprenante au débat sur l’évolutionnisme et le créationnisme. Professeur éminent de biologie à l’Université Brown, Miller soutient que le monde réel de la science est beaucoup plus intéressant que le courant scientifique dominant ou ses critiques créationnistes ont supposé. Il commence par démolir systématiquement les affirmations des critiques les plus virulentes de l’évolution, montrant que les grandes idées de Darwin continuent d’être valables, même dans les mondes raréfiés de la biochimie et de la biologie moléculaire. Comme il le dit, l’évolution « est la vraie chose, et nous aussi ». Cela signifie-t-il que l’évolution invalide toutes les visions du monde qui dépendent du spirituel? Exige-t-elle l’agnosticisme logique comme prix de la cohérence scientifique? Et exclut-elle rigoureusement la croyance en Dieu? Sa réponse, dans chaque cas, est un non retentissant. Non, comme il le soutient, parce que l’évolution est « mauvaise ». Loin de là. La raison, comme le montre Miller, est que l’évolution est « juste ». Dans ce livre animé et au rythme effréné, Miller propose une analyse réfléchie et de pointe des questions clés qui semblent diviser la science et la religion. Comme le montre son récit, les difficultés que l’évolution présente pour les religions occidentales sont plus apparentes que réelles. Bien comprise, l’évolution ajoute de la profondeur et du sens non seulement à une vision strictement scientifique du monde, mais aussi à une vision spirituelle. La résolution par Miller des questions qui semblent diviser Dieu de l’évolution servira de guide à quiconque s’intéresse aux questions classiques de la signification ultime et des origines humaines.