Eudora Welty (1909-2001), ""Death of a Traveling Salesman" (1936), "A Curtain of Green" (1941, L'Homme pétrifié), "The Golden Apples" (1949)," Delta Wedding" (1946), "The Ponder Heart" (1954), "Where Is the Voice Coming From ?" (1963), "The Demonstrators" (1966), "Losing Battles" (1970), "The Optimist’s Daughter", "The Eye of the Story" (1978), "One Writer’s Beginnings" (1984) - ...
Last update: 12/12/2017
C'est avec la publication en 1980 du recueil de ses nouvelles ("The Collected Stories of Eudora Welty") puis plus tard avec ses Mémoires "A Writer's Beginning" (1984), que Eudora Welty est devenue la grande dame de la littérature du Sud des Etats-Unis : elle le devint en libérant le Sud du poids de la culpabilité et des clichés et faisant de la "nouvelle" un extraordinaire monde d'expérimentation. Elle naquit au début du XXe siècle, à Jackson, dans le Mississippi, et découvrit très tôt, dans une famille cultivée où le racisme n'avait pas cours, le goût de l'aventure intellectuelle et la force du langage qui fonde les rapports humains (le sentiment de n'être là que parce qu'on le dit et que d'autres personnes le disent aussi), et au sein de ces rapports, « l'ambiguïté qui est un fait de la vie ». Dans l'écriture comme dans la vie, il faut apprendre à regarder une "chose de tous les côtés", l'infinie diversité des générations et des sensibilités, avec un style richement évocateur et souvent teinté d'humour. Elle publia son premier recueil, "A Curtain of Green" (1941), à 32 ans. Ses récits ne sont pas des histoires au sens classique du terme, ce qui lui permettra, écrira-t-elle, « de se concentrer sur les gens sans subir d'influences indues, d'écrire une histoire qui montrait la vie qui se déroulait à sa propre petite échelle ». Cependant, sous la surface des événements, ou plutôt l'absence d'événements, c'est une histoire très différente qui est racontée, celle de « nombreuses petites vies vécues en privé » : des personnes vivant seules, menant des vies d'une solitude extraordinaire, et même mystérieuses. « Plus différents et plus éloignés les uns des autres que les étoiles, toute communauté qu'ils partagent est partielle, tout ordre ou cérémonie qu'ils accomplissent semble fugace, provisoire. C'est comme si, malgré la chaleur de la famille et de la compagnie, ils habitaient ce que le narrateur appelle à un moment donné « une forêt sans nom »...
Eudora Welty (1909-2001)
Nouvelliste et romancière américaine née à Jackson (Mississippi), Eudora Welty y a vécu toute sa vie - au moins depuis 1931, après ses études à l'université du Wisconsin et à
Columbia (New York). Sa première nouvelle, "Mort d'un commis voyageur", parut dans "Manuscript" en 1936; en 1941, une autre nouvelle intitulée "Sentier battu" la fit reconnaître et elle publia dans la foulée son premier recueil, "L'Homme pétrifié". En 1942, elle publie un court roman féerique, "Le Forban de mon cœur" (The Robber Bridegroom) et, en 1943, un second recueil de nouvelles, "Le Chapeau violet" (The Wide Net). En 1946, elle revient au roman avec "Mariage au delta" (Delta Wedding), mais c'est en tant que nouvelliste à la réputation bien établie, surtout dans le Sud, qu'elle atteint à une sorte de perfection, comme le prouve son troisième recueil, "Les Pommes d'or" (1949), et "La Fiancée de l'lnnisfallen" (The Bride of the lnnisfallen, 1954). Cependant, la même année, elle publie un nouveau bref roman sous forme de monologue et sur le mode comique, "Le Cœur méditatif" (The Ponder Heart).
Les quinze années qui suivent sont relativement silencieuses (à part un livre pour enfants il quelques essais critiques), puis, en 1970, elle donne l'impressionnant et vibrant roman intitulé "Batailles perdues" (Losing Battles]). Comme tout le reste de son œuvre située dans le Mississipi, ce livre, qui étudie avec beaucoup de lucidité et non moins de subtilité l'état d'une famille réunie pour le quatre-vingt-dixième anniversaire de la grand-mère, a incontestablement ajouté une dimension nationale à la stature de son auteur, souvent jusqu'alors considérée comme une merveilleuse miniaturiste mais dans le genre régionaliste. "La Fille de l'optimiste" (The Optimist's Daughter, 1972], qui lui valut le prix Pulitzer en 1973, se situe exactement à mi-chemin de ces deux genres.
Eudora Welty a réuni ses essais et compte-rendus critiques sous le titre "L'Oeil de la nouvelle" (The Eye of the Story. Selected Essays and Reviews, 1977). Elle y reprend la Préface d'un recueil de photos intitulé "Un temps, un lieu" (One Time, one Place : A Snapshot Album, 1970) : Eudora Welty fut en effet aussi, à l'époque de la Dépression, une excellente photographe. Ses "Nouvelles complètes" (Collected Stories) ont été recueillies en 1981. En 1984, "Les Débuts d'un écrivain" (One Writers Beginnings), constituera un essai autobiographique en trois courts chapitres tirés de conférences et intitulés respectivement "Ecouter", "Apprendre à voir", "Trouver une voix" ...
"A Curtain of Green" (1941, L'Homme pétrifié)
Dans son introduction désormais célèbre à cette première collection par un jeune écrivain alors inconnu du Mississippi nommé Eudora Welty, Katherine Anne Porter écrivit "il y a même dans la plus petite histoire un sentiment de puissance en réserve qui me fait croire fermement que, splendide début qu’il est, ce n’est que le début» ("there is even in the smallest story a sense of power in reserve which makes me believe firmly that, splendid beginning that it is, it is only the beginning"). Le jugement de Porter était bien sûr prophétique ...
Dans son premier recueil de nouvelles (17), publié en 1941, Eudora Welty choisit le Sud où elle est née comme toile de fond, on pourrait presque dire comme protagoniste. La nature du Sud, avec ses fleuves lents, sa chaleur, ses plantes, joue un rôle essentiel et Welty a ainsi pu passer pour un écrivain d'atmosphère sudiste. Tout en posant le rythme alangui, la température écrasante, le foisonnement des plantes ou l'aridité des champs, Welty fait surgir et parler des personnages variés, paysans, notables de petite ville, mères de famille, ils sont jeunes ou vieux, noirs ou blancs. La diversité des tons utilisés par Welty pour raconter leur vie ou un épisode clef de celle-ci est grande, la touche d'humour ou d'ironie toujours présente et va jusqu`au comique, (par exemple dans le monologue de "Pourquoi j`habite au bureau de poste"), ou au satirique (une mentalité provinciale mesquine est esquissée dans "L'Homme pétrifié"), mais c`est au fond une tristesse grise ou noire qui colore toutes les nouvelles.
Celles-ci s'organisent autour de préoccupations semblables : le sentiment douloureux d'un écart entre le protagoniste et le monde qui l'entoure. L'agression que représente le monde est souvent figurée comme étant de nature sexuelle. Dans "Un souvenir", une très jeune fille observe sur la plage des baigneurs répugnants et tente de concilier cette vision d`une chair dégradée et son pur amour pour un camarade d'école. Le timide protagoniste de "Des fleurs pour Marjorie" tue sa femme enceinte. Dans "La mort d'un voyageur de commerce" (la première nouvelle qu'ait publiée Welty), un homme meurt seul en pleine cambrousse, après avoir trouvé refuge dans une cabane dont une très symbolique occupante est une femme enceinte occupée à nettoyer une vieille lampe à pétrole. La mort, comme la sexualité, apparaît donc aussi très souvent à l'arrière-plan de tous les mouvements fugitifs de l'âme. Indirectement, mais de manière constante, ce que Welty suggère c'est la douleur de se sentir séparé. Ce sentiment. qui va de l'ulcération au désespoir, est présent obliquement parce qu'il est voilé par le lyrisme. des métaphores multiples. une préciosité grande, parce que les symboles, les ellipses, les euphémismes, les silences garantissent, dans les meilleures nouvelles en tout cas, une élégante ambiguïté. (Trad. Flammarion. 1986).
"A Curtain of Green" - Mrs. Larkin est une femme vivant seule dans une maison entourée d’un grand jardin luxuriant. Depuis la mort tragique de son mari dans un accident, elle s’est isolée de tout et a trouvé refuge dans le soin obsessionnel de son jardin. La nature est devenue son seul lien avec le monde extérieur, un espace débordant de vie, presque sauvage. Elle y travaille sans relâche, se protégeant derrière un "rideau de verdure" qui la sépare du reste de la communauté et symbolise son retrait psychologique. Mais bien qu'elle évite tout contact humain, elle interagit brièvement avec un ouvrier noir qui l’aide dans le jardin, alternant gratitude et accès de colère. Lorsqu’un orage menace de détruire son jardin, Mrs. Larkin sera rapidement submergée par des émotions conflictuelles. Elle se tient immobile sous la pluie, au milieu de ses plantes, comme si elle cherchait une sorte de catharsis ou de communion avec la nature. Un moment de tension où elle semble être au bord de l’effondrement ou d’une révélation, la fin reste non explicite ...
"Lily Daw and the Three Ladies" - Lily Daw, une jeune femme avec un léger handicap mental, mais vive et joyeuse, et "trois dames" - Mrs. Watts, Mrs. Carson, et Aimee Slocum – des femmes influentes de la petite communauté où elle vit. Ces "dames" se considèrent comme responsables de son bien-être et prennent des décisions en son nom. L’histoire commence lorsque Lily annonce qu’elle a reçu une proposition de mariage d’un employé itinérant d’un spectacle ambulant. Cela provoque une crise chez les trois dames, qui estiment que cet homme est une menace pour Lily et que son mariage pourrait être une erreur. Elles décident que la meilleure solution pour garantir sa sécurité est de l’envoyer dans une institution pour les personnes atteintes de troubles mentaux. Mais cependant Lily est ravie de l’idée de se marier et insiste sur le fait qu’elle aime cet homme. Face à ces "dames" qui l'écoutent tout de même, Lily entend faire prévaloir son choix, la fin nous laisse à ce sujet dans l'ambiguïté ...
"A Piece of News"- Du besoin de valorisation. Ruby Fisher, une femme au foyer vivant dans une région rurale du Sud, est enfermée dans une vie monotone avec son mari, Clyde. Elle passe ses journées seule, peu sollicitée et insatisfaite. Elle découvre un article de journal qui affirme qu’une femme nommée "Mrs. Ruby Fisher" a été abattue par son mari, et bien que l’article ne la concerne pas réellement, elle s’identifie immédiatement à la victime mentionnée. L'article va déclencher chez elle une série de fantasmes : elle imagine notamment ce que sa mort signifierait pour Clyde et comment il réagirait. Elle se plaît à s’imaginer comme le centre d’attention, suscitant la sympathie des autres. La nouvelle se terminera sans que rien n'est véritablement changé dans sa situation si ce n'est qu'ont été révélés frustrations émotionnelles et désirs refoulés qui hantaient sa vie...
"Petrified Man" - Une nouvelle presque entièrement composée de dialogues, de l’égoïsme et de la petitesse des interactions humaines. Dans un salon de beauté, Leota, une coiffeuse bavarde et curieuse, discute avec une cliente régulière, Mrs. Fletcher, d’une variété de sujets, souvent futiles ou scandaleux. Leota raconte ainsi à Mrs. Fletcher des détails sur ses autres clientes et des nouvelles locales. La conversation tourne autour de la grossesse de Mrs. Fletcher, qu’elle essaie de cacher, et d’un couple étrange qui vit dans la pension où Leota réside. Elle en vient à évoquer un spectacle itinérant, où un homme prétendument "pétrifié" est exposé. Une cliente, Mrs. Pike, identifie l'homme comme étant un criminel recherché pour des viols en série, et revendique la récompense offerte pour sa capture. Cet événement provoque des jalousies et des tensions entre Leota et Mrs. Pike. L’histoire se termine sans véritable résolution, laissant le lecteur contempler l’absurdité et la superficialité des préoccupations des personnages...
"The Key" - Comment le plus petit événement peut perturber le quotidien et révéler des émotions bien enfouies. Dans une gare bondée, deux personnages principaux, Albert et Ellie Morgan, un couple âgé assis ensemble en silence, chacun enfermé dans une incompréhension mutuelle. Mais voici qu'Albert trouve une clé, la montre la clé à Ellie, espérant engager une conversation ou provoquer une réaction : Ellie répond avec indifférence. La clé va devenir le catalyseur d’émotions refoulées, obsédant Albert tandis qu’Ellie, en reste distante, accentuant leur opposition. La clé finalement rendue ou laissée de côté, le couple revient à son silence habituel ...
"Keela, the Outcast Indian Maiden" - Un homme revient dans une petite ville où il avait exploité un homme handicapé comme un spectacle de foire, autrefois connu sous le nom de "Keela", un homme noir utilisé et abusé pour attirer la curiosité morbide du public : souffrant à la fois physiquement et psychologiquement, il était forcé de mordre les spectateurs pour ajouter à l’illusion de sa "sauvagerie". Steve, ancien employé du spectacle, est rongé par la culpabilité, bien qu’il tente de minimiser sa responsabilité, tandis que Max, jadis spectateur, montre une indifférence qui révèle une acceptation tacite de la cruauté et de l’injustice sociale. Tous deux croiseront à nouveau leur victime, désormais libre mais visiblement marqué par son passé : chacun retournera à son existence sans la moindre apparente évolution ... Comment des individus vulnérables peuvent être réduits à des objets de divertissement, dépouillés de leur dignité et de leur humanité, sans que rien ne semble en mesure de s'y opposer..
"Why I Live at the P.O." - Une narratrice à forte personnalité et préjugés, qui reste anonyme mais est simplement appelée "Sister", explique pourquoi elle a décidé de quitter la maison familiale pour vivre au bureau de poste local, où elle travaille. Elle accuse sa famille, - en particulier sa sœur Stella-Rondo, qui a quitté son mari, Mr. Whitaker, emmenant avec elle une petite fille qu’elle prétend avoir adoptée, Shirley-T -, d’être responsable de son départ. Shirley-T serait en réalité la fille biologique de Stella-Rondo. La tension monte rapidement entre Sister et les autres membres de la famille. Stella-Rondo manipule leur père, leur mère, et leur oncle Rondo pour se retourner contre Sister. Chaque conflit est exacerbé par les rivalités et les malentendus familiaux, et des désaccords sur des sujets les plus insignifiants. Sister en vient à décider qu’elle ne peut plus tolérer les injustices de sa famille, emporte ses affaires et s’installe au bureau de poste, où elle trouve un refuge symbolique et physique. Sister conclut son récit en affirmant qu’elle est satisfaite de son choix, une satisfaction qui reste ambigüe ...
"The Hitch-Hikers" - Comment la violence peut émerger d'interactions apparemment banales - Tom Harris, un chauffeur de camion, voyage à travers le Sud américain, un homme simple et pragmatique, habitué aux longues routes solitaires. Sur sa route, il prend à bord deux auto-stoppeurs, un homme nommé Sobby et un jeune homme plus discret, Sanford. Sobby est bavard, imprévisible, et légèrement menaçant, tandis que Sanford est réservé et mal à l’aise. Progressivement s'installe une atmosphère de malaise, de Sobby à l'encontre de Sanford, tout en essayant de tester les limites de Tom. Une altercation éclate lorsque Sobby vole un couteau dans une station-service. Lors d’un arrêt dans un hôtel, Sobby, devenu de plus en plus agressif, attaque Tom avec le couteau volé. Sanford intervient pour sauver Tom : les auto-stoppeurs disparaissent rapidement l'abandonnant à un sentiment que le récit laisse ouvert ..
"A Memory" - La narratrice, une jeune fille, se remémore un moment particulier de son enfance, alors qu'elle se trouvait seule, plongée dans ses pensées, dans un monde encore marqué par l'innocence de son jeune âge : l'incursion d'un groupe de personnes aux comportements qui lui semblent grossiers et d'une sensualité confuse vient envahir ce moment de paix introspective, elle éprouve un mélange de honte et de fascination face à ce qu’elle voit. Un souvenir marquant parce qu’il symbolise la rupture entre la pureté de son imaginaire d'enfant et la réalité émotionnellement abrupte du monde adulte, un thème récurrent dans l’œuvre de Welty...
"Clytie" - Clytie Farr est une vieille fille qui vit dans la maison familiale délabrée avec son père malade, son frère Herbert, et sa sœur Octavia, tous trois reclus et déconnectés du reste de la société. Clytie passe ses journées à accomplir des tâches domestiques monotones et à faire de rares excursions en ville, des sorties qui sont autant de tentatives de briser son isolement, mais qui se soldent toujours par des échecs. Clytie en vient à développer une véritable obsession pour les visages des gens qu’elle croise, cherchant désespérément un visage ami, une quête quasi pathologique dont l'apogée est ce moment où elle croise son reflet dans l’eau d’un baril de pluie et voit son propre visage déformé : une vision qu'elle ne peut surmonter, et dans un acte désespéré, plonge sa tête dans le baril et se noie...
"Old Mr. Marblehall" - Un comptable respecté d’une petite ville du Sud, un homme perçu par ses collègues et ses voisins comme ordonné, prévisible, et moralement irréprochable, entretient en fait une double vie : il a une maîtresse et se rend régulièrement dans une autre ville pour la voir, et maintient soigneusement une séparation entre ces deux mondes. Mr. Marblehall tire une certaine fierté de sa capacité à jongler avec les apparences, mais à mesure que l’histoire progresse, commence à éprouver une tension intérieure entre ses deux identités. Ces deux mondes vont bientôt s’effondrer l’un sur l’autre, son double jeu est découvert, et il perd la maîtrise de son illusion si soigneusement construite ...
"Flowers for Marjorie" - Un couple marié, Howard et Marjorie, vivant dans des conditions particulièrement modestes, probablement dans une ville du Sud des États-Unis. Howard est au chômage et désespéré, accablé par l’incapacité de subvenir aux besoins de sa femme et par sa propre impuissance. Marjorie, bien que dévouée et aimante, devient involontairement une cible de ce ressentiment. Et le drame survient. Poussé par une colère et une frustration grandissantes, Howard tue Marjorie dans un moment de rage mais point culminant d’une tension sous-jacente bien plus ancienne. Ayant commis son crime, Howard sombre dans une forme de déni ou de détachement psychologique, continue sa journée comme si rien ne s’était passé, errant dans la ville, achetant des fleurs, qu’il destine à Marjorie : à mesure qu’Howard progresse dans sa journée, des pensées et des images fragmentées de Marjorie et de leur vie commune viennent le hanter, la culpabilité et le chagrin semble commencer à percer son déni, l'histoire nous laisse sans que nous sachions ce qui va advenir de lui ...
"A Visit of Charity" - Analyse ironique du sentiment de bienveillance et d'une certaine inconscience de la jeunesse. Marian, une jeune fille membre d’un groupe caritatif, rend visite à deux résidentes d'une maison de retraite, froide et impersonnelle, pour obtenir des points ou une récompense. Marian est prise en charge par une infirmière peu engageante jusqu’à une petite chambre où résident ces deux femmes, âgées, la pièce décrite comme sombre, étouffante, le comportement des deux femmes contradictoire, l’une est bavarde, agressive et critique, l'autre, silencieuse et mystérieusement triste. Marian est rapidement mal à l’aise et ne sait pas comment réagir : à vrai dire, elle semble plus préoccupée par l’idée d’obtenir des points que par l’expérience humaine qu'elle doit traverser. Marian finira par quitter précipitamment la maison de retraite, sans avoir véritablement accompli un acte de charité ou d’empathie, mais récupère une pomme, symbole ironique de la "récompense" de sa visite...
"Death of a Traveling Salesman", la première nouvelle publiée par Eudora Welty en 1936 dans Manuscript - R.J. Bowman, un vendeur itinérant qui traverse la campagne du Mississippi après avoir été malade pendant plusieurs jours, se perd sur un chemin de campagne isolé et trouve refuge dans la maison modeste d’un couple, Mr. et Mrs. Beecher. Les Beechers vivent dans une simplicité presque primitive, mais ils partagent une complicité silencieuse qui intrigue Bowman, une relation qu'il n'a jamais connu, celui d'un amour simple et authentique. Il en vient à réfléchir à sa propre vie marquée par la solitude et se rend compte que ses années de travail itinérant l’ont privé de tout véritable lien humain ou sentiment d’appartenance. Bowman est soudain pris d’un malaise grave, probablement une crise cardiaque. Alors qu’il lutte pour comprendre ce qui lui arrive, il prend conscience de toute l’ironie de sa situation : seul et loin de tout, il va mourir dans une maison remplie de la chaleur humaine qui lui a manqué toute sa vie ...
"Powerhouse" - Récit d’un concert que donne un certain Powerhouse, pianiste et chanteur noir excentrique, et talentueux, et son orchestre dans une salle de danse d’une petite ville du Sud. Le public est principalement blanc, l’atmosphère marquée par une distance raciale implicite. Son jeu est intense, imprévisible, mêlant habilement musique, humour, et narration, marquée l' histoire énigmatique d'un télégramme qui lui annonce la mort de sa femme, Gypsy : narration et musique de Powerhouse vont transcender les barrières raciales et sociales, mais cette communion du public et de l'artiste, si intense soit-elle, est éphémère, du moins ce que le récit nous laisse penser à l'issu du concert ...
"A Worn Path", une des nouvelles les plus célèbres d’Eudora Welty, publiée pour la première fois en 1941 dans The Atlantic Monthly - Phoenix Jackson, une femme noire âgée et pauvre, vêtue de façon modeste mais avec dignité, entreprend un voyage ardu à pied vers la ville à travers des champs, des forêts, et des collines, un chemin truffé d'obstacles naturels, dont la rencontre avec un chasseur blanc, qui semble pouvoir la décourager mais sa détermination ne faiblit pas. Au contraire, lorsqu’il laisse tomber une pièce, Phoenix la ramasse discrètement. Une fois parvenue à la clinique, Phoenix demande des médicaments pour son petit-fils, qui souffre de la gorge, et l'on se doute qu'il ne s'agit pas de sa première fois. Les médicaments en main et des friandises achetées avec l’argent qu’elle a ramassé, Phoenix reprend le chemin du retour. L’histoire nous révèle ainsi une héroïne silencieuse, dont la détermination et l’amour transcendent les barrières du temps, du lieu, et du contexte culturel....
"The Wide Net and Other Stories" (1943)
Ce recueil est une célébration des particularités culturelles, sociales, et géographiques du Sud, tout en explorant des thèmes universels qui transcendent ce cadre régional. Dans "The Wide Net", le protagoniste William Wallace part à la recherche de sa femme Hazel, qui a apparemment disparu, une quête qui devient celle de son propre rôle dans leur relation et une plongée dans la nature, qui agit comme une force de réconciliation. Dans "First Love", l’histoire raconte un amour innocent et naissant, tout en s'interrogeant sur la manière dont les souvenirs et les émotions en viennent à façonner notre compréhension des relations. Dans "A Still Moment", trois personnages – un prêcheur, un naturaliste, et un meurtrier – se rencontrent, révélant des perspectives profondément différentes sur la vie, la foi, et la nature. Dans "Asphodel", la nature devient un lieu d’exploration poétique et mythologique, rattachant le passé et le présent, et donnant un sens plus profond aux expériences humaines. Dans "Livvie", une jeune femme mariée se trouve tiraillée entre ses responsabilités et son désir de liberté ...
"The Golden Apples" (1949)
"I doubt that a better book about ‘the South’-one that more completely gets the feel of the particular texture of Southern life and its special tone and pattern-has ever been written" (New Yorker). - Recueil de sept nouvelles de l'écrivain Eudora Welty qui forment un tout, chacune s'attachant à présenter la vie ou un épisode de la vie d'un des habitants de la petite ville imaginaire de Morgana, Mississippi, les MacLains, les Starks, les Moodys et autres familles, un peu dans la tradition de Winesburg-en-Ohio de Sherwood Anderson.
L'originalité c'est qu`ici l'intention n`est pas directement réaliste. Le désir de Welty est plutôt de créer une mythologie, ou tout du moins de donner une épaisseur folklorique à l`univers d'une bourgade de province. Le projet est donc à la fois ambitieux et ironique. Welty nous présente King MacLain et Snowdie MacLain, leurs fils jumeaux Ran et Eugene. les Rayneys et nous conte leurs aventures, les rattachant à des épisodes de la mythologie grecque ou à des récits folkloriques irlandais et américains. La première histoire du recueil parle de rencontres amoureuses et de la naissance de jumeaux, la dernière - qui se passe des années plus tard - parle de la mort et l'enterrement d`une vieille dame tandis que sa fille évoque une image centrale à sa vie et aux préoccupations d'Eudora Welty. Son professeur de piano avait accroché à son mur un tableau représentant Persée brandissant la tête de Méduse : un héros, une victime...
"Shower of Gold" - L'imaginaire collectif - Le narrateur, King MacLain, est un voisin de Snowdie MacLain, tout deux habitants de Morgana, petite ville fictive du Mississippi : c'est une femme solitaire et discrète, perçue comme quelque peu marginale dans une communauté dans laquelle personnages et événements sont souvent interprétés à travers le prisme des rumeurs et des imaginaires collectifs. Snowdie MacLain est mariée à King MacLain, - un autre personnage, distinct du narrateur -, un homme charismatique mais infidèle. Mais ce qui alimente bien des rumeurs c'est le fait que Snowdie semble accepter avec résignation, mais dignité, le comportement de son mari, des spéculations qui vont augmentant avec la naissance, "quasi miraculeuse", de compte tenu de sa situation, de jumeaux ...
"June Recital" - Un récit structuré via les souvenirs entrecroisés de plusieurs personnages, autour d'un événement marquant pour l'ensemble d'une petite communauté : un récital de piano donné par les élèves d'une certaine Miss Eckhart dans une église de la ville, un grand moment censé être de célébration artistique et qui se transforme en un véritable désastre. Les enfants jouent mal, le public est mal à l’aise, et Miss Eckhart elle-même dévastée par l’échec apparent de ses efforts. D'autant que celle-ci est décrite comme étrangère et isolée, à la fois par son origine et par sa dévotion à la musique, une passion que la communauté ne comprend ni ne valorise...
"Sir Rabbit" - Quelque part dans le Sud des Etats-Unis, "Sir Rabbit", un homme d'apparence inoffensive mais grand et subtil manipulateur, se trouve impliqué dans une situation qu'il va résoudre en évitant toute confrontation directe et en jouant sur la perception qu’ont les autres de lui ...
"Moon Lake" - Dans un camp de vacances pour jeunes filles organisé par l’église, près d’un lac connu sous le nom de Moon Lake, un lieu, à la fois idyllique et mystérieux, des tensions et des rivalités alimentées par des personnalités très différentes, Nina Carmichael, une jeune fille de bonne famille, introvertie et sensible, Jinny Love Stark, plus superficielle mais plus extravertie, Miss Moody, une adulte responsable du camp, pragmatique et autoritaire, et deux visages masculins, Loch Morrison et Exum, et qui interviennent dans l'évènement central du récit : lors d’une baignade dans le lac, Loch semble se noyer, les filles, sous la supervision de Miss Moody, assistent avec horreur à cet événement, et c'est Exum, figure mythique ou symbolique qui va le sauver. L’accident et son dénouement vont pousser les filles, en particulier Nina, à réfléchir sur des concepts comme la vie, la mort, et leur propre vulnérabilité. Moon Lake est devenu un lieu de confrontation avec des émotions profondes et complexes qu’elles ne comprennent pas encore pleinement...
"The Whole World Knows" - Emma, une femme au passé jugé ambigu, revient dans sa ville natale après un mariage tumultueux. Sa relation avec son ex-mari, Julian, est marquée par une trahison qui l'a profondément marquée et qui fut amplifiée par les rumeurs et les jugements de la communauté, transformant un drame intime en un spectacle livré au public. La nouvelle s’ouvre sur son arrivée, avec une tension palpable entre son besoin de se reconstruire et le poids des regards extérieurs ...
"Music from Spain" - A New York, Eugene MacLain, un homme originaire du Sud, un personnage introspectif, hanté par des souvenirs personnels, notamment des tensions familiales et des pertes passées, marche seul dans les rues, cherchant à échapper à lui-même dans l’anonymat et la foule. En chemin, il entend une musique vibrante et passionnée provenant d’un musicien de rue espagnol jouant de la guitare : cette musique va déclencher en lui bien des émotions, le ramenant à des souvenirs profondément enfouis. Un pur instant d'évasion mais qui n'est, par nature, qu'éphémère ...
"The Wanderers" - Point culminant du recueil, au détour duquel Welty tisse une réflexion sur le passage du temps et le lien entre les individus et leurs origines, un bilan de la vie à Morgana. Virgie Rainey, figure récurrente du recueil, revient à Morgana après avoir passé du temps loin de la ville : elle est maintenant adulte, son retour coïncide avec la mort de sa mère, vieille et malade, elle reste cette figure rebelle en décalage avec les attentes de sa communauté. Autre personnage, Mattie Will Sojourner, mariée sans passion à Law Sojourner, un homme qui lui assure stabilité : elle interrogera un temps sa vie de couple mais sans véritablement la remettre fondamentalement en question. Cassie Morrison, une amie d’enfance de Virgie, sert de médiatrice entre le lecteur et l’univers de Morgana : moins rebelle que Virgie, mais partage son esprit introspectif, elle observe les dynamiques sociales qui agitent la communauté et réfléchit à la manière dont les vies des habitants sont influencées par leurs choix, leurs origines, et leurs relations. Virgie, après avoir enterré sa mère, se tourne vers l’avenir, nostalgique certes mais déterminée, prête à continuer son chemin comme une "vagabonde" (wanderer) ...
"The Ponder Heart" (1954)
C'est l’un des romans jugés les plus légers et humoristiques d’Eudora Welty, une œuvre qui raconte, à travers une narration décalée, tant les événements entourant la riche famille Ponder dans une petite ville fictive du Mississippi, Clay, que les mésaventures d’un personnage excentrique, Uncle Daniel Ponder. Edna Earle Ponder, la nièce de ce dernier, assume le rôle de narratrice, elle est attachée aux traditions mais est pragmatique, son ton ironique et bavard.
Uncle Daniel, l’oncle d’Edna Earle, est donc un personnage innocent et excentrique. D’une gentillesse presque naïve, il est connu pour donner sans compter et distribuer généreusement les richesses familiales à quiconque en a besoin. Sa générosité inquiète profondément Edna Earle et son père, une réelle menace pour la fortune familiale. Voici que Uncle Daniel décide d’épouser Bonnie Dee Peacock, une jeune femme de dix-sept ans d’origine modeste, mais un mariage qui va déclencher une série d’événements dramatiques marqué par sa mystérieuse disparition mystérieuse. Daniel est accusé de sa mort, et un procès farfelu s’ensuit, devenant le point culminant de l’histoire : un procès qui est à la fois un drame et une farce, illustrant les absurdités de la justice et les préjugés tenaces du Sud des Etats-Unis. Finalement, Daniel sera acquitté, mais la véritable cause de la mort de Bonnie Dee restera ambiguë, ajoutant une note de mystère au récit. Les tensions entre tradition, excentricité, et pression communautaire continueront de planer encore longtemps ...
"Bride of the Innisfallen : And Other Stories" (1955)
Un recueil de sept nouvelles d’Eudora Welty qui explore des thèmes variés tels que l’identité, l’isolement, la mémoire, et les relations humaines. Contrairement à ses récits profondément ancrés dans le Sud américain, certaines histoires de ce recueil élargissent le champ géographique et thématique, notamment avec un cadre européen dans la nouvelle qui donne son titre au recueil...
"The Bride of the Innisfallen" - L’histoire commence dans une gare où un train s’apprête à partir pour Cork, en Irlande. Les passagers montent à bord, chacun avec son propre bagage émotionnel et ses particularités, un véritable microcosme de la diversité humaine. La narratrice, une femme américaine voyageant seule, observe attentivement les autres passagers. Son regard mélancolique et curieux donne le ton introspectif de la nouvelle. Chacun des personnages incarne un aspect de la vie en Irlande ou de la condition humaine : un groupe de religieuses, symbolisant la foi et la tradition; une jeune femme qui semble être une mariée, vêtue de manière élégante mais discrète ("the bride"); des travailleurs, des familles, et d’autres voyageurs anonymes. La narratrice, observatrice et participante, réfléchissant sur son propre statut d’étrangère dans un pays qui n’est pas le sien, se sent à la fois attirée et détachée des gens qui l’entourent. La mariée de l’Innisfallen, bien qu’elle ne soit pas au centre de l’action, représente un idéal ou une figure mythique, un symbole de renouveau et de transition. Son silence et son mystère ajoutent une dimension poétique à l’histoire. L’île d’Innisfallen elle-même, située sur un lac près de Killarney, est évoquée comme un lieu de beauté et de légende, renforçant le caractère presque mystique du voyage. Le train va traverse des paysages irlandais, décrits avec une poésie évocatrice, les interactions entre les passagers restent, elles, superficielles mais chargées de sous-entendus émotionnels...
"No Place for You, My Love" - Lors d’un dîner à La Nouvelle-Orléans, un homme et une femme, tous deux étrangers dans la ville, se rencontrent, elle est mariée et originaire du Nord, tandis que l’homme est également un visiteur, bien qu’il ait des liens avec le Sud. Un singulier attrait les poussent à quitter ensemble la ville, en voiture, pour une journée, et gagner le delta du Mississippi, une région sauvage, vaste et mystérieuse. Pendant leur voyage, ils échangent peu de mots mais partagent relation implicite, renforcée par le paysage environnant, le delta, ses marécages, ses rivières, et sa végétation luxuriante, symbolisant à la fois le désir, le mystère, et l’inconnu. Ils évoquent leurs origines, leurs vies respectives, et leurs réflexions personnelles, mais évitent des sujets trop intimes ou explicites. Les silences sont entre eux tout aussi significatifs que leurs paroles. À la fin de la journée, les deux personnages retournent à La Nouvelle-Orléans. Ils se séparent sans promesse ni résolution, laissant leur rencontre comme un moment suspendu dans le temps, à la fois significatif et insignifiant dans leurs vies respectives ...
"The Burning" - Un récit qui se déroule pendant les derniers jours de la guerre de Sécession, à un moment où les troupes de l’Union traversent le Sud, brûlant et pillant les grandes plantations. La protagoniste est une femme sudiste, noble et fière, vivant seule dans son domaine familial isolé après que les hommes de sa famille aient rejoint les forces confédérées ou aient disparu. Lorsque des soldats de l’Union envahissent sa propriété, elle se voit confronter à leur officier commandant, confrontation et rencontre humaine marquée par une étrange ambiguïté. Les soldats incendient sa maison et détruisent les possessions familiales : elle assiste à la scène avec un mélange de douleur et de résignation, consciente qu’elle ne peut rien faire pour arrêter cette destruction. L’histoire se garde bien de présenter une opposition simpliste entre bons et méchants. Elle restera seule dans un paysage désolé, à reconstruire ...
"Ladies in Spring" - L’histoire est racontée par une narratrice adulte qui se remémore un printemps de son enfance dans une petite ville du Sud des Etats-Unis : deux figures féminines excentriques vont jouer un rôle central dans ses souvenirs, deux femmes qui ,bien que très différentes, représentent des aspects contrastés de la féminité et de la vie cette région : Mrs. Henchbrough, sévère et pragmatique, attachée aux conventions sociales et au maintien des apparences, un pilier de la communauté obsédé par le respect des normes; à l'opposé, Miss Arabelle, perçue par la communauté comme extravagante, voire scandaleuse. La nouvelle tourne autour d’un incident humoristique impliquant les deux femmes et leurs interactions avec la narratrice. Cet événement sert de catalyseur pour les réflexions de l’enfant sur la manière dont les adultes vivent leurs contradictions et leurs désirs...
"Circe" - Une réinterprétation moderne et originale du mythe grec de Circé racontée du point de vue de la magicienne elle-même : une femme puissante et vulnérable souvent réduite à un archétype dans les récits classiques, et qui ici devient une figure d’émancipation et de réflexion sur la condition féminine. L’un des éléments centraux du récit, hautement symbolique, est la capacité de la magicienne à transformer les hommes en animaux, comme elle l’a fait avec les compagnons d’Ulysse, les changeant en porcs. Elle considère cette magie non comme un acte de cruauté, mais comme une réponse à la brutalité et à la voracité des hommes qui envahissent son espace...
"Kin" - Welty a toujours excellé à décrire les subtilités des relations au sein d'une famille, révélant les non-dits, les malentendus, les émotions complexes et souvent contradictoires qui les sous-tendent. Et loin de glorifier ces relations familiales, "Kin" nous révèlent toutes leurs ambiguïtés, tant les obligations tacites, les frustrations, que les moments de véritable compréhension. La nouvelle débute avec une réunion familiale organisée chez un des membres aînés de la famille. La narratrice, une observatrice empathique mais critique, agit ici comme un guide pour le lecteur. Les conversations vont tourner le plus souvent autour des ancêtres et des possessions héritées, comme des objets précieux ou des terres. A cela s'ajoute, en contexte, une maison remplie d’objets anciens qui symbolise à la fois la richesse de l’histoire familiale et l’impossibilité de s’en détacher entièrement. Un moment clé survient lorsque l’un des personnages plus jeunes propose de vendre une partie de la propriété familiale pour des raisons pratiques, ce qui choque les aînés attachés à la symbolique de ces terres. Et l’un des axes principaux de l’histoire est justement la manière dont les différentes générations perçoivent leur rôle au sein de la famille et leur rapport à l’héritage commun ...
"Going to Naples" - Un groupe de touristes américains voyagent ensemble en Italie, et notamment à Naples. Chacun d'eux incarne un stéréotype propre à la culture américaine de l’époque (une mère autoritaire qui surprotège sa fille, un couple marié aux frustrations contenues, des individus pétri d'une convivialité qui n'est qu'apparente). Ils vont suivre un itinéraire typique, visitant des lieux emblématiques et participant à des activités touristiques le plus souvent standardisées : mais Naples est dépeinte comme une ville à la fois chaotique, belle et authentique, en contraste avec les attentes soigneusement calibrées des touristes américains. Fête locale et procession religieuse côtoient des moments surprise d’interaction avec les habitants ou d'incidents inattendus, autant de situations révélatrices de tensions et de rivalités subtiles, qui mêlent humour, ironie, et introspection. Comme toujours, un fin ambigüe, que reste-t-il pour ces touristes d'une expérience comme celle-ci, une fois regagné la terre ferme de leurs vies routinières?
La nouvelle "Where Is the Voice Coming From?" d'Eudora Welty a été initialement publiée dans The New Yorker le 6 juillet 1963, peu après l’assassinat de Medgar Evers, militant des droits civiques, survenu à Jackson, Mississippi, le 12 juin. Elle sera intégrée au recueil "The Collected Stories of Eudora Welty", publié en 1980, un recueil qui compte des textes provenant de ses cinq recueils précédents, ainsi que "The Demonstrators" (1966) qui porte sur les tensions raciales et sociales du Sud alors exacerbées par les manifestations pour les droits civiques : le Doc Pritchard, un médecin blanc en charge de soigner un membre de la communauté noire poignardé par un homme blanc, permet à Welty d'expose les préjugés subtils et explicites, et parfois contradictoires, qui marquent les relations entre deux communautés dans une société en pleine transition ...
"Where Is the Voice Coming From?"
une évocation, à chaud, audacieuse et brutale, du climat social tendu du Sud ségrégationniste des années 1960.
Et une critique incisive des mentalités racistes de l'époque. Pour tenter de saisir les mécanismes de haine et les motivations sous-jacentes à de telles expressions de violence raciste, - et forçant le lecteur à affronter directement la haine et la violence, sans détour ni embellissement -, Welty nous raconte la nouvelle à la première personne : un narrateur anonyme, un homme blanc du Sud dont le racisme se nourrit de peur, d’ignorance, et de pauvreté. Son extrême ressentiment à l'égard de ceux qu’il perçoit comme ses "rivaux", noirs, se nourrit du sentiment qu'il est lui-même victime d'un système social injuste. Il confesse avec une froideur glaçante avoir assassiné un leader noir local des droits civiques, qu’il nomme Roland Summers, parce qu’il le considère comme une menace insoutenable vis-à-vis de sa propre existence, et tente de justifier son acte en se posant comme un défenseur ou protecteur de la "suprématie blanche" : luttant pour que des Blancs comme lui ne perdent pas leur peu de privilèges qu'ils possèdent encore. Il racontera comment il a attendu Summers devant sa maison, armé d'un fusil, l’a abattu, puis a fui la scène ...
"I was on top of the world myself. For once. I stepped to the edge of his light there, where he's laying flat. I says, "Roland? There was one way left, for me to be ahead of you and stay ahead of you, by Dad, and I just taken it. Now I'm alive and you ain't. We ain't never now, never going to be equals and you know why? One of us is dead...."
J'étais moi-même au sommet du monde. Pour une fois. J'ai marché jusqu'au bord de sa lumière, là où il est allongé. J'ai dit : « Roland ? Il ne me restait qu'un moyen de te devancer et de rester devant toi, par papa, et je l'ai pris. Maintenant, je suis en vie et toi non. Nous ne sommes plus jamais égaux, nous ne le serons jamais, et tu sais pourquoi ? L'un de nous est mort. »
Le récit, glacial et sans émotion, montre l’influence d’une culture raciste profondément ancrée dans le Sud. Après le meurtre, le narrateur rentre chez lui, satisfait mais anxieux, et s’assied pour écouter les informations à la radio, curieux de l’impact de son acte. S'il ne montre aucun remords explicite, son monologue trahit une peur sous-jacente d’être découvert et se demande si les autorités, les voisins, ou même les membres de la communauté noire pourraient le dénoncer. Ses pensées deviennent de plus en plus chaotiques, illustrant une personnalité rongée par la haine et l’insécurité, mais incapable de véritablement comprendre les conséquences de son acte. Le titre même de l’histoire, "Where Is the Voice Coming From?", suggère l'intensité d'une haine irrationnelle et destructrice que rien ne semble pouvoir véritablement expliqué : d'où provient cette voix haineuse dans la tête de l’assassin ? Est-ce une voix intérieure, un produit de son environnement social, ou un mélange des deux ? ..
"The Optimist’s Daughter" (1972)
Ce roman, lauréat du Prix Pulitzer de la fiction en 1973, se veut une méditation sur la manière dont le deuil nous oblige à revisiter nos souvenirs et à réévaluer nos relations avec les êtres aimés disparus. L’histoire commence à La Nouvelle-Orléans, où Laurel Hand, une architecte vivant à Chicago, revient pour être aux côtés de son père, le juge Clint McKelva, qui subit une opération de la cornée. À l’hôpital, elle observe l’état de santé fragile de son père et dialogue avec sa seconde épouse, Fay McKelva, une femme beaucoup plus jeune, superficielle, et égocentrique. Le père ne se rétablit pas après l’opération et finit par mourir, laissant Laurel et Fay face aux conséquences de ce drame intime. Laurel accompagne alors Fay dans la petite ville de Mount Salus, Mississippi, là où le juge était une figure respectée. Les funérailles révèlent les tensions entre Fay, perçue comme une étrangère par la communauté, et les amis et voisins qui étaient proches du juge, la mémoire collective. Mais plus encore, Laurel doit non seulement gérer son propre deuil, mais aussi la présence oppressante de Fay, qui semble incapable de comprendre ou de respecter ses émotions et ses souvenirs tant elles diffèrent l'une de l'autre. Après les funérailles, Laurel reste quelques jours dans la maison de son enfance, revisitant des souvenirs de sa mère décédée et de sa propre jeunesse : elle y découvre aussi des lettres, des objets, et des souvenirs qui lui permettent de mieux comprendre ses parents, leurs forces, leurs vulnérabilités, et leur amour. La confrontation entre Fay et Laurel se soldera au bénéfice de la première, du moins en terme de patrimoine, - Laurel acceptera de laisser Fay partir avec ce qui lui reste du patrimoine familial -, celle-ci préférant préserver ses souvenirs intacts plutôt que de se battre pour quelques biens matériels...
"One Writer’s Beginnings" (1983)
"One Writer’s Beginnings" est une œuvre autobiographique exceptionnelle, basée sur une série de conférences qu’elle a données à l’université de Harvard en 1983, et qui révèle comment Eudora Welty a transformé les expériences ordinaires de sa vie en une oeuvre littéraire singulière. ses influences, ses souvenirs, son enfance, sa famille, et son environnement. Comment souvenirs et réflexions, viennent nourrir une imagination créative ...
L’autobiographie est structurée en trois parties principales, chacune se concentrant sur un aspect particulier de la formation de Welty en tant qu’écrivaine...
1) "Listening" (Écouter) :
L’impact de son enfance à Jackson, Mississippi, où elle a grandi dans une famille aimante et intellectuelle. Ses parents, très différents dans leurs personnalités, ont joué un rôle clé dans son développement : Sa mère, Chestina, était passionnée par la lecture et partageait cet amour des livres avec sa fille, instillant en elle une fascination pour les histoires. Son père, Christian, était un homme pratique et méthodique, qui a transmis à Welty un sens de la curiosité et de l’observation. Welty évoque l’importance des voix qu’elle a entendues en grandissant : celles des membres de sa famille, des voisins, et des figures locales. Ces voix ont alimenté son sens aigu du dialogue et son intérêt pour les dynamiques humaines. Elle insiste sur la manière dont l’écoute active – des conversations, des récits oraux, et même des silences – a formé la base de sa compréhension des histoires.
2) "Learning to See" (Apprendre à voir)
Comment son environnement, à la fois familial et géographique, a nourri son imagination visuelle : le paysage du Sud des Etats-Unis, et ses villes chargées d’histoire furent source constante d’inspiration pour son écriture. Elle décrit des moments spécifiques de son enfance où elle a appris à observer les gens, les lieux, et les détails avec une acuité particulière, et insiste sur l’importance de voir au-delà de l’évidence, de percevoir les émotions et les significations cachées derrière les apparences. La photographie, un autre de ses talents, est évoquée comme une discipline qui l’a aidée à affiner son regard, en capturant des moments éphémères et en reconstituant les histoires implicites des scènes qu’elle observait (cf. "Eudora Welty: Photographs" (1989), qui rassemble dans un volume environ 250 photographies représentatives des quelques milliers qu’elle a prises dans les années 1930, 1940 et 1950) ...
3) "Finding a Voice" (Trouver une voix)
Comment a-t-elle a trouvé sa propre voix en tant qu’écrivaine. Elle reconnaît que cette quête a été influencée par ses lectures, ses expériences personnelles, et sa compréhension de la culture du Sud. Elle revient sur ses premières tentatives d’écriture, souvent maladroites, mais toujours marquées par un désir sincère de capturer la vérité émotionnelle et humaine. Elle nous montre aussi combien les souvenirs, fussent-ils les plus simples, peuvent devenir de grandes sources d’inspiration riches. L’importance de la famille, sa relation avec ses parents et leur influence sur sa sensibilité artistique sont au cœur de son récit.
Pour Welty, le processus de créativité peut être décrit comme une accumulation de détails, d'attention aux petites choses – un mot, un geste, une scène ordinaire. Enfin, elle rappelle que son amour des livres et son aptitude à écouter les histoires des autres ont nourri sa passion pour raconter elle-même des histoires...
"Eudora Welty: Photographs" (1989)
Un livre qui rassemble en un volume environ 250 photographies représentatives des quelques milliers qu’Eudora Welty a prises dans les années 1930, 1940 et 1950, du Mississippi rural à la Nouvelle-Orléans, en passant par Charleston, New York et Yaddo, puis l’Irlande, l’Angleterre et le continent. C'est dans le cadre de la Works Progress Administration (W.P.A.), mise en place par le New Deal de Roosevelt, qu'elle découvrit les coins les plus reculés du Mississippi et entreprit de photographier Noirs et petits Blancs avec la passion de percer les secrets de l'âme sans céder à la mise en scène idéologique ...
"What did the pictures teach you about writing fiction? Did they teach you anything?
Nothing consciously, I guess, or specifically. I was writing all this time, but I think perhaps a kindred impulse made me attempt two unrelated things – an inquiring nature, and a wish to respond to what I saw, and to what I felt about things, by something I produced or did.
Did they teach you anything about perception or anything about technique?
I’m sure they taught me about the practice of perception and about technique, but the lessons were not in the abstract. Some perception of the world and some habit of observation shaded into the other, just because in both cases, writing and photography, you were trying to portray what you saw, and truthfully. Portray life, living people, as you saw them. And a camera could catch that fleeting moment, which is what a short story, in allits depth, tries to do. If it’s sensitive enough, it catches the transient moment..."
Day’s end / Jackson / 1930 - Window shopping / Grenada / 1930 - Jackson / 1930 - ...
"On Writing" (2002)
Une méditation sur l’écriture et un guide pratique pour les écrivains. Eudora Welty y partage sa vision de l’art littéraire, privilégiant l’observation, l’empathie, et l’attention aux détails. Des écrivains en herbe se sont tournés vers elle pour s'interroger sur ce qui fait qu’une histoire est bonne, qu’un roman a du succès, qu’un écrivain est un artiste. On Writing présente les réponses dans sept chapitres concis discutant des sujets les plus importants pour l’art narratif, et que chaque auteur de fiction devrait connaître, tels que le lieu, la voix, la mémoire et le langage. Mais ce qui est encore plus important, c’est ce que Welty appelle le « mystère » de l’écriture de fiction : la façon dont l’écrivain assemble le langage et les idées pour créer une œuvre d’art. À l’origine une partie de son œuvre plus vaste "The Eye of the Story", mais jamais publié dans un volume autonome ...
"Looking at Short Stories" - L'écriture de la nouvelle, un défi artistique unique, une forme d’art à part entière, avec ses propres règles. - Welty fera allusion à plusieurs de ses propres nouvelles pour illustrer ses points de vue, "A Worn Path" (l’atmosphère et les détails du voyage de Phoenix Jackson jouent un rôle essentiel dans la révélation du caractère et des thèmes), "Why I Live at the P.O." (l’unité de ton et l’humour noir donnent une cohérence et une puissance à l’histoire). - Réussir à écrire de bonnes nouvelles nécessite une lecture attentive de celles des autres, ainsi les auteurs qu’elle admire particulièrement : Anton Tchekhov, Katherine Mansfield, et James Joyce, des maîtres du genre à étudier.
Pour Welty, une bonne nouvelle repose sur une unité de ton, d’atmosphère, et de propos. Tous les éléments – personnages, décor, intrigue – doivent fonctionner ensemble pour servir un but commun, un seul événement ou une seule émotion, sans dispersion. - Les personnages sont le cœur de toute nouvelle réussie : même dans un espace limité, les personnages doivent être suffisamment complexes pour capter l’attention du lecteur. - Chaque détail dans une nouvelle compte, et Welty souligne l’importance de choisir des éléments significatifs qui enrichissent le récit. Elle considère les détails comme des "fenêtres" à travers lesquelles le lecteur peut voir les vérités plus larges d’une histoire. - L’un des défis du format court, selon Welty, est de trouver le bon équilibre entre ce qui est dit et ce qui est laissé à l’imagination du lecteur. Une bonne nouvelle suggère souvent plus qu’elle n’explique, laissant le lecteur participer à l’interprétation. - les nouvelles ne nécessitent pas toujours un point culminant dramatique ou une résolution claire. L’essence d’une nouvelle réside souvent dans les moments de révélation subtile, les aperçus émotionnels ou psychologiques qui laissent une impression durable...
"Writing and Analyzing a Story" - Eudora Welty évoque ici les deux aspects essentiels du processus narratif, la création d’une histoire et son analyse. Ce Comment les écrivains construisent leurs récits et quels sont les outils nécessaires pour comprendre et interpréter une œuvre littéraire, que l’on soit écrivain ou lecteur. En reliant écriture et analyse, Welty met en lumière l’importance de comprendre comment les histoires fonctionnent à tous les niveaux. Welty utilisera des exemples tirés de ses propres œuvres, comme "A Worn Path" et "The Wide Net", pour montrer comment elle a intégré ces principes dans sa pratique. -
Welty commence par détailler les éléments fondamentaux nécessaires pour écrire une histoire. Elle met l’accent sur les interactions entre ces éléments que sont le point de départ (une histoire commence souvent par un moment de curiosité, une image frappante, une émotion forte, ou une phrase qui émerge spontanément), les personnages (Que veulent mes personnages ? Pourquoi agissent-ils ainsi ?), le cadre (un bon cadre peut agir comme un "personnage silencieux", renforçant l’atmosphère et les thèmes de l’histoire), la structure et le rythme (le rythme narratif est comme une mélodie, il doit captiver, retenir l’attention, et créer une progression fluide), le langage (à chaque mot une finalité).
L’analyse d’une histoire - Une fois une histoire écrite, l’analyse devient une étape cruciale pour comprendre ce qui fonctionne (ou non) dans le texte. Tout écrivain doit être à la fois créatif et critique. L’écrivain doit être capable de prendre du recul pour voir l’histoire dans son ensemble, en évaluant la cohérence de ses thèmes, de sa structure, et de ses personnages. Les questions clés à poser : Quels sont les thèmes principaux de l’histoire ? Sont-ils exprimés de manière claire et cohérente ? Les personnages sont-ils authentiques et consistent-ils dans leurs actions et dialogues ? Le rythme et la structure de l’histoire permettent-ils une lecture fluide et engageante ? Le langage et le style servent-ils l’atmosphère et les émotions de l’histoire ?
Welty examine également la manière dont un lecteur peut aborder une histoire. Des lecteurs qui peuvent se demander comment et pourquoi une histoire les affecte émotionnellement.
Enfin, Welty montre que l’écriture et l’analyse ne sont pas des processus séparés, mais interdépendants. Un écrivain doit être capable d’analyser son propre travail pour améliorer ses compétences narratives, tandis qu’un lecteur attentif peut développer une compréhension plus profonde de la littérature en se posant les mêmes questions que celles qu’un écrivain se pose pendant la création...
"Place in Fiction" - Le lieu n'est pas seulement un décor ou un cadre, mais il est intrinsèquement lié aux personnages, à l’intrigue, et aux thèmes d’une œuvre. Welty nous explique comment le lieu façonne non seulement l’histoire, mais aussi l’identité de ses habitants et leur perception du monde. Un lieu peut fonctionner comme un symbole ou un miroir des conflits internes des personnages. Par exemple, un lieu isolé peut représenter la solitude ou l’introspection, tandis qu’une ville animée peut refléter des tensions sociales ou personnelles. L'accent est mis sur l’importance de l’observation précise pour capturer l’essence d’un lieu, les détails sensoriels – sons, couleurs, textures, odeurs – sont essentiels pour rendre un lieu crédible et immersif...
"Words into Fiction" - La fiction est faite de mots soigneusement choisis et arrangés. Chaque mot doit être porteur de sens et doit contribuer à l’atmosphère, aux personnages, et à l’intrigue. L’écriture d'une fiction transforme les mots en expériences tangibles et émotionnelles pour le lecteur, et cette transformation passe par l’imagination de l’écrivain et sa capacité à combiner observation et créativité. Pour écrire des mots qui résonnent, l’écrivain doit d’abord être un auditeur attentif. Welty insiste sur l’importance d’écouter les voix réelles, les rythmes du langage parlé, et les nuances de la communication humaine...
"Must the Novelist Crisade?" - Les romanciers n'ont pas à "croisader" pour une cause, cette attitude peut limiter la liberté artistique et détourner l’écrivain de son rôle principal qui est de scruter la condition humaine. - Si la fiction est un moyen de révéler la vérité humaine à travers des histoires, des personnages et des émotions, elle n'est pas outil de propagande ou manifeste politique. Certes, tout auteur est influencé par ses convictions morales, sociales, et politiques, mais cet engagement personnel ne doit pas nécessairement se traduire par un militantisme explicite dans ses œuvres : de l’importance de laisser les histoires se développer organiquement, plutôt que de forcer un message ou une idéologie dans le récit. En représentant des expériences humaines authentiques, la fiction peut révéler des injustices, des dilemmes moraux, et des vérités complexes de manière plus subtile et plus durable qu’un plaidoyer explicite...
"Is Phoenix Jackson Grandson Really Dead?" - De la tension entre engagement moral et intégrité artistique, bien que les écrivains puissent être influencés par leurs convictions, leur priorité doit être de créer des œuvres sincères et authentiques. Eudora Welty répond ici à une question fréquemment posée par les lecteurs de sa célèbre nouvelle "A Worn Path". Cet essai se concentre sur l’ambiguïté du récit et sur l’importance de la perception du lecteur face à une œuvre littéraire. Welty utilise cette interrogation comme point de départ pour réfléchir sur la nature des histoires qu’elle écrit et sur la relation entre l’écrivain, le texte, et le lecteur. La littérature n'a pas à fournir toutes les réponses, mais inciter à la réflexion et à l’interprétation...
"Some Notes on Time in Fiction" - Le temps n’est pas un simple cadre chronologique, mais un élément fluide et vivant qui agit comme une force narrative essentielle. Toute fiction est ancrée dans le temps, que ce soit de manière explicite (par un ordre chronologique clair) ou implicite (par des allusions, des souvenirs, ou des sauts temporels). Le temps est cette force invisible qui façonne l’histoire, les personnages, et leur monde. Les flashbacks (pour révéler le passé des personnages), les ellipses (pour sauter des événements non essentiels), le ralentissement ou l’accélération du rythme (pour intensifier ou réduire l’impact émotionnel) permettent de créer une structure narrative dynamique et immersive...