Jacqueline Susann (1918–1974), "Valley of the Dolls" (1966) - Jackie Collins (1937-2015), "The World Is Full of Married" Men" (1968) - ...
Last update: 12/12/2023
"Valley of the Dolls was sexy, shocking, and unrelenting in its revelations of the dangers facing women who dare to chase their most glamorous dreams. It shot to the top of the bestseller lists in 1966 and made Jacqueline Susann a superstar. It remains the quintessential big, blockbuster .." - A une époque où les normes sociales évoluaient rapidement, "Valley of the Dolls" (1966), malgré sa faible valeur littéraire et le rejet unanime des critiques médiatiques, fut l'un des romans les plus vendus de tous les temps. Il est devenu "Le roman culte" de l'autrice américaine Jacqueline Susann.
Best-seller emblématique de son époque, c'est un miroir de l’Amérique des années 1940-1960, des années 1960 marquées par une fascination croissante pour les stars de cinéma, les chanteurs, et le glamour hollywoodien. Une opportunité que Susann saura parfaitement saisir : "La Vallée des poupées" se veut représentation scandaleuse et sensationnaliste des dessous de l'industrie du divertissement et des excès associés à la célébrité, ambition, gloire, amour, addiction et autodestruction, autodestruction de la femme sous l'emprise sexuel du mâle dominant ...
Aujourd'hui, incarne-t-il encore un plaisir coupable qui mériterait une lecture attentive, ce fut sans doute la raison de son succès, le public ne demandait pas autre chose. Et si, au-delà du scandale apparent, le roman met bien en évidence comment les structures patriarcales rendent les femmes vulnérables, les poussant parfois vers l’autodestruction, il reste un témoignage, mais sans prise de conscience véritable, le public ne demande toujours pas autre chose ...
Précurseur du roman populaire féministe, "The World Is Full of Married Men" (1968), écrit par Jackie Collins, est l’un des premiers romans à présenter des femmes comme actrices de leur propre désir et ambition, un thème que Collins explorera davantage dans ses œuvres ultérieures ...
Jacqueline Susann s’est inspirée de sa propre expérience dans le showbiz et malgré son très faible apport littéraire, elle a marqué à sa façon l'histoire du roman américain, "She doesn’t write, she types", a dit Gore Vidal. La "Vallée des poupées" n'a certes pas été bien accueillie lors de sa publication, Publishers Weekly l'a décrit comme étant « poorly written», le magazine Time a titré qu'il s'agissait du « Dirty Book of the Month». Néanmoins, il a frappé l'imagination du public et, en l'espace de neuf semaines, il s'est hissé à la première place de la liste des best-sellers du New York Times, où il est resté pendant vingt-huit semaines. À ce jour, il s'est vendu à plus de 30 millions d'exemplaires, "Valley of the Dolls was the best-selling work of fiction history ..."
L’histoire suit trois femmes – Anne, Jennifer et Neely – sur plusieurs décennies, depuis leur arrivée à New York dans les années 1940 jusqu’à leurs vies mouvementées dans le monde du théâtre, du cinéma et de la télévision. Ces femmes cherchent à atteindre leurs rêves dans une industrie glamour mais impitoyable. La tyrannie de l’apparence et de la soumission féminine sont omniprésentes, poussant les personnages féminins à des comportements autodestructeurs, l’amour est ici par nature toxique et les relations abusives, malgré leur succès apparent, ces jeunes femmes restent prisonnières de relations déséquilibrées où elles cherchent comme une incontournable nécessité pour survivre la validation masculine. Elles ne tarderont pas à succomber aux pressions destructrices du succès et à l’abus de médicaments (appelés "dolls", somnifères, tranquillisants, amphétamine) ...
« La vallée des poupées » est un “roman à clef”, ses personnages centraux sont tous basés sur des artistes que Jacqueline Susann a bien connus. Susann avait décidé très tôt qu'elle voulait devenir actrice et a connu un succès modéré à Broadway. Entre deux emplois, elle écrivait des pièces de théâtre avec une autre actrice, Beatrice Cole. Elle a également connu un certain succès à la télévision, animant même sa propre émission, Jacqueline Susann's Open Door, qui aidait les citoyens à trouver du travail. À la fin des années 1950, elle est le visage public d'une entreprise de dentelle et de broderie, où elle apprend à commercialiser des produits, mais sent que sa carrière d'actrice s'essouffle. Son fils unique est atteint d'autisme aigu et doit être placé en institution : Susann se tourne vers les pilules pour surmonter sa détresse. Elle s'est également tournée vers l'écriture, et "Valley of the Dolls" fut son premier roman ...
Anne Welles, Neely O’Hara, et Jennifer North - "Love is companionship, having friends in common, the same interests. Sex is the connotation you're placing on love, and let me tell you, young lady, that if and when it does exist, it dies very quickly after marriage." Anne, September, 1945 - Le personnage central, Anne Welles, est inspiré de son amie Bea Cole. Jeune femme ambitieuse mais en quête désespérée d'amour, elle va succomber sous l’emprise d’hommes qui la manipulent affectivement. "Look, I'm a virgin, but I do know that sex and love are two different things for a man." Anne, October, 1945...
Neely O'Hara, l'amie d'Anne, dont la carrière l'emmène à Hollywood, est proche de Judy Garland (une histoire bien connue : MGM prescrira à cette ernière des amphétamines pour maintenir son énergie, ce qui la conduira à une dépendance qui marquera toute sa vie). Neely est décrite comme une étoile montante, poussée à travailler sans relâche et à se conformer aux attentes masculines : sa plongée dans la toxicomanie illustre les effets destructeurs de ces pressions.
Jennifer North, une autre amie d'Anne qui connaît quelque succès dans des films d'art et d'essai européens, est une combinaison de Joyce Mathews (épouse du comédien Milton Berle), de Carole Landis (une star hollywoodienne avec laquelle Susann s'est produite à Broadway) et de Susann elle-même. Belle mais instable, Jennifer n'est qu'apparence physique pour les hommes de sa vie, son destin sera dramatique, elle choisira le suicide face à la maladie (un cancer du sein, un drame emblématique). Le chapitre marquant de Valley of Dolls est, pour de nombreux critiques et lecteurs, celui qui évoque la chute de Neely O’Hara, seule dans sa chambre d’hôtel, confrontée à son reflet dans le miroir, des bouteilles vides et des pilules éparpillées autour d’elle ...
L'image de Marilyn Monroe surgit ici, ne s'épuisera-t-elle pas à s’affirmer en tant que véritable actrice pour être en fin de compte continuellement exploitée par les hommes de son entourage, que ce soit dans sa vie privée ou professionnelle (sa dépendance aux médicaments et son suicide tragique en 1962 illustrent cette dramatique emprise du mâle détenteur de pouvoir, en toute impunité : c'est le cycle infernal bien connu de l'exploitation d'une vulnérabilité qui, une fois consommée, plonge dans l'autodestruction, la femme qui s'effondre est rapidement abandonnée..).
Autres exemples, Dorothy Dandridge, une actrice afro-américaine qui eut à lutter non seulement contre le racisme systémique mais aussi contre les normes patriarcales de l’industrie, a connu une fin tragique, liée à des difficultés financières et personnelles exacerbées par des relations abusives. Barbara Payton, actrice prometteuse des années 1950, est un autre exemple d’une femme détruite par les attentes patriarcales et la pression de l’industrie ....
Enfin, Tony Polar, le petit ami de Jennifer, un chanteur populaire limité et au sexe débridé, aurait été inspiré de Dean Martin, un habitué du Rat Pack, et Helen Lawson, vieillissante et malheureuse, qui donne à Neely sa première chance à contrecœur, est un reflet de la légende de Broadway Ethel Merman, « There's No Business Like Show Business » (Il n'y a pas de business comme le show-business). ..
On peut ici parler de stratégie marketing révolutionnaire. Susann a réussi à faire une promotion d'une redoutable efficacité de son "oeuvre" lors de séances de dédicaces et en tant qu'invitée à des émissions de chat. Son mari, l'attaché de presse Irving Mansfield, qui l'avait courtisée en obtenant pour elle des mentions dans les pages mondaines des journaux et magazines new-yorkais, organisait ses campagnes de presse. Ensemble, le couple peut être considéré comme l'inventeur de la tournée de promotion moderne (the modern book tour. Susann avait l'instinct d'une artiste pour le marketing, acquis lorsqu'elle faisait la promotion de la dentelle à la télévision, et elle est reconnue comme le premier auteur à avoir connu le succès en tant que marque à part entière, quelles que soient les critiques médiocres à l'encontre de son livre. "Un nouveau livre, c'est comme une nouvelle marque de détergent, observe-t-elle. Il faut le faire savoir au public. Qu'y a-t-il de mal à cela ?» (‘A new book is like a new brand of detergent? You have to let the public know about it. What’s wrong with that?’) ...
Des auteures ont tenté de témoigner, chacune avec leur style et leur approche spécifique, surtout dans les années 1960 et 1970, de ce cycle d'existence rendu infernal tant par les normes patriarcales en vigueur et que par les pressions sociales : et notamment dans des industries livrées à tous les excès comme celles du spectacle ou des milieux bourgeois....
Dans "The Love Machine" (1969), Jacqueline Susann dénonce les intrigues et les luttes dans le monde de la télévision : Robin Stone est ici l'homme type, séduisant mais sans scrupules, utilisant les femmes pour son ascension sociale et professionnelle. Dans "Hollywood Wives" (1983), Jackie Collins, auteure populaire qui, comme Susann, a marqué la littérature commerciale avec ses récits provocateurs, déroule une véritable saga sur les vies fastueuses et tumultueuses des épouses des puissants hommes d’Hollywood, dévoilant les scandales, les relations extraconjugales, et les manipulations dans un cadre de luxe et de dépravation. "Postcards from the Edge" (1987) est récit semi-autobiographique basé sur la vie de Carrie Fisher (connue pour son rôle dans Star Wars), qui met en lumière la dépendance aux drogues, les relations dysfonctionnelles, et la célébrité à travers l’histoire de Suzanne Vale, une actrice en convalescence après une overdose. "Play It As It Lays" (1970) est un roman sombre et introspectif de Joan Didion dans lequel Maria Wyeth est une actrice en pleine dépression et un sentiment de vide dans un environnement impitoyable ...
"Valley of the Dolls" (1966) a été immédiatement adapté en un film devenu rapidement culte en 1967, réalisé par Mark Robson, et en une mini-série télévisée en 1981. Ces adaptations ont renforcé son statut dans la culture populaire. Barbara Parkins, Patty Duke et Sharon Tate incarnent les personnages de Anne Welles, Neely O’Hara, Jennifer North dont on suit les vies entrecroisées. Le film a parfaitement fonctionné au box-office, attirant le public grâce à la notoriété du roman et aux thèmes controversés qu'il aborde, malgré sa simplification extrême et sa dramatisation caricaturale (la descente aux enfers de Neely O’Hara) des thématiques soulevées par le roman. Restent son esthétique kitsch des années 1960, avec ses décors glamour, ses costumes tape-à-l'œil et une bande-son composée par André Previn et Dory Previn, incluant des chansons mémorables, notamment le thème principal, qui a contribué à sa popularité. Quant à Sharon Tate dans le rôle de Jennifer North, elle incarne un personnage hypersexualisé : la transgression est donc bien présente, pour le spectateur de l'époque, mais "Valley of the Dolls" reste relativement modéré par rapport aux films qui ont suivi ...
"Beyond the Valley of the Dolls" (1970), de Russ Meyer, plus psychédélique, érotique et outrancier que l’original, est aussi devenu, à sa façon, un film culte, mais pour d'autres raisons ...
"Scandalous Women: A Novel of Jackie Collins and Jacqueline Susann" (Gill Paul, 2024) imagine une rencontre et une amitié entre deux figures emblématiques de la littérature populaire du XXᵉ siècle : Jacqueline Susann, auteure de "Valley of the Dolls", et Jackie Collins, connue pour ses romans sulfureux comme "The World Is Full of Married Men" (1968). Le roman intègre également un personnage fictif, Nancy White, une jeune diplômée travaillant dans l'édition à New York, qui sert de lien entre les deux écrivaines. En mêlant faits réels et éléments fictifs, le roman sait évoquer les défis et triomphes de Susann et Collins, tout en reflétant les luttes plus larges des femmes dans une société en mutation ..
Jackie Collins (1937–2015), "The World Is Full of Married Men" (1968)
Jackie Collins était une écrivaine britannique et une figure emblématique de la littérature populaire, célèbre pour ses romans sulfureux explorant les thèmes de la célébrité, du pouvoir, du sexe et des relations dans des milieux glamours. Ses œuvres ont captivé des millions de lecteurs à travers le monde, faisant d’elle l’une des auteures les plus vendues de tous les temps (The Stud, 1969; The Bitch, 1979; Hollywood Wives, 1983; Lucky (1985). "Hollywood Wives" est devenu une mini-série télévisée très populaire dans les années 1980...
"The World Is Full of Married Men" est une œuvre révolutionnaire pour son époque, un livre qui fut interdit en Australie et critiqué par des cercles conservateurs pour son contenu sexuellement explicite et son portrait cynique des relations : un regard sans concession sur l’hypocrisie des relations hommes-femmes (l'homme marié qui cherche à préserver son image respectable tout en menant une double vie) et la sexualité féminine. Bien qu’il puisse sembler caricatural ou daté à certains, il reste un roman marquant pour son audace, sa critique sociale, et son rôle dans l’évolution de la littérature populaire féminine. Jackie Collins a posé les bases d’un genre qui continue d’influencer des écrivaines et des scénaristes aujourd’hui.
David Cooper, un homme marié dans la quarantaine, s’embarque dans une liaison avec une jeune mannequin, Claudia Parker, tout en restant affectivement et financièrement lié à sa femme, Linda. Linda découvre la trahison et décide de reprendre le contrôle de sa vie, une résilience qui contraste avec l’égoïsme et la superficialité de David. Le roman évoque également les ambitions de Claudia, qui utilise sa sexualité pour gravir les échelons dans l’industrie du divertissement, mais se heurte à bien des désillusions sur le pouvoir et la célébrité...