Family therapy (Thérapie familiale) - Virginia Satir (1916-1988), "Conjoint Family Therapy" (1964), "Peoplemaking" (1972) - Donald Winnicott (1896-1971), "Through Paediatrics to Psychoanalysis" (1958), "Playing and Reality" (Jeu et réalité, 1971) - Salvador Minuchin (1921-2017), "Families and Family Therapy" (1974) - Murray Bowen (1913-1990), "Family Therapy in Clinical Practice" (1978) - ...

Last update: 12/12/2017 


"La famille est l'usine où se fabriquent les gens", si toutes les familles ne sont pas à "problèmes", elles en rencontrent toutes, sans exception. Et c'est bien face aux membres de notre famille que nous apprenons à réagir de certaines façons, ces réactions vont nous forger à chacun un rôle, que nous jouerons plus particulièrement en situation de stress, mais ce rôle peut submerger notre vrai moi et nous accompagner dès lors tout au long de notre vie d'adulte. C'est ce que la thérapie familiale nous apprend. 

L'accent mis par Freud sur l'enfance et l'itinéraire du patient inspira fortement la psychologie comportementale et sociale, et, à la fin du XXe siècle, des psychothérapeutes comme Virginia Satir, Murray Bowen, Salvador Minuchin ou Donald Winnicott travaillèrent sur l'environnement familial. La psychologue américaine Virginia Satir est de celle qui souligna l'importance de la famille d'origine dans le développement de la personnalité, et étudia les différences entre familles dites équilibrées et familles dites dysfonctionnelles ("The family is a microcosm. By knowing how to heal the family, I know how to heal the world"  / La famille est un microcosme. En sachant comment guérir la famille, je sais comment guérir le monde). Plus particulièrement s'intéressera-t-elle aux différents rôles que les membres d'une même famille peuvent parfois s'attribuer pour compenser une éventuelle absence de dynamique saine. Elle fut sans doute la première thérapeute à souligner l'importance de l'affection et de la compassion dans le développement d'un psychisme équilibré ... 


Bien des œuvres littéraires célèbres mettent en scène des familles à problèmes et explorent des dynamiques familiales complexes, des textes souvent analysées en psychologie pour leur capacité à illustrer des troubles interpersonnels, des dysfonctionnements familiaux ou des problématiques psychiques...

 "Les Frères Karamazov" (Fiodor Dostoïevski) met en scène une famille dysfonctionnelle avec un père tyrannique et immoral et ses trois fils, chacun ayant des personnalités très différentes. Dostoïevski explore des thèmes comme la culpabilité, la haine, la rivalité fraternelle, ainsi que les conflits moraux et existentiels qui déchirent la famille. Un livre particulièrerment riche en analyses psychologiques des personnages. - "Une maison de poupée" (Henrik Ibsen), une pièce de théâtre qui explore la dynamique de genre dans une famille bourgeoise, et met en lumière la manipulation, l'oppression et l'illusion d'une vie de couple heureux. La protagoniste, Nora, est confrontée à la pression sociale et aux rôles rigides imposés par son mari, et finit par briser les normes de l'époque pour se libérer. - "Le Bruit et la Fureur" (William Faulkner) se concentre sur la famille Compson, une famille aristocratique déchue du Sud des États-Unis. Faulkner utilise des techniques narratives complexes pour montrer la dégradation de la famille à travers les points de vue de différents membres, dont l'un est autiste. Un livre qui n'hésite pas à explorer des thèmes comme la folie, l'inceste, la déchéance morale et la tragédie familiale. "La Confusion des sentiments" (Stefan Zweig) est un court roman qui se penche sur une relation compliquée entre un étudiant et son mentor, dans le contexte d'une famille peu fonctionnelle. Il aborde des thématiques psychologiques profondes telles que la dépendance affective, les secrets familiaux et la quête d'identité. "Le Dieu des Petits Riens" (Arundhati Roy) suit une famille indienne dont les relations sont marquées par la répression sociale, les traditions oppressives, et des événements traumatisants. Il explore les dynamiques complexes entre frères et sœurs, parents et enfants, et met en lumière les conséquences psychologiques de ces tensions. Dans "Les Enfants terribles", Jean Cocteau décrit une relation fusionnelle et toxique entre un frère et une sœur, Paul et Élisabeth, qui vivent dans un monde clos et fantasmé. Le livre explore les mécanismes de manipulation, de contrôle, et l’incapacité de ces jeunes à s’émanciper de leur relation destructrice. "Long Day's Journey into Night" (Eugene O'Neill) est une pièce de théâtre, largement autobiographique, qui raconte l'histoire d'une famille détruite par la dépendance et les troubles mentaux. Le père est un acteur alcoolique, la mère est accro à la morphine, et les deux fils sont perdus dans des cycles de culpabilité et de colère. L’œuvre illustre brillamment les dynamiques familiales dysfonctionnelles. - Dans "L'Amant" (Marguerite Duras), un récit autobiographique, Duras décrit une relation triangulaire complexe dans une famille pauvre et dysfonctionnelle, avec une mère dominatrice et des frères aux personnalités difficiles. Le livre explore les tensions latentes et les secrets qui minent cette famille coloniale vivant en Indochine. Enfin, pourquoi ne pas évoquer "Le père Goriot" (Honoré de Balzac), un classique de la littérature française, dans lequel Balzac nous conte l'histoire tragique d'un père, Goriot, qui se sacrifie pour ses deux filles ingrates, qui ne cessent de l'exploiter : une critique mordante des dynamiques familiales sous l'influence du matérialisme et de l'ambition....

Enfin, la célèbre phrase "Famille, je vous hais", tirée des "Nourritures terrestres" de André Gide, et publiée en 1897.  Gide y exprime son rejet des conventions sociales, dont celles liées à la famille, perçue comme une institution oppressante et aliénante pour l'individu. Une phrase souvent citée pour illustrer la révolte de l'écrivain contre les valeurs bourgeoises et la quête d'émancipation personnelle : "Familles, je vous hais ! Foyers clos ; portes refermées ; possessions jalouses du bonheur. Familles, je vous hais ! Maisons d’esclavage et prisons de la terreur. Que d’enfants vous ont pieusement tenus pour des idoles, que de fils vous ont suivis docilement dans vos sombres chemins ; des fils qui, sans un mot, sans une plainte, ont enfoui au plus profond de leur âme tous leurs désirs de grandeur et de gloire, pour rester à jamais fidèles à vos lois. Et moi, je veux être libre. Je veux fuir loin des vôtres pour courir vers le grand large, vers la vie ouverte et ses horizons infinis."...

A relire ces quelques citations puisées dans un passé plus ou moins proche, pouvons-nous peut-être mesurer qu'en ce XXIe, c'est un bien un autre monde qui se restructure ni la même "famille" ...


C'est dans "Totem and Taboo", en 1913, que Sigmund Freud a analysé la famille dans des termes singulièrement critiques. Procédant à une analyse anthropologique et psychologique de la structure familiale, en lien avec les origines de la société humaine et ses interdits, il va représenter la famille comme un terrain de conflits inconscients, un lieu aux prises à des dynamiques conflictuelles et des structures de pouvoir enracinées dans l’histoire humaine. La famille n'est plus pas simplement un espace de soutien et de soin relativement neutre, mais un lieu où se manifestent des tensions profondes entre désirs individuels et normes sociales, avec des effets psychiques durables sur les membres de la famille. Freud affina son approche en explorant des concepts tels que le totémisme, le tabou et l'œdipe, - en se basant sur des études ethnologiques de peuples "primitifs" pour éclairer la psychologie des individus modernes ...  

 

"Le totem est d'abord le représentant du père primitif et c'est à ce dernier que se rattachent ces interdictions. Ainsi, en interdisant l’inceste, le tabou du totem se trouve être la première forme de loi sociale limitant la jouissance sexuelle et les privilèges paternels au sein du groupe" - Freud avance que les familles humaines primordiales étaient organisées autour de tabous et du totem, représentant un animal sacré ou protecteur. Les interdits du totem, notamment l’interdiction de tuer l’animal totem et l’interdiction de l’inceste, sont des précurseurs des structures sociales modernes, y compris les normes qui régissent les relations familiales. Freud souligne la manière dont les règles totémiques (interdits) ont structuré la famille en imposant des règles sexuelles et morales, soulignant la tension entre les désirs individuels et les nécessités sociales.

 

"Ils tuèrent et dévorèrent leur père, mais ils ne réussirent pas à jouir des fruits de leur crime. La conscience les saisit et mit en place l’interdiction de l’inceste et la règle patriarcale, recréant ainsi dans l’ordre social ce qu'ils avaient détruit dans la violence" - Le complexe d’Œdipe et le meurtre du père : Freud critique ici la structure autoritaire de la famille, qu'il relie à cette culpabilité originaire. Pour lui, la famille moderne porte encore les traces de cette tension entre l’autorité du père et le désir de rébellion des fils, exacerbée dans le complexe d’Œdipe.

 

"La famille est le lieu où se manifestent les désirs refoulés à l’origine de la névrose, notamment par la prohibition de l’inceste. Ce tabou, qui se retrouve dans toutes les sociétés humaines, met en lumière la relation conflictuelle entre les pulsions individuelles et les besoins du groupe" - Freud traite la famille comme un lieu où les désirs sexuels (comme le désir œdipien) sont réprimés par des règles sociales (le tabou de l’inceste), engendrant des tensions psychiques et sociales. Freud analysera la prohibition de l’inceste comme une clé de voûte des sociétés humaines. Pour lui, cette interdiction, qui a commencé dans le cadre totémique, structure encore les dynamiques familiales modernes, et devient source de névrose.

 

"Le père, en tant que figure d’autorité, est à la fois aimé et haï. Cette dualité des sentiments trouve son expression dans l’inconscient et est l’un des moteurs fondamentaux de la vie psychique et des dynamiques familiales" - Freud critique ici la famille en tant qu'institution conflictuelle, où les membres sont pris dans des sentiments ambivalents, souvent sources de souffrance. Freud parle ainsi de "l'ambivalence des sentiments" dans les relations familiales, particulièrement l’amour et la haine pour le père ou les figures d'autorité. Cette ambivalence est une source de conflit psychologique qui reflète la structure de la famille.


Wilhelm Reich, "The Mass Psychology of Fascism" (1933)

"The authoritarian family becomes the factory for authoritarian ideology and structures" - Wilhelm Reich, psychanalyste et théoricien marxiste, jugé radical, a critiqué la famille en tant que source d'oppression sociale et de contrôle sexuel. La famille patriarcale traditionnelle est un instrument de contrôle idéologique qui prépare les individus à accepter les structures autoritaires dans la société, y compris le fascisme. Reich a ainsi vu la répression sexuelle dans les familles comme un élément central dans la perpétuation de l'autoritarisme. 


Donald Winnicott (1896-1971)

Donald Winnicott, le plus populaire des psychanalystes britannique , est surtout connu pour ses travaux sur le développement de l’enfant, la relation mère-enfant, et le concept de "faux self". Il introduira le concept de "holding", pour décrire la manière dont la mère soutient physiquement et psychiquement l’enfant, créant un environnement de sécurité affective indispensable au développement; et celui d’objet transitionnel qui aide l’enfant à faire la transition entre la dépendance à la mère et l’autonomie, un symbole de l’adaptation à la réalité externe

Il fut fortement influencé par Sigmund Freud mais aussi par Melanie Klein, notamment dans le domaine des sentiments inconscients de la mère (biologique et adoptive) envers son enfant. 

Ses théories ont eu un impact majeur sur la psychanalyse, la psychologie du développement et la psychothérapie infantile. "C’est par l’expérience de la famille que l’enfant construit la première base de son sens de la réalité", et, dans "L’enfant et sa famille" (1957), Winnicott analysera les premières expériences familiales de l’enfant et nous représentera le rôle de la famille dans la construction de l’identité de l’enfant. 

Dans "La Haine dans le contre-transfert" (1947), écrit après avoir travaillé sur des enfants déplacés pendant la Seconde Guerre mondiale, il expliquera que, parce que des enfants issus de foyers négligents ou abusifs on peur de ne pas être aimés par leur famille adoptive, ils peuvent être conduis à agir avec haine, et qu'il faut alors surmonter le cycle de haine qui s'installe et accepter d'être aimé pour se reconstruire. Winnicott travaillera durant quarante ans au Paddington Green Children's Hospital de Londres ...

Brett Kahr, son biographe, ressuscitera dans "Tea with Winnicott " (2016) Donald Woods Winnicott et l’invitera à prendre un thé mémorable au 87 Chester Square (la résidence de Winnicott à Londres) pour discuter avec lui de sa vie et de ses quelques vingt publications, livres, chapitres, essais, critiques et lettres, avec photographies inédites et illustrations d'Alison Bechdel ...

 

"Through Paediatrics to Psychoanalysis" (1958, De la pédiatrie à la psychanalyse)

"A mother is 'good enough' if she can adapt to her infant’s needs, gradually reducing this adaptation as the child becomes capable of adjusting to external reality" ("Une mère est 'suffisamment bonne' si elle sait s’ajuster aux besoins de son bébé, diminuant progressivement cet ajustement à mesure que l’enfant devient capable de s’adapter à la réalité)". Une notion centrale dans la théorie de Winnicott : une mère n'a pas besoin d'être parfaite, mais simplement suffisamment réceptive aux besoins de l'enfant au début. Cet ajustement progressif permet à l'enfant de tolérer l'expérience de la frustration, un processus essentiel pour l’intégration du faux self et du vrai self : le "vrai self" représente l’expérience authentique et spontanée de l’enfant, tandis que le "faux self" est une adaptation aux attentes externes, développée lorsque l’environnement n’est pas suffisamment sécurisant.

 

"... La méthode que j’ai choisie est différente, peut-être parce que je désire m’exprimer en tant que pédiatre et que j’ai l’habitude de penser à l’enfant qui se développe ou, plus précisément, au nourrisson. Pour le pédiatre, il y a une continuité dans le développement de l’individu ; ce développement commence avec la conception, et se poursuit pendant les premières années de la vie ; l’état d’adulte en est l’aboutissement, l’enfant étant le père de l’homme. Le but des soins maternels n’est pas seulement d’avoir un enfant en bonne santé, mais aussi de parvenir au développement ultime, celui d’un adulte en bonne santé. Ce qui m’intéresse ici, c’est de prendre cette affirmation par l’autre bout : la santé de l’adulte s’édifie à tous les stades de la petite enfance et de l’enfance. Le pédiatre ne cesse de s’intéresser aux soins et aux apports du milieu, à l’état de dépendance des nourrissons et à la maturation progressive de l’environnement qui doit avoir une continuité analogue à celle du développement intérieur de l’enfant. C’est pour cette raison que le pédiatre peut apporter une contribution importante à la psychiatrie.

Si certains pédiatres se sont intéressés davantage au physique et ont négligé le psychisme, je n’y peux rien. C’est une phase qui disparaît et personne ne peut nier que cette position ait été payante sur le plan physique. Je m’intéresserai ici au psychisme et, secondairement seulement, au soma ; je reste cependant pédiatre et, du point de vue de la pédiatrie, la santé mentale n’existe que si un développement antérieur a permis son édification. C’est la mère qui établit la santé mentale de l’enfant pendant la période où elle se préoccupe des soins à donner à son nourrisson. Sans crainte de paraître sentimental, on peut parler ici de « dévotion » et employer ce mot pour décrire un aspect essentiel sans lequel la mère ne peut jouer son rôle et s’adapter activement, avec sensibilité, aux besoins de son bébé – des besoins qui, au début, sont absolus. Ce terme de dévotion nous rappelle aussi que, pour réussir dans sa tâche, la mère n’a pas besoin d’être savante.

La santé mentale est donc le résultat des soins ininterrompus qui permettent une continuité du développement affectif personnel. On sait déjà que la névrose a son origine dans les premières relations inter-personnelles qui s’établissent lorsque l’enfant commence à prendre sa place dans la vie de famille en tant que personne totale. En d’autres termes, pour ce qui est de la socialisation et de l’absence de névrose, la santé d’un individu est édifiée par les parents à l’âge où l’enfant commence à marcher. Cette constatation, cependant, suppose un développement normal pendant la première enfance.

On ne sait pas d’une façon aussi certaine (en fait ceci reste à prouver) que les troubles qui peuvent être reconnus et étiquetés comme psychotiques ont leur origine dans les distorsions du développement affectif surgissant avant que l’enfant ne soit devenu vraiment une personne totale, capable de relations complètes avec des personnes totales...."

 

Ce recueil d'essais couvre une grande partie de ses travaux fondamentaux en tant que pédiatre et psychanalyste, y compris ses concepts de holding" (le fait de "tenir" psychiquement et physiquement l'enfant) et du rôle de la mère suffisamment "bonne" (good enough mother). Il examine la manière dont la mère répond aux besoins de l'enfant pour favoriser son sentiment de continuité d’existence.

 

"The Child, the Family, and the Outside World" (1964, L’enfant, la famille et le monde extérieur)

"The family is the first experience through which the child constructs a sense of reality" (La famille est la première expérience par laquelle l’enfant construit un sens de la réalité). Winnicott critique l’idée que les individus puissent être entièrement "fabriqués" par eux-mêmes : le sens de la réalité de l’enfant est d’abord, pour lui, façonné par la famille, en particulier à travers des attachements précoces. Ces relations sont le fondement du bien-être émotionnel et de la formation de l’identité. Le livre analyse ainsi les expériences de la petite enfance au sein de la famille et souligne le rôle de la famille dans la formation de l’identité de l’enfant. Winnicott explore également la façon dont le développement émotionnel des enfants dépend de leurs soignants primaires (primary caregivers).

 

"The Maturational Processes and the Facilitating Environment" (1965, Le processus de maturation chez l’enfant)

"Development is not a linear process, but a dynamic one, in which each stage depends on the quality of care received" (Le développement de l'enfant n'est pas linéaire, mais se construit dans un processus dynamique où chaque étape dépend de la qualité des soins reçus). Winnicott critique ici les théories linéaires du développement et souligne l'importance de la qualité des soins et de l'environnement. Selon lui, des perturbations ou des lacunes dans les soins précoces peuvent avoir des conséquences durables sur la capacité de l'enfant à fonctionner de manière autonome et authentique. Comment la relation mère-enfant crée les bases du développement émotionnel ...

 

"Playing and Reality" (Jeu et réalité, 1971)

"It is in playing and only in playing that the individual child or adult is able to be creative and to use the whole personality, and it is only in being creative that the individual discovers the self" (C’est seulement dans le jeu que l’enfant ou l’adulte est libre de se montrer créatif. L’expérience créative constitue la preuve qu’un individu est vivant) - Dans cet ouvrage, Winnicott explore le jeu comme un espace essentiel pour le développement de l’enfant. Il introduit le concept d’objet transitionnel (transitional objects) et la notion d’espace potentiel (potential space), une zone intermédiaire où se situent le jeu, la créativité et l’expérience culturelle. Le jeu est central au développement d’un sens de soi authentique. L’espace entre la réalité interne et externe permet à l’individu d’explorer et de donner sens à son monde, ce qui est fondamental pour la santé mentale.

 

"Home is Where We Start From" (1986)

"Home is where we start from, but it is not our destiny" (La maison est notre point de départ, mais ce n’est pas notre destin). Winnicott réfléchit ici au paradoxe de la vie familiale précoce, fondamental pour le développement d’un enfant, mais la tâche ultime de l’enfant est pourtant de dépasser cet environnement pour atteindre l’individualité et l’indépendance. Un recueil d’essais qui met en lumière les réflexions psychanalytiques de Winnicott sur les mondes émotionnels des enfants. Il aborde divers sujets, dont l’agression de l’enfance, le jeu imaginaire et l’importance de la dynamique familiale dans la santé émotionnelle.

 

"Human Nature" (1988, posthumous) - Un ouvrage compilant les réflexions de Winnicott sur ce qui constitue l'être humain et sur les conditions qui facilitent un développement sain. Il y traite des besoins émotionnels précoces de l’enfant et des effets destructeurs de la privation. "L’enfant a besoin de l’environnement, non seulement pour survivre, mais aussi pour être soutenu dans la croissance de son esprit et de son corps" (The child needs the environment, not just to survive, but to be supported in the growth of mind and body). La relation sécurisante avec la mère ou le soignant principal est un pilier du développement émotionnel, sans lequel l'enfant risque de développer un faux self (false self), une personnalité adaptée à ce qui est attendu par l'environnement mais qui manque d’authenticité.


Virginia Satir (1916-1988)

Née à Neillsville, dans le Wisconsin, en 1916, Satir a grandi dans un milieu rural et ouvrier qui a influencé sa compréhension des relations familiales et de l’importance de la communication. Dès son plus jeune âge, elle a observé les dynamiques complexes au sein de sa propre famille, qui ont jeté les bases de sa carrière ultérieure. Après avoir terminé ses études à l’université de Chicago, elle est devenue enseignante et travailleuse sociale, mais sa véritable passion était de comprendre comment les familles fonctionnaient en tant que systèmes. Les débuts de Virginia Satir en thérapie étaient axés sur la psychologie individuelle, mais elle a rapidement réalisé que les problèmes d’une personne ne pouvaient pas être entièrement compris sans examiner son contexte familial. Dans les années 1950, elle a rejoint l’Institut de recherche sur le mental (IRM) à Palo Alto, en Californie, où elle a commencé à formaliser son approche de la thérapie familiale. 

À une époque où la psychanalyse dominait, l’accent mis par Satir sur la dynamique familiale était révolutionnaire. Elle a observé que les problèmes comme l’anxiété, la dépression ou les problèmes de comportement chez un membre de la famille reflétaient souvent des dysfonctionnements plus profonds dans les modèles de communication familiale.

Sa première publication majeure, "Conjoint Family Therapy" (1964), l’a établie comme une leader dans le domaine. Dans ce livre, Satir propose que les thérapeutes travaillent avec des familles entières plutôt que de traiter les individus en isolement. Son travail a introduit une nouvelle approche systémique qui considérait la famille comme une unité, avec ses propres modèles, règles et dysfonctionnements. 

 

Thérapie familiale systémique - Virginia Satir est l'une des fondatrices de la thérapie familiale en tant que discipline distincte. Elle a proposé que les problèmes individuels (comme l’anxiété ou la dépression) ne puissent pas être totalement compris en dehors du contexte familial. Selon Satir, la famille est un système interdépendant, où chaque membre influence et est influencé par les autres. Elle croyait que les comportements problématiques étaient souvent des symptômes de déséquilibres ou de dysfonctionnements dans ce système.

Satir voyait la famille comme un écosystème en constante interaction (d'où son approche systémique), et sa thérapie visait à rétablir l'équilibre dans ce système. Son approche était holistique, considérant que chaque changement chez un membre pouvait provoquer des transformations positives pour l'ensemble.

 

L’importance de la communication : "Communication is to relationship what breathing is to life" (La communication est pour la relation ce que la respiration est pour la vie). Satir a insisté sur le fait que les problèmes de communication sont souvent au cœur des conflits familiaux et personnels. Quand les membres d'une même famille ont quelques difficultés à exprimer en toute sincérité leurs émotions et leur tendresse, des "rôles" ont tendance à prendre l'ascendant sur leurs identités réelles. Virginia Satir a ainsi définit cinq grands rôles parmi les plus courants, principalement en situation de stress et a développé des outils pour améliorer la qualité des interactions entre les membres d'une famille....

 

- "The Leveler" (Le niveleur), "The Congruent Communicator", celui qui communique avec sincérité, honnête et directe, le seul à adopter une position saine, tandis que les autres ne font que jouer un rôle.

- "The Distractor" (Le distracteur), celui qui cherche à éviter les tensions en détournant l'attention des problèmes émotionnels, en général le cadet de la famille, qui pense qu'on ne l'aimera que s'il joue à être inoffensif

-  "The Computer" (L'ordinateur), "The Super-Reasonable", celui qui est froidement intellectuel, qui s'en remet à son intellect pour étouffer ses sentiments

- "The Blamer" (Le réprobateur), celui qui trouve toujours quelque chose à critiquer, qui s'en prend  aux autres pour cacher la mauvaise image qu'il a de lui-même

- "The Placator" (Le conformiste), celui qui s'excuse à longueur de temps et veut plaire à tout le monde

 

L’estime de soi (Self-Esteem ) et le concept de "self" : Satir croyait profondément à l'importance de l’estime de soi dans la santé émotionnelle et psychologique. Elle considérait que de nombreux problèmes familiaux résultaient d’un manque d'estime de soi chez les membres de la famille. Elle voyait la thérapie comme un moyen de renforcer le "self" des individus, c'est-à-dire leur capacité à se sentir suffisamment en confiance pour s’affirmer de manière authentique, tout en restant connectés aux autres.

 

Modèle du changement (Five-Stage Change Model) - "We can learn something new anytime we believe we can" (Nous pouvons apprendre quelque chose de nouveau à chaque fois que nous croyons que c’est possible) - Satir a développé un modèle du processus de changement personnel, qui inclut cinq étapes :

 

- Le statu quo (Status Quo ) : La situation actuelle où les problèmes existent.

- L’élément étranger (Foreign Element ): Quelque chose de nouveau ou inattendu qui perturbe l'équilibre.

- La résistance au changement (Resistance ) : La peur ou la réticence face à la nouveauté.

- L’intégration (Integration) : L’apprentissage de nouvelles façons d’agir ou de penser.

- Le nouveau statu quo (New Status Quo) : Un nouvel équilibre avec de nouveaux comportements et perspectives.

 

- Les "sculptures familiales" (Family Sculpting) : Satir a introduit une méthode innovante appelée "sculpture familiale", une technique utilisée en thérapie pour représenter les relations familiales de manière visuelle et physique. Un membre de la famille est invité à disposer les autres dans des positions symbolisant leurs relations (proximité, distance, postures), créant ainsi une représentation concrète de la dynamique familiale. Cela permet aux individus de visualiser et de mieux comprendre leurs rôles au sein de la famille. Une méthode qui se révèle particulièrement puissante pour révéler les dynamiques inconscientes et les tensions non dites au sein de la famille. Elle aide les membres à prendre conscience de leurs attitudes, de leurs rôles et des relations qu’ils entretiennent entre eux.

 

- L’approche humaniste et la chaleur thérapeutique (Humanistic and Warm Therapeutic Approach) : Virginia Satir est profondément associée à l’approche humaniste en psychologie, qui met l’accent sur le développement personnel, la dignité, et l'autonomie. Elle croyait que les individus, s'ils sont soutenus avec empathie et authenticité, ont la capacité de changer et de s'épanouir. Elle a mis l’accent sur la chaleur et la compassion dans la relation thérapeutique, plaçant une grande importance sur la connexion humaine entre le thérapeute et le patient ("I want to love you without clutching, appreciate you without judging, join you without invading, invite you without demanding, leave you without guilt, criticize you without blaming, and help you without insulting").

 

- Les métaphores du fonctionnement familial (Metaphors for Family Functioning)- Satir aimait utiliser des métaphores pour aider ses patients à comprendre les dynamiques familiales complexes. Par exemple, elle comparait souvent les familles à des mobiles (les jouets suspendus, the hanging toys) : lorsque l'on touche un élément, tout le système est perturbé, soulignant ainsi l’interdépendance de chacun. - "As a family therapist, I see the family as a mobile—touch one piece and the whole system shifts" (En tant que thérapeute familiale, je vois la famille comme un mobile—touchez un élément et tout le système bouge.)

 

- Le processus de transformation du soi (The Process of Personal Transformation) : "The problem is never the problem. The problem is how we cope with the problem" (Le problème n'est jamais le problème. Le problème, c'est comment nous y faisons face). - Satir a mis en avant l'importance de la transformation personnelle, à la fois pour l'individu et pour la famille. Elle voyait chaque crise ou conflit comme une opportunité de développement. Elle a souligné que les personnes devaient développer une conscience de soi et une capacité à se responsabiliser pour changer leurs relations avec les autres.

 

 "Conjoint Family Therapy" (1964)

C’est l’une des œuvres les plus fondamentales de Satir, qui pose les bases de ses techniques de thérapie familiale. Le livre présente son approche systémique de la thérapie, en soulignant l’importance de voir la famille comme une unité où le comportement de chaque membre affecte tout le système.  Satir fournit des outils pratiques pour travailler avec les familles, aidant les thérapeutes à naviguer dans la dynamique familiale complexe. Elle aborde des questions courantes comme les pannes de communication et les conflits non résolus, et propose des stratégies pour reconstruire les relations au sein des familles.

"Thérapie familiale conjointe" était révolutionnaire à l’époque, depuis certains critiques soutiennent que le texte peut être quelque peu daté aujourd’hui, car il reflète les approches thérapeutiques des années 1960 et ne tient pas compte des dynamiques familiales plus contemporaine.

 

"Peoplemaking" (1972)

Satir retrace  son travail sur la thérapie familiale pour explorer le développement des individus dans le contexte familial. Le livre est axé sur le processus de développement personnel et celui de l’estime de soi, en fournissant des exercices pratiques et des idées pour améliorer la communication et l’expression émotionnelle au sein des familles. Reconnu pour sa clarté et ses exercices pratiques, certains critiques lui ont repproché son simplisme. 

"The New Peoplemaking" (1988) - Une version mise à jour de « Peoplemaking » qui incorpore de nouvelles idées issues de son travail en thérapie. Le livre reste centré sur la dynamique familiale et le processus de développement  personnel, tout en ajoutant des exemples et des techniques thérapeutiques plus contemporains. Le livre met l'accent sur l'établissement de relations fortes et saines, tant au sein des familles qu'à l'extérieur, et propose des techniques pour favoriser une communication ouverte et l'empathie. Il reste l'un des ouvrages de Satir les plus lus en raison de ses conseils pratiques sur la communication, l'intelligence émotionnelle et l'éducation des enfants.

 

"The family is where we all begin our journey. It is our first group, our first social system, and it has an immense influence on how we live our lives. The way family members communicate with each other, give love, provide support, and express their feelings not only determines the quality of relationships within the family, but also shapes the self-esteem of each individual.

 

"La famille est l’endroit où nous commençons tous notre voyage. C’est notre premier groupe, notre premier système social, et elle a une immense influence sur la façon dont nous vivons notre vie. La manière dont les membres de la famille communiquent entre eux, se donnent de l’amour, se soutiennent et expriment leurs sentiments détermine non seulement la qualité des relations au sein de la famille, mais également l’estime de soi de chaque individu.

 

It is essential to understand that in every family, there is a unique relational dynamic. The interactions between parents, between parents and children, and between siblings create a complex web of meaning, messages, and influence. It is within this web that the individual develops. A child learns who they are, what their value is, and how they should interact with the world based on what happens in their family. If the family environment is positive, the child learns to respect themselves and others. If the environment is conflicted or neglectful, the child may suffer deeply.

 

Il est essentiel de comprendre que dans chaque famille, il existe une dynamique relationnelle unique. Les interactions entre les parents, entre les parents et les enfants, et entre les enfants eux-mêmes, créent une toile complexe de significations, de messages et d’influences. C’est au sein de cette toile que l’individu se construit. L’enfant apprend qui il est, quelle est sa valeur, et comment il doit interagir avec le monde en fonction de ce qui se passe dans sa famille. Si l’environnement familial est positif, l’enfant apprend à se respecter et à respecter les autres. Si l’environnement est conflictuel ou négligent, l’enfant peut en souffrir profondément.

 

Each family member plays a role in the family dynamic. It is important for parents to be aware of their own behavior and how it affects their children. How a parent handles their own stress, communicates with their partner, and responds to their children’s emotional needs are all crucial factors that influence family well-being.

 

Chaque membre de la famille a un rôle à jouer dans la dynamique familiale. Il est important que les parents soient conscients de leur propre comportement et de la manière dont ils affectent leurs enfants. La manière dont un parent gère son propre stress, la manière dont il communique avec son partenaire, et la manière dont il répond aux besoins émotionnels de ses enfants sont autant de facteurs cruciaux qui influencent le bien-être familial.

 

One of the most important aspects of family life is communication. Unfortunately, many families fall into dysfunctional communication patterns. They may be indirect, critical, sarcastic, or simply unable to express what they truly feel. Hidden messages and unspoken feelings create an invisible tension that can affect everyone in the family. For the family to function in a healthy way, its members need to be able to express their feelings openly and honestly. This means being able to say 'I love you,' but also 'I am angry' or 'I feel hurt,' without fear of retaliation or rejection.

 

L’un des aspects les plus importants de la vie de famille est la communication. Malheureusement, beaucoup de familles tombent dans des schémas de communication dysfonctionnels. Ils peuvent être indirects, critiques, sarcastiques, ou tout simplement incapables de dire ce qu'ils ressentent vraiment. Les messages cachés et non-dits créent une tension invisible, qui peut affecter tout le monde dans la famille. Pour que la famille fonctionne de manière saine, il est essentiel que ses membres puissent exprimer leurs sentiments de manière ouverte et honnête. Cela signifie être capable de dire 'je t’aime', mais aussi 'je suis en colère' ou 'je me sens blessé', sans crainte de représailles ou de rejet.

 

It is also crucial to understand the importance of self-esteem in family relationships. Each individual needs to feel valued, loved, and accepted for who they are. When a family member has low self-esteem, it affects not only their own life but the family dynamic as a whole. Therefore, it is important for parents to actively work on building their children’s self-esteem, offering unconditional love and showing them they are capable and competent.

 

Il est également crucial de comprendre l’importance de l’estime de soi dans les relations familiales. Chaque individu a besoin de se sentir valorisé, aimé et accepté pour ce qu’il est. Lorsqu’un membre de la famille a une faible estime de soi, cela affecte non seulement sa propre vie, mais aussi la dynamique familiale dans son ensemble. Il est donc important que les parents travaillent activement à renforcer l’estime de soi de leurs enfants, en leur offrant un amour inconditionnel et en leur montrant qu'ils sont capables et compétents.

 

In a healthy family, members learn to recognize and respect their differences while remaining deeply connected. This means accepting that each person in the family is unique, with their own thoughts, feelings, desires, and needs. Parents, especially, must learn to respect their children’s differences and encourage them to explore their own identities while maintaining a strong emotional bond. Too often, parents try to mold their children according to their own desires and aspirations, instead of allowing their children to become who they truly are.

 

Dans une famille saine, les membres apprennent à reconnaître et à respecter leurs différences tout en restant profondément liés. Cela signifie accepter que chaque personne dans la famille est unique, avec ses propres pensées, sentiments, désirs et besoins. Les parents, en particulier, doivent apprendre à respecter les différences de leurs enfants, et à les encourager à explorer leur propre identité tout en maintenant un lien affectif fort. Trop souvent, les parents essaient de modeler leurs enfants selon leurs propres désirs et aspirations, au lieu de permettre à leurs enfants de devenir ce qu’ils sont vraiment.

 

However, it is important to note that even the most loving and nurturing families face challenges. There will always be moments of conflict, stress, and difficulty. What distinguishes a healthy family from a dysfunctional one is how it handles those challenges. Healthy families are able to address conflict constructively, using open communication and seeking solutions that respect everyone’s needs. They are able to adapt and grow together, rather than tearing each other apart during times of crisis.

 

Cependant, il est important de noter que même les familles les plus aimantes et bienveillantes rencontrent des défis. Il y aura toujours des moments de conflit, de stress et de difficulté. Ce qui différencie une famille saine d'une famille dysfonctionnelle, c'est la manière dont elle gère ces défis. Les familles saines sont capables de faire face aux conflits de manière constructive, en utilisant la communication ouverte et en cherchant des solutions qui respectent les besoins de chacun. Elles sont capables de s'adapter et de grandir ensemble, plutôt que de se déchirer dans les moments de crise.

 

Change is inevitable, and every family goes through transitions, whether it’s aging, economic shifts, or unexpected events. What matters is that the family stays united during those times, relying on a strong foundation of trust, communication, and mutual respect. The family is like a tree—with strong roots, it can withstand the storms and continue to grow, even in the most difficult conditions..."

 

Le changement est inévitable, et chaque famille traverse des transitions, qu'il s'agisse du vieillissement, des changements économiques ou des événements inattendus. Ce qui compte, c'est que la famille reste unie dans ces moments-là, en s'appuyant sur des bases solides de confiance, de communication et de respect mutuel. La famille est comme un arbre – avec des racines solides, elle peut résister aux tempêtes et continuer à croître, même dans les conditions les plus difficiles..."

 

"Your Many Faces: The First Step to Being Loved" (1978)

Un livre de Virginia Satir qui adopte une approche plus personnelle et introspective par rapport à ses travaux sur la thérapie familiale. Dans "Your Many Faces", Satir explore le concept de l’estime de soi et les différents "visages" ou "personas" que les individus adoptent en réponse à diverses situations de la vie. Elle encourage les lecteurs à embrasser tous les aspects d’eux-mêmes comme un chemin vers l’acceptation de soi et l’amour de soi.

Dans ce livre, Satir met l’accent sur l’acceptation de soi et la conscience de soi, en apprenant aux individus à reconnaître leurs forces intérieures et leur potentiel de croissance. Il a été salué pour son écriture accessible et ses idées personnelles. On considère cet ouvrage souvent comme plus utile pour l’aide personnelle générale plutôt que pour une utilisation dans des contextes thérapeutiques professionnels.

 

"The Satir Model: Family Therapy and Beyond" (1991)

"The survival of the human race depends on the ability of people to have strong, loving relationships with each other" - Coécrit avec John Banmen, Jane Gerber et Maria Gomori, ce livre porte un regard global sur ce qu'est la thérapie familiale selon Virginia Satir. Il peut offrir un cadre structuré pour les thérapeutes qui travaillent avec des individus, des couples et des familles afin de favoriser la croissance personnelle et relationnelle. Le modèle de développement ici privilégié met l’accent sur le potentiel humain et l'évolution de la perception que les individus ont d’eux-mêmes et de leurs relations pour obtenir un changement durable. Le livre explore les techniques thérapeutiques clés de Satir, telles que la "sculpture familiale" (family sculpting ) et la "communication congruente" (congruent communication).  

Avec "Self-Esteem" (1988), - "Self-worth is the feeling that I am loveable, and loveable because of my strengths and my limitations" - Satir écrivit pour le grand public, un guide dédié au développement de l’estime de soi : elle présente ici une série d’exercices et de réflexions pour aider les lecteurs à comprendre l’importance de la valeur personnelle et comment la cultiver dans la vie quotidienne ... 

Une époque de pionnier, une bonne dose d'idéalisme, sa foi inébranlable dans le potentiel humain, des intuitions et des techniques considérées comme difficiles à mesurer et à reproduire, certains critiques soutiendront également que l’accent mis par Satir sur la communication comme solution principale au dysfonctionnement familial simplifie à outrance la complexité des questions familiales. Reste sa conviction que, grâce à l’empathie, l’authenticité et la conscience de soi, les individus et les familles peuvent guérir et ré-apprendre à vivre ...

 


La "thérapie familiale" a été influencée par de nombreux auteurs et écoles de pensée au fil des décennies, chacun de ces auteurs contribuant de manière unique à l’évolution de la thérapie familiale en apportant des concepts et techniques novateurs. S'il est une critique commune à plusieurs de ces approches, c'est dans dans leur manque d'empirisme ou leur sur-simplification des dynamiques familiales complexes. Cependant, elles continuent d'influencer les pratiques contemporaines et d'inspirer de nouvelles générations de thérapeutes ...

 


Jay Haley, "Problem-Solving Therapy" (1976), "Strategies of Psychotherapy" (1963)

"The basic strategy in psychotherapy is to disrupt the current problem-solving process" - Jay Haley est l'une des figures centrales de la thérapie stratégique, qui se concentre sur la résolution des problèmes immédiats plutôt que sur l'exploration des origines profondes des problèmes familiaux. Il a développé des interventions directives, souvent paradoxales, pour déstabiliser les modèles familiaux rigides et provoquer des changements rapides. Haley a particulièrement mis l'accent sur les dynamiques de pouvoir et le contrôle au sein des familles. On lui a reproché son caractère manipulatif et une relative insensibilité aux émotions sous-jacentes ...


R. D. Laing , "The Politics of the Family" (1971)

R. D. Laing, un célèbre psychiatre britannique associé au mouvement antipsychiatrique, a critiqué la structure traditionnelle de la famille dans plusieurs de ses ouvrages, en particulier dans "The Politics of the Family". Il percevait la famille comme une institution oppressive qui contribue à la création de la maladie mentale en renforçant des rôles rigides et des attentes normatives. Selon Laing, les pathologies mentales ne résultent pas simplement de dysfonctionnements individuels, mais de la manière dont les familles et la société contrôlent et étouffent les individus. Sa vision de la famille comme un mécanisme de contrôle peut sembler excessivement pessimiste.


Salvador Minuchin, "Families and Family Therapy" (1974)

"To change the family, you must change its structure"- Salvador Minuchin est le fondateur de la thérapie familiale structurale, une approche qui examine l'organisation interne de la famille. Il a introduit des concepts tels que les sous-systèmes familiaux (ex. : parent-enfant, couple) et les frontières (rigides, claires, diffuses) entre ces sous-systèmes. Minuchin a mis l'accent sur la restructuration de la dynamique familiale, en aidant les familles à établir des frontières saines et à changer des rôles dysfonctionnels. Aucun autre livre dans le domaine ne combine aussi bien des exemples cliniques, des détails spécifiques de la technique et des perspectives matures sur les familles qui fonctionnent efficacement et celles qui cherchent une thérapie.  Salvador Minuchin présente en six chapitres, les transcriptions des séances en famille (deux consacrées aux familles ordinaires qui réussissent relativement à résoudre leurs problèmes, et quatre concernant les familles qui demandent de l’aide). Chaque transcription est accompagnée de l’interprétation courante de ce qui se passe par l’auteur,  L’auteur parvent à construire un modèle de famille qui fonctionne efficacement et définit les limites autour de ses différents sous-systèmes, qu’il s’agisse des parents, du conjoint ou des frères et sœurs. Il discute des façons dont les familles s’adaptent au stress de l’intérieur et de l’extérieur, alors qu’elles cherchent à survivre et à se développer. 

A noter que la thérapie structurale est souvent vue comme pragmatique et efficace à court terme, mais certains critiques estiment que son approche peut être trop directrice.  

 

"Robert Smith, his wife, his twelve-year-old son, and his father-in-law are sitting with me for their first consultation with a family therapist. Mr. Smith is the identified patient. He has been hospitalized twice in the past seven years for agitated depression and has recently requested

rehospitalization.

Minuchin: What is the problem? ... So who wants to start?

Mr. Smith: I think it's my problem. I'm the one that has the problem...

Minuchin: Don't be so sure. Never be so sure.

Mr. Smith: Well ... I'm the one that was in the hospital and everything.

Minuchin: Yeah, that doesn't, still, tell me it is your problem. Okay, go ahead. What is your problem?

Mr. Smith: Just nervous, upset all the time... seem to be never relaxed... I get uptight, and I asked them to put me in the hospital. ..

Minuchin: Do you think that you are the problem?

Mr. Smith: Oh, I kind of think so. I don't know if it is caused by anybody, but I'm the one that has the problem.

Minuchin: ... Let's follow your line of thinking. If it would be caused by somebody or something outside of yourself, what would you say your problem is?

Mr. Smith: You know, I'd be very surprised.

Minuchin: Let's think in the family. Who makes you upset?

Mr. Smith: I don't think anybody in the family makes me upset.

Minuchin: Let me ask your wife. Okay?

 

The consultation that began with this exchange was the beginning of a new approach to the problem of Mr. Smith. Instead of focusing on ·the individual, the therapist focused on the person within his family. The therapist's statement, "Don't be so sure," challenged the certainty that Mr. Smith alone was the problem or had the problem-a certainty which had been shared by Mr. Smith, his family, and the many mental health professionals he had encountered.

 

La consultation qui a débuté par cet échange a marqué le début d'une nouvelle approche du problème de M. Smith. Au lieu de se concentrer sur l'individu, le thérapeute se concentre sur la personne au sein de sa famille. La déclaration du thérapeute, « Ne soyez pas si sûr », a remis en question la certitude que M. Dupont était le seul à avoir un problème ou qu'il était le seul à en avoir un. la certitude que M. Smith était le seul à avoir un problème ou à en avoir un - une certitude partagée par M. Smith, sa famille et les nombreux professionnels de la santé mentale qu'il avait rencontrés.

 

The therapist's framework was structural family therapy, a body of theory and techniques that approaches the individual in his social context. Therapy based on this framework is directed toward changing the organization of the family. When the structure of the family group is transformed, the positions of members in that group are altered accordingly. As a result, each individual's experiences change. The theory of family therapy is predicated on the fact that man is not an isolate. He is an acting and reacting member of social groups. What he experiences as real depends on both internal and external components. The paradoxical duality of the human perception ofreality is explained by Ortega y Gasset in a parable: "Peary relates that on his polar trip he traveled one whole day toward the north, making his sleigh dogs run briskly. At night he checked his bearings to determine his latitude and noticed with great surprise that he was much further south than in the morning. He had been toiling all day toward the north on an immense iceberg drawn southwards by an ocean current. "1 Human beings are in the same situation as Commander Peary on the iceberg. Man's experience is determined by his interaction with his environment.

 

Le cadre de travail du thérapeute était la thérapie familiale structurelle, un ensemble de théories et de techniques qui abordent l'individu dans son contexte social. La thérapie basée sur ce cadre vise à modifier l'organisation de la famille. Lorsque la structure du groupe familial est transformée, les positions des membres de ce groupe sont modifiées en conséquence. En conséquence, les expériences de chaque individu changent. La théorie de la thérapie familiale repose sur le fait que l'homme n'est pas un isolat. Il est un membre actif et réactif de groupes sociaux. Ce qu'il vit comme réel dépend de composantes internes et externes. La dualité paradoxale de la perception humaine de la réalité est expliquée par Ortega y Gasset dans une parabole : « Peary raconte qu'au cours de son voyage polaire, il a voyagé toute une journée vers le nord, faisant courir ses chiens de traîneau à vive allure. Le soir, il vérifia ses repères pour déterminer sa latitude et remarqua avec grande surprise qu'il était beaucoup plus au sud que le matin. Il avait travaillé toute la journée vers le nord sur un immense iceberg entraîné vers le sud par un courant océanique ». Les êtres humains se trouvent dans la même situation que le commandant Peary sur l'iceberg. L'expérience de l'homme est déterminée par son interaction avec son environnement.

 

The traditional techniques of mental health grew out of a fascination with individual dynamics. This preoccupation dominated the field and led therapists to concentrate on exploring the intrapsychic. Of necessity, the resulting treatment techniques focused exclusively on the individual, apart from his surroundings. An artificial "boundary" was drawn between the individual and his social context.

 

Les techniques traditionnelles de santé mentale sont nées d'une fascination pour la dynamique individuelle. Cette préoccupation a dominé le domaine et a conduit les thérapeutes à se concentrer sur l'exploration de l'intrapsychique. Par nécessité, les techniques de traitement qui en ont résulté se sont concentrées exclusivement sur l'individu, sans tenir compte de son environnement. Une « frontière » artificielle a été tracée entre l'individu et son contexte social. (...)


Michel Foucault, "Histoire de la sexualité" (1976)

"La famille n’est pas seulement une structure biologique ou affective, mais un élément crucial dans les mécanismes du pouvoir disciplinaire". La famille est une institution qui contribue au contrôle des corps et des comportements à travers des normes sexuelles et morales. Elle fonctionne comme "un instrument de normalisation et de surveillance." - Michel Foucault, bien que philosophe, a influencé de manière décisive la critique de la famille à travers son analyse des relations de pouvoir et des institutions sociales dans "La Volonté de savoir". Foucault explore comment la sexualité, y compris celle des enfants et des adolescents, est régulée et surveillée par des institutions comme la famille. Il montre que la famille joue un rôle clé dans la discipline des corps et des esprits, imposant des normes sociales et des comportements acceptables. On a pu lui reprocher une certaine abstraction et de se focaliser sur le pouvoir au détriment des autres dynamiques relationnelles.


Murray Bowen (1913-1990), "Family Therapy in Clinical Practice" (1978)

"Emotional systems operate in predictable ways across generations." - Le psychologue et psychiatre américain Murray Bowen voyait la famille comme un système interconnecté (family systems theory), où les émotions et comportements de chaque membre affectent l'ensemble du groupe. "Family Therapy in Clinical Practice" consitue l'œuvre principale de Bowen et le livre de référence pour comprendre sa théorie des systèmes familiaux. Il compile plusieurs de ses articles et interventions sur la thérapie familiale, y compris ses concepts fondamentaux comme la différenciation de soi, les triangles et le processus multigénérationnel...

L’un des concepts clés de Bowen est le "processus de différenciation" (Differentiation of Self), qui se réfère à la capacité d'un individu à maintenir son identité tout en restant connecté à sa famille. Un individu faiblement différencié peut être submergé par l'anxiété familiale et avoir du mal à établir des frontières émotionnelles claires. Une représentation de la famille trop centrée sur les structures traditionnelles et n'accordant pas suffisamment d'attention aux questions culturelles et sociales, lui fut-il reprocher ...

 

Autres notions particulièrement intéressantes développées par Bowen : 

- "Triangles" : Bowen a observé que dans les relations, lorsqu'une tension se développe entre deux personnes, elles peuvent impliquer une troisième personne pour réduire cette tension, créant un "triangle". C’est une manière d’éviter de faire face directement aux conflits émotionnels. Le psychologue peut utiliser ce concept pour comprendre comment les patients externalisent leurs conflits et comment des triangles relationnels dans leur famille d'origine ou actuelle peuvent influencer leurs comportements et leurs émotions.

- Processus émotionnel multigénérationnel (Multigenerational Emotional Process) :

Bowen a introduit l'idée que les patterns émotionnels se transmettent à travers les générations. Des schémas comme les conflits non résolus, les dysfonctionnements relationnels, ou encore les attentes émotionnelles non satisfaites peuvent affecter plusieurs générations. Pour un psychologue, cela suggère qu'il est crucial de prendre en compte l’histoire familiale dans le traitement des problèmes actuels des patients.

- Projection familiale (Family Projection Process) :

Ce concept se réfère à la tendance des parents à transmettre leurs propres émotions non résolues (comme l'anxiété ou l'insécurité) à leurs enfants. Cela peut créer un cercle vicieux dans lequel l'enfant peut adopter ces mêmes difficultés émotionnelles. Ce concept aide le psychologue à explorer comment les problèmes émotionnels des parents influencent les enfants, parfois de manière inconsciente.

- Coupure émotionnelle (Emotional Cutoff) :

Il s'agit de la tendance des individus à couper ou à fuir émotionnellement les membres de leur famille pour éviter le stress ou l'anxiété. Cependant, selon Bowen, la coupure émotionnelle ne résout pas les problèmes de différenciation et peut en fait perpétuer l'anxiété familiale. Le psychologue peut aider les patients à comprendre que la coupure n'est pas toujours une solution, et qu’un travail sur la gestion des relations familiales peut être nécessaire.

- Processus sociétal émotionnel (Societal Emotional Process) :

Bowen a également appliqué sa théorie aux systèmes sociaux plus larges. Il croyait que les mêmes processus émotionnels observés dans les familles pouvaient être étendus aux institutions sociales, aux communautés, et même aux nations. Cela permet de penser les problèmes sociaux, tels que l’anxiété collective ou les conflits, sous un angle systémique et émotionnel.

 

Parmi les ouvrages publiés relatifs aux théories de Bowen, citons, 

-  "Bowen Theory’s Secrets: Revealing the Hidden Life of Families" (2013, Michael E. Kerr) - Michael Kerr, un ancien collaborateur de Bowen, continue d'approfondir et de développer la théorie de Bowen dans cet ouvrage. Kerr offre une explication claire et accessible des concepts clés et de leur application pratique en thérapie familiale. Il explore également comment les dynamiques systémiques des familles influencent le comportement humain.

- "Family Evaluation" (1988, Michael E. Kerr et Murray Bowen) - Un ouvrage, coécrit par Bowen et Kerr qui propose une approche détaillée de l'évaluation des familles dans un cadre thérapeutique. Il explique comment appliquer la théorie de Bowen à l'analyse des structures et des dynamiques familiales, en particulier en ce qui concerne la gestion de l'anxiété et la transmission intergénérationnelle des émotions.

- "The Eight Concepts of Bowen Theory" (2004, Roberta M. Gilbert) - Une introduction claire aux huit concepts clés de la théorie de Bowen. Il est souvent recommandé pour ceux qui cherchent une approche concise et accessible de la pensée de Bowen.  

- "Extraordinary Relationships: A New Way of Thinking About Human Interactions" (1992, Roberta M. Gilbert) - Un ouvrage qui explore l’application de la théorie de Bowen dans la vie quotidienne et les relations humaines en dehors du cadre strictement thérapeutique.  

- "Bowen Family Systems Theory and Practice: Illustration and Critique" (1999, Jenny Brown et Lauren Errington) - Une critique et une explication approfondie de la théorie des systèmes familiaux de Bowen, illustrée par des exemples cliniques. Il est souvent utilisé dans la formation des thérapeutes.

- Enfin, "The Family Diagram and Family Research" (Murray Bowen), le génogramme ou "family diagram", un outil clé développé par Bowen pour représenter visuellement les relations familiales et les dynamiques sur plusieurs générations.  


Mara Selvini Palazzoli (1916-1999), "Paradox and Counterparadox" (1978)

Selvini Palazzoli est l'une des figures majeures de l'école de Milan, connue pour son approche stratégique et systémique de la thérapie familiale. Elle a développé des techniques d'intervention paradoxale et a mis en avant l'idée que les symptômes individuels dans les familles sont souvent des tentatives inconscientes de maintenir un équilibre familial. "Paradox and Counterparadox: A New Model in the Therapy of the Family in Schizophrenic Transaction" est une œuvre clé coécrite par Mara Selvini Palazzoli, avec ses collègues Luigi Boscolo, Gianfranco Cecchin, et Giulio Prata. La méthode du "du paradoxe thérapeutique" consiste à « prescrire le symptôme » pour que la famille soit confrontée à un choix qui les mène vers un changement, une approche qui joue sur le double lien et la dynamique de la communication au sein de la famille : "The therapy seeks to maintain the symptoms, thereby paradoxically inducing the family to abandon its own symptomatic behavior. The double-bind structure of the family interaction is revealed, not by attacking it head-on, but by prescribing the very behavior that sustains the pathology. This creates a dilemma for the family: either they comply with the therapist’s directive, thereby maintaining the symptom voluntarily, or they rebel against the directive and abandon the symptom, leading to change" ...

L’approche de Selvini Palazzoli a pu être perçue par certains critiques comme trop dirigiste et intellectuelle, avec des techniques qui peuvent sembler artificielles pour certaines familles...


Carl Whitaker (1912-1995), Augustus Napier, "The Family Crucible" (1978)

Whitaker et Napier ont soutenu l'idée d'une thérapie familiale "vécue", un lieu de confrontations émotionnelles et d’implication personnelle du thérapeute dans le processus, une expérience partagée seule à même de provoquer le changement. On a pu leur opposer des  risques éthiques et de contre-transfert. Un style provocateur et peu conventionnel qui ne conviendra pas à tous les thérapeutes ou à toutes les familles. "Dancing with the Family: A Symbolic-Experiential Approach", écrit par Carl A. Whitaker (1988) poursuit cette approche en rappelant le caractère central de la personne du thérapeute et la nécessité de maîtriser de bout en bout le processus évolutif de la thérapie ...


Nancy Chodorow (1944), "The Reproduction of Mothering" (1978)

"Mothering perpetuates itself as the only primary mode of caregiving" - Nancy Chodorow, psychanalyste et sociologue, s'est concentrée sur la manière dont les rôles de genre et les rôles parentaux sont reproduits à travers les générations dans son livre "The Reproduction of Mothering". Elle soutient que la socialisation différenciée des garçons et des filles, en particulier la relation mère-fille, renforce les structures patriarcales. Chodorow critique le fait que les femmes soient socialisées pour devenir des mères nourricières, tandis que les hommes sont éloignés de ces responsabilités. Un focus presque exclusif sur la mère, au détriment du rôle du père et d'autres membres de la famille?

 

Shulamith Firestone (1945-2012), dans "La Dialectique du sexe" ("The Dialectic of Sex: The Case for Feminist Revolution",1970), théoricienne féministe radicale, critiquera la famille en tant que mécanisme d'oppression patriarcale. Elle estime que la libération des femmes doit passer par l'abolition de la famille traditionnelle, qu’elle voit comme un pilier fondamental de l'inégalité entre les sexes : "La famille est la structure primitive de l'oppression des femmes. Elle fonctionne comme un microcosme du pouvoir patriarcal qui se répète à travers toute la société".


Elisabeth Badinter (1944), "L’Amour en plus" (1980)

"L’instinct maternel est une invention récente, un mythe de notre société moderne" - La philosophe et psychanalyste française Élisabeth Badinter a remis en question les idées traditionnelles sur la maternité et la famille dans son ouvrage "L’Amour en plus". Elle y développe l'idée que l'amour maternel est socialement construit et non une prédisposition naturelle. Selon elle, la famille et la maternité sont des institutions qui servent souvent à renforcer les rôles traditionnels de genre et à contraindre les femmes à un rôle d'épouse et de mère dévouée. Badinter critique également la tendance à idéaliser la famille comme un espace naturellement harmonieux.


 Michael White, David Epston, "Narrative Means to Therapeutic Ends" (1990)

Les auteurs partent d'un principe, que l'on peut discuter. Les gens éprouvent des problèmes lorsque les histoires de leur vie, telles qu’elles ont été inventées et formulées  par eux (ou d’autres), ne sont plus à même de correspondre à leur expérience vécue. Le récit va jouer ici un rôle central dans la thérapie. Michael White et David Epston sont ainsi les fondateurs de la "thérapie narrative", une approche qui aide les individus et les familles à reconstruire leurs histoires pour mieux comprendre et transformer leurs expériences. Une approche philosophique et linguistique considérée comme trop abstraite ou déconnectée des réalités psychologiques et émotionnelles plus profondes, pour certains.  


Judith Butler, "Gender Trouble" (1990)

"Gender is not something that one is, it is something one does, a series of acts" - Judith Butler, philosophe américaine et théoricienne du genre, a fortement critiqué la famille normative et les rôles traditionnels de genre dans son ouvrage fondateur "Gender Trouble". Butler soutient que les rôles de genre et les identités sexuées, qui sont souvent inculqués au sein de la famille, ne sont pas naturels, mais plutôt des performances culturelles imposées par la société. Elle critique les structures familiales hétérosexuelles qui perpétuent les normes de genre rigides. La théorie de Butler a été critiquée pour sa complexité théorique, ce qui la rend parfois difficile à appliquer concrètement.  


"The Craft of Family Therapy: Challenging Certainties",  Salvador Minuchin (2013)

Les stagiaires en thérapie familiale sont submergés par une multitude de théories sur la thérapie familiale. Ils ont également des difficultés à passer d’une vision individualiste à une vision des interactions et des systèmes. Comment les thérapeutes affinent-ils leurs propres méthodes avec tous ces choix? Comment peuvent-ils apprendre en appliquant un processus inductif d’exploration de ce qui s’est produit pendant la séance thérapeutique? 

Le thérapeute vétéran et fondateur de la thérapie familiale structurelle, Salvador Minuchin, revient ici aux fondamentaux avec ses deux co-auteurs Michael D. Reiter et Charmaine Borda. 

Pionnier de l'approche systémique et structurelle en thérapie familiale, il développer encore et toujours l'idée que la famille doit être comprise comme un système, où chaque individu est influencé par les interactions avec les autres membres. L'accent est mis sur la structure de la famille, les rôles et les règles implicites, ainsi que sur la manière dont les problèmes peuvent résulter de déséquilibres dans ces systèmes relationnels. Ce modèle structurel permet au thérapeute de travailler à réorganiser les interactions familiales pour restaurer un équilibre plus fonctionnel.

L'un des concepts centraux du livre est de questionner les "certitudes" auxquelles les thérapeutes (et les familles) peuvent s'accrocher. Ces certitudes sont souvent des schémas de pensée ou des croyances rigides sur les familles, les problèmes et les solutions. Minuchin et ses co-auteurs encouragent les thérapeutes à être flexibles dans leur approche et à rester ouverts à la complexité et à l'imprévisibilité des relations familiales. Ce défi contre les certitudes permet aux thérapeutes d'éviter d'imposer des solutions préconçues et de mieux répondre aux besoins individuels des familles. Minuchin souligne l'importance d'une approche créative dans la pratique de la thérapie familiale. Il insiste sur le fait que chaque famille est unique, et donc qu'il est crucial que le thérapeute s'adapte et utilise des interventions qui sortent des méthodes traditionnelles lorsque nécessaire. Cela peut inclure des techniques innovantes ou des interventions non conventionnelles qui permettent aux familles de voir leurs problèmes sous un autre angle ...