Clemens Brentano (1778-1842) - Bettina Brentano (1785 –1859) - Karoline von Günderode (1780-1806) -  Achim von Arnim (1781-1831) - Jacob et Wilhelm Grimm (1785-1863 ; 1786-1859), "Kinder- und Hausmärchen" (1812-1819) - ...

Last update: 12/31/2016


Succédant aux "classiques de Weimar" (Goethe, Hölderlin, Schiller), la première vague du romantisme allemand - "l'école d'Iéna" (les frères Schlegel, Tieck, Novalis) -  tendait à l'universalité, la Révolution française semblant porter en elle un immense brassage d'idées entre les hommes et les cultures. Mais dans l'Allemagne qui se retrouve sous la tutelle de Napoléon après avoir écrasé la Prusse, la seconde vague romantique, réunie à Heidelberg, cherchent des raisons d'espérer en se tournant vers les aspirations nationales : l'Allemagne, morcelée et asservie, ne peut trouver son identité dans la structure du Saint Empire qui vient de s'effondrer, mais dans cette communauté de langue et de culture qui plonge ses racines dans le passé et dans le peuple. Les frères Grimm publient la première grammaire complète de l'allemand, réunissent les Légendes allemandes (1816-1818) et Contes d'enfants et du foyer (1812-1815). Joseph von Görres fait revivre l'histoire médiévale (Livres populaires allemands, 1807), Achim von Arnim et Clemens Brentano le "Cor merveilleux de l'enfant" (1805-1808). Cette seconde vague romantique veut donner aux rêves la consistance de la réalité et met ainsi en lumière la notion de Volksgeist, cette âme germanique  qui se révèle, à la fois, voix vivante du peuple allemand et porteur de l'enfance de l'humanité... Pourtant, une autre petite musique anticipe sur les temps à venir, "je voyais un méchant esprit des ténèbres qui, partout où il paraît, apporte le malheur, la ruine et le désespoir dans cette vie et pour l'éternité.." (Hoffman, L'Homme au sable)

(Caspar David Friedrich - 1809-1810 - Abbey among Oak Trees - Alte Nationalgalerie - Staatliche Museen zu Berlin)


Le premier groupement des romantiques à Iéna et ensuite à Berlin ne dura guère qu'une huitaine d'années, de 1796 à 1803. Dès 1802, Frédéric Schlegel quitta Berlin pour se rendre à Paris, et la même année Tieck alla s'établir aux environs de Francfort-sur-l'0der. L'année suivante, Wilhelm Schlegel commença ses voyages avec Mme de Staël. Enfin, en 1804, Schleiermacher fut appelé à l'université de Halle, où il enseigna jusqu'au moment de l'invasion française. Quant à Novalis, la mort l'avait enlevé dès le mois de mars 1801. C'est dans cette courte période, de 1796 à 1803, que l'école se constitua, qu'elle affirma ses principes, qu'elle étendit son influence. 

La seconde génération des romantiques offre moins de cohésion que la première. Elle se partage en plusieurs petits groupes, qui conservent plus ou moins fidèlement la tradition de I'école. Clément Brentano et Achim d'Arnim ont leur centre d`activité à

Heidelberg, où ils fondent le Journal des Ermites (1808, Zeitung für Einsiedler). A Berlin, le poète La Motte Fouqué, l'écrivain dramatique Zacharie Werner  et le philosophe Fichte se rattachent à l'Almanach des Muses de Chamisso et Varnhagen; au même groupe appartient le conteur Hoffmann. Enfin Karl Immermann, dans la région du Rhin, et Eichendorff, en Prusse, continuent chacun de son côté à propager l'esprit romantique, tout en gardant l'oríginalité de leur nature...

 

Le groupe de léna se désintégra en 1804, mais une seconde phase du Romantisme allait voir le jour, deux ans plus tard, à Heidelberg. Les leaders du groupe de Heidelberg, Clemens Brentano, Achim von Arnim et Joseph von Gorres, publièrent un périodique, "Zeitung für Einsiedler" (Journal pour les ermites, 1808). Le groupe est davantage connu pour avoir produit un recueil de chants populaires, "Des Knaben Wunderhorn (Le Cor enchanté de l'enfant, 1805-1808). nom tiré du titre du poème d'introduction dans lequel un garçon apporte un cor magique à une impératrice. Le premier volume, publié en 1805 (daté de 1806), était consacré à Goethe. Si Goethe lui-même l'accueillit favorablement, d'autres critiques lui reprochèrent son approximation phiosophique.

C'est par sa famille que le poète, romancier et dramaturge Clemens Brentano (1778-1842). fit la connaissance de Goethe et des Romantiques de Iéna. Il abandonna ses études à l'université de Iéna et rencontra Arnim avec lequel il publia "Le cor enchanté de l'enfant". En tant qu'écrivain, ses contes de fées connurent un très grand succès, et notamment "Gockel, Hinkel el Gackelia"(1838). Son roman "Geschichte von braven Kasperl und dern schönen Anner" (Histoire du brave Gaspard et de la belle Annette, 1817) souligne ses tentatives de faire fusionner la tradition populaire et la fantaisie, alors que son autre roman, "Godwi" (1801), prend en transversale les deux phases du Romantisme allemand. Parmi ses autres œuvres, il convient de citer la comédie "Ponce de Léon" (1801) et "Die Gründung Prags" (La fondation de Prague, 1815). Les contributions d'Achim Arnim (Karl Joachim Friedrich Ludwig von Arnim, 1781-1831) sont certes moins remarquables que celles de son coéditeur Brentano, mais ses tentatives de concilier réalisme et fantaisie au sein de brèves histoires exercèrent une grande influence sur son époque. En tant que groupe, les Romantiques de Heidelberg étaient plus pragmatiques et déterminés que leurs prédécesseurs de léna. Ils stimulèrent l'intérêt de leurs concitoyens pour l'Allemagne et jetèrent les bases de l'étude de la philosophie et de la littérature médiévale allemandes.


Achim von Arnim (1781-1831)
Achim von Arnim n'est pas chez lui dans le monde, disait Thomas Mann, son imagination sans limite, portée pourtant par une écriture réaliste, l'enferma dans une solitude dite "poétique" - Issu d'une vieille famille de l'aristocratie prussienne, orphelin de mère et délaissé par son père, Achim von Arnim étudie le droit et les mathématiques à Halle an der Saale et à Göttingen de 1798 à 1801, puis se tourne vers la littérature et le Cénacle romantique d'Heidelberg (Joseph Görres, Friedrich Creuzer, Clemens Brentano). Sa rencontre avec Clemens Brentano date de 1802, et c'est avec lui  qu'il publie Des Knaben Wunderhorn (1806-1808), un recueil de plus de 700 chants populaires allemands collectés avec l'aide des frères Grimm et de Bettina Brentano, la soeur de Clemens qu'il épousera en 1811, un recueil d'importance qui va revivifier la mythologie nationale, révéler à notre âme malade une nature mystique, et inspirer autant les poètes, Eichendorff, Heine, que les compositeurs tels que Schumann, Brahms et Mahler. A partir de 1809, Arnim vit à Berlin, où il travaille sur le "Berliner Abendblätter" de Heinrich von Kleist, fréquente des nationalistes prussiens tels que Friedrich de la Motte, Fouqué et Kleist. En 1811, il fonde à Berlin le groupe "Deutsche Tischgesellschaft" (Société allemande de la table), singulièrement patriote et antisémite,... 


Ce qui caractérise le groupe de Heidelberg, c'est la tendance à rafraîchir la langue et la littérature à la source populaire. Jusqu'alors on n'avait proposé aucune solution précise du problème qui préoccupait toute l'école romantique. On voulait que la littérature eût un caractère national; on reprochait aux classiques de trop s'appuyer sur l'antiquité, et on leur opposait le moyen âge et la Renaissance chrétienne. Mais c'était le Moyen Âge des seigneurs et des clercs, c'est-à-dire une culture qui n'était pas elle-même sans quelque chose d'artificiel, et qui n'avait jamais pénétré profondément dans le peuple. Quand Tieck voulut remonter aux origines de la poésie allemande, c'est aux Minnesinger qu'il s'adressa. Arnim et Brentano suivirent une autre voie; ils eurent l'idée de recueillir tout ce qui, à quelque époque que ce fût et même en pleine période classique, portait cette marque indéfinissable qu`on appelle le caractère populaire, toutes ces poésies qui, selon l'expression de Gœthe, ne sont écrites ni par le peuple ni pour le peuple, mais qui, par leur ton franc et vigoureux, sont faites pour être comprises de toute la partie la plus profonde de la nation.

Achim d'Arnim disait, dans un article publié en 1805 (Von Volksliedern), au moment où il venait de rassembler ses documents : "Les savants se sont usés à créer une langue spéciale, distinguée, qui n`a servi qu'à exclure le peuple, pour un long temps, de toute conception élevée. Mais il leur a bien fallu reconnaître que le seul moyen de maintenir une telle langue eût été de la rendre générale. Constituer une langue pour elle-même, prétendre la fixer artificiellement, c'est une idée contraire à toute vraie culture. Il faut que la langue soit éternellement fluide, si elle doit se plier à tous les mouvements de la pensée qu'elle est appelée à manifester: c'est seulement ainsi qu'elle peut faire chaque jour des acquisitions nouvelles, sans que personne ait besoin d'y mettre la main. Si nous n'avons plus de poésie populaire, c'est qu'on a cantonné la  langue, et qu'on s'est aliéné ainsi la partie saine et poétique du peuple." Les romantiques n'avaient jamais parlé autrement... 


Elisabeth, dite Bettina Brentano (1785 –1859), et Achim von Arnim ont formé un couple emblématique du romantisme, lui luthérien et solitaire refermé sur lui-même, elle catholique, amie proche de Goethe dès son plus jeune âge (ses "Goethes Briefwechsel mit einem Kinde", 1835, influencèrent longtemps la perception que l'on avait de Goethe) et dénonçant la misère ouvrière (Dies Buch gehört dem König, 1843). Bettina vivait à Berlin, Achim gérait le domaine de Wiepersdorf... Les Brentano furent proche de Karoline von Günderode (1780-1806), poétesse méconnue (sous le pseudonyme masculin de Tian) qui ne vécut que 26 ans, torturée par sa condition de femme : "Schon oft hatte ich den unweiblichen Wunsch, mich in ein wildes Schlachtengetümmel zu werfen, zu sterben. Warum ward ich kein Mann! Ich habe keinen Sinn für weibliche Tugenden, für Weiberglückseligkeit. Nur das Wilde, Große, Glänzende gefällt mir. Es ist ein unseliges, aber unverbesserliches Mißverhältnis in meiner Seele; und es wird und muß so bleiben, denn ich bin ein Weib und habe Begierden wie ein Mann, ohne Männerkraft" (J'ai souvent eu le désir non féminin de mourir dans une bataille sauvage. Pourquoi ne suis-je pas devenu un homme ! Je n'ai aucun sens des vertus féminines, de la félicité féminine. Je n'aime que le sauvage, le grand, le brillant. C'est une disproportion malheureuse mais incorrigible dans mon âme..), écrit-elle à Gunda Brentano.


En 1810, Achim von Arnim publie "Armut, Reichtum, Schuld und Buße der Gräfin Dolores". Solitaire, Arnim s'éloigne de Berlin et se retire sur ses terres en 1814, dans son château de Wiepersdorf (Brandebourg). S'il a peu convaincu en tant que poète et auteur dramatique, il publie un roman historique, "Die Kronenwächter oder Bertholds erstes und zweites Leben" (1817), qui fait renaître avec talent le XVIe siècle. Sa notoriété est attachée à ses nouvelles dans lequelles il sait plus que tout autre relier des significations symboliques aux évènements les plus réels, rechercher dans un monde plus vaste, imaginaire ou rêvé, une texture plus riche que ce que nous donne à vivre le quotidien, raconter ses hallucinations comme des faits avérés :  "Mistris Lee" (1809), "Der Wintergarten (1809, Le Jardin d'hiver), "Isabella von Ägypten, Kaiser Karls V. erste Jugendliebe" (1812, Isabelle d'Égypte), où le Golem et la Mandragore prennent forme humaine , "Frau von Saverne" (1817), "Der Tolle Invalide auf dem Fort Ratonneau" (1818, L'Invalide du Fort Rappeneau), "Die Majoratsherren" (1820, Les Héritiers du majorat), où le ghetto se peuple de fantômes ,"Martin Martir" (1841)...


Clemens Brentano (1778-1842)
Achim von Arnim, Joseph von Eichendorff, et Clemens Brentano sont considérés comme les représentants les plus importants de la période dite romantique de Heidelberg. Brentano naquit dans la littérature, petit-fils de Sophie von La Roche, fils de Maximiliane von La Roche, autrefois vénéré par le jeune Goethe. Mais singulièrement, comme nombre d'écrivains romantiques allemands, son éducation fut des plus terre-à-terre, étudiant les sciences minières à Halle, puis la médecine à Iéna. C'est à Iéna qu'il rencontra le classicisme de Weimar (Weimarer Klassik), Johann Wolfgang von Goethe, Christoph Martin Wieland, Johann Gottfried von Herder, et ces premiers romantiques que furent Friedrich Schlegel, Johann Gottlieb Fichte et Ludwig Tieck. Il y publie son premier roman, "Godwi oder das steinerne Bild der Mutter" (1801). Il gagne Göttingen pour étudier la philosophie, y rencontre Achim von Arnim et publie avec lui Des Knaben Wunderhorn (1806-1808), recueil de vieilles chansons allemandes. En 1809, Clemens Brentano vit principalement à Berlin et semble gagné par un certain antisémitisme que l'on trouve dans des associations religieuses telle que Die Deutsche Tischgesellschaft, fondée notamment par Achim von Arnim, le climat est au patriotisme prussien, anti-napoléonien (Louise de Mecklembourg-Strelitz, reine de Prusse et épouse de Frédéric-Guillaume III, incarnera jusqu'à sa mort, en 1810, ce patriotisme), mais aussi antisémite. En fond de son oeuvre, une tonalité religieuse germano-chrétienne très profonde qui se cherche et parfois se perd dans ses caricatures excessives condamnant le Philistin et le Juif (Der Philister vor, in und nach der Geschichte), c'est une des limites de ce romantisme d'Heidelberg souvent insuffisamment évoquée...  


De 1803 à 1811, il travaille à une vaste épopée de plus de 1000 ans, "Romanzen vom Rosenkranz" (les Romances du Rosaire, inachevé, 1852) , qui relate la rédemption par le rosaire d'une faute millénaire qui pèse sur une famille de Bologne. En 1817, il quitte la littérature profane et se tourne vers le catholicisme sous l'influence de la jeune Luise Hensel (1798-1876) dont il s'était épris. Le poète Wilhelm Müller (1794-1827), soupirant tout autant reconduit, composera sur cet amour non partagé des poèmes qui inspireront à Franz Schubert deux cycles de Lieder, "Die schöne Müllerin" et "Winterreise".

Crise de la "conversion" à la foi catholique qui se poursuit lorsqu'il passe six années (1818-1824) à Dülmen (Westphalie), au chevet de la religieuse augustine Anna Katharina Emmerick (1774-1854) à retranscrire ses visions, source de stigmates : non sans y introduire sa propre inspiration lyrique, il publiera de cette "expérience" un premier volume en 1833 ("Das bittere Leiden unserer Herrn Jesu Christi"), puis un second en 1852 ("Leben der heiligen Jungfrau Maria"), des textes d'une grande beauté plastique qui inspireront des congrégations romanes et américaines. Gabriel von Max a réalisé en 1885 un portrait saisissant de "La vierge extatique Anna Katharine Emmerick"....


En 1833, Brentano rencontre le peintre et mécène Emilie Linder (1797-1867), vénérée par Schelling et Franz von Baader, et tente une nouvelle fois de la convertir à la foi catholique (ce qu'elle fit un an après la mort de Brentano). La religion et ses passions amoureuses, singulièrement liées, pulsion sensuelle et ferveur religieuse, restent les éléments déterminants de la dernière partie de sa vie. Si l'œuvre et la personne de Brentano ont suscité les appréciations les plus contradictoires, et si ses œuvres ont beaucoup vieilli, il a laissé quelques poésies qui comptent parmi les plus belles du lyrisme allemand : "Ich darf wohl von den Sternen singen" ("J'ai le droit de chanter des étoiles")...

Brentano, Clemens (1778-1842)
Ich darf wohl von den Sternen singen


Ich darf wohl von den Sternen singen,
Mich hat die Blume angeblickt,
Und wird mein armes Lied gelingen,
Dann wird vom Stern mir zugenickt.

O Stern und Blume, Geist und Kleid,
Lieb, Leid, und Zeit und Ewigkeit.
Im Garten stand die frühe Waise,
Und senkt den Blick zum Blumenfeld
Die Sonne sank im Purpurgleise,
Die Sterne spannen aus ihr Zelt.

O Stern und Blume, Geist und Kleid,
Lieb, Leid, und Zeit und Ewigkeit.
Mit euch wohl wagt ein Kind zu sprechen,
Ihr kennet mich und bin ich stumm,
Weil mir das kranke Herz will brechen,
Bringt ihr mich nicht mit Fragen um.

O Stern und Blume, Geist und Kleid,
Lieb, Leid, und Zeit und Ewigkeit.
Ihr lieben Blumen still und innig
Ein Tröpfchen Tau, ein Licht, ein Hauch,
Ihr lieben Sterne klar und sinnig
Ein Strahl, ein Blick, ein Blitz, ein Aug'.

O Stern und Blume, Geist und Kleid,
Lieb, Leid, und Zeit und Ewigkeit.
Und wie die Sterne heller blinken
Beugt Schatten sich aufs Blumenfeld
Und auch des Kindes Augen sinken,
Der Traum sie in den Armen hält.

O Stern und Blume, Geist und Kleid,
Lieb, Leid, und Zeit und Ewigkeit.
Ihr Engel steiget auf und nieder
Bringt Sternenlust, bringt Blumenschmerz,
Und küßt die unerschaffnen Lieder
Und legt sie schlafen auf ihr Herz.
….



Le recueil laborieux de contes de fées pourrait être considéré comme une conséquence inévitable des efforts des romantiques allemands pour insuffler un nouvel amour de la tradition populaire et des mythes...

"Kinder- und Hausmärchen (Contes de l'enfance et du foyer, 1812-1822), recueilli par Jacob Ludwig Karl Grimm (1785-1863) et Wilhelm Carl Grimm (1786-1859), marqua le début de la science de la tradition populaire. Les deux frères y furent initiés par Brentano et Herder qu'ils rencontrèrent à l'université de droit de Marburg. En 1816, ils abandonnèrent le droit pour se consacrer à plein temps à la recherche littéraire. Ils recueillirent dans un premier temps des chansons populaires et des légendes pour Arnim et Brentano, puis travaillèrent à leurs propres projets avec une approche empirique et méthodique, lls explorèrent les traditions littéraires anglaise, irlandaise, écossaise, espagnole, néerlandaise, scandinave, serbe et finlandaise. Par son titre, "Kinder- und Hausmärchen" (Contes de l'enfance et du foyer), un recueil de deux cents histoires le plus souvent inspirées de la tradition orale, suggère que cette œuvre peut être lue par les enfants et les adultes. Publiée dans un premier temps en Allemagne, elle est distribuée dans le monde entier en soixante dix langues. Parmi les oeuvres importantes des frères Grimm, il convient de citer un recueil de légendes historiques et locales, "Deutesche Sagen" (1816-1818) et l'oeuvre intensive de Jacob, "Deutsche Grammatik", une étude de la grammaire allemande, ainsi que "Deutesche Rechtsalterürner" (1828), une vue d'ensemble des pratiques et croyances allemandes ...


Jacob et Wilhelm Grimm (1785-1863 ; 1786-1859)
Les Contes de Grimm étaient initialement destinés à un public adulte et c'est par le biais des traductions anglaises qui en furent faites et devant leur succès auprès des enfants que les frères Grimm se lancèrent dans des adaptations plus "convenables" mais sans en atténuer leurs cruautés. Ils parvinrent ainsi à établir sans doute le plus grand corpus en Europe de ces contes dont l'une des caractéristiques est de ne comporter ni lieux ni personnages ni évènements auxquels ils puissent être rattachés.
Jacob Grimm et Wilhelm Grimm, originaires de Hanau, sont les aînés d'une fratrie de six enfants qui perdent leur père en 1796. Après des études à l’université de Marbourg, les frères Grimm commencent à rassembler des contes en 1806, publient "Über den altdeutschen Meistergesang" (1811), "Kinder- und Hausmärchen" (Contes de l'enfance et du foyer, 1812-1819), plus de 200 contes (Schneewittchen, Aschenputtel, Dornröschen, Rotkäppchen, Die Bremer Stadtmusikanten, Hänsel und Gretel, ..) et nombre de légendes (deux tomes 1816-1818: Der Rattenfänger von Hameln, Wilhelm Tell, Der Tannhäuser..) qui dans les années 1830 rencontrent un nouveau public, celui d'une bourgeoisie qui entend plonger, avec des enfants désormais reconnus à part entière, dans un monde de vérités éternelles, regorgeant de personnages se métamorphosant au gré d'évènements magiques, parfois terribles, et s'achevant toujours positivement. Extraordinaires linguistes et philologues, les frères Grimm entreprennent à partir de 1838 la réalisation du fameux Deutsche Wörterbuch dont les 32 volumes ne seront achevés qu'après leur mort.

(Elisabeth Jerichau-Baumann - 1855 Die Gebrüder Grimm v Alte Nationalgalerie - Staatliche Museen zu Berlin)