SLOVAKIA (Central Europe)
La Slovaquie (5 millions d'habitants sur 49 000 kilomètres carrés), le plus petit pays d'Europe centrale et le moins peuplé, est peut-être née de la vogue actuelle des fausses indépendances et des micro-États. Montagneuse, sans grandes ressources ni passé particulier, elle a pour capitale Bratislava qui, sous les Hasbourg, s'appelait Presbourg et n'était en quelque sorte qu'un faubourg de Vienne. Après avoir appartenu pendant près de mille ans au royaume de Hongrie, puis, à partir de 1918, à la Tchécoslovaquie, les Slovaques ont, d'un commun accord avec les Tchèques, mis un terme à la République fédérative tchèque et slovaque (Fédération tchéco-slovaque) qui regroupait les deux entités au sein d'un État commun.
La "révolution de Veloursa" (sametová revoluce,en tchèque, nežná revolúcia, en slovaque), - parce qu'elle s’est déroulée pacifiquement -, correspond à une série de manifestations pacifiques qui ont eu lieu en Tchécoslovaquie du 17 novembre au 29 décembre 1989 et qui ont marqué la fin du régime communiste en Tchécoslovaquie, ouvrant, selon la formule consacrée, la voie à une transition démocratique. 1989 est alors la grande époque de l'effondrement des régimes communistes à travers toute l'Europe de l'Est (chute du mur de Berlin, mouvements en Pologne, Hongrie, etc.).
L'année 1993 marque un autre événement majeur, la dissolution pacifique de la Tchécoslovaquie, souvent appelé le "Divorce de Velours", en écho à la "Révolution de Velours". Le 1er janvier 1993, la Tchécoslovaquie se scinde en deux États indépendants, la République tchèque et la Slovaquie. Cette séparation s'est effectuée de manière pacifique, à l'initiative des leaders politiques des deux nations, qui ont convenu tous deux que les différences entre les deux entités rendaient la coexistence difficile : ils ont opté pour une séparation sans référendum national, arguant que les parlements des deux pays représentaient suffisamment la volonté populaire...
Parmi les raisons politiques, économiques et culturelles expliquant cette séparation, on a cité des Tchèques historiquement plus industrialisés et urbanisés face à une Slovaquie plus agricole et un développement industriel plus tardif, entraînant des désaccords sur la réforme économique et la distribution des ressources; des langues proches (le tchèque et le slovaque), mais des différences culturelles importantes; des Tchèques de tradition séculariste sécularisme et doté d'une élite politique souvent orientée vers l’Europe occidentale, des Slovaques en majorité catholiques, avec une identité nationale marquée par un sentiment de sous-représentation dans l’État tchécoslovaque.
Au final, la Slovaquie a pu renforcer son identité nationale et acquérir une reconnaissance internationale tant politique que culturelle, la République tchèque gagnant au passage une plus grande latitude économique et Prague devenant plus que jamais un centre culturel reconnu mondialement ...
Parmi les lieux incontournables de la Slovaquie, citons,
- Ses villes principales, Bratislava (capitale), son Château, perché sur une colline qui domine le Danube, sa Vieille ville, la Cathédrale Saint-Martin et la Porte Michel. - Košice et sa Cathédrale Sainte-Élisabeth, laa plus grande cathédrale gothique de Slovaquie, la Rue principale (Hlavná ulica) - Banská Štiavnica, une ville inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO, ancienne cité minière entourée de collines volcaniques...
- Ses nombrex Châteaux et forteresses, le Château de Spiš (Spišský hrad), un des plus grands complexes de châteaux médiévaux en Europe, le Château de Bojnice, l'un des plus beaux châteaux d'Europe centrale, le Château d’Orava (Oravský hrad), situé sur une falaise escarpée, le Château de Trenčín, une forteresse médiévale ...
- En espace naturel, le Parc national des Tatras (TANAP), ses lacs glaciaires (Štrbské Pleso) et ses sommets (Gerlachovský štít), les Grottes de glace de Demänovská, le Parc national du Paradis slovaque (Slovenský raj), un réseau de gorges, de cascades et de passerelles, ...
La codification du slovaque par Ľudovít Štúr au XIXe siècle a été essentielle pour établir les base d'une langue littéraire structurée, ce qui sans doute a limité la diffusion initiale des œuvres slovaques et une audience internationale réduite : bien que certains auteurs comme Monika Kompaníková ou Pavel Vilikovský aient acquis une reconnaissance récente.
Les années 1920-1930 ont vu émerger des écrivains influencés par les courants européens comme le surréalisme, le symbolisme et l’expressionnisme. On pense à Ivan Krasko, précurseur du symbolisme en Slovaquie;, à Janko Jesenský (1874–1945), poète et prosateur avec "Les Démocrates" (Demokrati, 1934–1938), un roman satirique sur la société slovaque durant l’entre-deux-guerres; à Milo Urban (1904–1982) et à son roman expressionniste, "La Passe dangereuse" (Živý bič, 1927); à Dominik Tatarka (1913–1989), qui dénonce la soumission au totalitarisme stalinien avec "Le Démon du consentement" (Démon súhlasu, 1956) et "La Vie sans fin" (Panna zázračnica, 1944); à Ladislav Mňačko (1919–1994), auteur du "Goût amère du pouvoir" (Ako chutí moc, 1968), roman politique sur la corruption morale liée au pouvoir sous le régime communiste...
Au XXIe siècle, la littérature slovaque rejoint les thématiques de la littérature mondialisée qui s'impose désormais quasiment uniformément un peu partout, mais persiste cette petite musique d'Europe centrale, celle de Milan Kundera et de Bohumil Hrabal ...
Pavel Vilikovský (1937–2020) s'est imposé comme un maître de l’introspection et de la narration complexe avec "Vilikovský’s Večne je zelený…" (Ever Green Is…, 1989), salué comme un chef-d’œuvre du postmodernisme : fusionnant des expériences personnelles apparemment banales avec des métaphores dénonçant les structures oppressives et absurdes du régime, nous suivons un homme ordinaire embarqué dans des situations absurdes qui dévoilent les contradictions de la société. La trame narrative alterne entre des réflexions intérieures, des événements bureaucratiques burlesques, et des épisodes de la vie quotidienne qui révèlent les failles du système social et politique. Suivront "Vlastný životopis zla" (L’Autobiographie du mal, 2009), "Pes na ceste" (Chien sur la route, 2010), "Vlastný životopis zla" (L’Autobiographie du mal, 2009), et "RAJc je preč "(The Thrill Is Gone, 2018). Il appartient à cette génération d’écrivains qui a émergé dans les années 1960, transformant fondamentalement la fiction slovaque, mais n'a véritablement été reconnue qu’après 1989, les contraintes de la censure communiste ayant disparu...
Balla (Vladimír Balla, 1967) a le don de capter avec une précision chirurgicale tant les sentiments de désespoir et d'impuissance qui caractérisent souvent la vie moderne que ceux de la frustration et des l'échec dans des sociétés en transition : "Le nom du père" (V mene otca, 2011), la quête psychologique d’un homme en conflit avec sa famille, en particulier avec son père, et avec lui-même, "Grand amour" (Veľká láska, 2015), réflexion sur la solitude et l'obsession amoureuse dans un monde moderne aliénant, ici un narrateur, anonyme, décrit sa relation amoureuse et ses implications émotionnelles, existentielles et sociales, mais "grand amour" annoncé s’effondre rapidement dans une série de désillusions, de frustrations, et d’incapacités à établir une véritable relation humaine. "Carnet d’enregistrements" (Cudzí ou Le Carnet, 2008) est un roman fragmenté relatant des épisodes de vie désordonnés et chaotiques, illustrant toute la difficulté de communiquer et de trouver un sens à la vie, "Pseudologue" (Pseudologia fantastica, 2015), une critique de l'hypocrisie et du matérialisme, et "Les Épitaphes" (Epigramy, 2003), une série de récits courts entrelaçant humour noir et réflexion existentielle ..
Jana Beňová (1974) nous offre une roman fragmenté de la vie quotidienne et de la solitude dans une Bratislava post-communiste (Café Hyena , "Plán odprevádzania", 2008, traduit en anglais sous le titre "Seeing People Off"). Dans Bratislava, représentée comme une ville morne, le Café Hyena incarne un microcosme où les personnages peuvent échapper, temporairement, à leur solitude et au vide de leur quotidien; le roman est construit comme un collage, alternant observations poétiques, dialogues et descriptions brèves, reflétant l’instabilité émotionnelle des personnages; parmi ceux-ci, Elza, la narratrice, une jeune femme à la sensibilité exacerbée, attentive à ses relations et ses émotions avec un regard à la fois cynique et poétique, Ian, son partenaire, avec qui elle partage une relation ambivalente, marquée par l’ennui, l’introspection et malgré tout une quête de sens; Rémi et Kalisto Tanzi, amis d’Elza, qui symbolisent différentes figures de l’errance et du désenchantement, le tout avec un humour subtil où l'absurde est toujours présent ...
Michal Hvorecký (1976) privilégie la dimension satirique et dystopique dans "Troll" (2017), une critique dystopique des médias sociaux et des manipulations politiques numériques, et "Eskorta" (2007), satire de la mondialisation et de son aliénation. - Zuska Kepplová (1982), écrivaine et journaliste slovaque, après s'être attaché à l'observation des expériences des jeunes Slovaques vivant à l'étranger, confrontés aux défis de l'expatriation et de l'identité dans "Buchty švabachom" (Les Brioches en écriture gothique, 2011), poursuit son exploration des thèmes de la migration et de l'identité dans "57 kilometrov od Taškentu" (57 kilomètres de Tachkent, 2013) et "Reflux" (2015), "nomades modernes" naviguant entre différentes cultures en quête d'appartenance ..