PAYSAGES - EAST ASIA - Confucius ...

The middle class in East Asia is one of the most significant and influential in the world, driven by rapid economic growth, urbanization, and industrialization in countries such as China, Japan, South Korea, and Taiwan ...

 


East Asia is undoubtedly one of the most important economic and sociological engines of globalization, driven by its massive population, growing middle class and dynamic economies, and plays a key role in shaping global consumer, cultural and political trends ...

(L’Asie de l’Est est incontestablement l’un des moteurs économiques et sociologiques les plus importants de la mondialisation, poussé par sa population massive, sa classe moyenne en pleine croissance et ses économies dynamiques, et joue un rôle essentiel dans l’évolution des tendances mondiales en matière de consommation, de culture et de politique) ...


Deux milliards? - La classe moyenne en Chine, en Corée du Sud et au Japon joue un rôle significatif et de plus en plus influent dans la mondialisation et l'économie mondiale. Leur importance découle de leur population nombreuse, de leur pouvoir de consommation croissant et de leur contribution au commerce mondial, à l'innovation et aux échanges culturels. Mais cette réalité économique et sociologique n'est peut être pas sans incidence intellectuelle et politique, notamment vis-à-vis d'un Occident embourbé qu'il semble être dans son individualisme traditionnel, à court d'imagination et de créativité. A contrario, entraînée par le développement considérable de sa classe moyenne, n'assiste-t-on pas à la montée des valeurs est-asiatiques dans la culture globale, et notamment celle du "confucianisme" et de certaines valeurs et comportements collectifs? Dans une Asie incroyablement diversifiée avec un large éventail de traditions culturelles, religieuses et philosophiques,  le "confucianisme", l’un de ces nombreux systèmes culturels et philosophiques, a en effet structuré les cadres sociaux, politiques et éthiques de pays comme la Chine, la Corée du Sud, le Japon et le Vietnam. Les sociétés occidentales ne seraient-elles pas tenter, implicitement et faute d'arguments, de s'adapter aux valeurs dites confucéennes, telles que le respect de la hiérarchie, les produits axés sur la famille et l'importance accordée à l'éducation et à l'amélioration de soi...

La pensée confucéenne met l'accent sur la méritocratie, l'ordre social et le respect de l'autorité. Les nations asiatiques qui parviennent à combiner ces valeurs avec une gouvernance interventionniste et souvent autoritaire pourraient présenter un modèle alternatif aux démocraties libérales occidentales qui marquent le pas et se replient sur des valeurs conservatrices faute d'idéaux politiques. Et ce modèle pourrait séduire les pays en quête de stabilité et de développement rapide, en particulier ceux du Sud. D'autant que cet Occident est déjà fortement séduit par ces valeurs dites confucéennes qui tentent à promouvoir une forme de mondialisation plus éthique, mettant l'accent sur la durabilité, le respect de la nature et la réflexion à long terme plutôt que sur la maximisation des profits à court terme ...

L'individualisme à l'occidental peut-il résister aux aspects collectivistes et hiérarchiques du confucianisme et à la force motrice de 2 milliards d'individus acquis à la consommation sans frein et indifférents aux structures politiques tant qu'elles n'interfèrent pas sur leur mode de vie et préservent leurs acquis. Ou n'assisterons nous pas une hybridation des valeurs, un mélange de valeurs confucéennes et d'idéaux occidentaux (mais de quels idéaux occidentaux parle-t-on?) ....

Reste aussi que, malgré la croissance de la classe moyenne, l’inégalité des revenus reste un problème important en Asie de l’Est, comme dans le monde entier, que les avantages de la mondialisation n’ont pas été répartis équitablement, et que des pays comme le Japon et la Corée du Sud sont confrontés à des défis démographiques en raison du vieillissement de leur population ...


Gaozi a dit : " La nature humaine est comme une eau tourbillonnante. Ouvrez-lui un canal à l'est, et elle s'écoulera à l'est ; ouvrez-lui un canal à l'ouest, et elle s'écoulera à l'ouest. La nature humaine ne fait pas de distinction entre le bien et le mal, tout comme l'eau ne fait pas de distinction entre l'est et l'ouest".

 Mencius répondit :

 "Il est vrai que l'eau ne distingue pas l'est et l'ouest, mais ne distingue-t-elle pas le haut et le bas ? La nature humaine est bonne comme l'eau tend à couler vers le bas. Il n'y a pas d'être humain qui ne soit pas enclin à faire le bien, tout comme il n'y a pas d'eau qui ne soit pas encline à couler vers le bas. Or, l'eau, si vous la faites sauter en l'éclaboussant, vous pouvez la faire monter au-dessus de votre front. En l'endiguant et en la canalisant, vous pouvez la forcer à s'écouler vers le haut. Mais est-ce là la nature de l'eau ? C'est le cas en raison de la situation dans laquelle elle se trouve. Bien que l'on puisse amener les gens à faire ce qui n'est pas bon, leur nature reste telle qu'elle était". (Mencius 6B.2)


L’Asie de l’Est (Chine, Corée du Sud, Japon, Taïwan, Singapour) est devenue un centre économique et technologique majeur, et s'impose comme modèle du capitalisme numérique. Parallèlement, la mondialisation économique et technologique a entraîné des transformations profondes des classes moyennes américaines et européennes. Sous l’influence du modèle est-asiatique, basé sur la méritocratie, la discipline et la technologie, la question d'une convergence semble se poser ...

Au XXIᵉ siècle, les classes moyennes continuent à jouer un rôle central dans notre monde, stabilisant les démocraties et les systèmes économiques, structurant la consommation et l'innovation technologique, et persévérant dans leur rôle de pivot entre élites et classes populaires. Elles représentent environ 4 milliards d'individus, dont la moitié se trouve en Asie. 

En Occident, leur pouvoir semble fragilisé par l’influence grandissante de ces mêmes élites et les inégalités croissantes, des élites financières et technologiques, et des élites politiques d'autant plus autoritaires qu'elles profitent d'une profonde désaffection culturelle et politique, notamment en Europe ...

En 2010, l'Europe comptait environ 664 millions de personnes appartenant à la classe moyenne, tandis que l'Amérique du Nord en comptait 338 millions et l'Asie environ 525 millions. D'ici 2030, la part de la classe moyenne mondiale vivant en Europe devrait diminuer à environ 14 % alors que la classe moyenne asiatique pourrait représenter environ 66 % de la classe moyenne mondiale, avec une estimation de 3,2 milliards de personnes ... 


Asie : 50-55 % de la classe moyenne mondiale. - L’Asie abrite la plus grande population de la classe moyenne au monde. Selon l’Institution Brookings et d’autres sources, l’Asie représentait plus de 50 % de la population mondiale de classe moyenne en 2020. La Chine et l’Inde sont les plus grands contributeurs à cette croissance. La Chine compte à elle seule des centaines de millions d’individus appartenant à la classe moyenne, et la classe moyenne indienne se développe également rapidement. D’ici 2030, on estime que l’Asie représentera près de 65 % de la population mondiale de la classe moyenne, avec une croissance importante en Asie du Sud-Est (p. ex., Indonésie, Vietnam et Philippines) et en Asie du Sud (p. ex., Inde, Bangladesh). À compter de 2023, la population de classe moyenne en Asie est estimée à plus de 2 milliards de personnes, avec la Chine et l’Inde représentant collectivement une part importante.

Europe : 20-25 %. - L'Europe abrite 20 à 25 % de la classe moyenne mondiale, soit environ 540 millions de personnes (en 2023). Une classe moyenne bien établie, avec des pays comme l’Allemagne (50-55M), la France (38-40M), le Royaume-Uni (35-40M), l’Italie (30-35M), et l'Espagne (25-28M), qui y contribuent de façon significative. Cependant, la croissance a ralenti par rapport à l’Asie. Dans ces pays, la classe moyenne représente généralement 50 à 65 % de la population totale....

Amérique du Nord : 15 %. - La part mondiale de l'Amérique du Nord représente environ 15 % de la classe moyenne mondiale (environ 370 millions de personnes, en 2023).mondiale. Les États-Unis et le Canada dominent la population de la classe moyenne dans cette région. La classe moyenne en Amérique du Nord est relativement aisée comparativement à d’autres régions, mais sa part de la classe moyenne mondiale a diminué au fur et à mesure que l’Asie se développe rapidement.

Amérique latine : 10-12 %. - L'Amérique latine compte une population de la classe moyenne d'environ 350 millions de personnes (en 2023), soit 10 à 12 % de la classe moyenne mondiale. Des pays comme le Brésil, le Mexique, l’Argentine et la Colombie ont connu une croissance importante de leurs classes moyennes au cours des deux dernières décennies. Cependant, l’instabilité économique et les inégalités dans certains pays ont ralenti les progrès.

Afrique : 10 %. - La population de la classe moyenne, en Afrique, est estimée environ 350 millions de personnes (en 2023), soit environ 10 % de la classe moyenne mondiale. La classe moyenne africaine est en croissance, mais reste relativement petite par rapport à sa population totale. Des pays comme le Nigeria, l’Afrique du Sud, le Kenya et l’Égypte sont les moteurs de cette croissance. Cependant, beaucoup de la classe moyenne africaine sont considérés comme "flottants" ou vulnérables, ce qui signifie qu’ils risquent de retomber dans la pauvreté en raison des chocs économiques.

Moyen-Orient : 3-5 %. - Sur une population totale de 300M d'habitants (2023), on estime la classe moyenne à environ 100 à 150M de personnes (environ 30-50 % de la population régionale). Les pays du Golfe (Arabie saoudite, Émirats arabes unis, Qatar, Koweït, etc.) ont une classe moyenne plus importante en pourcentage de leur population, grâce à des revenus élevés et des économies diversifiées. Les pays à revenu intermédiaire (comme l'Iran, la Turquie et l'Égypte) ont une classe moyenne en croissance, mais souvent fragile. Les pays en conflit ou en crise économique (comme la Syrie, le Yémen et l'Irak) ont une classe moyenne réduite ou en déclin. D'ici 2030, la classe moyenne au Moyen-Orient pourrait atteindre 150 à 200M de personnes ...

(Sources : World Bank, OECD, Brookings Institution, or Pew Research Center).


Ces tendances ont des implications significatives sur l'économie mondiale et les dynamiques géopolitiques au cours des prochaines décennies. L’Asie ne se contente plus d’absorber la culture occidentale, elle exporte désormais activement ses propres normes culturelles et ses récits. Et comme la mondialisation économique et numérique accélère l’adoption de comportements similaires de part le monde, que l’essor du capitalisme technologique et du travail flexible favorise une adaptation aux standards asiatiques, et que les classes moyennes occidentales, en déclin, cherchent des solutions face à la montée des inégalités et à l’instabilité sociale, l'hypothèse d’une homogénéisation des classes moyennes occidentales et orientales sous l’influence du modèle est-asiatique semble pouvoir légitimement se poser ...

 

Ou à minima, l’hypothèse d’un modèle hybride des classes moyennes américaines et européennes sous influence asiatique est plausible, un modèle hybride combinant les supposées forces du modèle est-asiatique (discipline, méritocratie, innovation), du modèle américain (flexibilité, individualisme) et du modèle européen (État-providence, équilibre social).

 

Cette convergence est-elle inéluctable? Il existe encore de part ce monde des différences culturelles et philosophiques qui structurent encore et toujours, outre les barrières linguistiques, notre planète Terre. Très globalement, en Asie, le modèle confucéen fondé sur le collectif, la hiérarchie et l’harmonie sociale, sans oublier un État interventionniste (contrairement aux États-Unis où le marché domine). Aux Etats-Unis, un modèle ultra-individualiste, basé sur la réussite personnelle et l’auto-entrepreneuriat. En Europe, un équilibre entre collectif et individuel (L’Europe est encore réticente à abandonner son modèle social, ce qui freine une adoption totale du modèle asiatique), avec une forte tradition démocratique et syndicale. La perception des inégalités est encore, peut-être pour peu de temps, différente entre une Europe qui les conteste (et en appelle à une régulation sociale) et un bloc Asie / États-Unis qui les voit comme le prix du mérite et du succès (en Chine et en Corée, il existe une élite économique extrêmement riche, avec peu de contestation, et aux États-Unis, le fossé entre riches et pauvres est énorme, mais culturellement accepté). 

L’idéologie du mérite et de la réussite individuelle est sans doute au coeur des convergences éventuelles de ces différentes classes moyennes : aux États-Unis et en Asie (notamment en Chine, Corée du Sud et Japon), les classes moyennes adhèrent fortement au mythe de la méritocratie; aux Etats-Unis, l'idée du self-made man, selon laquelle chacun peut réussir par son travail, est toujours profondément présente;  en Asie, pour reprendre le modèle confucéen, l’éducation et la discipline permettent l’ascension sociale : en Europe, l’ascenseur social était supposé être garanti par l’État, celui-là même qui fournissait protection à l'encontre de toute pression économique intense.

Mais cette idéologie du mérite et de la réussite individuelle gagne du terrain en Europe, paradoxalement par un excès de conservatisme social et d'éthique technocratique. On ne mesure peut-être pas assez le vide des idées politiques et des évolutions démocratiques auquel nous sommes désormais confrontés. Les nouvelles classes moyennes asiatiques, qui consomment à tout va, s'accommodent de toutes les formes de pouvoir, fussent-elles autoritaires, tant que l'enrichissement reste possible. Reste le problème de la fracture entre élites mondialisées et classes moyennes en crise ...


Cette montée des valeurs est-asiatiques dans la culture globale, que porte le développement considérable de sa classe moyenne, en  recouvre donc celle du "confucianisme" et de certaines valeurs collectives : contrairement à l’individualisme traditionnel à l'occidental, les classes moyennes asiatiques favorisent l’éducation (une certaine forme d'éducation), le respect de l’ordre et le travail assidu ... 

Et la liberté s'y exerce sous forme de "divertissement" ("yúlè" en mandarin, "Nihongo" en japonais, "Hangugeo" en coréen) ...

La mode excentrique au Japon (Harajuku, Visual Kei, Gothic Lolita) est une contre-culture qui permet de sortir des codes habituels; les jeux vidéo immersifs en Chine et Corée sont des mondes où l’individu peut s’exprimer plus librement. Le cosplay et les événements pop culture, des lieux où l’on peut s’affirmer hors des conventions sociales. Le rôle du divertissement dépasse donc largement celui du simple loisir et est profondément lié à l’organisation sociale, au rythme de vie et aux pressions culturelles. Lui aussi est une composante de la culture mondialisée qui structure notre monde. Disneyland Shanghai et Tokyo, Lotte World en Corée sont des parcs d’attractions ultra-fréquentés et les cafés à thème (manga, chats, gaming, cosplay), un besoin de micro-évasion accessible ...

Pour Confucius, globalement, le divertissement doit servir à renforcer l’harmonie sociale, les loisirs doivent consolider les liens sociaux plutôt que les affaiblir, un bon divertissement renforce les valeurs collectives. Ici, le divertissement constitue bien un exutoire et un outil de contrôle social ..


"Much of early Chinese thought is elitist. It is ruler- rather than people centred. Chinese philosophers devoted most of their time to thinking about  those who occupied leading roles in society: the ruler, the general, the sage,  the worthy, the scholar, the noble person, the authentic person, the king, the  sovereign, the lord, the duke or the emperor. Defining the art of rulership,  therefore, stood high on the agenda of ancient China’s ‘Hundred Masters’, a  term used to refer to the collective of thinkers of the fourth and third  centuries BCE. There is virtually no Chinese philosopher from this period  who does not have a view on how to manage people and rule society, and  that includes those who preferred to withdraw from the lure of  statesmanship rather than engage with the world...." ("Chinese Thought: From Confucius to Cook Ding", written by Roel Sterckx, 2019)

 

"Une grande partie de la pensée chinoise ancienne est élitiste. Elle est centrée sur le dirigeant plutôt que sur le peuple. Les philosophes chinois ont consacré la majeure partie de leur temps à réfléchir sur ceux qui occupaient des rôles de premier plan dans la société : le dirigeant, le général, le sage, le digne, le savant, la personne noble, la personne authentique, le roi, le souverain, le seigneur, le duc ou l'empereur. La définition de l'art de gouverner figurait donc en bonne place dans l'agenda des « cent maîtres » de la Chine ancienne, terme utilisé pour désigner l'ensemble des penseurs des IVe et IIIe siècles avant notre ère. Il n'y a pratiquement aucun philosophe chinois de cette période qui n'ait un avis sur la manière de gérer les gens et de diriger la société, y compris ceux qui ont préféré se soustraire à l'attrait de la fonction d'État plutôt que de s'engager dans le monde.

 

Qu'est-ce qui fait la puissance d'une personne ? Est-ce la personnalité, le talent inné ou la capacité à repérer le potentiel et à persuader les autres de travailler pour vous ? Est-ce le charisme, la simple intelligence, ou le pouvoir et l'autorité ne sont-ils que le produit de la position ou de l'institution que l'on occupe (les enseignants ont toujours la parole en premier, même s'ils n'ont rien d'important à dire) ? Comment alors inspirer les autres ou repousser ses adversaires, se protéger et évaluer la loyauté de ceux qui vous entourent ? Faut-il être invisible ou aller à la rencontre des gens ? Faut-il s'affirmer, donner l'exemple, ou vaut-il mieux se cacher derrière de hauts murs ou au fond d'un palais pour que les autres aient à imaginer sa puissance ? Pourquoi ne pas simplement se débarrasser de ceux qui ne sont pas d'accord avec vous (subtilement, si nécessaire) et récompenser ceux qui sont prêts à être l'écho de votre cri et le bras de votre torse ? Comment réprimander les gens qui ne font pas leur travail, quel ton et quel langage adopter pour donner des ordres et des directives ? Faut-il expliquer en détail ce que l'on veut obtenir ou vaut-il mieux se taire (même si l'on a quelque chose à dire) et faire passer sa communication par la voix des autres ? Quel est le meilleur moyen de faire passer votre message ? Vous lancez-vous avec assurance et sans détour dans un « Je pense que... », « Je dis que... », « Je suis d'avis que... », « À mon avis... » ? Ou bien une formule plus indirecte : « On dit que... », « J'ai entendu dire que... », « Les anciens nous disent que... » (trois des formules les plus courantes dans le dialogue chinois classique) ?

 

Ce sont les types de questions qui ont préoccupé les penseurs chinois lorsqu’ils ont tenté d’identifier les caractéristiques qui distinguent ceux qui gouvernent de ceux qui sont gouvernés. Ils étaient unis dans leur fascination pour la question de savoir comment on doit se positionner pour gouverner ou diriger avec le plus d’efficacité. Il n’y avait pas de désaccord sur la prémisse fondamentale selon laquelle le pouvoir doit être monarchique, c’est-à-dire concentré entre les mains d’un seul dirigeant ou d’une seule figure de proue. Pourtant, chaque penseur proposait une stratégie différente pour donner du pouvoir à ceux qui devaient accomplir le Mandat du Ciel avec succès. Certains ont soutenu que la société pourrait être mieux dirigée par une personne d’autorité morale qui gouverne par l’exemple. D’autres ont affirmé qu’il ne suffisait pas d’avoir un pouvoir total et absolu. Pour certains, la question était de savoir s’ils devaient entrer ou sortir. Certains ont insisté sur le fait que la meilleure façon de gouverner n’est pas de gouverner, tandis que d’autres ont soutenu que les décisions prises par des moyens indirects étaient les plus efficaces. Les idéalistes ont inventé des théories sur ce qu’ils pensaient que la société devait être; les réalistes ont regardé les dures réalités du monde dans lequel ils vivaient et ont conçu la politique comme l’art de ce qui était possible là-bas et alors...."

 

"... À l'instar d'une armée dirigée par un général éclairé, la société devrait être dirigée par une avant-garde de personnes moralement accomplies. Cet idéal de la société en tant que communauté harmonieuse (he) dirigée par une élite exemplaire est au premier plan de la philosophie du penseur le plus durable et le plus influent de Chine : Confucius. Les traits de personnalité qui composent la personne confucéenne autoritaire convergent vers un ensemble de valeurs qui imprègnent la pensée sociale et politique chinoise. Ces vertus dites confucéennes comprennent le sens de la droiture (yi), la sincérité (cheng) ou la fiabilité (xin), la bienveillance ou l'humanité (ren), la bienséance rituelle (li), la dévotion filiale (xiao) et le désir d'être loyal (zhong), prévenant (shu) et bien informé (zhi) ...."


Confucius (551-479 av. J.-C.) a formulé un système éthique et politique qui a structuré la Chine pendant des millénaires. Ses "Entretiens" (Lúnyǔ) sont devenus le fondement d'un système de pensée, le confucianisme, qui a influencé la Chine, la Corée, le Japon, le Vietnam et d’autres pays d’Asie de l’Est. Pendant plus de 2 000 ans, l’enseignement confucéen fut la base des examens impériaux chinois (kējǔ), déterminant qui pouvait gouverner la Chine. Le confucianisme est resté la philosophie dominante en Chine jusqu’au XXe siècle et continue d’influencer la culture chinoise et asiatique. Aujourd’hui, plus d’un milliard de personnes vivent encore sous l’influence des valeurs confucéennes (Chine, Corée, Japon, Vietnam). Même après la Révolution culturelle de Mao Zedong, qui a tenté de supprimer le confucianisme, la Chine moderne redécouvre et réhabilite les idées de Confucius.

Contrairement aux textes religieux, les Entretiens ne parlent ni de divinité ni de salut, ni de métaphysique, mais de l’ordre social et moral de ce monde. Hegel, que l'on peut contester, placer Confucius dans la tradition des penseurs qui cherchent à organiser la société sur la base de règles éthiques et non sur un questionnement métaphysique profond. Pour Hegel, la pensée chinoise est statique, tournée vers l’ordre social et non vers une dynamique dialectique du développement de l’Esprit (Geist). Il estime que Confucius ne cherche pas la vérité en elle-même, mais plutôt à maintenir l’harmonie sociale par la morale et le respect des rites, une approche qui ne permet guère cette pensée de l’évolution historique et philosophique que l’on trouvait en Occident jusqu'à ce qu'achève le XXe siècle ...

Le maintien de son individualité dans ce qui pourrait ressembler à une quasi harmonie sociale semble aujourd'hui la pensée, s'il y a pensée, dominante de ce début du XXIe siècle : dans le contexte de mondialisation qui est aujourd'hui le nôtre, l'Occident semble entrer en résonnance avec l'Orient ... 


Les ENTRETIENS (Loueuyu - Lunyu) constituent l`œuvre la plus importante pour la connaissance de la pensée du philosophe chinois Confucius (dates traditionnelles 551-479 av. J.-C.). Composée de vingt chapitres, ils rapportent les discussions entre le maître et ses disciples. discussions que ceux-ci eurent soin de noter. Les problèmes traités concernent la morale, la politique et la méthode ... 

Le "Jen", ou concept d'humanité, dérive pour Confucius du concept traditionnel du "T`ien" (ciel) qui gouverne l'Univers avec justice et bonté. L`humanité. dans son acception générale, embrasse toutes les manifestations possibles : la politique et la religion, en particulier. ne peuvent exister sans elle. Mais les Dialogues ne livrent pas qu'une seule conception de l'humanité ; Confucius en parle de différentes manières. selon que c'est l'un ou l'autre de ses disciples qui a recueilli sa pensée. 

Pour Yen Yuan (le disciple qui est le plus porté à la spéculation morale), posséder sa propre humanité, c`est se mortifier et se faire une règle de l'intérêt commun (exprimé par les rites). Mais lorsqu'iI interrogea Confucius sur la vertu parfaite. le Maître répondit : "Que vos yeux, vos oreilles, vos langues, tout en vous soit maintenu dans les règles de l'honnêteté [...] Ne faites pas à autrui ce que vous ne voulez pas qu`on vous fasse à vous-même. Dans la principauté, personne ne sera mécontent de vous ; dans la famille. personne ne se plaindra de vous" (Dialogue XII). 

Pour Tse Kong (le disciple qui s`adonne à la dialectique), l`humanité consiste à se stabiliser soi-même avant de stabiliser les autres, et à devenir soi-même compréhensif, au lieu d'attendre que les autres le soient (Dialogue VI). Pour conquérir cette humanité, il faut avoir courage et bonne volonté, ainsi que bon sens et intelligence. Un gouvernement comme celui des premiers

temps des Tcho (vers l 122 av. J .-C .) - gouvernement qui est aux yeux de Confucius un modèle à imiter - dit son exceptionnelle perfection à la sagesse et à la vertu des souverains. Un bon gouvernement appuie son autorité sur la force des armées, la satisfaction d`un peuple suffisamment pourvu de vivres, et la confiance qu`il inspire. Si la nécessité oblige à se passer de l'un ou de l'autre de ces trois éléments de base, il importe de renoncer tout, d'abord aux armées, puis à la nourriture, mais jamais à la confiance, parce que "la mort a existé et existera de tout temps, mais un peuple ne peut se survivre s'il n`a foi en son souverain". La conséquence de cette attitude est le respect des lois ; une distinction naturelle, et acceptée par tous doit s`établir entre supérieurs et inférieurs, de sorte que tous demeurent à leur poste et accomplissent leur, tâche, faisant par là régner l'ordre et la félicité.

L'attitude de Confucius consiste à prendre soin en effet d`adapter son enseignement à la nature de ses disciples, et de développer les possibilités de chacun. C'est à force de volonté qu`il a réussi à être un grand Maître : "A 15 ans, je m`appliquais à l'étude de la sagesse, dit-il; à 30 ans, je marchais d`un pas ferme dans le chemin de la vertu; à 40 ans, j`avais l'intelligence parfaitement éclairée; à 50 ans, je connaissais les lois de la Providence; à 60 ans, je comprenais, sans avoir besoin d`y réfléchir, tout ce que mon oreille entendait; à 70 ans, en suivant les désirs de mon cœur, je ne transgressais aucune règle" (Dialogue II, 4).

Et c'est avec un grand zèle qu`il entreprend de conduire ses disciples sur le chemin de la vérité et des venus. Yen Yuan dit que le Maître le conduit adroitement suivant le plan qu'il avait établi. ll donne du champ à son esprit grâce aux études, il règle sa conduite d`après les exigences de la nécessité. Quand il tente de se détourner de l'étude. il n'y réussit pas, quoi qu'il fasse; il lui semble que quelque chose se dresse devant lui. et, bien qu`il veuille s`en saisir, il ne trouve aucun moyen de le faire.

Dans ces Dialogues, Confucius apparaît comme le plus grand Maître et le premier moraliste du monde oriental. D'aucuns le considèrent même comme le Maître de morale par excellence, du fait que parmi ses disciples il ne s`en est pas trouvé un seul qui prit le contre-pied de son enseignement, ou qui ait construit un système plus puissant... 


Le Penser Droit - Le confucianisme remonte à l'enseignement de CONFUCIUS (551-479 av. J.-C.) qui se situe dans la tradition d'une pensée extrêmement ancienne auquel il veut donner une autorité. Lui-même n'a laissé aucun écrit. Son enseignement fut rassemblé par ses disciples dans l'ouvrage intitulé "Lun Yü". Sa pensée a pour objet la vie concrète de l'être humain et les enjeux de la vie pratique ; il défend une philosophie morale et politique de tradition ritualiste. Les vertus fondatrices sont : l'humanité, la droiture, la décence, la sagesse et la loyauté. Elles se réalisent dans les relations fondamentales entre souverain et serviteur, père et fils, frères aîné et cadet, époux et épouse, ami et ami. La stabilité du Royaume repose sur la moralité de l'individu et sur le rôle central de la famille. Le véritable souverain gouverne son peuple uniquement par le modèle moral qu'il donne. Un extrait du Zhongyong établit le lien moral qui relie le tout et ses membres :

"Si quelqu'un veut gouverner son pays, il doit d'abord tenir sa famille en ordre. Si quelqu'un veut tenir sa famille en ordre, il doit d'abord former son caractère. Si quelqu`un veut former son caractère, il doit d'abord posséder un cœur droit. Celui qui veut posséder un cœur droit, doit d'abord penser droit. Celui qui veut penser droit, doit d`abord parvenir au jugement droit. "

Le programme confucéen d'éclaircissement et de classification des termes est mis au service du penser droit. 

 

L'idéal est le noble cultivé, le sage. C'est pour cette raison qu`une importance toute particulière est accordée à l'éducation qui s'applique à la fois à l'esprit et au cœur. MENCIUS (371-289 av. J .-C.) pense que l'homme est bon par nature. Les fondements de toutes les vertus sont donc innés et l'être humain e a pour unique tâche de les conserver et de les développer. La situation de l'Etat dans sa totalité dépend de la qualité morale du souverain. Les hommes suivent spontanément un bon souverain, dont le but le plus élevé doit être le bien-être et la morale de son peuple.

Au contraire, XUN ZI (vers 313-238 av. J.-C.) croit que l'homme est mauvais par nature et qu'il ne peut s'améliorer que péniblement, grâce à l'éducation et à la culture. Le groupe des « Légistes » adopte une position opposée à la doctrine politique du confucianisme reposant sur la morale. Ils visent à établir un Etat plus puissant et plus uni dont les soutiens sont l'armée et l'agriculture. Les fondements en sont constitués par des prescriptions parfaitement claires et obligatoires pour chacun, prescriptions dont l'observation doit être garantie par un système rigoureux de peines et de récompenses. Le programme des Légistes, fondé sur la face politique, est prosaïque, pragmatique et moderniste. 


"The Analects of Confucius", traduction et commentaire par Arthur Waley, l'une des meilleures en anglais.  - "Confucianism and Chinese Civilization", d'Arthur F. Wright (1964), analyse de l’impact du confucianisme sur la culture et la politique chinoise. - " China: A History", de John Keay (2008), montre comment le confucianisme a structuré la politique chinoise pendant des millénaires. - "Confucius Speaks : Words to Live By" (1996), de Tsai Chih Chung, un illustrateur et dessinateur taïwanais de renom, connu pour sa capacité à distiller des idées philosophiques complexes en bandes dessinées simples, humoristiques et visuellement attrayantes. Un livre qui fait partie de sa série qui explore la philosophie orientale, y compris des travaux sur Laozi, Zhuangzi et Sunzi. - "China in the World: An Anthropology of Confucius Institutes, Soft Power, and Globalization, Jennifer Hubbert (2019) : les Instituts Confucius, programmes linguistiques et culturels financés par le gouvernement chinois, ont été créés dans plus de 1500 écoles à travers le monde depuis leurs débuts en 2004. Pièce maîtresse du soft power chinois, ils représentent un effort pour faciliter le chemin de la Chine vers le statut de superpuissance en renforçant son attrait mondial, ce qui ne va pas sans de nombreuses interrogations sur comment sont construites et "consommées" les représentations que la Chine veut donner d'elle-même. - ...


"Confucius: And the World He Created", Michael A. Schuman (2015) - Confucius est peut-être le philosophe le plus important de l’histoire. Aujourd’hui, ses enseignements influencent la vie quotidienne de plus de 1,6 milliard de personnes. En Asie de l’Est, l’influence de Confucius peut être observée dans tout, des pratiques commerciales aux relations familiales en passant par les normes d’éducation et les politiques gouvernementales. Même si les idées occidentales, du christianisme au communisme, ont bombardé la région, la doctrine de Confucius est restée le fondement de la culture d’Asie orientale. Il est impossible de comprendre l’Asie de l’Est, démontre le journaliste Michael Schuman, sans d’abord s’engager avec Confucius et son vaste héritage. Confucius a créé une vision du monde qui est à bien des égards distincte de la culture occidentale et en conflit avec elle. Comme le montre Schuman, la façon dont les entreprises d’Asie de l’Est sont gérées, la manière dont les membres des familles interagissent entre eux et la façon dont les gouvernements perçoivent leur rôle dans la société diffèrent tous de la norme en Occident en raison de l’impact durable de Confucius. Confucius a été crédité d’avoir donné à l’Asie de l’Est un avantage dans le monde d’aujourd’hui, en inculquant à son peuple une dévotion pour l’apprentissage et en propulsant le progrès économique de la région. Pourtant, le sage a également été très controversé. Au cours des 100 dernières années, les Asiatiques de l’Est se sont demandé si la région pouvait devenir vraiment moderne alors que Confucius restait si enraciné dans la société. Il a été critiqué pour avoir causé l’inégalité des femmes, promouvoir les régimes autoritaires et supprimer les droits de la personne. Malgré ces débats, les Asiatiques de l’Est se tournent aujourd’hui vers Confucius pour qu’il les aide à résoudre les maux de la vie moderne plus qu’ils ne l’ont fait en un siècle. À mesure que l’Asie, riche et de plus en plus puissante, s’élèvera sur la scène mondiale, Confucius occupera également une place plus importante dans la culture mondiale. Touchant à la philosophie, l’histoire et les affaires courantes, Confucius raconte l’histoire vivante et dramatique du philosophe énigmatique dont les idées restent au cœur de la civilisation asiatique orientale.

 

" Twenty-five hundred years after Confucius first expounded his ideas, they  remain ensconced within the societies of East Asia, having survived endless  political upheavals, economic metamorphoses, and a torrent of foreign doctrines, religions, and cultural influences. Although in recent decades  East Asia has undergone fantastically accelerated modernization, there is  still simply no way to interact with a Chinese, Korean, or Japanese person  without understanding, and contending with, the ancient ideals of  Confucius...."

 

"Vingt-cinq cents ans après que Confucius ait exposé ses idées, celles-ci restent ancrées dans les sociétés d'Asie de l'Est, ayant survécu à d'interminables bouleversements politiques, à des métamorphoses économiques et à un torrent de doctrines, de religions et d'influences culturelles étrangères. Bien qu'au cours des dernières décennies, l'Asie de l'Est ait connu une modernisation fantastiquement accélérée, il est toujours impossible d'interagir avec un Chinois, un Coréen ou un Japonais sans comprendre les anciens idéaux de Confucius et sans s'y confronter. Ses enseignements peuvent être découverts dans les bureaux ministériels et les chambres parlementaires, régissant la manière dont les fonctionnaires élaborent les politiques et entretiennent des relations avec leurs citoyens ; dans les salles de conseil d'administration des entreprises et dans les ateliers, guidant les PDG sur la stratégie commerciale et les ressources humaines ; dans les salles de classe, dictant la manière dont les enseignants éduquent leurs élèves ; et dans les chambres à coucher, s'immisçant dans les relations entre les maris et les épouses. Confucius influence la façon dont les Asiatiques de l'Est conçoivent la démocratie, élèvent leurs enfants, choisissent leur carrière, se socialisent au bureau et comprennent leur propre identité. Il est impossible de mener à bien des affaires, de négocier avec un fonctionnaire, de comprendre les problèmes qui se posent dans les relations amoureuses ou de saisir ce qui motive les Asiatiques de l'Est aujourd'hui sans avoir une idée de Confucius.

 Cela fait incontestablement de Confucius l'un des hommes les plus importants de l'histoire de l'humanité. Ses enseignements modèlent la vie quotidienne de plus de 1,6 milliard de personnes aujourd'hui, soit près d'un quart de la population mondiale, dans une immense zone géographique qui s'étend du nord du Japon jusqu'à Java en Indonésie (His teachings shape the daily lives of well over 1.6 billion  people today, nearly a quarter of the world’s population—in a huge  geographic swath stretching from northern Japan down to Java in Indonesia). Seul le christianisme peut prétendre exercer une plus grande influence sur la culture mondiale moderne. Même si l'Asie a été bombardée d'influences extérieures - du Manifeste communiste à la Bible en passant par Harry Potter, du moka latte à McDonald's en passant par Britney Spears - Confucius a perduré, faisant trop partie de la vie quotidienne pour être étouffé, déraciné ou remplacé. Confucius se classe donc aux côtés d'Abraham, de Jésus, de Mahomet et de Siddhartha Gautama (mieux connu sous le nom de Bouddha), ainsi que d'Aristote et de Platon, comme l'un des fondateurs de la civilisation moderne.

Malgré cette réalité, la plupart des Occidentaux ne savent pratiquement rien de Confucius. Cette méconnaissance est en fait assez dangereuse. (Despite this reality, most westerners hardly know anything about Confucius. That lack of knowledge is actually quite dangerous) Alors que l'Asie prend de l'importance au niveau mondial, avec un poids plus important dans l'économie mondiale et la géopolitique internationale que la région n'en a connu depuis des siècles, Confucius et la culture qu'il a créée sont en train de s'élever avec elle. Pour faire face aux nations nouvellement autonomes de l'Asie de l'Est, pour comprendre les motivations des hommes d'affaires, des hommes politiques et des décideurs de la région, l'Occident doit plus que jamais apprendre à connaître Confucius, sa philosophie et son héritage (the West needs to learn,  more than ever before, about Confucius, his philosophy, and his legacy).  Ce que nous devons comprendre, aux États-Unis et en Europe, c'est que la civilisation de l'Asie de l'Est est construite sur une base philosophique entièrement différente de la nôtre - dans une large mesure, les enseignements de Confucius. (What we in the United States and Europe have to appreciate is that East Asian civilization is constructed on an entirely different philosophical basis  than our own—to a great degree, the teachings of Confucius).

Les universitaires et les hommes politiques occidentaux ont étudié pendant des siècles les philosophes grecs (Aristote, Platon, Socrate), la Bible et d'autres ouvrages judéo-chrétiens, ainsi que les penseurs qui ont jeté les bases de la société moderne en Occident, tels que John Locke, Thomas Hobbes et Adam Smith.  

Il n'en va pas de même en Asie de l'Est. Historiquement, les universitaires, les écrivains et les fonctionnaires de cette partie du monde ont lu les classiques confucéens, qui ont constitué l'épine dorsale idéologique des institutions gouvernementales de l'Asie de l'Est, les programmes de ses académies et les normes du discours social. En Chine, la connaissance du canon confucéen et des nombreux commentaires et essais qui s'y rapportent était traditionnellement une condition préalable à l'ascension sociale et professionnelle, l'éducation de base qu'il fallait posséder pour être considéré comme véritablement civilisé. Les fonctionnaires chinois ont gagné leur emploi en maîtrisant ces classiques pendant 1 900 ans. En Asie de l'Est, c'est Confucius, et non Moïse, qui a transmis les normes de la morale humaine. C'est Confucius, et non Locke ou Thomas Jefferson, qui a forgé la relation entre le citoyen et l'État et la position de l'individu dans la société. (In East Asia, it was Confucius, not Moses, who  handed down the standards for human morality. It was Confucius, not  Locke or Thomas Jefferson, who forged the relationship between citizen  and state and the position of the individual in society).

Le confucianisme n'a pas été la seule influence sur la civilisation de l'Asie de l'Est. Le bouddhisme, par exemple, a joué un rôle important. Il en va de même pour les religions et idéologies étrangères qui sont arrivées dans la région au cours des deux cents dernières années, du christianisme au marxisme. Confucius est loin d'être le seul philosophe brillant de l'histoire asiatique. Laozi, le fondateur (peut-être mythique) du taoïsme, n'est qu'un des nombreux penseurs importants dont l'influence se fait encore sentir dans la vie asiatique. Pourtant, aucun individu n'a exercé une plus grande influence sur l'Asie orientale pendant une période aussi longue que Confucius. En effet, l'histoire de la civilisation de l'Asie orientale est synonyme de développement de la doctrine confucéenne..."


Confucius a vécu pendant la période des Printemps et Automnes (770-476 av. J.-C.), une époque de grande instabilité politique en Chine. Issu d’une famille noble déchue de l’État de Lu (aujourd’hui dans le Shandong), il a développé une pensée cherchant à restaurer l’harmonie sociale et politique en s’inspirant des anciens rites et traditions. Il s’inscrit donc dans une tradition de rétablissement des valeurs ancestrales, notamment celles des Rois-Sages de la dynastie Zhou. Son objectif principal était donc de rétablir un gouvernement juste et stable à travers une éthique personnelle et sociale basée sur les vertus.

L'enseignement de Confucius repose sur plusieurs concepts fondamentaux qui structurent aussi bien la morale individuelle que l’ordre social :

- La Vertu Principale : Le "Ren"

Le "Ren" est souvent traduit par "bienveillance", "humanité" ou "altruisme". Il représente l’idée selon laquelle un individu doit cultiver l’amour des autres et un profond sens moral. « Le sage cultive le Ren et ne se lasse jamais de le pratiquer ». Maître de la peinture traditionnelle chinoise, Qi Baishi (1864-1957 met en avant une esthétique de la simplicité et de l’humilité, deux valeurs centrales du confucianisme...

- La Propriété Rituelle : Le "Li"

Le "Li" désigne les rites et les normes sociales qui régulent les relations humaines. Pour Confucius, le respect des rituels permet d’instaurer une harmonie durable entre individus et dans la société. « Si l’on s’appuie uniquement sur les lois et les punitions, on obtiendra la soumission, mais non la vertu »

- La Justesse Morale : Le "Yi"

"Yi" signifie la droiture morale, le sens du devoir. Un homme vertueux agit par principe et non par intérêt personnel.

- Le Gouvernement par la Vertu

Contrairement aux légalistes qui prônent un contrôle strict par des lois et des punitions, Confucius propose que les dirigeants doivent gouverner par l'exemple. Il affirme que l’homme vertueux inspire naturellement le peuple : « Gouvernez par la vertu et vous serez comme l’étoile polaire, autour de laquelle les autres étoiles gravitent naturellement ».

 

Les principales sources de la pensée de Confucius sont :

- Les "Entretiens" (Lunyu, 论语) – Une compilation de ses dialogues et enseignements.

- Le "Livre des Rites" (Liji, 礼记) – Décrit les règles rituelles et sociales.

- Le "Grand Étude" (Daxue, 大学) – Traite du perfectionnement moral.

- Le "Doctrine du Milieu" (Zhongyong, 中庸) – Expose l’équilibre entre émotion et rationalité.

 

Après sa mort, son enseignement a été systématisé par Mengzi (Mencius, 372-289 av. J.-C.) et Xunzi (310-235 av. J.-C.). Sous la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.), le confucianisme devient idéologie d’État.  


La Corée partage avec la Chine et le Japon une tradition confucéenne, une tradition porteuse d'une stabilité et d'une harmonie communautaire, mais en insistant sur deux traits distincts, notamment une hiérarchie sociale stricte basée sur l’âge et une culture du respect des aînés particulièrement développée ..

- Cette hiérarchie sociale où l'âge joue un rôle déterminant, appelée "yeonjang-juseo", implique que les individus plus jeunes doivent respect et obéissance à leurs aînés, une structure qui influence divers aspects de la vie quotidienne, que l'on retrouve dans l'utilisation de niveaux de langage honorifiques pour s'adresser aux personnes plus âgées, dans les interactions sociales, dans le milieu professionnel  (les décisions sont souvent influencées par l'ancienneté et l'âge, indépendamment des compétences individuelles). Une hiérarchie qui favorise la cohésion sociale en établissant des rôles clairs, mais peut également limiter l'expression individuelle et l'innovation, notamment chez les jeunes générations ...

- Le respect des aînés, ou "chon-gye", est une valeur centrale en Corée et se manifeste par des célébrations spécifiques ou des fêtes comme le "Hwangap", des priorisations ou des responsabilisations spécifiques, mais confrontées aujourd'hui aux évolution des structures familiales et à un individualisme croissant...


"The Confucian Transformation of Korea: A Study of Society and Ideology", by Martina Deuchler (1992) - Le néo-confucianisme a servi d'outil pour restructurer la société coréenne, établissant des normes sociales et des hiérarchies qui ont perduré pendant des siècles. Deuchler analyse ici la transition de la Corée du royaume de Koryŏ à la dynastie Chosŏn (1392-1897), époque charnière qui vit l'adoption du néo-confucianisme comme idéologie dominante. Une adoption qui a transformé divers aspects de la société, notamment :

- les structures familiales et lignées : L'introduction du néo-confucianisme a renforcé le système patriarcal, mettant l'accent sur les lignées masculines et la primauté des ancêtres paternels.

- les rituels et pratiques culturelles : Les rituels confucéens, tels que le culte des ancêtres et les rites de deuil, ont été institutionnalisés, influençant profondément les comportements sociaux et les obligations familiales.

- le rôle des femmes : La position des femmes a été redéfinie, limitant leurs droits en matière d'héritage et renforçant leur rôle au sein du foyer en tant que gardiennes des valeurs familiales.

- le système éducatif et la bureaucratie : L'éducation confucéenne est devenue essentielle pour l'ascension sociale, avec les examens impériaux servant de principal moyen d'accès aux positions gouvernementales.

 

Dans "Korean Confucianism: The Philosophy and Politics of Toegye and Yulgok" (2018),  Hyoungchan Kim étudiera le néo-confucianisme coréen à travers les vies et les travaux de deux figures emblématiques de la dynastie Joseon, Yi Hwang (Toegye) et Yi I (Yulgok). Le néo-confucianisme fut adopté comme idéologie d'État en 1392, a modelé la Corée pendant plus de cinq siècles jusqu'à la fin de la dynastie Joseon en 1910. L'auteur se concentre sur les contributions de Toegye et Yulgok, qui ont fondé les deux principales écoles de pensée néo-confucéenne en Corée. Le livre analyse leurs philosophies respectives et leur impact sur la société et la politique coréennes.


"Confucianism in Context: Classic Philosophy and Contemporary Issues, East Asia and Beyond" est un ouvrage collectif dirigé par Wonsuk Chang et Leah Kalmanson, publié en 2010. Cet ouvrage offre une perspective exhaustive sur le confucianisme, explorant à la fois ses fondements philosophiques et sa pertinence contemporaine dans divers contextes culturels et géographiques. Le confucianisme, bien que né en Chine, a été adopté et adapté différemment en Corée et au Japon en raison de contextes historiques, sociaux et politiques distincts ... 

 

La Chine fut le berceau du confucianisme, Confucius (Kongzi, 551-479 av. J.-C.) et ses disciples. La Chine impériale utilisera le confucianisme comme outil de gouvernance et de légitimation politique. Adopté sous les Han (206 av. J.-C. – 220 apr. J.-C.), il devint la base du système administratif via les examens impériaux (keju), mais dut par la suite coexister avec le taoïsme et le bouddhisme : contrairement à la Corée et au Japon, la Chine intègrera ces philosophies dans une approche syncrétique. Sous les Qin (221-206 av. J.-C.), le confucianisme fut violemment réprimé. Et durant la Révolution culturelle (1966-1976), il fut attaqué comme une idéologie féodale. Aujourd’hui, la Chine réhabilite Confucius comme un élément du soft power et du nationalisme chinois. 

 

En Corée, un tout autre schéma se dessine, le confucianisme structurera toute la société...

La dynastie Joseon (1392-1910) fit du néo-confucianisme (de Zhu Xi, XIIᵉ siècle) son idéologie dominante, supplantant le bouddhisme, et la structure sociale sous l'emprise de la classe des yangban (lettrés confucéens), avec une mobilité sociale particulièrement restreinte. Le confucianisme coréen a durci la hiérarchie familiale et le statut des femmes, restreignant leurs droits (héritage, divorce, éducation), et les rites confucéens (jerye) furent strictement appliqués, notamment dans le culte des ancêtres. L’adoption stricte du confucianisme visait à structurer l’État et légitimer la monarchie. À partir du XVIIᵉ siècle, la Corée s’est fermée à l’influence étrangère, renforçant cette application rigide du confucianisme. Et contrairement à la Chine et au Japon, la modernisation coréenne fut freinée par l’influence néo-confucéenne jusqu’à l’occupation japonaise (1910-1945).

 

Introduit via la Chine dès le VIᵉ siècle, le confucianisme japonais n’a jamais remplacé le shintoïsme et le bouddhisme. Sous les Tokugawa (1603-1868), le confucianisme fut utilisé pour renforcer la hiérarchie féodale mais avec un bushidō (code des samouraïs) insistant sur la loyauté et l’honneur plutôt que sur la piété filiale. Contrairement à la Corée, la structure familiale était moins stricte, et les femmes avaient plus de marges de manœuvre sociales. Avec l’ère Meiji (1868-1912), la modernisation rapide du Japon a marginalisé le confucianisme au profit du nationalisme et de l’industrialisation. Le Japon n’a jamais connu de rupture religieuse majeure, ce qui a permis une coexistence harmonieuse du confucianisme avec d’autres croyances et, contrairement à la Corée, où les lettrés dominaient, la classe militaire (samouraïs) jouait un rôle central. Avec l’ère Meiji, le Japon a rapidement adopté les modèles occidentaux, réduisant l’influence confucéenne dans la sphère publique...

 

C'est ainsi que la Corée a donc poussé son application à l’extrême, en construisant la société la plus confucéenne de l’histoire. Aujourd'hui, la Corée du Sud reste marquée par la hiérarchie confucéenne (dans les entreprises, la famille), la Chine l’exploite pour son soft power, tandis que le Japon lui accorde une importance moindre, privilégiant d’autres références culturelles ...


"The Cloud Dream of the Nine" (Guunmong) est un roman classique coréen écrit par Kim Man-jung au XVIIᵉ siècle sous la dynastie Joseon. Ce texte est considéré comme l'un des chefs-d'œuvre de la littérature coréenne pré-moderne et l'un des premiers romans coréens influencés par le bouddhisme et le confucianisme. C'est aussi l'une des premières oeuvres traduites en anglais. L'auteur y développe les thèmes de l’illusion, du rêve et du désir humain à travers l’histoire de son protagoniste, Shao-yu (So-yu en coréen), qui vit une vie de luxe et de plaisirs avant d’être confronté à une révélation spirituelle : une structure typique des récits bouddhistes sur l’illusion du monde matériel construite autour du concept d’impermanence (musang) et de la nécessité de transcender les désirs pour atteindre l’illumination.

L’histoire commence avec un moine bouddhiste, Hsing-chen (Seong-jin en coréen), qui est un disciple dévoué dans un monastère. Cependant, à cause d’un écart mineur dans sa pratique, il est réincarné en tant que Shao-yu (So-yu), un homme noble vivant en Chine sous la dynastie Tang. So-yu grandit et s'affirme comme jeune homme talentueux, séduisant et érudit. Grâce à son intelligence et son charisme, il gravit rapidement les échelons de la société et devient un fonctionnaire influent à la cour impériale. Il est entouré de neuf femmes extraordinaires, qui l’aiment et l’accompagnent dans ses succès. Ces femmes sont décrites comme des incarnations de la beauté et de la vertu, reflétant divers idéaux féminins de l’époque. Il profite d’une vie de plaisirs, de pouvoir et de succès, vivant dans un monde rempli de richesse, de luxure et d’honneurs.

Mais après une vie apparemment parfaite, So-yu se réveille brusquement dans son monastère : tout ce qu’il a vécu n’était qu’un rêve. Il réalise alors que tous ses désirs, ses richesses et ses amours étaient illusoires, renforçant ainsi l’enseignement bouddhiste sur l’impermanence du monde matériel. Cette révélation le pousse à retourner à la voie spirituelle, acceptant la vacuité du monde et la nécessité de se libérer des attachements terrestres.

Le roman est influencé par des œuvres classiques chinoises comme "Le rêve dans le pavillon rouge" (Honglou Meng) et "Le conte du lettré Yi" (Liaozhai Zhiyi), qui explorent également la frontière entre rêve et réalité...


"Korean Workers : The Culture and Politics of Class Formation", by Hagen Koo (2001) - Quarante ans d’industrialisation rapide ont transformé des millions de paysans sud-coréens et leurs fils et filles en ouvriers urbains. Hagen Koo explore les expériences de cette première génération de travailleurs industriels et décrit ses luttes pour améliorer les conditions de travail dans l’usine et pour rechercher la justice dans la société. La classe ouvrière en Corée du Sud est née dans un environnement culturel et politique extrêmement hostile à son développement, dit Koo. Les travailleurs coréens ont cependant forgé leur identité collective beaucoup plus rapidement que leurs homologues des autres pays nouvellement industrialisés d’Asie de l’Est.

Ce livre étudie comment les travailleurs autrefois dociles et soumis de la Corée du Sud se sont réinventés si rapidement en une classe avec une identité et une conscience distinctes. Basé sur des sources allant des écrits personnels de travailleurs aux rapports syndicaux en passant par des entrevues approfondies, une analyse pénétrante de l’expérience des travailleurs sud-coréens :  Koo révèle comment la culture et la politique ont simultanément supprimé et facilité la formation de classes en Corée du Sud. Avec des chapitres explorant les rôles des femmes, des étudiants et des organisations religieuses dans la lutte, le livre reflète l’intérêt plus large de Koo pour les dimensions sociales et culturelles de la transformation industrielle.

 

Les environnements de travail en Corée du Sud et au Japon sont souvent comparés en raison de leurs influences culturelles communes (confucianisme, hiérarchie, éthique du travail rigoureuse) et de leurs modèles économiques similaires basés sur de grands conglomérats ("chaebols" en Corée, de grands conglomérats familiaux, et "keiretsu" au Japon, des réseaux de sociétés interdépendantes). On en connaît les représentations. Hiérarchie et respect de l’ancienneté, un système basé sur le confucianisme (respect des supérieurs, importance de l’ancienneté), sur un communication indirecte (la confrontation est évitée, et les critiques exprimées de manière subtile), et le fameux concept de loyauté à l’entreprise (en voie d'évolution, les Coréens changent plus souvent d’entreprise)...

 

L'expression "culture du surmenage" désigne un système de travail où l’excès d’heures, la pression constante et le sacrifice de la vie personnelle sont normalisés, voire valorisés. Le fameux "burn-out" à l'Occidental ...

Ce phénomène est particulièrement marqué en Corée du Sud et au Japon, mais il n’est pas exclusif à ces pays. On parle de "gwaromunhwa" en coréen, de "gwaro" (travail excessif) et "munhwa" (culture), ou de "karō bunka" en japonais, de "karō" (travail excessif) : l'expression n'est pas une invention occidentale, mais un concept qui existe en Asie depuis longtemps, mais fut effectivement popularisée par l'Occident. 

L'influence confucéenne est ici connue, le travail est considéré comme un devoir moral, mais un devoir qui ne peut être dissocié d'une valorisation de la discipline et du respect de la hiérarchie. Ces trois composantes sont indissociables (l'Occident les dissocie). 

L'industrialisation rapide du Japon et de la Corée ont permis d'implémenter en profondeur ce modèle, dans le Japon des années 1950-1980), mobilisé au sortir de la Seconde Guerre mondiale, (le travail intense s'imposant comme un patriotisme économique incontournable), et dans la Corée du Sud des années 1960-1990, qui, sous Park Chung-hee, justifiait le développement économique par des horaires extrêmes et peu de droits du travail. 

Depuis 2018, la Corée a réduit la durée maximale de travail à 52 heures/semaine (contre 68h auparavant). C'est avec les phénomènes de "mort par excès de travail" ("karōshi" au Japon, "kwarosa" en Corée) que des chercheurs occidentaux ont commencé à parler de "culture du surmenage" dans les années 1980-1990. À partir des années 2000, dans un contexte de critique du néolibéralisme globalisé, la "culture du surmenage" est dénoncée dans des pays occidentaux touchés par des pratiques similaires (ex. : États-Unis, France, Allemagne). 

Mais en Asie, cette culture du surmenage n'est pas tant liée, comme en Occident, à la compétitivité personnelle ou aux conditions du marché du travail, qu'à la pression sociale et à l'importance de la notion de hiérarchie. 


The middle class in China, South Korea, and Japan plays a significant and increasingly influential role in globalization and the global economy. - La classe moyenne asiatique est à la pointe de l'innovation technologique. Une importance sans doute décisive si l'on considère que la consommation d'innovation technologique joue désormais un rôle crucial dans l'évolution économique, sociale et politique de notre monde, et ce d'autant plus que nous ne parvenons plus à maîtriser intellectuellement ces fameuses dynamiques géopolitiques que nous décrivent sans véritablement les comprendre et les maîtriser médias et détenteurs de pouvoir de toute nature. 

La classe moyenne en Chine, en Corée du Sud et au Japon joue un rôle significatif et de plus en plus influent dans la mondialisation et l'économie mondiale. Leur importance découle de leur population nombreuse, de leur pouvoir de consommation croissant et de leur contribution au commerce mondial, à l'innovation et aux échanges culturels. Les classes moyennes américaine et européenne ont toujours été les principaux moteurs de la consommation et de l'innovation dans le monde. Cependant, la classe moyenne asiatique les rattrape rapidement et, dans certains domaines, les dépasse. Par exemple, la classe moyenne chinoise est aujourd'hui le plus grand marché pour les produits de luxe, les automobiles et les smartphones, éclipsant les États-Unis et l'Europe. La Chine, la Corée du Sud et le Japon sont des leaders mondiaux dans des domaines tels que l'intelligence artificielle, la robotique et l'énergie verte. Leurs classes moyennes alimentent la demande intérieure de produits et de services de pointe, qui stimule à son tour l'innovation mondiale. 

La classe moyenne sud-coréenne, par exemple, a contribué au succès d'entreprises telles que Samsung et Hyundai, tandis que la classe moyenne japonaise a favorisé les progrès dans les secteurs de l'automobile et de l'électronique. Avec plus de 400 millions de consommateurs de la classe moyenne, la Chine est le plus grand marché de biens et de services au monde. Sa classe moyenne stimule la demande mondiale dans tous les domaines, des produits de luxe aux technologies, ce qui en fait un acteur essentiel des chaînes d'approvisionnement et du commerce mondiaux. 

Alors que la classe moyenne des États-Unis et de l'Europe a toujours joué un rôle central dans les systèmes économiques et politiques mondiaux, la montée en puissance de la classe moyenne asiatique est en train de remodeler l'équilibre des pouvoirs au niveau mondial, mais plus encore ...


En Asie, le "respect de la hiérarchie" et la "pression sociale" sont étroitement liés, mais leur influence varie selon les pays, les contextes (travail, famille, société) et les générations.

En effet, dans les générations plus âgées et les milieux traditionnels, le respect de la hiérarchie est la norme principale. Chez les jeunes générations et dans les sociétés plus urbanisées, la pression sociale prend le dessus, car la compétition et le regard des autres influencent fortement la vie quotidienne.

 

La classe moyenne en Asie est plus importante et croît plus rapidement qu'aux États-Unis et en Europe. Alors que les États-Unis et l'Europe ont des classes moyennes bien historiquement enracinées, la classe moyenne asiatique continue de se développer, en particulier en Chine et en Inde. D'ici 2030, l'Asie devrait représenter les deux tiers de la classe moyenne mondiale, dépassant de loin les États-Unis et l'Europe. Et cette classe moyenne asiatique devrait représenter plus de 50 % de la consommation mondiale d'ici 2030, dépassant ainsi les États-Unis et l'Europe. 

Cette évolution transforme les marchés mondiaux et oblige les multinationales à s'adapter aux goûts et aux préférences des Asiatiques. (Asia's middle class is expected to account for over 50% of global consumption by 2030, surpassing the U.S. and Europe. This shift is transforming global markets and forcing multinational companies to adapt to Asian tastes and preferences). Mais plus encore, et plus globalement, redessine-t-elle peut-être la configuration d'une nouvelle civilisaton qui marquerait les générations de ce XXIe siècle ...

La définition de la "classe moyenne" varie selon les sources et les critères utilisés, rendant difficile une estimation précise et uniforme de sa taille dans différents pays. Cependant, en se basant sur certaines estimations disponibles, voici un aperçu de la classe moyenne en Chine, au Japon et en Corée du Sud ...


Dans les sociétés est-asiatiques, l’appartenance aux classes moyennes implique souvent une adhésion aux valeurs confucéennes, notamment en ce qui concerne l’éducation, le respect de l’ordre et le travail assidu...

Le confucianisme n’est pas seulement une philosophie mais est principalement un système de valeurs structurant l’éducation, la famille, le travail et les relations sociales. Il a profondément influencé la formation des classes moyennes modernes en Corée, au Japon, en Chine, en instaurant un cadre normatif stable, certes avec des nuances importantes en fonction de l’histoire et des évolutions sociales propres à chaque pays. 

- Éthique du travail et méritocratie : la valeur du travail acharné ("qínmiǎn" en chinois) et l'idée que l’éducation mène à la réussite sociale sont au cœur du confucianisme.

- Respect des hiérarchies sociales et familiales : la notion de filialité (xiào) et l'obéissance aux autorités (parents, supérieurs hiérarchiques, gouvernement) restent centrales dans la mentalité des classes moyennes.

- L'éducation comme ascenseur social : le système des examens impériaux en Chine et ses équivalents au Japon et en Corée ont modelé une société où l’accès à l’élite repose sur l’éducation.

 

Nous avons vu que le confucianisme n’a pas évolué de la même manière en Chine, au Japon et en Corée ..

En Chine, si Mao Zedong avait rejeté le confucianisme pendant la Révolution culturelle (1966-1976), depuis les années 1990, le gouvernement chinois avait réhabilité les valeurs confucéennes. Les classes moyennes chinoises adhèrent fortement à la méritocratie et à l'idée que l’éducation assure un statut social (via le gaokao, l'examen d'entrée à l’université). En revanche, le respect aveugle des hiérarchies familiales a décliné, notamment avec la politique de l’enfant unique. La Chine semble donc avoir valorisé un  confucianisme pragmatique (méritocratie, stabilité sociale), mais moins les valeurs traditionnelles de soumission aux anciens...

La Corée du Sud est une Société Ultra-Confucéenne, elle est en effet considérée comme le pays le plus confucéen aujourd’hui, notamment dans ses structures familiales et éducatives. Les entreprises coréennes fonctionnent selon un modèle confucéen strict, avec une hiérarchie rigide et des codes de respect forts entre juniors et seniors. En Corée du Sud, le confucianisme structure toujours la mentalité des classes moyennes, notamment dans le travail, l’éducation et les relations sociales.

Le Japon a intégré le confucianisme sous les Tokugawa (1603-1868), mais il a été fusionné avec des valeurs shintoïstes et le Bushidō (la voie du guerrier). L’éducation et la loyauté envers l’entreprise sont des valeurs clés des classes moyennes japonaises, en partie héritées du confucianisme. Cependant, le respect des hiérarchies familiales a beaucoup diminué au Japon, plus qu’en Corée ou en Chine. Le confucianisme japonais est donc plus individualisé et modéré, avec une forte influence du shintoïsme et du Bushidō.


Cultural influence? La classe moyenne asiatique est un important exportateur de culture, ou du moins d'une certaine idée de la culture. Les États-Unis et l'Europe sont depuis longtemps des puissances culturelles, leurs classes moyennes étant à l'origine des tendances mondiales dans les domaines de la musique, du cinéma, de la mode et de la technologie. Cependant, la classe moyenne asiatique modèle de plus en plus la culture mondiale par le biais de ses propres industries créatives et de ses préférences de consommation. La « Hallyu » (vague coréenne) de la Corée du Sud et les industries de l'anime et du manga du Japon ont acquis une popularité mondiale, en grande partie grâce au pouvoir de création et de consommation de leurs classes moyennes. Celles-ci modèlent également la culture mondiale par sa demande en matière de divertissement et de tourisme ainsi que par son influence croissante sur les médias et les arts internationaux. 

 

Political Influence? Aux États-Unis et en Europe, la classe moyenne a traditionnellement joué un rôle central dans l'élaboration des institutions démocratiques et de la gouvernance mondiale. En revanche, la classe moyenne asiatique opère dans des systèmes politiques divers, allant des démocraties (Corée du Sud, Japon) aux régimes autoritaires (Chine). Alors que les classes moyennes américaine et européenne ont été les principaux défenseurs des droits de l'homme et de la démocratie mondiale, la classe moyenne asiatique a tendance à donner la priorité à la stabilité et à la croissance économique, bien qu'il y ait des demandes croissantes de transparence et de responsabilité. 

  

 La classe moyenne aux États-Unis et en Europe est confrontée à des défis tels que l'inégalité des revenus, la stagnation des salaires et la polarisation politique. De même, la classe moyenne asiatique est confrontée à des problèmes tels que l'augmentation du coût du logement, l'insécurité économique et la dégradation de l'environnement. Toutefois, la classe moyenne asiatique est plus dynamique et plus optimiste quant à l'avenir, compte tenu de la croissance économique et du développement rapides de la région ...

 

On peut noter enfin les régions du monde dans laquelle la pensée confucéenne est moins dominante : l'Asie du Sud (Inde, Pakistan, Bangladesh, etc.), des régions principalement influencées par l’hindouisme, l’islam, le bouddhisme et d’autres traditions locales (Le confucianisme a peu ou pas de présence historique ici). L'Asie du Sud-Est (Thaïlande, Indonésie, Malaisie, etc.) : bien que le confucianisme ait une certaine influence dans les pays ayant d’importantes communautés de la diaspora chinoise (par exemple, Singapour, Malaisie), les cadres culturels et religieux dominants sont le bouddhisme, l’islam et les traditions autochtones. L'Asie centrale, une région plus influencée par les traditions islamiques et turques, avec peu de liens historiques avec le confucianisme...


JAPAN

While Japan has its own unique cultural traditions (e.g., Shintoism and Bushido), Confucian ideas about social order, respect for authority, and moral cultivation have also played a significant role in shaping Japanese society (bien que le Japon ait ses propres traditions culturelles uniques (par exemple, le shintoïsme et le bushido), les idées confucéennes sur l’ordre social, le respect de l’autorité et la culture morale ont également joué un rôle important dans la formation de la société japonaise).

 

Les estimations précises varient, mais une grande partie de la population japonaise est considérée comme appartenant à la classe moyenne. Le Japon compte environ 123 millions d'habitants en 2025.  

La classe moyenne japonaise a émergé pendant le boom économique de l'après-guerre, soutenu par une industrialisation rapide et un système démocratique stable. La classe moyenne est devenue synonyme de la culture du « salaryman » et d'une société relativement égalitaire. Elle est connue pour l'importance qu'elle accorde à la stabilité, au conformisme et à des taux d'épargne élevés. On estime que la classe moyenne japonaise représente 60 à 70 % de la population, soit environ 75 à 85 millions de personnes. Toutefois, à l'instar de la Corée du Sud, le Japon a vu la taille de sa classe moyenne diminuer en raison de la stagnation économique, du vieillissement de la population et de l'accroissement des inégalités. 

 

Au Japon, le respect de la hiérarchie reste la règle dominante, mais la pression sociale joue aussi un rôle important, notamment à travers le "dōchō atsuryoku", la "pression à la conformité",

- la hiérarchie stricte dans l’entreprise, la famille, les interactions sociales.

- le système de séniorité au travail (promotions basées sur l’ancienneté et non sur la performance.

- un langage ultra-hiérarchisé (keigo) : parler à un supérieur impose un langage formel strict. On rappelle en effet que le japonais est une langue très hiérarchisée, avec trois niveaux de politesse (keigo), honorifique pour parler à un supérieur (Sonkeigo), le langage humble pour parler de soi (Kenjōgo), et le langage standard de politesse (Teineigo). On se doit de savoir en toutes circonstances utiliser le bon niveau face à ses interlocuteurs. C'est dire que le langage lui-même codifie la place de chacun dans la société et que la communication égalitaire entre employés de rang différent n'existe pas ...

 

La "pression sociale" s'exprimera à travers les attitudes suivantes, 

- "Dōchō atsuryoku", la "pression à la conformité"  : il est mal vu d’être différent, d’exprimer une opinion contraire.

- "Kūki o yomu", "Lire l’air", soit être attentif aux attentes implicites des autres pour ne pas briser l’harmonie (wa).

MAIS la hiérarchie reste plus fondamentale que la pression sociale, c'est qui structure toute la société japonaise.

 

Le confucianisme reste la base intellectuelle du respect de la hiérarchie. Celui-ci (Jukyō)s'est introduit au Japon depuis la Chine via la Corée au Ve siècle, et structure profondément la société japonaise. Les relations humaines sont en effet codifiées en cinq rapports fondamentaux (gogyō) pour lesquels l'obéissance aux supérieurs est primordiale. Les vertus de loyauté, de respect et de devoir envers l'autorité sont centrales.

Le concept "chūkun aikoku" (loyauté au seigneur et amour de la patrie), influencé par Confucius, a servi de fondement au système impérial japonais et aux grandes entreprises modernes.

Mais, si l'on compare avec la Chine et la Corée, il faut ajouter qu'au Japon, le confucianisme a été intégré au bushidō et au shintoïsme, renforçant la soumission à l’État et aux entreprises.

En Chine, le confucianisme a perdu de son influence après la Révolution culturelle. En Corée du Sud, la hiérarchie confucéenne est forte, mais plus contestée par les jeunes générations.

Le bushidō (voie du guerrier) est l’éthique des samouraïs, basée sur la fidélité absolue au seigneur (daimyo). Cette mentalité a survécu dans le monde du travail moderne, où l’employé est fidèle à son entreprise comme un samouraï à son clan. Le sacrifice personnel est valorisé, ce qui explique la culture du surmenage et du travail à vie. Au Japon, traditionnellement, les employés ne remettent pas en question leurs supérieurs, même en cas d’erreur. Ils suivent les ordres par respect de la chaîne de commandement, ce qui peut parfois ralentir l’innovation.

Le shintoïsme et la notion d'harmonie sociale (wa) vient parfaire le système. Le shintoïsme met l’accent sur l’harmonie avec le groupe et la nature, et le concept de "wa" (harmonie) signifie que l'intérêt collectif prime sur l'individualisme. La hiérarchie assure cette harmonie, car chacun a une place définie et respecte son rôle. C'est ainsi, par exemple, qu'en entreprise, les décisions importantes puissent être prises collectivement pour éviter les conflits hiérarchiques (la décision par consensus, ou nemawashi). Par contre, comme la hiérarchie est rigide, les évolutions peuvent prendre du temps.

On peut rappeler que le Japon a été une société féodale (shogunat) jusqu’en 1868, où les classes sociales étaient rigides (samouraïs, artisans, marchands, paysans). La Restauration Meiji (1868-1912) a par la suite modernisé le pays mais a conservé un État centralisé et hiérarchisé sous l’Empereur. Après la Seconde Guerre mondiale, la hiérarchie a été transférée aux grandes entreprises, où le modèle des keiretsu (conglomérats) a renforcé la fidélité à l’employeur.

 

"The Japanese Mind : Understanding Contemporary Japanese Culture", de Roger J. Davies & Osamu Ikeno (2002), analyse le concept de hiérarchie et d'harmonie sociale au Japon et explique comment les valeurs confucéennes influencent encore le pays. Mais un ouvrage Dans qui offre aux occidentaux une clé inestimable pour les aspects uniques de la culture japonaise et parmi les sujets explorés, citons aimai (ambiguïté), amae (dépendance à la bienveillance des autres), amakudari (descente de la nation du ciel), chinmoku (silence dans la communication), gambari (persévérance), giri (obligation sociale), haragei (littéralement, et « art du ventre et « ; communication implicite, non dite), kenkyo (l’apparence de la modestie), sempai-kohai (ancienneté), wabi-sabi (simplicité et élégance) et zoto (don), ainsi que des discussions sur l’éducation des enfants, l’espace personnel et les rôles des femmes dans la société japonaise...

A compléter par "Bushido: The Soul of Japan", par Inazo Nitobe (2002), un classique qui décrit l’influence du bushidō sur la loyauté et la structure sociale japonaise...

 

"Shutting Out the Sun : How Japan Created Its Own Lost Generation", Michael Zielenziger (2006). Une analyse moderne des conséquences négatives de la hiérarchie stricte, notamment sur les jeunes générations (hikikomori, pression au travail). Le Japon, deuxième pays le plus riche du monde, semblait autrefois prêt à dépasser l’Amérique. Mais son incapacité à se remettre de l’effondrement économique du début des années 1990 fut singulier, et aujourd’hui la société japonaise semble confrontée à une série de tendances sociales jugées inquiétantes. Le Japon a le taux de suicide le plus élevé et le taux de natalité le plus faible de tous les pays industrialisés, ainsi qu’une incidence croissante des cas de dépression non traités. Tout aussi troublants sont les plus d’un million de jeunes hommes qui se sont enfermés dans leurs chambres, se retirant de la société et le nombre croissant de « parasites célibataires », le nom donné à des femmes célibataires qui refusent de quitter leur foyer, de se marier ou d’avoir des enfants. Michael Zielenziger soutient que la société rigide et traditionnelle du Japon, son aversion pour le changement et sa méfiance à l’égard de l’individualité et de l’expression de soi étouffent la relance économique, les réformes politiques et l’évolution sociale. En donnant un visage humain au malaise du pays, Zielenziger explique comment ces contraintes ont conduit des jeunes hommes intelligents et créatifs à devenir des ermites modernes. Dans le même temps, les jeunes femmes, mieux éduquées que leurs mères et bien rémunérées, rejettent la voie traditionnelle du mariage et de la maternité, préférant dépenser leur argent en biens de luxe et en voyages. "Fermer le soleil" est une explication audacieuse de la stagnation du Japon et de ses implications pour le reste du monde...

 

"Japan's New Middle Class: The Salary Man and His Family in a Tokyo Suburb", by Ezra F. Vogel (1963) - Une étude sociologique fondamentale qui examine l’émergence et le mode de vie de la classe moyenne japonaise d’après-guerre, en se concentrant particulièrement sur le salarié (ouvrier salarié) et sa famille dans une banlieue de Tokyo. Voici les points clés :

- The Salaryman Phenomenon : L’ouvrage explore la montée du "salaryman" en tant que figure centrale de la reprise économique et de la structure sociale de l’après-guerre au Japon. Les salariés étaient des employés de grandes entreprises, bénéficiant d’une sécurité d’emploi, de prestations et d’un revenu stable, ce qui est devenu le signe distinctif de la nouvelle classe moyenne du Japon.

- "Family Dynamics" : Vogel plonge dans la vie familiale des salariés, en mettant l’accent sur la division des rôles : le mari comme gagne-pain et la femme comme femme au foyer. Le rôle de l’épouse dans la gestion du ménage et le soutien de la carrière de son mari était crucial pour maintenir le statut social de la famille.

- Mobilité sociale et stabilité : Le style de vie des salariés était attaché à la mobilité sociale ascendante et à la stabilité économique pour de nombreuses familles japonaises dans l’après-guerre. Vogel souligne comment cette nouvelle classe moyenne a contribué à la croissance économique rapide et à la cohésion sociale du Japon.

- La loyauté dans les entreprises : L’ouvrage traite de la profonde loyauté que les salariés témoignent à l'égard de leur entreprise, donnant souvent la priorité au travail plutôt qu’à la vie personnelle. Cette loyauté a été récompensée par un emploi à vie et un sentiment d’appartenance, qui sont devenus une caractéristique déterminante de la culture d’entreprise japonaise.

- "Suburban Life" : L’étude de Vogel se déroule dans une banlieue de Tokyo, reflétant les tendances d’urbanisation et de suburbanisation de l’époque. Le style de vie en banlieue symbolisait les aspirations de la nouvelle classe moyenne à une vie moderne et confortable.

- Implications culturelles et sociales : Le livre donne un aperçu de la façon dont le modèle salarié a façonné la société japonaise, influençant des valeurs telles que le travail acharné, la discipline et la conformité. Il examine également les pressions et les défis auxquels sont confrontés les salariés et leurs familles, y compris les exigences de la vie d’entreprise et les attentes sociétales.

Un ouvrage qui demeure un texte fondamental pour comprendre la société japonaise d’après-guerre et l’importance culturelle du salarié. Il offre un compte rendu ethnographique détaillé d’une période de transformation dans l’histoire du Japon, ce qui en fait une ressource précieuse pour les chercheurs en sociologie, anthropologie et études japonaises.

Publié pendant la période de croissance économique rapide du Japon, le travail de Vogel capture l’essence d’une société en transition et l’émergence d’une nouvelle classe sociale qui définirait le Japon moderne.


La culture de la classe moyenne japonaise est une mosaïque de valeurs traditionnelles, d’aspirations modernes et de pressions sociales. Cette  culture de la classe, particulièrement celle qui a émergé dans l’après-guerre et qui a évolué au fil du temps, est profondément liée aux valeurs, aux traditions et aux influences modernes. Cette culture se reflète dans les livres, les divertissements et les médias qui façonnent et reflètent les aspirations, les défis et le mode de vie de la classe moyenne. 

Un bref aperçu de ce qui constitue cette culture ...

- Dur labeur et discipline : La classe moyenne, en particulier la culture des salariés, met l’accent sur la diligence, la loyauté envers l’entreprise et la persévérance. Cela est souvent représenté dans les histoires sur la vie d’entreprise et le sacrifice personnel. L’importance de la famille, de la communauté et du maintien de l’harmonie sociale (wa) est un thème récurrent. Les histoires explorent souvent l’équilibre entre les désirs individuels et les attentes de la société. La classe moyenne valorise la stabilité économique, l’éducation et la mobilité vers le haut, qui sont souvent décrites dans les récits de réussite et d’amélioration personnelle.

S'il est un genre de fiction recherché, c'est bien le semi-autobiographique qui évoque les luttes personnelles, la dynamique familiale et les pressions de la vie de classe moyenne. Des auteurs comme Natsume Soseki ("Kokoro") et Junichiro Tanizaki ("The Makioka Sisters") donnent à voir les complexités psychologiques et sociales de l’existence de la classe moyenne. Haruki Murakami (par exemple, "Norwegian Wood", "Kafka on the Shore") dépeignent souvent des personnages de la classe moyenne naviguant dans la solitude, les crises existentielles et la recherche d’un sens dans une société en évolution rapide. Des histoires centrées sur la vie familiale, comme "Banana Yoshimoto" et Hiromi Kawakami dans "Strange Weather à Tokyo", mettent en lumière les luttes quotidiennes et les joies de la vie de classe moyenne.

En termes de divertissement et médias, les "Home Dramas"mettent l’accent sur la vie familiale, les relations et les attentes de la société. Ainsi "Oshin" (un drame historique sur la persévérance) et "Wataru Seken wa Oni Bakari" (une comédie dramatique sur la dynamique familiale). Parmi les "Salaryman Dramas", des émissions comme "Hanzawa Naoki" dépeignent les défis et les triomphes de la vie d’entreprise, en résonance avec le public de classe moyenne.

Dans la catégorie anime et manga, des séries comme "Sazae-san" (un long anime sur une famille de la classe moyenne) et "Clannad" (une histoire sur la famille et la communauté) reflètent les valeurs de la classe moyenne et la vie quotidienne. Des mangas comme "Shirokuma Café" ou "Hataraki Man" évoquent la vie de professionnels, mêlant humour et commentaire social.

Quant aux films, on peut citer les œuvres de Yasujirō Ozu : des films comme "Tokyo Story" et "Late Spring" dépeignent les conflits générationnels et les luttes silencieuses des familles de la classe moyenne. Des films comme "Shoplifters" (réalisé par Hirokazu Kore-eda) nouqs entraînent aux frontières de la famille et de la classe dans le Japon moderne.

Parmi les divertissements, le Karaoké est unne forme populaire de divertissement qui reflète le désir de la classe moyenne pour les loisirs et les liens sociaux. Les familles de la classe moyenne accordent souvent la priorité aux déplacements nationaux et internationaux, ce qui se reflète dans les médias qui font la promotion du tourisme et de l’exploration culturelle.

La classe moyenne est le moteur des tendances en matière de mode, de technologie et de produits de style de vie, souvent représentés dans la publicité et les médias.

Enfin, de nombreux livres et émissions traitent des problèmes liés à l’équilibre entre le travail et la vie personnelle, une préoccupation clé pour la classe moyenne. La classe moyenne japonaise a adopté certains aspects de la culture occidentale, comme les vacances (Noël), la mode et le divertissement, tout en maintenant une identité japonaise distincte. Ce mélange se reflète souvent dans les médias et la littérature.


CHINA

Confucianism has been a cornerstone of Chinese culture for over two millennia, influencing its governance, education, family structures, and social ethics. Even under communist rule, Confucian values like respect for hierarchy, filial piety, and social harmony persist. (Le confucianisme est une pierre angulaire de la culture chinoise depuis plus de deux millénaires, influençant sa gouvernance, son éducation, ses structures familiales et son éthique sociale. Même sous le régime communiste, les valeurs confucéennes telles que le respect de la hiérarchie, la piété filiale et l’harmonie sociale persistent).

 

La classe moyenne chinoise est apparue plus récemment que certains de ses voisins, à la suite des réformes économiques de la fin des années 1970 et d'une urbanisation rapide. Contrairement au Japon et à la Corée du Sud, la classe moyenne chinoise s'est développée dans le cadre d'un système autoritaire à parti unique, ce qui a façonné son rôle et ses aspirations politiques. Et si elle semble de plus en plus influencée par la culture mondiale, elle reste profondément enracinée dans les traditions et les valeurs chinoises.

La classe moyenne se caractérise par une résidence urbaine, un emploi de col blanc et l'accès à des équipements modernes comme les voitures, les smartphones et l'accession à la propriété. En 2023, la classe moyenne en Chine est estimée à 400-500 millions de personnes, soit environ 30-35 % de la population. Ce nombre devrait augmenter à mesure que l'urbanisation et le développement économique se poursuivent, les projections suggérant que la classe moyenne pourrait atteindre 70 % de la population d'ici 2030. La classe moyenne chinoise est concentrée dans les zones urbaines, en particulier dans les villes de premier rang comme Pékin, Shanghai et Guangzhou.  

 

En Chine, la hiérarchie reste la structure sociale dominante, surpassant la pression sociale moderne. Ici, la hiérarchie n’est pas seulement une norme sociale, elle est institutionnalisée par l’État, la famille et la tradition, ce qui réduit considérablement l’influence de la pression sociale individuelle ...

Cette notion de  hiérarchie est issue de facteurs historiques, philosophiques et politiques, ancrés dans le confucianisme, le légisme, l’organisation impériale et l’influence du Parti communiste. En Corée du Sud, la pression sociale (nunchi, compétitivité scolaire et professionnelle) a pris le dessus sur la hiérarchie. Au Japon, la hiérarchie et l’harmonie sociale (wa) coexistent, avec un fort respect des structures. 

En Chine, la hiérarchie a toujours été imposée par l’État, la famille et les institutions politiques, ce qui la rend plus stable et plus puissante que la pression sociale individuelle. La société chinoise valorise donc l’ordre social et la stabilité plutôt que la compétition individuelle. Et si la pression sociale existe, elle est canalisée par des structures hiérarchiques fortes....

 

On retrouve le confucianisme, comme toujours, à la base du respect de la hiérarchie. C'est Confucius (Kǒngzǐ, 551-479 av. J.-C.) qui a établi les bases de la société chinoise, les Cinq Relations fondamentales (Wǔlún) où chaque individu a une place précise dans la hiérerchie.

 

A cela s'ajoutent l’importance du "li" (rites et normes sociales), car c'est bien la hiérarchie qui peut garantit l’ordre et l’harmonie; et la piété filiale (xiào), le respect absolu des parents et des anciens.

 

Mais en Chine, le confucianisme a cédé le pas à la prééminence de la hiérarchie sociale.

En Chine, le pouvoir central a toujours été plus fort que la pression des individus. Les citoyens doivent suivre les directives de l’État plutôt que d’être influencés par la compétition sociale. D'où le "légisme", une culture du contrôle par l’État. Le légisme (Fǎjiā), développé par Han Feizi (IIIe siècle av. J.-C.), met l’accent sur l’obéissance absolue à l’État et aux lois. Contrairement au confucianisme, qui valorise l’éthique, le légisme impose la hiérarchie par la discipline et le contrôle strict du peuple. L’Empereur détient un pouvoir absolu et ce modèle a influencé le Parti communiste chinois.

 

Cette importance donnée à la hiérarchie a été expérimentée historiquement. Les élites furent, elles-aussi, soumises à une structure rigide qui limitait l’ambition personnelle et le respect de l’État a primé sur la réussite individuelle. L’influence du système impérial et du mandarinat vient compléter le système. Depuis la dynastie Han (206 av. J.-C. - 220 apr. J.-C.), le système des examens impériaux (kējǔ) a structuré la hiérarchie sociale. La réussite n’était pas fondée sur la compétition individuelle, mais sur l’acceptation du système et la fidélité au pouvoir impérial. Les intellectuels et fonctionnaires (shì) ne sont-ils pas fondamentalement les gardiens de l’ordre social...

 

L’influence du Parti communiste chinois (PCC) depuis 1949 vint consolider le système. Depuis Mao Zedong, le PCC a conforté un système où la hiérarchie d’État domine toute la société. Le Parti régule les comportements sociaux et professionnels, ce qui limite la pression sociale individuelle. L’État contrôle l’éducation, le marché du travail et les réseaux sociaux, renforçant ainsi la hiérarchie et l’ordre. Contrairement à la Corée ou au Japon, où les familles et les individus exercent une forte pression sociale, en Chine, c’est donc l’État qui dicte les règles.Les citoyens ne sauraient exercer autant de pression les uns sur les autres, car ils doivent obéir aux directives gouvernementales.

 

La structure de famille chinoise et la hiérarchie générationnelle vient finaliser cet ensemble intellectuel qui devient implicite au plus profond de la société. La piété filiale (xiào) présente comme l’un des piliers de la culture chinoise. Les parents ont une autorité absolue sur leurs enfants, qui doivent subvenir à leurs besoins en vieillesse. Même si la pression sociale existait, elle serait filtrée par la structure familiale et la hiérarchie des générations. Les choix de vie sont ainsi souvent dictés par la famille plutôt que par la société en général et un individu doit avant tout répondre aux attentes de ses parents et du Parti, et non à une compétition sociale ouverte.

 

"The Search for Modern China" (1990, révisé 2013), une œuvre majeure de Jonathan D. Spence, historien spécialiste de la Chine, qui retrace l’évolution de la Chine de la fin de la dynastie Ming (vers 1600) jusqu’aux années 1980. Jonathan Spence démystifie l’évolution de l’État chinois et montre que, malgré les transformations, le rôle de l’État dominateur est resté une constante dans l’histoire chinoise...

Le livre analyse les transformations politiques, économiques, et sociales qui ont marqué la transition de la Chine d’un empire ancien à un État-nation moderne. Spence nous montre comment la Chine a tenté de se moderniser face aux défis intérieurs et extérieurs, en mettant un accent particulier sur le rôle de l'État comme force dominatrice dans l’organisation de la société et du pouvoir.

 L’un des thèmes centraux du livre est le rôle omniprésent de l’État, qui a toujours cherché à contrôler et structurer la société à travers différentes dynasties et régimes politiques. Depuis l’ère impériale jusqu’à la République populaire, l’État chinois a conservé une structure fortement centralisée, utilisant un mélange de bureaucratie, d’idéologie et de coercition pour maintenir son autorité.

Spence ne voit pas l’État chinois comme une entité figée, mais comme un système qui évolue en s’adaptant aux crises et aux réformes. Son livre va ainsi couvrir plusieurs siècles d’histoire (plus de 800 pages), mais nous pouvons ici nous focaliser sur les périodes où l’État joue un rôle dominateur majeur...

- L’État impérial sous la dynastie Qing (1644-1911)

La dynastie Qing (mandchoue) maintient un système bureaucratique centralisé, basé sur l’examen impérial et le confucianisme. L’administration impériale contrôle la fiscalité, la justice et l’armée, imposant une structure rigide sur tout le pays. Cependant, les crises du XIXe siècle (guerres de l’opium, révoltes intérieures, intervention occidentale) mettent à mal ce modèle. En synthèse, un État impérial est puissant, mais incapable de se réformer face aux nouvelles menaces.

- La chute de l’Empire et l’émergence d’un État républicain (1911-1949)

Après la Révolution de 1911, la Chine devient une république, mais le pouvoir central s’effondre rapidement. 

- La période des Seigneurs de la guerre (1916-1928) montre une fragmentation du pays, où l’État est faible face aux forces locales. Chiang Kai-shek (1928-1949) tente de restaurer un État fort à travers le Guomindang (KMT), mais il échoue un État est affaibli, mais l’obsession du pouvoir centralisé demeure.

- La Révolution communiste et l’État maoïste (1949-1976)

Mao Zedong établit un État totalitaire, utilisant la répression et l’idéologie communiste pour unifier et transformer la société. L’État prend en charge l’économie, l’éducation, et même la pensée individuelle (culte de la personnalité).

- Le Grand Bond en Avant (1958-1962) et la Révolution culturelle (1966-1976) montrent l’extrême pouvoir de l’État sur la population, souvent au prix de millions de morts. L’État devient ultra-dominant, mais ses excès conduisent à l’instabilité et aux crises.

- L’Ère des réformes sous Deng Xiaoping et la modernisation de l’État (1978-1989)

Deng Xiaoping amorce un tournant économique, réduisant le contrôle de l’État sur certains aspects économiques mais renforçant l’autoritarisme politique. L’État reste au cœur du système, notamment par un contrôle strict du Parti communiste. L’épisode de Tian’anmen (1989) montre que l’État chinois tolère des réformes économiques, mais refuse toute ouverture politique.

Au total, l’État évolue, mais son rôle dominateur demeure intact. Qu'en est-il aujourd'hui? 

Spence conclut que le pouvoir de l’État chinois n’a jamais vraiment été remis en cause, bien qu’il ait changé de forme, de bureaucratique et confucéen (dynastie Qing), à militaire et autoritaire (Guomindang et Mao), puis à techno-bureaucratique sous Deng et ses successeurs...

 

"Wealth and Power : China’s Long March to the Twenty-First Century" (2013), un ouvrage de Orville Schell (journaliste et sinologue américain) et John Delury (historien spécialiste de la Chine). Un livre qui analyse l’ascension moderne de la Chine à travers l’évolution des idées de puissance (qiáng) et de prospérité (fù), qui ont structuré la pensée chinoise depuis la chute de l’Empire Qing (1644-1912) jusqu'à nos jours. L’ouvrage ne se contente pas d’analyser l’économie et la politique contemporaine, mais retrace l’histoire intellectuelle et idéologique de la modernisation chinoise à travers une dizaine de personnages clés ...

Depuis la Première guerre de l’opium (1839-1842), la Chine a cherché un moyen de retrouver sa dignité nationale et sa puissance, entre modernisation inspirée de l’Occident et retour aux valeurs traditionnelles chinoises... ou Comment la Chine a modernisé son économie sans briser la structure hiérarchique traditionnelle...

Le livre est organisé en douze chapitres, chacun centré sur un penseur, un réformateur ou un dirigeant chinois ayant joué un rôle clé dans la transformation du pays. Les auteurs montrent comment l’élite chinoise a cherché à résoudre la question fondamentale : comment la Chine peut-elle redevenir forte et prospère après des siècles d’humiliation et de domination étrangère ?

.Les auteurs examinent ces personnages dans un cadre chronologique, montrant leur influence sur la politique et la pensée chinoises.

- Wei Yuan (1794-1857), le premier réformateur : fonctionnaire et penseur de la dynastie Qing, auteur de "Illustrated Treatise on the Maritime Kingdoms" (1844), une analyse des nations étrangères et de leurs forces militaires. Son idée clé : L’importance d’adopter les techniques occidentales pour renforcer la Chine.

- Feng Guifen (1809-1874), l'auto-renforcement, Il développe le concept de "self-strengthening" (zìqiáng), utiliser la technologie occidentale tout en préservant la culture chinoise. Son influence sera majeure dans les réformes du XIXe siècle.

- Li Hongzhang (1823-1901), le diplomate pragmatique. L'architecte du mouvement d'auto-renforcement, il modernise l'armée et l’industrie et tente de concilier la tradition confucéenne avec la nécessité d’adopter des réformes.

- Kang Youwei (1858-1927), le réformateur radical, le penseur du "Réformisme des Cent Jours" (1898) sous l’empereur Guangxu. Il cherche à instaurer une monarchie constitutionnelle inspirée des modèles occidentaux.

- Liang Qichao (1873-1929), l'intellectuel moderniste, le disciple de Kang Youwei : il introduit des idées républicaines et nationalistes en Chine, et joue un rôle clé dans la diffusion des idées modernes au début du XXe siècle.

- Sun Yat-sen (1866-1925), le Père de la République de Chine, le fondateur du Guomindang (Parti nationaliste chinois), il rêve d’une Chine républicaine. Il est le premier à promouvoir un nationalisme moderne inspiré des modèles occidentaux.

- Chiang Kai-shek (1887-1975), le général nationaliste, dirigeant du Guomindang, il combat les Japonais et les communistes. Son échec à stabiliser la Chine entraîne l’essor du Parti communiste chinois (PCC).

- Mao Zedong (1893-1976), la Révolution communiste. Leader de la révolution de 1949 et fondateur de la République populaire de Chine. Son idéologie du Marxisme-Léninisme à la chinoise marque un tournant radical dans l’histoire du pays.

- Deng Xiaoping (1904-1997), l'architecte des réformes. Après la mort de Mao, il ouvre la Chine à l’économie de marché (gǎigé kāifàng) tout en conservant le régime autoritaire.

Il lance la transformation économique qui mènera à la croissance rapide du pays.

- Jiang Zemin (1926-2019) et Hu Jintao (né en 1942) : la Chine post-réformes. Jiang introduit la doctrine des Trois Représentations, intégrant le capitalisme au PCC. Hu met l’accent sur une croissance plus équilibrée et un "développement scientifique".

- Xi Jinping (né en 1953) : Le "rêve chinois". Depuis 2012, Xi Jinping renforce le pouvoir du PCC et ambitionne de faire de la Chine une superpuissance mondiale. Il combine réforme économique, retour au nationalisme et contrôle politique accru.

Tous ces leaders partagent une même obsession, retrouver la grandeur chinoise après des siècles d’humiliation (guerres de l’opium, traité de Nankin, etc.). Les solutions varient : réforme partielle (Wei Yuan, Feng Guifen), rupture radicale (Mao Zedong), ou pragmatisme économique (Deng Xiaoping). Mais un point domine, l’héritage du confucianisme et du nationalisme : bien que modernisée, la Chine conserve une structure autoritaire et hiérarchique influencée par le confucianisme. Et le nationalisme joue un rôle clé dans la légitimation du pouvoir, notamment sous Xi Jinping.

La question centrale reste celle-ci : la Chine peut-elle maintenir un équilibre entre développement économique et autoritarisme politique ? Le livre semble suggérer que l’histoire chinoise montre une tendance à l’adaptation pragmatique, mais aussi une récurrence des crises.

 

"China's Emerging Middle Class: Beyond Economic Transformation" est un ouvrage collectif dirigé par Cheng Li, publié en 2010, qui examine l'essor rapide de la classe moyenne chinoise et ses implications sociopolitiques.

- Les contributeurs de cet ouvrage soulignent que, malgré une croissance rapide et une influence croissante, la classe moyenne chinoise est loin d'être homogène sur le plan politique. Certains membres de cette classe moyenne, notamment ceux qui ont bénéficié des réformes économiques, tendent à soutenir le statu quo pour préserver leurs acquis. D'autres, confrontés à des enjeux tels que la corruption, les inégalités sociales et les problèmes environnementaux, expriment un désir de réformes et d'une plus grande participation politique. Cependant, en raison de restrictions politiques et d'un espace limité pour la dissidence, ces aspirations sont souvent canalisées vers des formes d'expression non institutionnelles, comme les réseaux sociaux ou des mouvements communautaires informels.

- Comme dans d'autres nations en développement rapide, l'essor économique de la Chine a conduit à une augmentation significative de la classe moyenne, similaire à ce qui a été observé dans des pays comme l'Inde. La migration massive vers les zones urbaines, favorisée par l'industrialisation, est aussi une tendance commune à de nombreux pays en développement, y compris la Chine.

Mais la Chine se distingue par sa transition unique d'un système socialiste à une économie de marché, influençant la formation et la perception de sa classe moyenne. Les disparités de revenus entre les zones urbaines et rurales sont particulièrement prononcées en Chine, accentuées par des politiques de développement favorisant les régions côtières. L'État chinois joue un rôle central dans l'économie, influençant directement la croissance et la composition de la classe moyenne, ce qui diffère de nombreux autres pays où le marché libre prédomine.

- La classe moyenne chinoise bénéficie largement des réformes économiques et de la croissance rapide du pays. Cette prospérité relative les incite souvent à soutenir le statu quo pour préserver leurs acquis. De plus, le Parti communiste chinois (PCC) a mis en place des mécanismes de cooptation, intégrant les élites économiques au sein du parti pour renforcer la légitimité du régime et prévenir l'émergence d'oppositions structurées.

L'ouvrage souligne que la classe moyenne chinoise contribue à la stabilité politique en soutenant le régime en place, tout en étant porteuse de demandes de réformes modérées visant à améliorer le système actuel sans le transformer radicalement.


La culture de la classe moyenne chinoise, qui a émergé et s'est développée rapidement avec la croissance économique de la Chine depuis les années 1980, est un mélange complexe de traditions anciennes, de modernité et d'influences globales. Cette culture se reflète dans les livres, les divertissements et les médias, qui répondent à ces aspirations, aux défis et modes de vie de cette classe sociale...

- Ascension Sociale et Réussite : La classe moyenne chinoise valorise l'éducation, le travail acharné et la réussite matérielle. Ces thèmes sont souvent explorés dans les récits de réussite personnelle et professionnelle. Après des décennies de bouleversements, la classe moyenne aspire à la stabilité économique et à la sécurité, ce qui se reflète dans les préoccupations liées à l'immobilier, à l'épargne et à la planification familiale. 

Malgré la modernisation, les valeurs familiales et les traditions restent centrales, notamment le respect des aînés et l'importance des réseaux familiaux : le "guanxi" est un concept central dans la culture chinoise, désignant les réseaux de relations personnelles et professionnelles fondés sur la loyauté, l'obligation mutuelle et la confiance. Il joue un rôle essentiel dans divers aspects de la société chinoise, notamment dans les domaines social, politique et des affaires.

En termes de romans Contemporains, on peut citer Mo Yan (Prix Nobel de littérature), ses œuvres, comme "Le Sorgho rouge", explorent typiquement les transformations sociales et les tensions entre tradition et modernité. Yu Hua, dans "Brothers ou China in Ten Words", décrit les bouleversements économiques et sociaux vécus par la classe moyenne. Des auteurs comme Han Han ("Triple Door") ou Guo Jingming ("Tiny Times") ont su capter les défis que se posent les jeunes urbains de la classe moyenne, souvent tiraillés entre rêves et réalité.

En termes de 3. Divertissement et Médias, parmi les Séries Télévisées (Dramas), des séries comme "Ode to Joy" ou "All Is Well" évoquent les dynamiques familiales, les conflits générationnels et les pressions sociales sur la classe moyenne. Des séries comme "The First Half of My Life" mettent plutôt en scène des personnages confrontés aux défis du monde du travail et de la vie personnelle.

Les films de Jia Zhangke, des œuvres comme "The World" ou "A Touch of Sin" dépeignent les bouleversements sociaux et économiques affectant la classe moyenne. Des Comédies Urbaines et films comme "Lost in Thailand" ou "Dying to Survive" mêlent humour et critique sociale, reflétant les préoccupations de la classe moyenne. Et dans la fameuse catégorie des émissions de Télé-Réalité, on peut citer "If You Are the One", un jeu de rencontres, révélateur des attentes et les valeurs de la classe moyenne en matière de relations et de mariage.

La classe moyenne chinoise est très connectée, utilisant des plateformes comme WeChat, Weibo et Douyin (TikTok) pour partager des contenus, suivre des tendances et exprimer ses opinions. Le tourisme intérieur et international est en plein essor, reflétant l'aspiration à explorer le monde et à profiter des fruits de la réussite économique.

Enfin, la classe moyenne chinoise est un moteur de la consommation de luxe et de produits de qualité, influençant les tendances mondiales. Mais cette classe moyenne adopte aussi des éléments de la culture occidentale (cinéma hollywoodien, musique pop, mode) tout en conservant une forte identité culturelle chinoise. Cette hybridation est visible dans les médias et les divertissements ...


SOUTH KOREA

Confucian principles deeply influence Korean society, particularly in areas like family relationships, education, and workplace hierarchies. Respect for elders, emphasis on education, and collective responsibility are key Confucian traits evident in Korean culture. (les principes confucéens influencent profondément la société coréenne, en particulier dans des domaines tels que les relations familiales, l’éducation et les hiérarchies de travail. Le respect des aînés, l’accent mis sur l’éducation et la responsabilité collective sont les traits confucéens clés de la culture coréenne).

 

Les estimations précises varient, mais une proportion significative de la population sud-coréenne est considérée comme appartenant à la classe moyenne. Avec une population d'environ 52 millions en 2025, la classe moyenne représente une part importante de la société sud-coréenne. La Corée du Sud contribue notablement à la classe moyenne mondiale, bien que sa part soit inférieure à celle de pays plus peuplés comme la Chine ou l'Inde.

 

La classe moyenne sud-coréenne a connu une croissance rapide à la fin du XXe siècle, alimentée par une industrialisation fondée sur les exportations et la démocratisation dans les années 1980 et 1990. La classe moyenne sud-coréenne est très éduquée et urbanisée, et met l'accent sur l'accession à la propriété et l'épargne. La classe moyenne a joué un rôle déterminant dans la promotion des réformes démocratiques et semble avoir adopté à la fois les valeurs traditionnelles et les tendances culturelles mondialisées, comme en témoigne la popularité mondiale de la K-pop et des drames coréens. On estime que la classe moyenne en Corée du Sud représente 60 à 70 % de la population, soit environ 30 à 35 millions de personnes. Toutefois, certains s'inquiètent d'un risque d'érosion de celle-ci en raison de l'augmentation des inégalités et des pressions économiques exercées sur les jeunes générations. 

 

(Hangug-ui sahoejeok apbak-eun eomcheongnada), "La pression sociale en Corée est énorme". Le Japon mise sur l’harmonie, tandis que la Corée met l’accent sur la compétition et l’apparence. La Chine connaît aussi une pression sociale forte, mais l’influence du Parti Communiste crée une autre forme de contrôle. En Corée, la pression sociale est tout simplement plus visible et plus directe que partout ailleurs : elle est plus forte que la hiérérchie parce qu'elle affecte tous les aspects de la vie, le travail, l’éducation, l’apparence, la réussite sociale et la vie privée. Plusieurs facteurs historiques, culturels et économiques expliquent cette intensité unique en Corée...

- "Nunchi munhwa", ou la "culture du regard des autres" (chaque individu est constamment évalué par la société).

- "Hell Joseon", "L’Enfer Joseon", la critique du système ultra-compétitif coréen, et la réussite dépend du classement scolaire, ce qui crée une pression sociale énorme dès l’enfance...

 

La Corée du Sud, comme d’autres pays d’Asie de l’Est (Japon, Chine, Taïwan), est marquée par la culture confucéenne, qui met l’accent sur  L’obéissance à la hiérarchie (famille, travail, société), la pression du groupe (l’individu doit se conformer aux attentes collectives), l'honneur familial (la réussite d’un individu affecte le statut de toute la famille).

En Chine, cette pression existe, mais elle est moins présente dans les grandes villes modernes, où l’individualisme se développe. Au Japon, la pression sociale est forte, mais les Japonais valorisent davantage l’harmonie (wa) et la discrétion plutôt que la compétition agressive. En Corée, les attentes sociales sont élevées, les exemples sont connus ...

 

- Un système éducatif ultra-compétitif : le "Suneung" (équivalent du bac coréen) est un examen national ultra-sélectif qui détermine l’accès aux meilleures universités (Seoul National University, Korea University, Yonsei University). Les étudiants passent en moyenne 12 à 16 heures par jour à étudier, notamment dans les hagwons (écoles privées de soutien scolaire). Les parents investissent massivement dans l’éducation (Corée du Sud  connaît l’un des taux les plus élevés de dépenses privées en éducation dans l’OCDE). Aux États-Unis et en Europe, l’éducation est compétitive, mais il existe plusieurs voies de réussite (université, apprentissage, entrepreneuriat). En Corée, l’université détermine souvent toute la carrière d’un individu, d’où une pression extrême.

Au Japon, l’université est importante, mais la pression est plus forte avant l’entrée à l’université, pas après. En Chine, le Gaokao est aussi un examen difficile, mais la taille de la population crée plus de diversité dans les parcours.

 

- Une pression sociale liée à l’apparence physique ("Lookism") -  C'est que les standards de beauté sont extrêmement stricts en Corée. La chirurgie esthétique est socialement acceptée et souvent encouragée (un cadeau pour la majorité des jeunes femmes après le bac). Les candidats à un emploi doivent souvent inclure une photo sur leur CV et être jugés sur leur apparence. Les célébrités et influenceurs coréens entretiennent des standards irréalistes de beauté (peau blanche, V-line, corps mince, etc.).

 

- La culture du travail et du succès social ("Hell Joseon") - La Corée du Sud est surnommée "Hell Joseon", une critique bien connue du système hyper-compétitif. La réussite professionnelle est une obsession, et la pression commence dès l’enfance. Les chaebols (Samsung, Hyundai, LG) dominent le marché du travail et offrent les meilleurs salaires, mais sont difficiles à intégrer. Le surmenage est la norme : la productivité est mesurée en fonction du temps passé au bureau, et non de l’efficacité.

Au Japon, la culture du travail est similaire (karōshi, mort par excès de travail), mais il existe une culture de l’harmonie qui atténue la pression directe. En Chine, le modèle "996" (travailler de 9h à 21h, 6 jours sur 7) existe dans la tech, mais la culture entrepreneuriale permet plus de flexibilité. En Europe et aux États-Unis, il y a une prise de conscience croissante du bien-être au travail, même si des industries restent exigeantes (finance, start-ups).

 

- Les attentes sociales en matière de mariage et de famille - Les femmes subissent une forte pression pour se marier avant 30 ans, sous peine d’être appelées "gold miss" (femmes célibataires "trop vieilles"). Les hommes doivent être financièrement stables avant de fonder une famille (posséder un appartement à Séoul est quasi impossible sans aide des parents). Au Japon, le problème est quasi similaire, taux de mariage et natalité sont en chute libre. En Chine, la pression sociale est forte, mais l’État encourage activement le mariage et la natalité. 

En Occident, l’individualisme permet plus de flexibilité, tandis qu’en Corée, l’opinion du groupe est essentielle. Mais la Corée est en pleine transformation, lente et progressive : les jeunes générations semblent remettre en question ces pressions, adoptant la "tendance YOLO" (You Only Live Once), refusant le mariage (No Marriage Movement) et la parentalité (No Kids Movement) ...

 

"From Miracle to Mirage: The Making and Unmaking of the Korean Middle Class, 1960-2015", by Myungji Yang (2018) - Un compte rendu critique de la trajectoire de la formation de la classe moyenne parrainée par l'État en Corée au cours de la seconde moitié du vingtième siècle. L'ouvrage de Yang présente de manière convaincante la réalité qui se cache derrière le mythe de la formation de la classe moyenne. Analysant l'émergence, la reproduction et la fragmentation de la classe moyenne coréenne, il retrace le processus historique par lequel le projet apparemment réussi de l'État de construire une société de classe moyenne a abouti à un véritable "mirage". Yang fait valoir que la spéculation rentable sur la montée en flèche des prix de l'immobilier à Séoul a permis à la nouvelle classe moyenne d'accéder à la mobilité et au confort matériel. Elle montre également que la fragilité inhérente à ce type de développement était ancrée dans la formation même de ce groupe socio-économique. Contrairement aux idées reçues, Yang met l'accent sur le rôle de l'État dans la production de modèles de structure de classe et d'inégalité sociale. Elle démontre les modes de spéculation et d'exclusion qui ont présidé à la formation de la classe moyenne. Selon elle, la politique intérieure et les politiques de l'État ont modelé les expériences vécues et les identités de la classe moyenne coréenne.

"From Miracle to Mirage" nous donne une nouvelle interprétation de la réalité qui se cache derrière le mythe; et l'analyse de Yang montre comment, en termes culturels et objectifs, le programme de développement économique rapide et concentré du pays a créé une profonde distorsion dans la répartition des richesses.

 

Dans une société sud-coréenne souvent marquée par des normes sociales strictes et des attentes élevées, le message de "I Decided to Live as Me", by Kim Soo-hyun (2017), un psychologue et auteur coréen de renom, sur l'importance de l'individualité et de l'acceptation de soi a trouvé un écho auprès de nombreux lecteurs. Le développement personnel est un thème porteur dans les sociétés du monde entier. D'autre part, l’industrie de l’édition coréenne est très active dans la traduction des best-sellers internationaux, en particulier dans les domaines suivants, "self-help", "personal development", et "business genres", des  versions traduites qui deviennent souvent elles-mêmes des best-sellers, puisque répondant à la demande croissante d'une classe moyenne sud-coréenne ouvertes aux tendances mondiales ...

- "The Subtle Art of Not Giving a F*ck", by Mark Manson ((Singyeong Sseuji Anneun Beop, "The Art of Not Caring", 2016), Le message de Manson, qui consiste à donner la priorité à ce qui compte vraiment et à ne pas trop s’inquiéter des attentes de la société ou de la validation externe, est très présent chez beaucoup de Sud-Coréens qui cherchent l’équilibre et le bien-être mental...

-  "The Alchemist", by Paulo Coelho (Yeongeumsulsa)

-  "Ikigai: The Japanese Secret to a Long and Happy Life", by Héctor García and Francesc Miralles (Ikigai: Ilbon-ui Oraego Haengbokhan Salm-ui Bimil)

-  "Rich Dad Poor Dad", by Robert T. Kiyosaki (Buja Appa Ganahan Appa)

- "Atomic Habits", by James Clear (Wonssing: Deo Simpeuhan Seonggong-ui Beopchik)

- "Deep Work" by Cal Newport (Dip Wokeu: Jipjungryeok-ui Him) - Dans une société où la productivité et l’efficacité sont très appréciées, Deep Work fournit des stratégies pratiques pour se concentrer sur des tâches significatives et minimiser les distractions.

- "The Power of Now", by Eckhart Tolle (Jigeum I Sungan-eul Sarara)

- "Sapiens: A Brief History of Humankind", by Yuval Noah Harari (Sapiens: Yuinwon-eseo Saibogeukkaji)

- "The 7 Habits of Highly Effective People", by Stephen R. Covey (Seonggonghaneun Saramdeul-ui 7gaji Seupgwan)

-  "The Life-Changing Magic of Tidying Up", by Marie Kondo (Jeongni-ui Mabeop)

- "Thinking, Fast and Slow", by Daniel Kahneman (Saenggak-e Gwanhan Saenggak)

- "The Four Agreements", by Don Miguel Ruiz (Ne Gaji Yaksok)

- "How to Win Friends and Influence People", by Dale Carnegie (Kanegi Ingwangyeron)

- "The 5 Love Languages", by Gary Chapman (5gaji Sarang-ui Eoneo)

- "Start with Why", by Simon Sinek" (Seutateu Wideu Wai)

- "The Miracle Morning", by Hal Elrod (Mirakeul Moning), l’accent mis sur les routines matinales et le développement personnel a gagné en popularité en Corée du Sud, où beaucoup cherchent des moyens de commencer leur journée de manière productive et positive ...

- "The Monk Who Sold His Ferrari", by Robin Sharma (Korean Translation), est un roman de développement personnel, initialement publié en 1997, et qui conte l'histoire de Julian Mantle, un avocat prospère mais surmené, qui subit une crise cardiaque en plein tribunal. Cet événement le pousse à réévaluer sa vie et à entreprendre un voyage spirituel en Inde, où il découvre les Sages de Sivana, qui lui enseignent sept vertus pour mener une vie éclairée. Le livre a connu un succès mondial, se vendant à plus de trois millions d'exemplaires et étant traduit en plusieurs langues. 


A partir du XIe ap. J.-C., c`est le néoconfucianisme qui devient la philosophie dominante en

Chine. ZHU Xl (1130-1200) défend une position que l'on pourrait qualifier de dualiste. Ses deux

principes fondamentaux sont le principe fonnel universel Li (raison universelle) et le principe matériel de réalité Qi. Ces principes qui structurent la nature déterminent aussi l'individu :

- Li comme ce qui est identique dans tous les êtres humains, 

- Qi comme ce qui détermine l'individualité.

Même la nature éthique de l'homme possède son modèle dans la norme universelle, de sorte que Li fait aussi office de norrne de conduite.

Face à lui, WANG YANG-MING (1472-1528) adopte un point de vue moniste qui conçoit la raison comme l'unique principe universel auquel l'homme puisse participer.

L”homme possède par nature la faculté de comiaître toutes les choses en soi. C'est en surmontant ses passions égoïstes qu'il parvient à ne former plus qu'un avec la raison

universelle. D'où l'existence d'un lien étroit entre l`action éthique et la connaissance.

 

La doctrine Yi King est associée au "Livre des Mutations" (Yi King). Celui-ci contient des spéculations sur les nombres qui établissent, selon lui, un lien entre le cycle cosmique de la nature et la vie humaine, grâce à un modèle d'ordre qui leur est commun. Pour cela, les principes fondamentaux sont les 8 trígrammes constitués par des traits pleins ou discontinus qui symbolisent les forces et les qualités de la nature (Ciel, ou Force, Feu, ou éclat, Vent, ou pénétration, Montagne, ou reos, Mer, ou plaisir, Tonnerre, ou mouvement, Eau, ou danger,Terre ou Don). Leur combinaison en 64 (8 x 8) hexagrammes permet de créer un système ordonné commun de toutes les forces cosmiques.

Les deux principes fondamentaux sont Yang (masculin, solide, clair, actif) et Yin (féminin, mou, sombre, passif). C`est par leur interaction réciproque que se trouvent expliquées la création et la transformation de toutes choses.

Le néoconfucianisme et le taoïsme utilisent la doctrine Yin-Yang pour la formation de leur

propre cosmologie. Le philosophe néo-confucéen Z1-lou DUN Yi (1017-1073) rassemble dans un diagramme l'action des forces cosmiques. La "limite suprême" (Tai ji) crée par le mouvement la force Yang qui est suivie par le repos, correspondant à la force Yin. Par le jeu réciproque du Yin et du Yang sont créés les 5 agents (Feu, Eau, Terre, Bois, Métal) et, de ceux-là, toutes les choses existantes...