PAYSAGES - EUROPE DU NORD - Northern Europe ...

 

L’Europe du Nord est une région géographique qui inclut plusieurs sous-régions, telles que la Scandinavie, les Pays Baltes, et parfois des parties de l’Europe septentrionale ou arctique. Pour comprendre leurs différences culturelles et historiques encore faut-il les distinguer linguistiquement. La Scandinavie est linguistiquement homogène avec des langues nordiques germaniques étroitement liées, le norvégien, le suédois, le danois, des langues mutuellement intelligibles (en partie, surtout à l’écrit) qui appartiennent au groupe germanique nordique de la famille indo-européenne avec une forte influence du vieux norrois, la langue des Vikings. Les Pays Baltes sont linguistiquement plus variés, mélangeant langues baltes (indo-européennes), avec le lituanien et le letton, et finno-ougriennes, avec l'estonien (groupe finno-ougrien). Le finnois (Finlande) est étroitement lié à l'estonien, l'islandais (Islande), une langue germanique nordique très proche du vieux norrois...

Les pays d'Europe du Nord, notamment la Norvège, le Danemark, l'Islande, la Suède et la Finlande, se distinguent par des niveaux de richesse élevés, mesurés par le produit intérieur brut (PIB) par habitant. Cités en exemple pour leur modèle social avancé et leur prospérité économique, ces pays ne sont pas exempts de problèmes, bien évidemment, traduits le plus souvent en termes de pressions sur leur modèle social, sur leur tradition d'égalité sociale et économique. Défis démographiques, pression migratoire (lors de la crise migratoire de 2015, la Suède a enregistré l'un des taux d'asile par habitant les plus élevés d'Europe), transition écologique, compétitivité internationale ont, comme souvent en ce début du XXIe siècle dans toute l'Europe, une traduction politique en terme de ce qu'on appelle, sans savoir toujours ce que l'on veut dire ainsi, une émergence des mouvements populistes ...

Bien que le niveau de vie des Pays Baltes ait considérablement augmenté depuis leur adhésion à l'UE en 2004, ils restent en dessous de la moyenne européenne en termes de richesse et de services sociaux, et une part importante de la population vit encore avec des revenus modestes.

La Scandinavie accueille environ 25 millions de visiteurs internationaux par an, l'Islande, un nombre impressionnant de 2,3 millions de touristes. Ce tourisme est en quête de paysages et de phénomènes naturels, de fjords, d'aurores boréales en hiver, de soleil de minuit en été, de volcans et de glaciers. Les Pays baltes, les trois pays combinés, attirent environ 8 à 10 millions de touristes, et le surtourisme d'été étouffe particulièrement les vieilles villes médiévales des capitales (tourisme de croisière) ...

- Pays : Scandinavie, Suède (10M2), Norvège (5M4), Danemark (5M8) - Finlande (5M5) - Pays baltes, Estonie (1M3), Lettonie (1M8), Lituanie (2M7) - Islande (0M3) ...

- Villes : Copenhagen (1M3), Stockholm (1M5), Oslo (1M5), Helsinki (1M2), Tallinn (0M4), Riga (0M6), Vilnius (0M5), Reykjavik (0M140) ...


Les pays d'Europe du Nord, fusionnant traditions ancestrales et innovations modernes, exercent  une influence culturelle qui peut sembler disproportionnée par rapport à leur taille démographique. Des décors sobres, des dialogues épurés au service d’une réflexion sur l’existence, mélancolique et introspective, une nature omniprésente, jouant un rôle central dans les ambiances visuelles et émotionnelles ..

 

Les mythes nordiques, par leur profondeur symbolique, ne sont pas seulement des récits anciens, mais une source toujours vivante qui ne cesse de nourrir l'imaginaire collectif et la production culturelle mondiale... 

Les textes classiques de la mythologie nordique, en effet, tels que l'Edda poétique et l'Edda en prose de Snorri Sturluson (XIIIe siècle), furent des œuvres fondatrices qui ont inspiré la littérature tant scandinave qu'européenne. Les exploits des dieux nordiques (Odin, Thor, Loki), les récits cosmogoniques (la création du monde à partir du chaos de Ginnungagap) et les prophéties apocalyptiques (Ragnarök), ont intégré la culture mondiale. La lutte entre les Ases (dieux de l’ordre) et les géants (forces du chaos) est un thème universel qui se retrouve dans de nombreuses œuvres littéraires. Les auteurs de "fantasy" comme George R.R. Martin (Game of Thrones) et Rick Riordan (Magnus Chase and the Gods of Asgard) intègrent des éléments nordiques dans leurs récits et les mythes nordiques enrichissent la création de mondes imaginaires avec des structures mythologiques complexes. La tétralogie lyrique de Richard Wagner, "L'Anneau du Nibelung" (1848), s'inspire des légendes germaniques et nordiques, en particulier de la "Völsunga saga" et du "Nibelungenlied". J.R.R. Tolkien s'inspirera de même profondément de celles-ci pour construire son monde et l’univers de "The Lord of the Rings" (1954-1955). Et un Georges Dumézil analysera ces mythes nordiques dans le cadre de leur théorie des fonctions tripartites indo-européennes (souveraineté, guerre, fécondité)....

Au XXIᵉ siècle, la mondialisation aidant, de nombreuses œuvres scandinaves sont traduites dans des dizaines de langues grâce au soutien des institutions culturelles, et soutenues par des adaptations télévisées et cinématographiques. L'Europe du Nord comptait plusieurs prix Nobel, dont Selma Lagerlöf (Suède), Knut Hamsun (Norvège) et Sigrid Undset (Norvège), mais la littérature scandinave va atteindre un public plus large tout en s'ouvrant à de nouvelles thématiques . Stieg Larsson (Millennium) et Henning Mankell popularisent  le genre du "Nordic noir", un genre qui va dominer la scène télévisuelle internationale, avec des séries comme "Forbrydelsen" (The Killing, 2007), "The Bridge" (Bron/Broen), - enquête après la découverte d’un corps sur le pont reliant Copenhague à Malmö -, ou "Borgen" (Danemark, 2010), qui allient intrigue policière et commentaires sociaux. Mais c'est aussi une littérature qui, bien que profondément enracinées dans la culture scandinave, sait renouveler des thèmes universels qui trouvent écho chez les lecteurs du monde entier, la solitude, la complexité des relations humaines et la quête de sens (le norvégien Per Petterson, la finlandaise Sofi Oksanen)...


Complexité des relations humaines et tensions sociales et existentielles imprègnent tout autant le cinéma scandinave. Le cinéma suédois avait connu un âge d’or dans les années 1910-1920, sous l’impulsion de réalisateurs comme Victor Sjöström (La Charrette fantôme, 1921) et Mauritz Stiller (Gösta Berlings saga, 1924). Greta Garbo, découverte par Stiller, n'était-elle pas devenue une star hollywoodienne? Et le Danemark avait été un pionnier du cinéma muet, avec des réalisateurs comme Carl Theodor Dreyer, connu pour son chef-d'œuvre "La Passion de Jeanne d'Arc" (1928) et l'intense Ordet (La Parole, 1955). Mais il fallut attendre les années 1950-1970 pour voir progressivement revivre pleinement le cinéma scandinave...

Ingmar Bergman (Suède), le grand dramaturge de l'introspection - "Le Septième Sceau" (Det sjunde inseglet, 1957), "Les Fraises sauvages" (Smultronstället, 1957)"Cris et Chuchotements" (1972), "Fanny et Alexandre" (Fanny och Alexander, 1982) - et Lars von Trier (Danemark, - "Breaking the Waves", 1996; "Dancer in the Dark", 2000; "Melancholia", 2011) -, sont devenus des figures majeures du cinéma d'auteur mondial du XXe siècle. Mais il faut compter avec le norvégien Joachim Trier ("Oslo, 31 août", 2011; "The Worst Person in the World", Verdens verste menneske, 2021), le suédois Lukas Moodysson, dans "Fucking Åmål" (Show Me Love, 1998) raconte deux adolescentes dans une petite ville suédoise découvrant leur identité et leur sexualité, ou dans "Lilya 4-Ever" (2002) nous entraîne dans la suite dramatique d'une jeune fille abandonnée dans une ville post-soviétique entraînée dans un réseau de traite humaine...

Au XXIe siècle, le "Nordic Noir" a permis la production de thrillers psychologiques et policiers, caractérisés par des intrigues sombres et complexes, un réalisme social et des paysages austères, qui ont rapidement  acquis une renommée mondiale.  Mais l'Europe du Nord est ausi un leader dans l'industrie vidéoludique, avec des jeux comme Minecraft (Suède), Control (Finlande), et Angry Birds (Finlande). Des plateformes comme Spotify (Suède) et Skype (Estonie) ont révolutionné la consommation musicale et les communications...

Les films baltes, quant à eux, gagnent progressivement en visibilité via leur participation à des festivals internationaux comme Cannes, Berlin, Karlovy Vary, ou encore Tribeca....


Le "MONDE BALTIQUE" - La mer Baltique, dix fois plus petite que la Méditerranée, couvre 372 000 kilomètres carrés et est bordée par neuf pays européens (Danemark, Estonie, Finlande, Allemagne, Lettonie, Lituanie, Pologne, Russie, et Suède). Beaucoup moins profonde, elle est aussi une mer intérieure essentielle aux échanges commerciaux (des ports majeurs comme Saint-Pétersbourg (Russie), Helsinki (Finlande), Stockholm (Suède), Copenhague (Danemark), Gdansk (Pologne) et Klaipėda (Lituanie) jouent un rôle clé dans le commerce international), et au centre de singulières relations historiques et culturelles. Elle est aussi carrefour stratégique, reliant les membres de l'Union européenne et de l'OTAN à la Russie et à la région nordique, et zone de tensions, notamment avec l’expansion de l’OTAN et la militarisation de certains secteurs, comme l’enclave russe de Kaliningrad.

De la même façon qu'il existe un monde méditerranéen, il y a un monde baltique, illustré par la fameuse ligue des cités maritimes connue dans l'Histoire sous le nom de Ligue hanséatique ou plus simplement de Hanse. Ce monde baltique n'inclut toutefois pas la Norvège, tournée vers le grand large. C'est le Danemark, qui en tient les détroits, est la clef de la Baltique. Elle communique en effet avec le large par les détroits danois, aujourd'hui franchis par des ponts, comme le Bosphore. Elle monte très au nord par le golfe de Botnie qui sépare la Suède de la Finlande, et s'enfonce très à l'est, jusqu'à Pétersbourg, par celui de Finlande. L'Oder, la Vistule, le Niémen et la Dvina, qui s'y jettent, lui apportent beaucoup d'eau douce. Peu salée, elle gèle souvent. La Baltique est particulièrement vulnérable au réchauffement climatique, subissant pollution et dégradations environnementales, et parmi celle-ci le développement rapide du tourisme : la Baltique attire des millions de touristes chaque année grâce à ses stations balnéaires, ses îles pittoresques (Gotland, Bornholm) et ses villes historiques comme Tallinn, Riga, et Gdansk. Le tourisme de croisière est en plein essor, avec des itinéraires reliant les principales villes côtières... 

La mer baltique est source d'inspiration artistique. Contrairement à la lumière éclatante de la Méditerranée, celle de la Baltique est plus douce et diffuse. Ses côtes sont variées, plages de sable, falaises calcaires (Gotland, Suède), îles boisées, reflètent une diversité de gamme lumineuse qu'accentuent des eaux souvent calmes, miroir reflétant ciel et nuages, et couleurs changeantes, des conditions favorisant bien des réflexions contemplatives et intimistes. Caspar David Friedrich (1774-1840) fut l'un des premiers a y puisé son inspiration, "Moine au bord de la mer" (1810) est une figure solitaire contemplant une mer immense et sombre, symbolisant la spiritualité et l’infini,  "Falaises de craie sur l’île de Rügen" (1818) est une représentation emblématique des paysages de la Baltique. En Suède, des artistes comme Anders Zorn ont représenté les côtes suédoises de la Baltique dans des œuvres célébrant la vie locale et les paysages marins. En Finlande, la mer Baltique apparaît dans les oeuvres de Akseli Gallen-Kallela, souvent en lien avec la mythologie nordique et la nature. 

Et la Baltique a vu l’émergence de colonies d’artistes, notamment sur les côtes allemandes. Fondée à la fin du XIXᵉ siècle, Ahrenshoop (Péninsule de Fischland-Darß-Zingst) animée par Paul Müller-Kaempff et Elisabeth von Eicken et une approche impressionniste. Gerhart Hauptmann (Prix Nobel de littérature en 1912) et des peintres comme Clara Arnheim et Elisabeth Büchsel ont travaillé ou vécu à Hiddensee, ine petite île isolée à l'ouest de Rügen.  À l’extrême nord du Jutland, bien que techniquement sur la mer du Nord, la colonie de Skagen, à la fin du XIXe siècle, a influencé la peinture nordique, notamment autour de la lumière spécifique de la région : Peder Severin Krøyer, Anna Ancher, et Michael Ancher. De nombreuses colonies d'artistes se sont installées sur la côte suédoise, notamment à Varberg (Nils Kreuger, Karl Nordström).  Nida (Neringa, Lituanie), sur l’isthme de Courlande, est une étroite bande de terre entre la mer Baltique et la lagune de Courlande, célèbre pour ses dunes spectaculaires et ses lumières changeantes, Ernst Mollenhauer, Max Pechstein y séjournèrent...


Le Danemark est un petit pays de 43 000 kilomètres carrés (de loin le plus petit des pays scandinaves) et de 6 millions d'habitants : les immigrants (essentiellement turcs, polonais, syriens, allemands et irakiens) représentent 14 % de la population. La population est à 75 % protestante (principalement luthérienne évangélique), mais seule une petite minorité fréquente régulièrement l’église. Le pays ressemble physiquement à l'Irlande, dont il a les paysages et le climat. Mais il a, il y a bien longtemps (à la fin du premier millénaire de notre ère) joué un rôle important : ses habitants descendirent sur leurs drakkars vers les îles Britanniques, la Gaule et jusqu'en Europe du Sud, et de là partirent ensuite, avec Guillaume le Conquérant, à l'assaut de l'Angleterre...

Le territoire du Danemark comprend aujourd'hui une longue presqu'île sablonneuse, le Jutland, et des îles vertes et riches, Fionie, Sjaëlland. La capitale, Copenhague, ville principale de la Baltique, commande le détroit majeur de cette mer comme Istanbul commande le Bosphore. C'est une belle agglomération de 2 millions d'habitants (le tiers de la population y vit) et pour le touriste, une ville compacte dont les principaux sites rayonnent de la Rådhuspladsen (place de l’hôtel de ville), le cœur animé de la cité : créé en 1962, Strøget était le premier grand boulevard piétonnier d’Europe et est devenu le modèle des zones de passage à niveau du monde entier. Parmi les plus célèbres monuments de Copenhague, on cite le plus souvent le Palais royal d'Amalienborg, symbole de la monarchie danoise, la Petite Sirène, d'Edvard Eriksen (1913), l’un des symboles les plus photographiés de la Scandinavie.

Aarhus, universitaire, deuxième plus grande ville du Danemark et principal centre culturel de la péninsule du Jutland (ARoS Aarhus Kunstmuseum, avec son spectaculaire arc-en-ciel sur le toit, la vieille ville, Den Gamle By). Odense, capitale de l'île de Fionie, est la ville natale de Hans Christian Andersen ...

L'économie du Danemark est prospère, le pays est reconnu pour son modèle de "flexisécurité" sur le marché du travail, combinant flexibilité pour les employeurs et sécurité pour les employés. Mais, parmi les problèmes qui se posent aujourd'hui, on peut noter l'utilisation par les autorités de systèmes algorithmiques pour détecter les fraudes aux prestations sociales, et des politiques d'immigration strictes, qui suscitent bien des débats sur leur efficacité et leur impact sur la cohésion sociale ...

Du Danemark dépendent les îles Féroé, un archipel de 18 îles situé dans l'Atlantique Nord, où quelques dizaines de milliers de pêcheurs luttent contre une mer hostile, mais qui, en 2023, a accueilli environ 130 000 visiteurs, soit plus du double de leur population locale de 54 000 habitants....

La littérature danoise du XXe siècle compte deux grands auteurs de réputation internationale. Johannes V. Jensen (1873-1950), romancier et poète, prix Nobel de littérature en 1944 pour "la rare force et la fertilité de son imagination poétique, combinées à une curiosité intellectuelle d'une vaste portée et à un style audacieux et créatif". Son œuvre majeure, "Den lange rejse" (Le Long Voyage, 1908-1922), est une série épique retraçant l'évolution de l'humanité, depuis la préhistoire jusqu'à l'ère moderne, intégrant des éléments de la théorie de l'évolution de Darwin. "La Chute du roi" (Kongens Fald, 1900-1901), un roman historique moderniste qui suit la vie de Mikkel Thøgersen parallèlement à celle du roi Christian II, est considéré comme son oeuvre majeure. Karen Blixen (1885-1962), qui écrira sous le pseudonyme d'Isak Dinesen, est célèbre pour "Out of Africa" (1937) et "Seven Gothic Tales" (1934), qui combinent des éléments gothiques et réalistes.

 

Au XXIe, le Danemark contribue lui aussi genre "Nordic Noir", et à ses des millions de lecteurs dans le monde. Jussi Adler-Olsen (1950) est ainsi l'auteur de la série Département V, débutée en 2007, qui suit les enquêtes de l'inspecteur Carl Mørck, personnage cynique et désabusé dans un contexte de  corruption, d'abus de pouvoir, d'inégalités sociales et de traumatismes. Le dernier tome, "7 m²" (2024), conclura cette série à succès. C'est sans doute Peter Høeg (1957) qui, avec " Smilla et l'amour de la neige" (Frøken Smillas fornemmelse for sne, 1992), marquera un tournant dans la littérature danoise, en ouvrant la voie à l'internationalisation des récits scandinaves. Suivront Jens Christian Grøndahl (1959), avec "Les Portes de fer" (2008), "Quatre jours en mars" (2010), Dorthe Nors (1970), avec "Minna cherche un homme" (Kantslag,2013), - première auteure danoise publiée dans The New Yorker -, vont jouer un rôle significatif dans la diffusion de la littérature danoise au-delà de ses frontières ...


La Suède, comparée au Danemark, est un pays immense, dix fois plus étendue, et couvre 450 000 kilomètres carrés pour 9 millions d'habitants. La cordillère norvégienne l'isolant des vents atlantiques, le territoire est continental, froid et brumeux l'hiver, chaud et ensoleillé l'été. Jadis, la Suède a dominé un temps l'ensemble de la Baltique, puis y renonça. Dotée d'une dynastie issue d'un maréchal de Napoléon (Bernadotte), c'est aujourd'hui une nation paisible et industrieuse, célèbre par le confort de ses logis (Ikéa). Orienté du nord au sud, le pays est assez plat, mais couvert de forêts et de lacs. La population est concentrée dans la moitié méridionale, le nord étant presque désert autour des célèbres mines de fer de Kiruna. 

Un tiers d’eau, un tiers de parcs, un tiers de ville, Stockholm, la capitale (un million d'habitants), bâtie sur un chapelet d'îles face à la mer (14 îles tissées ensemble par 54 ponts), montre une belle architecture classique. Animée, elle reste austère, comme l'est la Suède que décrit assez le cinéma de Bergman. Le Musée Vasa, qui un célèbre navire de guerre du XVIIe siècle qui a coulé lors de son voyage inaugural, est l’un des musées les plus visités de Scandinavie. Gamla Stan,  la vieille ville avec ses ruelles médiévales, ses bâtiments colorés et le palais royal suédois, est l’un des quartiers les plus visités de la région....

Göteborg (Gothenburg), 2e ville la plus grande de Suède, est le plus grand port de Scandinavie.  Malmö, une ville multiculturelle avec une architecture moderne. Uppsala, une ville universitaire...

Neutre pendant les guerres du XXe siècle, la Suède a su bâtir une économie compétitive, un État-providence renommé dont l'engagement en faveur de l'innovation est reconnu. Elle fait partie de l'Union européenne, mais pas de la zone euro. De nombreux problèmes émergent aujourd'hui, des inégalités économiques croissantes, une augmentation des violences et des tensions ethniques liés au défi que pose, comme dans toute l'Europe, les problématiques d'immigration et d'intégration.

 

La littérature suédoise du XXe siècle compte deux grands écrivains de réputation internationale. Pär Lagerkvist (1891-1974, poète et romancier, prix Nobel de littérature en 1951, et dont le roman "Barabbas" (1950) offre une perspective unique sur le personnage biblique. Artur Lundkvist (1906-1991), poète, critique littéraire et grand traducteur, a joué un rôle majeur dans l’introduction d’auteurs internationaux en Suède (Pablo Neruda, Federico García Lorca). Il a aussi joué un rôle d'expérimentateur avec "Självporträtt av en drömmare med öppna ögon" (Autoportrait d’un rêveur aux yeux ouverts, 1966), exemple d’écriture introspective et de réflexion sur l’acte créatif, enrichie d’images oniriques, et ses récits de voyage ("Liv som gräs", La Vie comme herbe, 1954). Mais il faut aussi compter avec Henning Mankell (1948-2015), un écrivain suédois de renommée mondiale, principalement connu pour ses romans policiers mettant en scène le commissaire Kurt Wallander, - un homme ordinaire, souvent mélancolique et fatigué, confronté à des enquêtes complexes dans une Suède en mutation ("Meurtriers sans visage", Mördare utan ansikte, 1991; "Les Chiens de Riga", Hundarna i Riga, 1992; "L’Homme inquiet", Den orolige mannen, 2009) -, mais son œuvre dépasse cependant le genre policier ...

Astrid Lindgren (1907-2002) est l'une des figures les plus influentes et aimées de la littérature jeunesse mondiale, "Pippi Långstrump" (Fifi Brindacier, 1945), une petite fille aux tresses rousses, incroyablement forte, indépendante et excentrique, et qui vit seule dans sa maison, Villa Villekulla, avec son cheval et son singe, sans adultes pour lui imposer des règles, est une icône pour les petites filles défiant les règles traditionnelles, et pour des millions d’enfants dans le monde entier ... 

 

Au XXIe, la littérature suédoise participe à la grande aventure mondiale du "Nordic Noir", avec des auteurs comme Stieg Larsson (1954-2004) et sa trilogie "Millénium" (2005-2007), Mikael Blomkvist, un journaliste d'investigation, et Lisbeth Salander, une pirate informatique asociale mais brillante, sont les protagonistes d'enquêtes sur des affaires complexes mêlant crimes, pouvoir et corruption : "Les Hommes qui n'aimaient pas les femmes" (Män som hatar kvinnor, 2005), "La Fille qui rêvait d’un bidon d’essence et d’une allumette" (Flickan som lekte med elden, 2006), "La Reine dans le palais des courants d’air" (Luftslottet som sprängdes, 2007). "Millénium" s’est vendu à plus de 100 millions d’exemplaires à travers le monde et a été traduit dans plus de 50 langues.

Parmi les auteurs abordant des thèmes sociaux, on cite Susanna Alakoski dans ses journaux "Oktober i Fattigsverige" (2012) et "April i Anhörigsverige" (2015) qui renouvelle l'écriture autobiographique en s'inspirant de la littérature prolétarienne suédoise, lui permettant d'aborder les inégalités sociales via l'expérience de transfuges de classe et de personnes issues de l'immigration. La traduction et l'adaptation d'œuvres étrangères ont enrichi par ailleurs la littérature suédoise, introduisant de nouvelles perspectives et styles narratifs, les auteurs sont en grande majorité anglophones ...


La Norvège est une région de superlatifs, c’est la plus montagneuse, la plus pittoresque et, grâce à ses champs pétroliers offshore, la plus riche des pays scandinaves. La Norvège est avant tout une terre d’une beauté naturelle épique, avec ses montagnes escarpées et ses fjords profonds sculptés et façonnés par un âge de glace ancien. Le Geirangerfjord avec ses falaises abruptes, ses cascades spectaculaires est considéré comme l’un des plus emblématiques de la Norvège. Avec ses 328 000 kilomètres carrés, le pays n'occupe qu'une superficie moyenne, mais du fait de sa position géographique, la Norvège est un pays d'Atlantique Nord : elle fait face à l'océan sur 1 750 kilomètres de long au versant occidental des montagnes de Scandinavie, lesquelles occupent les deux tiers de sa superficie et se jettent dans la mer en multiples échancrures étroites et profondes, les fameux "fiords" (Geirangerfjord, Nærøyfjord : les croisières dans les fjords attirent des millions de visiteurs chaque année). La Norvège n'a que 4,5 millions d'habitants, et, malgré les vicissitudes de l'Histoire et une indépendance à éclipses (elle a souvent été annexée par le Danemark ou la Suède), cette monarchie constitutionnelle a construit un État-providence actif. Les Norvégiens sont un peuple très homogène, presque autant que les Japonais ; mais, à la différence de ces derniers, ils sont ouverts à l'immigration et l'on compte aujourdihui une forte communauté maghrébine. 

La Norvège bénéficie d'une économie robuste, soutenue par ses vastes ressources en pétrole et en gaz naturel de la mer du Nord extraits en abondance depuis 1970 (dixième producteur mondial), les Norvégiens n'ont pas voulu rejoindre l'Union européenne et le pays affiche un faible taux de chômage et un niveau de vie élevé. 

Comme les Grecs, les Norvégiens sont et ont toujours été de grands marins. Comme celle des Grecs, leur flotte commerciale est l'une des premières du monde - sous divers pavillons. Les communications intérieures étant difficiles, les villes sont pratiquement toutes des ports, à commencer par la capitale, Oslo, qui s'ouvre vers le sud. Les autres ports sont orientés plein ouest : Bergen, Trondheim, Narvik. 

Sa capitale du pays, Oslo, qui accueille environ 3,5 millions de visiteurs par an, est merveilleusement accessible à pied, une ville animée, ses musées reflètent son patrimoine maritime et ses parcs sont inoubliables : le "Parc de sculptures de Vigeland" (situé dans le parc Frogner) est un chef-d'œuvre de Gustav Vigeland, le sculpteur norvégien le plus célèbre; il abrite  plus de 200 sculptures en granit, bronze et fer forgé, dont le fameux Monolithe, une colonne de 14 mètres représentant une masse de corps humains entrelacés.  C’est l’attraction la plus visitée d’Oslo et un symbole de l’art scandinave moderne...

Bergen est la 2e plus grande ville de Norvège, un centre culturel historique et la porte d’entrée des fjords norvégiens. Trondheim, une ville universitaire dynamique et connue pour la cathédrale de Nidaros, un haut lieu de pèlerinage médiéval. Stavanger, célèbre pour ses maisons blanches en bois bien préservées, est cosmopolite et la capitale norvégienne de l'industrie pétrolière ... 

Au septentrion, la Norvège dépasse de beaucoup le cercle polaire pour s'enfoncer dans l'océan glacial Arctique. Tromsø, la "capitale de l'Arctique" et la plus grande ville du nord de la Norvège (77 000 habitants), est renommée pour ses paysages spectaculaires, ses aurores boréales et sa riche culture sami. C'est également une base scientifique importante pour les recherches arctiques....

 

La littérature norvégienne du XXe siècle compte trois grands écrivains de réputation internationale.  Knut Hamsun (1859-1952), pionnier du modernisme, prix Nobel de littérature en 1920, et dont le roman "La Faim" (Sult, 1890), récit introspectif et psychologique, est celui d'un jeune écrivain, pauvre, qui erre dans les rues de Christiania (l'actuelle Oslo) tout en luttant contre la faim (physique et spirituelle) et les effets qu'elle a sur son esprit et son corps. Sigrid Undset (1882-1949), lauréate du prix Nobel de littérature en 1928, surtout connue pour sa trilogie "Kristin Lavransdatter"(1920-1922), qui dépeint la vie médiévale en Norvège. Tarjei Vesaas (1897-1970), un écrivain prolifique reconnu pour ses romans tels que "Le Palais de glace" (Is-slottet, 1963), récit poétique et symbolique sur l'amitié entre deux jeunes filles, et "Les Oiseaux" (Fuglane, 1957), qui raconte l'histoire de Mattis, un homme simple d'esprit, et sa relation avec le monde qui l'entoure....

Au XXIe siècle, Jon Fosse (1959), dramaturge et romancier, prix Nobel de littérature en 2023 pour "ses pièces et sa prose qui donnent voix à l'indicible", nous offre avec "Septologie" (Det andre namnet, 2019–2021), une série en sept parties qui suit un peintre vieillissant, confronté à sa foi et à son identité, un chef-d'œuvre, méditation sur l’art, la spiritualité et la condition humaine. Karl Ove Knausgård (1968) a marqué la scène littéraire avec son autobiographie monumentale "Mon combat" (Min Kamp, 2009–2011):  s'il y expose publiquement sa famille et ses relations, non sans suscité des débats sur les limites de l’autobiographie, cette série en six volumes, totalisant plus de 3 500 pages, et qui couvre des aspects variés de la vie de l’auteur et son expérience d'écrivain,  interroge non seulement la construction de l’identité à travers les souvenirs et les relations interpersonnelles, mais en vient à magnifier les aspects les plus ordinaires de la vie, transformant la banalité en une réflexion existentielle.

 Autre succès mondial, - c'est dire la richesse de la littérature norvégienne, traduit en plus de 50 langues, "Ut og stjæle hester" (Pas facile de voler des chevaux, 2003), de Per Petterson (1952), conte l'histoire de Trond Sander, un homme de 67 ans qui, après la mort de sa femme, décide de vivre isolé dans la campagne norvégienne, un récit alterne qui entre présent et souvenirs de son adolescence en 1948, lorsqu'il vécut une expérience marquante avec son père. Suivront du même auteur "Maudit soit le fleuve du temps" (Jeg forbanner tidens elv, 2008) et "Je refuse" (Jeg nekter, 2012), la solitude, l'amitié, le temps qui passe, le deuil. Petterson avait débuté avec "Dans le sillage" (I kjølvannet, 2000), un roman semi-autobiographique inspiré d'une tragédie personnelle, la perte de sa famille dans le naufrage du ferry Scandinavian Star en 1990, et la nécessité de se reconstruire...


Finlande (Suomi) et Islande enrichissent la diversité linguistique et culturelle de l’Europe du Nord, tout en occupant des positions uniques en raison de leur histoire et de leurs langues respectives.

La Finlande fait face à la Suède, au-delà du golfe de Botnie. Elle lui a appartenu avant de devenir une province de l'empire des tsars ; elle est indépendante après 1918. Presque aussi grande que la Suède (338 000 kilomètres carrés), elle est, comme elle, orientée nord-sud, mais plus continentale encore. Si les étés y sont chauds, elle connaît les hivers les plus rigoureux d'Europe. Les 7 millions de Finlandais ne sont pas des Scandinaves mais parlent une langue ouralo-altaïque qui ressemble au hongrois, amené là - comme en Hongrie - par des cavaliers asiatiques. Leur patriotisme et leur volonté d'indépendance sont puissants. En 1940, leur armée vainquit l'Armée rouge. En 1945, Staline, qui respectait la force, en tira la conclusion qu'il valait mieux laisser ces indomptables se gouverner eux-mêmes, bien qu'ils aient été les alliés des Allemands. C'est ainsi que la Finlande, pour avoir tenu tête à l'URSS, ne devint pas une démocratie populaire, mais resta une démocratie tout court (ce qu'elle était demeurée malgré l'alliance hitlérienne). Le terme de "finlandisation" n'en fut pas moins utilisé pendant la guerre froide comme synonyme de soumission. L’adhésion récente de la Finlande à l’OTAN (2023) a été saluée pour renforcer sa sécurité, mais elle a également accru les tensions avec la Russie, un voisin historiquement complexe...

Sur le golfe de Finlande, Helsinki est la capitale très moderne de ce pays froid, mais chaleureux. C'est une ville marquée par son passé sous la domination suédoise (jusqu’en 1809) et russe (1809–1917), capitale mondiale du design en 2012, et dont les îles environnantes, comme Suomenlinna, ont été classée au patrimoine mondial de l'UNESCO, ce qui n'atténue pas ses hivers longs, froids et sombres, avec peu de lumière naturelle. On sait que dans le nord de la Finlande (Laponie), les nuits polaires peuvent durer plusieurs semaines, ce qui rend la vie encore plus éprouvante. Bien que connectée à d’autres grandes villes européennes, Helsinki est relativement éloignée des grands centres économiques et culturels de l’Europe occidentale.

 

Bien que la littérature finlandaise du XXe siècle soit souvent perçue comme marginale dans le contexte européen, Frans Eemil Sillanpää, Väinö Linna et Tove Jansson ont atteint une reconnaissance mondiale. Une littérature qui a connu, avec la Guerre d’Hiver et la Guerre de Continuation (1941-1944) une vague de récits héroïques et tragiques, dont Väinö Linna (1920–1992) est l'auteur clé avec "Le Soldat inconnu" (Tuntematon sotilas, 1954) : il brise ici les stéréotypes héroïques et explore les conflits internes des personnages. "Ici sous l’étoile polaire" (Täällä Pohjantähden alla, 1959-1962) est une trilogie épique sur la lutte des classes, les tensions sociales et l'histoire de la Finlande. Les luttes sociales et les inégalités économiques ont inspiré des auteurs issus de la classe ouvrière, tel que Elmer Diktonius (qui écrira en suédois). Après la Seconde Guerre mondiale, les écrivains se tournent vers des thèmes introspectifs, ainsi Tove Jansson (1914–2001). Frans Eemil Sillanpää (1888–1964), le seul Finlandais à avoir reçu le Prix Nobel de littérature, en 1939, récompensé pour "sa profonde compréhension des paysans de son pays et la finesse artistique avec laquelle il dépeint leur manière de vivre et leur relation avec la nature": "Les Hommes dans la nuit" (Ihmiset suviyössä, 1934), "Silja ou Une jeune fille dans la tourmente" (Nuorena nukkunut, 1931)... Et le réalisateur Aki Kaurismäki apportera au cinéma mondial son minimalisme poétique avec "L’Homme sans passé" (Mies vailla menneisyyttä, 2002) ..

Au XXIe siècle, Sofi Oksanen (1977), romancière et dramaturge, née en Finlande d'un père finlandais et d'une mère estonienne, a acquis une reconnaissance internationale avec "Puhdistus," (Purge, 2008) qui évoque l'occupation soviétique et les traumatismes personnels qui s'ensuivent : le roman se déroule en Estonie et alterne entre deux époques, les années 1940 (occupation soviétique) et les années 1990 (après l'indépendance), et conte l'histoire entrecroisée d'Aliide Truu, une femme âgée ayant vécu les purges soviétiques, et Zara, une jeune femme fuyant un réseau de traite humaine. En 2003, elle avait publié "Stalinin lehmät" (Les Vaches de Staline, 2003), un roman semi-autobiographique qui met en scène Anna, une jeune femme issue d’un mariage mixte (finno-estonien) qui doit affronter une crise identiaire. En 2012, elle publiera "Kun kyyhkyset katosivat" (Quand les colombes disparurent, 2012), scrutant la complexité des relations humaines sous l'occupation nazie puis soviétique en Estonie...


L’importance des PAYS BALTES, qui occupent la côte orientale de la Baltique, dans le monde dépasse leur taille géographique et démographique. Ils eurent une histoire mouvementée, les occupations nazie puis soviétique ont suscité des interrogations sur leurs identités nationales respectives. L'adhésion de ces pays à l'Union européenne en 2004 a facilité les échanges culturels et permis aux auteurs d'accéder à une audience plus large tout en intégrant des perspectives globales dans leurs œuvres et en les diversifiant. Mais situés entre la Russie et l’Europe occidentale, ils occupent une position clé à la frontière de l’Union européenne (UE) et de l’OTAN, ce qui en fait un espace tampon dans les relations Est-Ouest. Les ports baltes (Tallinn, Riga, Klaipėda) sont des points d’accès majeurs pour le commerce en mer Baltique, reliant les marchés nordiques, européens et mondiaux. Et leur riche patrimoine culturel en fait des destinations touristiques prisées, notamment leurs capitales (Tallinn, Riga, Vilnius), toutes inscrites au patrimoine mondial de l’UNESCO...

Le Monument de la Liberté (Brīvības piemineklis) située à Riga, une colonne de 42 mètres surmontée d'une statue féminine, Milda, tenant trois étoiles dorées, oeuvre de Kārlis Zāle inauguré en 1935 célèbre l'indépendance et la liberté de la Lettonie. Les pays baltes (Estonie, Lettonie, Lituanie) possèdent en effet une riche tradition dans la sculpture et nombre d'entre elles sont devenues emblématiques ...


L'Estonie, qui fait face à la Finlande de l'autre côté du golfe de ce nom et qui parle le finlandais, lui ressemble en tout, à la différence que les influences russes et germaniques s'y affrontèrent vivement. Jusqu'à la chute de l'URSS, le pays fut soviétique après avoir été indépendant avant 1940. Une forte minorité russe y subsiste. Ce petit État, grand comme la Hollande mais peuplé seulement d'un million d'habitants, semble assez fragile malgré son entrée dans l'Union européenne en 2004 : son leadership dans la numérisation et les services électroniques (Skype) est amplement reconnu, et son expérience en matière de transformation numérique et de cybersécurité en a fait un modèle pour d’autres pays cherchant à moderniser leurs infrastructures...

 Tallinn en est la capitale, sa proximité avec Helsinki (à 2 heures en ferry) explique son importante activité touristique. C'est une ville qui séduit par son charme médiéval exceptionnel, ses remparts, ses tours et ses rues pavées, mais aussi sa modernité technologique et sa qualité de vie : mais la vieille ville connaît en été un surtourisme de croisière et de grandes disparités sociales et économiques, notamment entre les populations estonophones et russophones...

 

La littérature estonienne du XXe reflète, comme l'ensemble des pays baltes, bien des bouleversements historiques majeurs. Anton Hansen Tammsaare (1878-1940) nous offre dans son œuvre majeure, "Tõde ja õigus" (Vérité et Justice, 1926-1933), une pentalogie qui explore la société estonienne du XIXᵉ au XXᵉ siècle, abordant des thèmes universels tels que la lutte pour la justice et la quête de vérité. Jaan Kross (1920-2007), romancier et poète, est connu pour ses romans historiques, notamment "Keisri hull" (Le Fou du tsar, 1978), qui relate les tensions entre l'identité nationale estonienne et le pouvoir impérial russe. Au XXIe, une nouvelle génération émerge, et parmi eux, Andrus Kivirähk (1970) qui, dans  "Mees, kes teadis ussisõnu" (L'Homme qui savait la langue des serpents, 2007), fusionne folklore et modernité pour évoquer la société estonienne contemporaine, et Maarja Kangro (1973), poétesse et romancière reconnue pour ses œuvres explorant les thèmes de l'identité et de l'existence humaine dans un monde globalisé...

Arvo Pärt (1935), qui a grandi dans une Estonie sous occupation soviétique et fut obligé de s'exiler en 1980, est l'un des plus grands compositeurs contemporains, créateur du style "tintinnabuli" (du latin "petite cloche") basé sur des lignes mélodiques simples, entrelacées avec des harmonies triadiques, inspiré par sa quête de pureté musicale et spirituelle ; "Passio" (1982), "Magnificat" (1989), "Tabula Rasa" (1977). "Spiegel im Spiegel" et "Fratres", sont régulièrement utilisées dans les bandes-son de films ...


La Lettonie, un peu plus étendue (64 000 kilomètres carrés) et plus peuplée (2 millions d'habitants), fut colonisée au Moyen Âge par les chevaliers Teutoniques, qui firent de Riga leur capitale. Pro-allemands, les Lettons ont beaucoup souffert de l'oppression soviétique. Ils sont aujourd'hui entrés dans l'Union européenne et même dans l'Alliance atlantique, à la grande colère des Russes qui composent encore le tiers de la population. 

Riga concentre l'essentiel des quelques richesses de ce pays dévasté par l'Histoire et la lutte séculaire des Germains et des Slaves : ce fut le point extrême de la poussée germanique vers l'est, le Drang nach Osten. La ville connaît des hivers longs et froids, avec de courtes journées et des températures glaciales, et, comme le reste de la Lettonie, est confrontée à une émigration importante tout en subissant en été un surtourisme désastreux dans sa vieille ville (un centre historique, Vecrīga, inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, célèbre pour ses rues pavées, ses églises gothiques et ses maisons hanséatiques). Riga est aussi connue comme la capitale mondiale de l’architecture Art nouveau, avec des centaines de bâtiments ornés de motifs floraux et géométriques, principalement dans le quartier de l’avenue Alberta...

 

La littérature lettone du XXe siècle reflète, comme l'ensemble des pays baltes, bien des bouleversements historiques majeurs. Aleksandrs Čaks (1901-1950), poète et écrivain,  est reconnu pour ses poèmes qui évoquent la vie quotidienne de Riga, tandis que son recueil "Mūžības skartie" (Touchés par l'éternité, 1942) rend hommage aux soldats lettons de la Première Guerre mondiale. Vizma Belševica (1931-2005), poétesse et romancière, fut nominée pour le prix Nobel de littérature. Son cycle romanesque "Bille" (1976-1999) offre une vision intime de la Lettonie sous le régime soviétique à travers les yeux d'une jeune fille.

Au XXIe, une nouvelle génération émerge, et parmi eux Nora Ikstena (1969) dont le roman "Mātes piens" (Le Lait maternel, 2015) retrace la vie de trois générations de femmes lettones, et Osvalds Zebris (1975) qui, avec "Gaiļu kalna ēnā" (À l'ombre de la colline des coqs, 2014), nous plonge dans la période de la Première Guerre mondiale...


La Lituanie est le plus grand (75 000 kilomètres carrés) et le plus peuplé (3 millions d'habitants) des pays baltes, le moins mélangé aussi. On y trouve très peu de Russes. Il est différent des deux autres non pas par le paysage, plaine basse semée de lacs (les lagunes et les dunes de l’isthme de Courlande (Lituanie et Russie) sont un site naturel exceptionnel), mais par la religion. Lettons et Estoniens sont des protestants luthériens marqués par l'influence de la Suède et de la Prusse, alors que les Lituaniens sont, à l'image des Irlandais, de fervents catholiques. Ce qui leur permit longtemps de dominer les Polonais, pays balte et catholiques comme eux, et de faire de leur pays une puissance. De 1410 (Ladislas Jagellon) à 1686, il y eut un royaume lituano-polonais : Jean Sobieski, qui secourut Vienne en 1683, était encore roi de Pologne et de Lituanie. Vilnius était alors une grande capitale. En abandonnant à la Russie des tsars sa province lituanienne, la Pologne commença le processus de rétrécissement qui la conduisit, au XVIIIe siècle, à sa disparition en tant qu'État. Indépendante et libérée des Soviets, la Lituanie est entrée dans l'Union européenne. 

Vilnius, centre économique de la Lituanie, a hérité du passé  une très forte identité multiculturelle, polonaise, juive, russe et lituanienne. Sa "vieille ville" est l’une des plus grandes et les mieux préservées d’Europe de l’Est, réputée pour son architecture éclectique, mêlant styles gothique, baroque, renaissance et classique. L’Université de Vilnius est l'une des plus anciennes d’Europe centrale (fondée en 1579) et la Porte de l’Aurore, un lieu de pèlerinage important pour les catholiques. Mais elle porte encore les marques de l’occupation soviétique et de la Seconde Guerre mondiale, notamment l’extermination presque totale de sa communauté juive (La Jérusalem du Nord). C'est une ville active, jeune, se positionnant comme un hub technologique et culturel en Europe orientale, malgré l'émigration de ses jeunes talents vers l'Europe de l'Ouest : mais une grande partie de son économie dépend d'un tourisme de masse : Lettons et Estoniens, Polonais, Allemands, Britanniques ...

 

La littérature lituanienne du XXe reflète, comme l'ensemble des pays baltes, bien des bouleversements historiques majeurs. Balys Sruoga (1896-1947), poète, dramaturge et critique littéraire, est surtout connu pour son ouvrage "Dievų miškas" (La Forêt des dieux, 1957), un récit basé sur son expérience dans le camp de concentration de Stutthof. 

Ieva Simonaitytė (1897-1978), représentante de la culture de la Lituanie Mineure, est l'auteur de "Aukštujų Šimonių likimas" (Le Destin des Šimoniai d'Aukštujai, 1935), un roman qui dépeint la vie des Lituaniens sous la domination allemande, Antanas Maceina (1908-1987), philosophe et poète existentialiste, a abordé des questions profondes sur l'existence et le mal dans des œuvres telles que "Didysis inkvizitorius" (Le Grand Inquisiteur, 1950) et "Jobo drama" (Le Drame de Job, 1950).

Au XXIe, une nouvelle génération émerge, et parmi eux Sigitas Parulskis (1965), dont le roman "Tamsa ir partneriai" (Ténèbres et compagnie, 2012) aborde la complicité lituanienne dans l'Holocauste, et Ieva Dumbrytė qui, dans "Šaltienos bistro" (Le Bistro de la gelée de viande, 2023) aborde les aspirations contemporaines de la Lituanie...


L'Islande fut occupée par les Vikings norvégiens il y a plus de mille ans. C'est une grande île de 100 000 kilomètres carrés où apparaît la principale fracture tectonique du globe, la "médiane atlantique". L'Islande compte de ce fait plus d'une centaine de volcans (immenses ou minuscules) en activité; elle produit chaque année une bonne partie de la lave et des fumées éruptives de la planète. Par chance, ces volcans sont presque tous situés dans l'intérieur, où leurs éruptions, qui ne dérangent personne, attirent les volcanologues (mais l'île a connu quelques éruptions dévastatrices et meurtrières).

Le pays se compose de deux parties dissemblables : l'intérieur et la côte. Le premier est un plateau élevé absolument désert, et on ne le traverse plus. En son centre s'élève le magnifique cratère circulaire du volcan Askja, l'une des plus grandes caldeiras de la Terre, qui ressemble quasiment au volcan Olympus de la planète Mars. Un lac bleu ciel, au milieu duquel émerge le cône noir et pourpre du cratère actif, l'emplit. Sous le soleil de minuit, les parois verticales de lave noire, blanchies de neige, jaunies de soufre et rougies de fer non refroidi, se reflètent de manière irréelle, voilées par la vapeur des solfatares, dans les eaux. D'immenses glaciers couvrent le plateau central, dont le plus étendu, le Vatnajökull, dépasse la Corse en superficie et culmine à 2 119 mètres : le plus grand glacier d'Islande est aussi l'un des plus vastes d'Europe, couvrant environ 8% de la superficie du pays. Situé au pied du glacier Vatnajökull, le Jökulsárlón est un lagune glaciaire formé par la fonte des glaciers descendant de ce dernier et ses blocs de glace flottants constitue une des attractions touristiques majeure, souvent représentée dans les films et la culture populaire...

La côte islandaise ne diffère guère de celle de la Norvège, sauf dans la partie où le grand glacier Vatna s'écroule au sud-est dans la mer. Les ports de pêche s'y blottissent au fond des fjords. Le climat n'y est pas vraiment froid (le Gulf Stream). 

Reykjavik, au sud, est devenue une grande ville de 100 000 habitants sans caractère. Il faut lui préférer la capitale du nord, Akureyri (10 000 habitants), plus froide mais beaucoup plus ensoleillée. Intensément volcanique, l'île regorge de sources chaudes parfois éruptives, les fameux geysers, et fonctionne à l'énergie géothermique. Les rivages sont parsemés de fermes isolées où des paysans obstinés élèvent chevaux et moutons ; ils cultivent aussi, sous serre (il n'y a pas d'arbres en Islande). Cependant, la pêche industrielle est aujourd'hui la première activité des Islandais, auxquels elle assure des revenus substantiels. Les 300 000 Islandais, descendants des premiers colons du Xe siècle, dès l'an mille, ils avaient créé une assemblée représentative, l'Althing: longtemps annexés et exploités par le Danemark qu'ils détestent, ils ont profité de l'occupation de ce dernier par les Allemands, en 1941, pour proclamer leur indépendance. ...

 

Pays de petite taille et à la population limitée, l'Islande est pourtant mondialement reconnue pour ses sagas médiévales (Njáls saga, Egils saga), qui ont influencé bien des formes narratives en Europe. Au XXᵉ siècle, les écrivains islandais ont continué à puiser dans ce patrimoine en réinterprétant ou en s'inspirant des structures et des thèmes des sagas. Et ce d'autant que l’islandais moderne, qui a peu évolué depuis le vieux norrois, permet une continuité directe entre les écrivains du XXᵉ siècle et leurs prédécesseurs médiévaux. 

Halldór Laxness (1902–1998), prix Nobel de littérature en 1955, a joué un rôle central dans la reconnaissance internationale de la littérature islandaise. "Indépendance" (Sjálfstætt fólk, 1934-1935), récit d’un fermier islandais, Bjartur, luttant pour son indépendance contre des forces sociales et naturelles oppressantes, se veut critique du mythe de l’indépendance individuelle, profondément ancrée dans le contexte islandais. "La Cloche d’Islande" (Íslandsklukkan, 1943-1946) est une trilogie historique examinant la lutte de l'Islande pour son identité sous la domination danoise. Laxness a ainsi popularisé les thèmes de la lutte pour la survie dans des conditions extrêmes, les tensions entre modernité et tradition, et l'exploration de l'âme humaine dans un contexte souvent austère. Au XXᵉ siècle, la littérature islandaise s’est largement consacrée à la vie rurale, thématisant les luttes des fermiers et des pêcheurs face à une nature implacable. Steinn Steinarr (1908–1958), poète majeur du modernisme islandais, a, quant à lui, évoqué des thèmes de solitude, d’aliénation et d’existence avec une sensibilité toute lyrique. 

Au XXIe, les paysages islandais, avec leurs montagnes, glaciers et mers tempétueuses, jouent un rôle central dans les récits de Jón Kalman Stefánsson (1963, romancier et poète, qui s'impose avec sa trilogie romanesque composée de "Entre ciel et terre" (Himnaríki og helvíti, 2007), le premier volume qui marque l'entrée de Stefánsson sur la scène littéraire internationale : dans un petit village de pêcheurs, un jeune garçon tente de comprendre la mort de son meilleur ami, emporté par une tempête en mer. La quête du garçon est à la fois littérale et métaphorique, mêlant une recherche de sens à un combat contre les éléments. Suivent "La Tristesse des anges" (Harmur englanna, 2009), - le jeune garçon accompagne un facteur dans une traversée périlleuse de l’Islande, sous les tempêtes et le froid glacial -,  et "Le Cœur de l’homme" (Hjarta mannsins, 2011), la dure réalité des conditions de vie en Islande. Dans "D'ailleurs, les poissons n'ont pas de pieds" (Fiskarnir hafa enga fætur, 2013), nous suivrons Ari, un homme retournant en Islande après des années d'absence, et explore sa relation avec sa famille et sa patrie, dont la uite, "À la mesure de l’univers" (Eitthvað á stærð við alheiminn, 2015) approfondira les histoires entrelaçant plusieurs générations d'une famille islandaise.

La littérature islandaise de ce XXIᵉ siècle poursuit une étonnante confirmation internationale avec des écrivains comme Jón Kalman Stefánsson, Andri Snær Magnason, Auður Ava Ólafsdóttir, Sjón (Le Moindre des mondes, Skugga-Baldur, 2003) et Kristín Eiríksdóttir (A Fist or a Heart, Elín, ýmislegt, 2017).  Auður Ava Ólafsdóttir (1958) conte dans "Rosa candida" (Afleggjarinn, 2007) l’histoire d’Arnljótur, un jeune homme qui quitte l’Islande pour cultiver une roseraie dans un monastère étranger, en quête de paix intérieure et de renouveau, puis dans "Miss Islande" (Miss Ísland, 2018), une jeune femme ambitieuse qui, dans les années 1960, veut devenir écrivain, mais se heurte aux limites d'une société qui n'attend rien d'elle. 

Andri Snær Magnason (1973) eut, avec "Dreamland: A Self-Help Manual for a Frightened Nation" (Draumalandið, 2006), un retentissement international : c'est un essai particulièrement incisif dénonçant les politiques environnementales de l’Islande, notamment la construction de barrages pour alimenter les industries lourdes. Suivra "À propos du temps et de l’eau" (Um tímann og vatnið, 2019), évocation très personnelle et poétique des défis liés à la crise climatique. Benedikt Erlingsson poursuit cette thématique avec un cinéma écologique, "Woman at War" (Kona fer í stríð, 2018) qui sait mettre en évidence toute la beauté et la fragilité de la nature islandaise...