Les tourments de la couleur et de l'existence….
L’Expressionnisme (1905-1920) est une des tendances majeures de l'art dans le premier quart du XXe siècle, qui toucha essentiellement les pays d'Europe du Nord, et autant les arts plastiques que la musique, la littérature, le cinéma et le théâtre. Esthétique du paroxysme, l'expressionnisme se manifeste par le besoin d'épanchement d'une subjectivité marquée par le sentiment de la souffrance et du tragique. Ses moyens plastiques sont fondés sur des déformations et des stylisations qui recherchent un maximum d'intensité expressive : déformation des motifs, libération de leur couleur naturelle pour en augmenter la puissance d'expression....
A la fin du XIXe siècle, l'expressionnisme est annoncé par l'art de Vincent Van Gogh, de James Ensor et d'Edvard Munch. Mais c'est en Allemagne, où existe déjà une durable tradition romantique et symboliste, qu'il trouve son milieu d'expansion le plus favorable (Emil Nolde, Otto Mueller, Ernst Ludwig Kirchner, Max Pechstein, Erich Heckel, Karl Schmidt-Rottluff, Alexeï Von Jawlensky, Wassily Kandinsky, Gabriele Münter, Franz Marc, August Macke, Oskar Kokoschka, Egon Schiele, Chaim Soutine, Emil Filla, Béla Czobel, Edward Munch)....
The torments of colour and existence ...
Expressionism (1905-1920) is one of the major trends in art in the first quarter of the 20th century, which mainly affected Northern European countries, as much in the visual arts as in music, literature, cinema and theatre. Expressionism, the aesthetic of paroxysm, manifests itself in the need for the effusion of a subjectivity marked by the feeling of suffering and tragedy. Its plastic means are based on deformations and stylisations that seek a maximum of expressive intensity: deformation of the patterns, release of their natural color to increase the power of expression....
Los tormentos del color y la existencia ..
Expresionismo (1905-1920) es una de las principales tendencias artísticas del primer cuarto del siglo XX, que afectó principalmente a los países del norte de Europa, tanto en las artes visuales como en la música, la literatura, el cine y el teatro. El expresionismo, la estética del paroxismo, se manifiesta en la necesidad de la efusión de una subjetividad marcada por el sentimiento de sufrimiento y tragedia. Sus medios plásticos se basan en deformaciones y estilizaciones que buscan un máximo de intensidad expresiva: deformación de los patrones, liberación de su color natural para aumentar el poder de expresión....
"Die Brücke" (Dresde, Berlin) - Le 7 juin 1905, un groupe d’artistes, étudiants en architecture fondent à Dresde, l’association Die Brücke, dont le nom est pris de Nietzsche, dans «Ainsi parlait Zarathoustra» : «La grandeur de l’homme c’est qu’il est un pont et non une fin ; c’est qu’on peut aimer chez l’homme, c’est qu’il est transition et chute». Ernst Ludwig Kirchner (1880-1938), Erich Heckel (1883-1970), Max Pechstein (1881-1955) et Karl Schmidt-Rottluff (1884-1976) se représentent comme une élite artistique et invitent dans leur manifeste de 1906 tous les artistes progressistes à s’unir pour un existentialisme artistique révolutionnaire. Le groupe Die Brücke rejette la peinture traditionnelle, celle de Liebermann, de Max Slevogt ou Corinth, en renonçant à tenir compte de toute perspective de l'espace et en fixant leurs impressions vécues à coups de traits de pinceaux rapides. C'est pendant les mois de l'été 1910, que Max Pechstein, Erich Heckel, Ernst Ludwig Kirchner vivront une libre communauté de travail au bord des étangs de Moritzburg, non loin de Dresde. La guerre de 14-18 viendra assombrir les palettes et allonger les silhouettes représentées...
Emil Nolde (1867-1956), Paula Modersohn-Becker (1876-1907) et Christian Rohlfs (1849-1938) sont quant à eux les représentants d'un expressionnisme nord allemand : sans constituer un groupe, ils partagent le même attachement à une expression symbolique des forces de la nature que respirent les côtes de l'Allemagne du Nord .....
"Der Blaue Reiter" (Munich) - titre d'une publication qui parut en 1912, et alors que Die Brücke se retrouve miné par des dissensions internes, le mouvement centré autour de Wassily Kandinsky (1866-1944) et de Franz Marc (1880-1916) forme un groupe fixe dans lequel chacun des participants créera son propre monde. Kandinsky s'adressant à la colonie des artistes russes exilés (Kandinsky, Jawlensky, Von Werefkin, Wladimir Von Bechtejeff) et autres peintres munichois (Alexander Kanoldt, Paul Baum, Carl Hofer, Adolf Erbslöh, Münter) espère "donner une forme matérielle à ces relations spirituelles entre artistes, qui créera l'occasion de parler au public avec des forces réunies". C'est bien dans le symbolisme que 'Le Cavalier Bleu" s'enracine, et l'intériorité que Kandinsky et les siens entend exprimer est, à la différence des expressionnistes, une force spirituelle et non plus pulsionnelle. Aux couleurs reviennent la structure d'expression de chacun de nos états d'âme..
On a regroupé sous le titre d'expressionnisme rhénan, autour de Campendonk et de d'August Macke, des personnalités individuelles qui exposèrent à Bonn en 1913 sous le titre "Rheinische Expressionisten", Carlo Mense, Heinrich Nauen, Maria Nauen Von Malachowski, Paul Adolf Seehaus, Hans Thuar, Franz Henseler, Max Ernst...
La Première Guerre mondiale, dans laquelle s'engage avec un enthousiasme aveugle les expressionnistes, a profondément influencé l'oeuvre de tous ces peintres : accueillie positivement, creuset espéré de tous les idéaux d'engagements, la guerre se révélera progressivement dans toute son horreur. Mais alors que la génération de Die Brücke ne parvient pas à affronter les conséquences physiques et psychologiques d'un tel conflit, la génération suivante tend à s'adosser à cette brutale expérience pour construire leurs intentions artistiques, on pense à Beckmann, mais aussi à ces jeunes peintres nés dans les années 1880s, comme Dix, Grosz, Felixmüller, la ville devenant le terreau d'un expressionnisme plus virulent dans sa dénonciation sociale...
A Vienne, où domine la personnalité d'un Gustav Klimt, qui traduit son obsession de la sexualité et de la mort dans des éléments essentiellement décoratifs, Oskar Kokoschka et Egon Schiele, s'ils révèrent le maître, reprennent ses obsessions existentielles dans un style cru et direct à partit de 1908 : il ne s'agit plus de représenter le monde et soi mais de les exprimer par équivalences plastiques à partir du vécu. Avec Kokoschka, l'expressionnisme n'est plus un style mais l'expression d'un mode d'existence, "je suis expressionniste parce que je ne sais pas faire autre chose qu'exprimer la vie... "
1920 et la fin des agitations révolutionnaires d'après-guerre marquent la fin de ce mouvement en Allemagne. Au-delà de cette période, l'expressionnisme continue certes à produire des oeuvres d'art qui se rapporte à cette sensibilité, mais c'est durant ces années 1905-1920 que le style traduit le mieux le climat de rejet politique et social unanime d'une génération...
Où rencontrer des oeuvres expressionnistes ? Where to meet Expressionist works?
- Edvard Munch, Le Cri, 1893 (Huile sur toile, Oslo, Nasjonalgalleriet)
- Chaïm Soutine, L'idiot du village, 1922 (Huile sur toile, Avignon, Musée Calvet)
- Georges Rouault, Eve déchue, 1905 (Aquarelle et pastel, Paris, Musée d'art moderne)
- Max Beckmann, La Nuit, 1919 (huile sur toile, Düsseldorf, Kunstsammlung Nordrhein-Westfalen)
- Karl Schmidt-Rottluff, Portrait de Rosa Schapire, 1911 (huile sur toile, Berlin, Brücke-Museum)
- Karl Schmidt-Rottluff, À la gare, 1911 (Vienne, Osterreichische Galerie im Belvedere)
- August Macke, La Dame en veste verte, 1913 (huile sur toile, Köln, Museum Ludwig)
- Oskar Kokoschka, La tempête ou la fiancée du vent, 1914 (huile sur toile, Bâle, Kunstmuseum)
- Ernst Ludwig Kirchner, Potsdamer platz, 1914 (huile sur toile, Berlin, Staatliche Museen)
- Ernst Ludwing Kirchner, Les peintres du Die Brücke, 1926-1927, (Cologne, Musée Ludwing)
- Ernst Kirchner, Autoportrait habillé en soldat, 1915 (Berlin, Brücke Museum)
- Alexeï von Jawlensky, Portrait du danseur Alexander sacharoff, 1909 (huile sur carton, Munich, Städtische Galerie)
- Lovis Corinth, Le Christ rouge, 1922 (huile sur bois, Munich, Pinakothek der Moderne)
- Egon Schiele, Nu masculin debout, 1910 (mine de plomb, aquarelle, Vienne, Albertina)
- Egon Schiele, Femme assise à la jambe gauche repliée, 1917 (Prague, Narodni Galerie)
- Egon Schiele, Autoportrait aux doigts écartés, 1911 (Vienne, Historisches Museum)
- Egon Schiele, Amants, 1913 (Turin, Galleria Galatea)
- Emil Nolde, Soleil tropical, 1914 (huile sur toile, Seebüll, Fondation Nolde)
- Otto Muller, Deux sœurs, 1920 (Saint Louis, Musée d’Art de Saint Louis)
- Erich Heckel, Pechstein endormi, 1910 (huile sur toile, Bernried, Buchheim Museum)
"German Expressionist Painting", Peter Selz, 1957
Publiée en 1957, la peinture expressionniste allemande a été la première étude complète de l'un des mouvements les plus importants de l'art de ce siècle. À l'époque de sa rédaction, l'expressionnisme allemand apparaissait comme une manifestation excentrique très éloignée de ce qui était alors considéré comme le courant dominant de l'art moderne. Mais comme les historiens le savent bien, chaque génération modifie le concept de courant dominant pour englober les aspects du passé qui semblent les plus pertinents pour le présent. L'impact de l'expressionnisme allemand sur l'art et la pensée des générations suivantes n'aurait jamais pu être anticipé au moment de la rédaction de ce livre. Au cours des années qui ont suivi, un nombre considérable de recherches scientifiques et un nombre encore plus important de livres de vulgarisation sur l'art expressionniste allemand ont été publiés. Il existe aujourd'hui de nombreuses monographies et études détaillées sur la plupart des artistes, et d'innombrables expositions accompagnées de catalogues ont été organisées. Une grande partie de ces nouvelles recherches aurait pu être incorporée dans une édition révisée et la bibliographie aurait certainement pu être considérablement élargie pour inclure les écrits importants qui ont été publiés en Allemagne, aux États-Unis et ailleurs depuis la parution initiale de ce livre. L'auteur a toutefois fait le choix de rééditer le texte original, qui constitue à lui seul une étude fondamentale de la peinture expressionniste allemande...